Amel Bouderra a fait une première fois le buzz, en octobre 2011, en faisant ficelle de vingt-cinq mètres.
Plus extraordinaire encore, elle a été rappelée à la toute dernière minute par Valérie Garnier, la coach des Bleues, pour participer aux JO de Rio suite à la blessure de Céline Dumerc.
Entre-temps, la meneuse de Charleville a été plébiscitée MVP française de la saison 2015-16 et ses performances depuis font qu’elle peut prétendre à un deuxième trophée consécutif.
Amel est aussi une jeune femme qui répond aux questions de BasketEurope.com avec beaucoup de fraîcheur.
L’interview est en deux parties.
Combien de fois avez-vous raconté votre participation à la dernière minute aux Jeux de Rio ?
(Rires) Le jour même, c’était déjà de la folie. J’ai passé tout le voyage en train jusqu’à l’aéroport l’oreille scotchée au téléphone. Entre les amis, la famille, les journalistes, les gens que je croise dans la rue, j’ai raconté ça énormément de fois.
Déjà, vous aviez été la dernière coupée avant Rio. Ça n’avait pas été trop dure à avaler pour vous qui aviez été élue MVP française de la saison ?
L’avant-dernière ! J’ai été coupée à Mondeville mais avant le tournoi alors que Pao Salagnac a fait le tournoi, sans faire tous les matches, et c’est après qu’elle a été coupée. Moi, on ne m’avait jamais appelé en équipe de France, c’était ma première sélection. J’avais déjà du mal à y croire, aussi je n’ai vécu que des moments de bonheur. Aucune déception et j’ai envie de dire que le titre de MVP –j’en parle souvent-, ça ne veut rien dire.
Vous ne l’avez pas eu au rabais, vous aviez une large avance sur la deuxième ?
Oui, c’est un honneur d’autant que c’est un vote effectué par les capitaines (NDLR : et les coaches) avec des noms comme Gaëlle Skrela et Céline Dumerc. Mais pour moi ce n’est pas un titre qui donne accès obligatoirement à l’équipe de France.
Valérie Garnier vous avez dit de vous maintenir en forme au cas où…
Oui et non car elle ne s’attendait vraiment pas à ça et encore moins à ce poste là. En plus, elle avait refait deux stages et elle avait fait appel à d’autres joueuses, Romane Bernies et Marième Badiane, aussi je pensais que c’était vraiment terminé pour moi puisque je n’avais pas été rappelée pour venir aider. Par contre, j’étais en préparation physique pour la saison en club. J’ai d’abord eu un coup de fil en vacances de Valérie pour me dire qu’elles partaient aux Etats-Unis et qu’ils devaient envoyer une liste à la FIBA de joueuses remplaçantes en cas de blessures. Mon nom était dessus comme meneuse. Elle m’a demandée si j’étais encore dans le circuit et je lui ai dit que je continuais mon programme physique avec mon club.
Ce qui a été marquant, c’est que lors du premier match, on n’a pas eu l’impression que vous reveniez de vacances et que vous redécouvriez l’équipe que vous aviez quitté début juin. Vous avez été tout de suite dans le bain (contre la Turquie, Amel a joué 14 minutes pour 4 points, 2 rebonds et 2 passes) ?
Il faut se rappeler que juste après les Jeux, c’était la reprise. On est rentré le mardi et le jeudi je reprenais avec Charleville. J’étais donc dans un plan où on attaquait déjà du fractionné sur du court, le foncier était déjà là. Ce qui m’a manqué malheureusement le plus aux JO, c’est le feeling basket.
« Je crois, je ne suis pas sûre, que je vais peut-être à Rio ce soir. Mais papa, je n’ai plus de chargeur ! »
Ça a dû être un tourbillon entre le voyage, le décalage horaire, les formalités administratives ?
Tout est allé à cent à l’heure. J’ai eu un sms le jeudi matin à 7h, je l’ai lu à 8h30. J’ai eu la confirmation vers 11h. J’ai pris le train à Strasbourg à 13h puis l’avion à Paris à 23h30. Je suis arrivé à Rio à 4h sauf que je n’avais pas encore mon accréditation. J’ai dû faire la queue jusqu’à la douane, que mon nom s’affiche pour qu’ils sachent que j’étais joueuse, que l’on m’oriente vers le coin des départs pour le village. C’est là que j’ai fait mon accréditation. J’étais avec d’autres délégations, celle du trampoline m’a adoptée, mais en quelque sorte, oui, j’étais toute seule. Dans d’autres disciplines, les sportifs sont préparés et attendant dans un hôtel annexes qu’il y ait d’éventuelles blessures. Pour moi, ne pas être au courant, être appelée, faire la route d’un coup, c’est une sacrée aventure.
Heureusement que votre téléphone marchait ce jour là !
Il a failli mourir. La veille, figurez vous que j’étais à Charleville pour installer mon alarme et j’ai oublié mon chargeur là-bas. Je suis partie à Mulhouse chez mes parents. Le matin, quand tout le monde savait par les infos que Céline Dumerc était blessée, j’ai reçu cinquante messages et quand je me suis réveillée il ne restait que 8% de batterie et je n’avais pas de chargeur ! Cette histoire aurait pu se finir très mal (rires). Je pense que les gens ne connaissaient pas le numéro de mes parents. J’ai lu le message de Valérie, j’ai rappelé. Je suis descendu au petit dej’ et j’ai dit à mes parents « je crois, je ne suis pas sûre, que je vais peut-être à Rio ce soir. Mais papa, je n’ai plus de chargeur ! » Heureusement, le jeudi matin à Mulhouse, c’est le marché et il m’y a emmené pour acheter un chargeur. C’est une belle histoire !
Avez-vous eu le temps de profiter de votre séjour aux JO pour voir du basket masculin, d’autres sports ?
On aurait pu en profiter davantage si tout n’avait pas été aussi loin du village. Mais j’ai réussi à voir de la boxe, de la boxe française, du basket masculin, du handball, de la natation. J’ai pu aussi rencontrer des célébrités, des gens dont je suis fan. Ça a été un pur moment de magie pendant deux semaines complètes.