Gary Pomerantz est l’auteur d’un ouvrage intitulé The Last Past à propos des Boston Celtics de Bob Cousy et Bill Russell avec comme toile dramatique la vie américaine des années 50-60. Un passage fait pour nous figure de document. Avec les souvenirs de l’intéressé, l’auteur raconte la venue de Bob Cousy dans la ferme familiale à Lachapelle-sous-Rougemont, une commune située sur le Territoire de Belfort, qui compte aujourd’hui 580 habitants. Des photos inédites apportent une saveur exceptionnelle à cet épisode. On parle parfois de « l’oncle d’Amérique ». Cette fois, Bob Cousy est « le neveu d’Amérique. »
Voici l’extrait.
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« Au printemps 1962, Cousy voyagea vers le Vieux Monde et trouva son chemin dans le passé familial. Il conclut un accord avec la firme des rasoirs Gillette afin de passer cinq semaines dans un tour de France promotionnel, faisant des démonstrations de basket-ball dans quinze villes ; Gillette accepta de payer entièrement les frais pour Missie (NDLR : sa femme) et les filles. Premièrement, les Cousy s’arrêtèrent à Rome. Le archidiocèse de Worcester s’arrangea pour que la famille aient une audience privée avec le Pape Jean XXIII au Vatican, ce qui voulait dire qu’ils recevraient la bénédiction papale au moment où le Saint-Père se mêlerait brièvement à un groupe d’environ trente personnes. Les filles Cousy, âgées de simplement dix et neuf ans, s’étaient entraînées à la génuflexion en vue de baiser l’anneau papale mais n’eurent pas cette chance. Lorsque le groupe s’approcha près du pape, quelqu’un bouscula accidentellement la petite Tricia. Elle trébucha et, en essayant de conserver l’équilibre, elle agrippa la robe du Pape. Le Pape Jean XXIII se retourna et gentiment tapota la tête de Tricia.
Les Cousy firent un arrêt à Lourdes, au pied des Pyrénées, où il est dit que la Vierge Marie fit son apparition en 1858. Missie remplit deux jarres en plastique d’eau bénite pour les ramener à la maison.
Ils atterrirent à l’aéroport d’Orly à Paris le 1ermai 1962. « Excusez-moi », dit Cousy au journaliste sportif de L’Equipeà une conférence de presse sur les Champs-Elysées, « mais ça me prendra deux ou trois jours pour retrouver mon vocabulaire français. »
A l’Institut National des Sports d’élite près de Paris, Cousy portait un T-shirt où on lisait BOB COUSY France GILLETTE et fit une démonstration de dribble et de shoot. Il fit une exhibition de son fameux bras roulé lequel une fois avait troublé Sweetwater Clifton (NDLR : l’un des premiers joueurs noirs en NBA) et impressionna l’assistance par ses dribbles dans le dos. Durant les clinics, il parlait anglais ; durant les séances de questions-réponses, il parlait français. Il observa les jeunes joueurs français et dit : « je pense qu’ils sont un peu en retard dans leur développement physique. Ils ne font pas leurs mouvements naturellement. » Au Mans, il joua un deux-contre-deux et montra un film sur les contre-attaques des Celtics.
Missie lui dit qu’elle voyait que sa personnalité était en train de changer en France. D’une part, dit-elle, il utilisait davantage ses mains quand il parlait et la nuit, il parlait dans son sommeil, ce qui n’était pas l’habitude et quand il parlait, c’était en français. Même lorsque Cousy trébuchait pour reprendre les commandes de sa première langue, Tricia s’émerveilla de la capacité de son père à converser. C’est presque comme si elle voyait une personne différente. Avec une riche imagination d’enfant, Tricia prétendit être une petite fille d’une famille française. Elle savait que même si pas une autre personne que son père le parlait, tout le monde assumait le fait d’être français et elle s’en régalait en secret. Sur une photo de leur voyage, les quatre Cousy marchent dans les rues de Paris main dans la main. Les filles arborent des robes à fleurs et des mocassins beiges. Missie portait un classique vêtement pied de poule et Cooz était dans un manteau de sport mou et élimé, le mégot d’un cigare dans la bouche.
Ils se déplacèrent en France dans deux voitures conduites par des employés de chez Gillette. Faisant cap sur le Nord Est, pas loin de la frontière allemande et suisse, Cousy étudia une carte et réalisa qu’il était prêt de la vieille ferme familiale de son père à Lachapelle-sous-Rougemont. Ce n’est qu’alors qu’il pensa à effectuer une visite.
Près de Mulhouse, ils changèrent de route et trouvèrent le chemin vers un village fermier avec moins de 500 habitants. Cousy demanda la direction de la ferme au prêtre de la paroisse. « Mon père où se trouve la ferme des Cousy ? » (en français dans le texte).
Le prêtre lui sourit et lui indiqua le bas de la route. A une courte distance, ils arrivèrent à une ferme délabrée. Cousy pénétra à l’intérieur et se présenta : « je suis Robert, fils de Joseph » (en français dans le texte). Son arrivée imprévue surpris sa famille. Le père de Cousy, encore à St. Albans, avait maintenant soixante-dix ans et n’avait plus parlé aux personnes qu’il avait laissé derrière lui lorsque Juliette et lui embarquèrent sur le Mauretania en 1927.
Aujourd’hui, trente-cinq ans plus tard, il était Cooz dominant par la taille son oncle Eugène, un vieux et courbé paysan français, ses mains noueuses de par sa vie de travail. La ferme était recouverte de terre battue et avaient des logements plus modernes à l’étage. Sa famille arriva de l’extérieur, une chèvre fut trait, et revint avec un bol de lait frais encore chaud. Habituée à la politesse, Marie lit l’expression du visage de sa mère : « nous devons boire ça ! ». Ils servirent du pain et du fromage et lorsque Missie et les filles eurent besoin d’aller aux toilettes, elles furent dirigées vers une grange. C’était sombre à l’intérieur et quand elles virent un trou dans le sol et qu’elles prirent conscience que c’était fait pour ça, les filles en rigolèrent. Cousy et son oncle Eugène burent du vin ensemble. Eugène demanda à propos de son frère Joe : « comment va le playboy ? » (en français dans le texte). Cela mis Cooz dans l’embarras. « Mon pauvre père », pensa t-il. « De la minute où le paquebot arriva à Ellis Island, il prit deux ou trois jobs à la fois. Playboy ? » Il se rendit compte que Joe n’était pas apprécié à la ferme. Joe avait travaillé toute sa vie et son frère semblait le dénigrer comme un playboy.
Maintenant il comprenait pourquoi son père avait quitté cette ferme qui avait été amoché par le Première Guerre Mondiale. Il remerciait Joe Cousy d’avoir pris ce risque. Se déplaçant dans cette ferme et sur le point de jouer sa dernière saison en NBA, il eut une révélation. Si son père n’avait pas embarqué sur le Mauretania, Cooz serait devenu un anonyme fermier français tout simplement comme son oncle Eugène.
Pas de Celtics, pas de titres NBA, pas de Houdini. »
Les origines françaises de Bob Cousy à la loupe
Michel Stimpfling a deux particularités. C’est un cousin éloigné de Bob Cousy et il est généalogiste pour son plaisir. Il nous a contacté et nous a fourni de précieux renseignements sur la famille de l’ancienne star de la NBA. Voici les points les plus importants.
*Ce patronyme COUSY s’est formé à Eteimbes à la fin du XIIe siècle, à partir d’un certain Nicolas COISY, certainement un soldat originaire du Nord de la France. Il est donc particulier à ce village et n’a rien à voir avec les autres patronymes COUSY.
*J’ai retrouvé la présence de Marie JACOB (grand-mère maternelle de Bob COUSY) et de Juliette CORLET (la mère de Bob) à Lachapelle-sous-Rougemont (90) en 1906 (recensement), village à côté d’Eteimbes (68) d’où est originaire le père de Bob. Les dates de naissance correspondent : Marie JACOB en 1865 et Juliette CORLET en 1896, dite américaine. Le père de cette dernière est certainement Clément CORLET, alors encore aux USA je pense.
*La mère de Marie JACOB est Adèle CAYOT née en 1840. Le mariage de Jules Joseph COUSY et de Juliette CORLET a eu lieu à Belfort en 1927 avant le départ pour les USA. L’indication de Dijon dans certains articles résulte certainement d’une approximation.
*Clément CORLET, son grand-père maternel, issu d’un village du Doubs (50 km de Besançon) a fait plusieurs voyages entre la France et les USA entre 1890 et 1910. La famille CORLET est ensuite restée plusieurs années à Lachapelle-sous-Rougemont près de Belfort. La mère de Bob, Juliette CORLET, née aux USA, a été élevée un temps par sa grand-mère à cet endroit, entre 1901 et 1906 (retour de sa mère Marie JACOB). Son père, Clément CORLET est de retour en 1911. Il est décédé en 1926 à Lachapelle-sous-Rougemont.
*Autre information qui bat un peu en brèche les légendes, en fait les COUSY étaient des paysans très aisés.
*Bob COUSY est le petit cousin du chroniqueur de rock, animateur TV et radio, Philippe MANOEUVRE !
*Voici une photo récente de la ferme familiale, rue de Lachapelle à Eteimbes toujours occupée par un COUSY-DIETEMANN.
A suivre
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« Au printemps 1962, Cousy voyagea vers le Vieux Monde et trouva son chemin dans le passé familial. Il conclut un accord avec la firme des rasoirs Gillette afin de passer cinq semaines dans un tour de France promotionnel, faisant des démonstrations de basket-ball dans quinze villes ; Gillette accepta de payer entièrement les frais pour Missie (NDLR : sa femme) et les filles. Premièrement, les Cousy s’arrêtèrent à Rome. Le archidiocèse de Worcester s’arrangea pour que la famille aient une audience privée avec le Pape Jean XXIII au Vatican, ce qui voulait dire qu’ils recevraient la bénédiction papale au moment où le Saint-Père se mêlerait brièvement à un groupe d’environ trente personnes. Les filles Cousy, âgées de simplement dix et neuf ans, s’étaient entraînées à la génuflexion en vue de baiser l’anneau papale mais n’eurent pas cette chance. Lorsque le groupe s’approcha près du pape, quelqu’un bouscula accidentellement la petite Tricia. Elle trébucha et, en essayant de conserver l’équilibre, elle agrippa la robe du Pape. Le Pape Jean XXIII se retourna et gentiment tapota la tête de Tricia.
Les Cousy firent un arrêt à Lourdes, au pied des Pyrénées, où il est dit que la Vierge Marie fit son apparition en 1858. Missie remplit deux jarres en plastique d’eau bénite pour les ramener à la maison.
Ils atterrirent à l’aéroport d’Orly à Paris le 1ermai 1962. « Excusez-moi », dit Cousy au journaliste sportif de L’Equipeà une conférence de presse sur les Champs-Elysées, « mais ça me prendra deux ou trois jours pour retrouver mon vocabulaire français. »
A l’Institut National des Sports d’élite près de Paris, Cousy portait un T-shirt où on lisait BOB COUSY France GILLETTE et fit une démonstration de dribble et de shoot. Il fit une exhibition de son fameux bras roulé lequel une fois avait troublé Sweetwater Clifton (NDLR : l’un des premiers joueurs noirs en NBA) et impressionna l’assistance par ses dribbles dans le dos. Durant les clinics, il parlait anglais ; durant les séances de questions-réponses, il parlait français. Il observa les jeunes joueurs français et dit :
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Photo d’ouverture: Incroyable cliché qui montre les Cousy en 1962 avec l’oncle et toute leur famille française.