Boris Diaw est sur le terrain comme dans la vie, multidimensionnel. Un temps on l’imaginait meneur de jeu à la Magic Johnson et il s’est retrouvé à défendre parfois sur les pivots mastoc de la NBA. On pense qu’il va devenir coach ou président, il est photographe, réalisateur et se voit partir dans l’espace.
Cet article est paru avant l’Euro 2017.
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Après réflexion, on peut faire deux reproches à Boris Diaw. Premièrement de ne pas toujours prendre les tirs ouverts. Deuxièmement, de souvent esquiver les questions. Avec le sourire. Pas par manque d’arguments car vous avez à faire avec un type intelligent, à l’éducation bien nourrie, drôle. Seulement, il n’a juste pas envie. Une conférence de presse n’est pas le cadre idéal pour s’épancher. Ce n’est pas non plus un homme à polémique, plutôt easy going, Boris.
Sinon, on peut le couvrir de fleurs. C’est un grand frère, un ambianceur, charismatique, qui fait don de soi, un généreux donateur y compris pour tenter de faire de son club chéri, les JSA Bordeaux un grand de France ou de sauver la presse basket en péril. Sur le terrain, c’est un facilitateur, comme aime à le dire Jacques Monclar. Celui qui fait souvent la passe avant la passe décisive souligne George Eddy. Un ancien guard/forward beau comme un Diaw reconvertit en power forward qui peut amener sa science du placement en défense en pleine peinture et qui à chaque rentrée est en surpoids.
Ne cherchez pas le numéro 2 au classement des meilleurs joueurs français de tous les temps derrière son copain de promo, Tony Parker, c’est lui. Son palmarès (un titre de champion d’Europe et un titre NBA en devanture), sa fidélité en bleu, son apport sur le parquet sur la durée, n’a pas de concurrence. L’impression de facilité, d’aisance qu’il dégagea lors de l’Euro 2005 en Serbie est demeurée imprimée à vie dans les mémoires.
Sa vie sans ballon est aussi riche et colorée, loin de celle stéréotypée des millionnaires américains. Comme Evan Fournier, il aime la nature, la solitude. Et découvrir de nouvelles sensations. Les journalistes américains se disent épatés par le personnage.
Donc Babac est face à nous, les cheveux un brin grisonnant, avenant, réfléchi mais imperturbable, pas enclin à livrer des scoops pour faire les gros titres des chaînes d’info en continue. Encore que, à la fin… Vous verrez.
-Le fait d’être agent libre change-t-il votre approche d’une compétition internationale ?
-Non, ça ne change rien. C’est vraiment deux choses complètement distinctes. Le fait que je n’ai pas de club en ce moment change rien sur ma façon de jouer avec l’équipe nationale.
-Si vous reveniez en Europe, vous avez une destination préférée ?
–Non. Je ne me suis pas encore penché là-dessus. La piste NBA reste bien entendu ouverte avec des discussions avec certaines équipes mais rien de concret pour l’instant. S’il y avait un retour sur l’Europe, la priorité serait d’être dans une équipe ou une ville qui me plait. Pour l’expérience de vivre dans telle ou telle ville. Et le projet sportif, bien entendu.
-Pour vous, il est hors de question de signer avant la fin de l’Euro ?
-Il n’y a rien qui est hors de question, aucune porte n’est fermée.
-Ça nécessiterait un aller-retour entre l’Europe et les Etats-Unis ?
-Pas forcément. Je l’ai déjà fait dans le passé. Si c’est une veille de quarts de finale, de demi-finale, je ne pense pas faire l’aller-retour. Ça peut se faire sans aller-retour, sans faire la visite médicale ou en la repoussant.
Le vin, c’est du sérieux
Pour choisir un angle d’attaque d’un article sur Boris Diaw, on a le choix. On peut par exemple rappeler que chaque année c’est lui qui reçoit l’équipe de France à Pau puisqu’il est co-propriétaire de La Villa Navarre avec l’ancien rugbyman Stéphane Carella et le romancier Frédéric Beigbeder. Une vidéo, Bleu Blanc, Tour, réalisée par Benoit Dujardin et Tommy Hombert nous avait fait entrer dans les coulisses des Bleus et montré un Rudy Gobert, alors rookie, devenir fou pour une histoire de polo.
Boris, qui se reconnait volontiers extraverti, a un sens de l’humour pointu. Aux Jeux de Londres, après la victoire sur le Nigeria et alors qu’on lui demandait d’intervenir sur France 2, il était arrivé avec son nom inscrit sur une pancarte. « Je me sous-titre moi-même car comme ça il n’y a pas d’erreur ! » Une facétie en réaction à France Télévisions, au professionnalisme douteux, qui avait orthographié son nom « Boris Viaud » !
Il y a aussi le Boris Diaw, épicurien, oeunologue, ce qui avait le don de plaire à son coach des Spurs, Gregg Popovitch.
« Ah ! Le vin ! C’est du sérieux là. Le Bordelais, c’est là que l’on trouve le meilleur vin. Chez nous, c’est le meilleur un point c’est tout », vanta-t-il un jour à un reporter de Maxi-Basket. Car s’il est né en banlieue parisienne, Boris est Bordelais, fier de l’être. Il a commencé le basket tout petit à Talence et à Pessac puis il est entré aux JSA en minimes, dans la petite salle des Peupliers. C’est pour ça qu’il rêva d’un grand club à Bordeaux, y investit de son temps et de son argent et y joua 9 matches en Pro B durant le lockout de la NBA en 2011 avant de lâcher prise.
« Je suis en partenariat avec des vignerons à deux niveaux différents », révéla t-il dans la version américaine de GQ. « Je travaille avec des entreprises en France pour importer du vin aux Etats-Unis où j’essaye de faire une sélection de vins qui ont un bon rapport, un bon prix et un excellent goût. Je travaille également maintenant avec un vigneron pour faire mon propre vin. »
« Je veux aller dans l’espace »
Le Boris Diaw qui a marqué aussi les esprits, c’est l’avaleur de grands espaces. Plutôt que de prendre un jet entre San Antonio et Salt Lake City pour déménager des Spurs aux Jazz, il fit le trajet en voiture avec des potes dont Ronny Turiaf. Un itinéraire de 3 000 km à travers les majestueux parcs américains. Comme il y avait une prise de courant dans sa voiture, Boris y emmena sa désormais célèbre machine à café afin de pouvoir déguster un expresso même en plein désert.
Boris est passionné de photographie. Il a été initié par Catherine Steenkeste, une photographe française qui a œuvré plusieurs années au sein des Lakers. Des trips, il en fait d’autres, en Afrique du Sud, au Botswana, en Tanzanie, aux Philippines. Il avait demandé à faire un stage chez le prestigieux National Geographic et c’est ainsi qu’il est parti photographier les grands fauves en Inde avec le célèbre photographe Steve Winter.
Il a sorti un livre pour enfants, Hoops to Hippos!, avec ses plus belles images animalières prises lors de safaris. A San Antonio, il s’était fait construire un studio photo.
Mais Boris veut aller encore plus loin, très loin. A GQ, il confiait :
-Pour sûr, je ne plaisante pas quand je le dis : je veux aller dans l’espace. J’essaierais de le faire si c’est possible et je pense que ce sera dans ma vie. Mars, je ne sais pas si cela sera possible. Ils vont d’abord envoyer des astronautes professionnels. J’ai entendu dire que ce serait une mission à sens unique.
-Si c’est le cas, envisageriez-vous de vivre sur Mars?, enchérit le journaliste.
Absolument. Je ferais le voyage aller simple. 100%. S’ils cherchaient des candidats, je voudrais certainement faire une demande. Juste aller à l’espace pendant quelques jours, puis revenir en arrière serait cool. Je pense que c’est quelque chose qui est déjà possible pour les civils, c’est très, très cher, mais peut-être que le prix pourrait diminuer.
Le record de sélections de sa mère à portée de fusil
Revenons sur le plancher des vaches. Nous sommes en août 2017 et donc Boris Diaw est sans club. Il a été « libéré » par les Utah Jazz où il était rémunéré 7,6 millions de dollars l’année pour permettre les arrivées de Thabo Sefolosha et Jonas Jerebko.
En attendant de connaître sa prochaine destination, il s’apprête à disputer son 8e Euro. Lui, ne flanche pas. Pas de retraite alors qu’il a le même âge que Parker, pas de break alors que son corps n’est plus celui d’un jeune homme.
Pour lui, le vieux sage, qui observe que deux joueurs manquent à l’appel, il n’y a pas péril en la demeure :
« A part ceux qui sont à la retraite, il n’y a que deux joueurs qui ne sont plus là, Batum et Gobert qui se reposent. Je ne pense pas que ça soit un manque de respect de cette compétition qu’est le championnat d’Europe, mais c’est un moment où ces deux joueurs-là ont senti qu’ils avaient besoin de se reposer par rapport à des saisons à rallonge et des étés en équipe de France qui se succèdent. Ce sont des choix personnels mais je ne pense pas que ce soit un syndrome, il n’y a que deux joueurs qui ne sont pas là, » insiste t-il.
Aux Hawks, aux Suns et aux Spurs, Boris Diaw n’a jamais été contraint et forcé par sa franchise de rester aux Etats-Unis l’été pour effectuer une préparation individuelle. Sa motivation a balayé toutes les réticences.
« Ça dépend déjà des franchises, celles qui y sont favorables, à qui ça plaît que l’on aille en équipe de France, jouer contre les meilleurs joueurs du monde, progresser grâce à des matches de qualité. Il y a certaines franchises qui voient le risque de blessures et à qui ça ne plait pas trop que les joueurs aillent en équipe nationale. Mais de toutes façons, ils ne peuvent pas l’interdire. C’est aux joueurs de prendre la décision. »
Lorsque Babac a disputé son premier Euro, en 2003 en Suède, les intérieurs français étaient Cyril Julian, Thierry Rupert, Florent Pietrus et Rony Turiaf. Quatorze ans plus tard, le capitaine a accueilli la bleusaille dont les tours jumelles parisiennes, Louis Labeyrie et Vincent Poirier. Il les avait découvert quelques petites semaines auparavant.
« Je les ai vu jouer en demi-finale contre Chalon, c’est la première fois que je les voyais et bien entendu au fur et à mesure des entraînements et des matches avec l’équipe de France. Ce sont des joueurs très talentueux, qui ont beaucoup de potentiel et qui vont faire de bonnes choses dans le futur. Ce sont de jeunes joueurs mais qui ont déjà de grosses qualités sur lesquelles on peut s’appuyer. »
Boris a pu aussi apprécier depuis huit ans, avec les Bleus et en NBA, l’immense percée de Nando De Colo. Quand on lui demande ce qui sépare le Français d’un starter NBA, il répond :
« C’est un style de jeu qui est un peu différent. En plus Nando a vraiment progressé lors des trois dernières années et est arrivé au niveau d’un joueur starter avec un gros impact sur une équipe NBA. Au moment où il est arrivé en NBA, à mon avis, il n’était pas encore au niveau où il est maintenant. Il a continué à progresser les années où il est reparti en Europe. Il n’a pas eu forcément la chance de pouvoir exprimer son jeu au moment où il était en NBA. Maintenant, c’est un choix personnel de savoir s’il veut revenir ou pas. A mon avis il aura la possibilité de revenir en NBA s’il le souhaite. »
Plusieurs fois, Boris a émis le souhait d’égaler le record de sélections de sa mère, Elisabeth Riffiod, 247 sélections obtenue de 1967 à 1980, troisième dans la hiérarchie nationale derrière Céline Dumerc et Paoline Ekambi. Au fur et à mesure des campagnes, son fils a grimpé à 235 sélections et il est lui aussi au troisième rang chez les hommes derrière Hervé Dubuisson et Jacques Cachemire.
-Même avec les 9 matches de l’Euro, ça ne fera pas le compte ?!
-Non.
-Il va falloir continuer après ?
-(Rires) Je ne sais pas, on verra. D’ailleurs j’ai toujours pensé que je n’arriverai jamais à la rattraper parce que ça serait beaucoup, beaucoup de matches. 247, c’est inatteignable. C’est vrai qu’on (sic) est plus prêt que jamais. Je ne sais pas encore. »
Le président ne veut pas être président
Autre facette, profitant du break du All-Star Game, Boris a tourné son premier court-métrage « Easy Life » soutenu par Oxmo Puccino et Vincent Balse pour la bande son, avec dans les rôles principaux Cederic the Entertainer et Nicoye Banks. Le thème : un fils de riche apprend que la vie n’est pas la même pour tout le monde. A un journaliste américain qui évoquait le sujet avec lui, il répondait en rigolant :
« Il me faut des plans pour quand je vais me retirer. Il y a des choses que je veux faire. Réalisateur en est une, certainement. »
Autre piste : il y a quelques semaines, il indiquait sur Instagram qu’il participait à un programme d’économie à Milan. Un indice pour son futur ?
– C’était organisé par le syndicat des joueurs NBA. C’est toujours bien d’apprendre des choses et de se former. C’était un séminaire de trois jours, aussi c’était rapide. On a appris beaucoup de choses sur le global marketing international. »
Et le basket ? Les voies sont multiples. Si on l’oriente sur Laurent Foirest, l’un de ses anciens équipiers devenu assistant-coach chez les Bleus, il est louangeur, rappelant que joueur, le Marseillais a toujours été à l’écoute et qu’il amène aux internationaux son immense expérience du terrain. Il est alors opportun de savoir si Boris se destine au même type de trajectoire.
–Non !
–Président alors ?
-Non plus (rires). Les présidents ont trop de responsabilités.
-Réinvestir dans un club comme à Bordeaux ?
-Non, ce n’est pas prévu. Je pense que je resterai un pied dans le basket car c’est quand même un milieu que j’aime beaucoup mais sans avoir je pense de rôle opérationnel majeur.
Ça jette presque un froid tellement on est tous persuadé que Boris Diaw a le profil parfait pour succéder à Vincent Collet, Jean-Pierre Siutat, Alain Béral ou être l’une des chevilles ouvrières d’un futur grand club d’Euroleague à Paris. Alors, on espère que rien n’est définitif et en attendant, il y a une nouvelle médaille à aller chercher.
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Après réflexion, on peut faire deux reproches à Boris Diaw. Premièrement de ne pas toujours prendre les tirs ouverts. Deuxièmement, de souvent esquiver les questions. Avec le sourire. Pas par manque d’arguments car vous avez à faire avec un type intelligent, à l’éducation bien nourrie, drôle. Seulement, il n’a juste pas envie. Une conférence de presse n’est pas le cadre idéal pour s’épancher. Ce n’est pas non plus un homme à polémique, plutôt easy going, Boris.
Sinon, on peut le couvrir de fleurs. C’est un grand frère, un ambianceur, charismatique, charismatique, qui fait don de soi, un généreux donateur y compris pour tenter de faire de son club chéri, les JSA Bordeaux un grand de France ou de sauver la presse basket en péril. Sur le terrain, c’est un facilitateur, comme aime à le dire Jacques Monclar. Celui qui fait souvent la passe avant la passe décisive souligne George Eddy. Un ancien guard/forward beau comme un Diaw reconvertit en power forward qui peut amener sa science du placement en défense en pleine peinture et qui à chaque rentrée est en surpoids.
Ne cherchez pas le numéro 2 au classement des meilleurs joueurs français de tous les temps derrière son copain de promo, Tony Parker, c’est lui. Son palmarès (un titre de champion d’Europe et un titre NBA en devanture), sa fidélité en bleu, son apport sur le parquet sur la durée, n’a pas de concurrence. L’impression de facilité, d’aisance qu’il dégagea lors de l’Euro 2005 en Serbie est demeurée imprimée à vie dans les mémoires.
Sa vie sans ballon est aussi riche et colorée, loin de celle stéréotypée des millionnaires américains. Comme Evan Fournier, il aime la nature, la solitude. Et découvrir de nouvelles sensations. Les journalistes américains se disent épatés par le personnage.
Donc Babac est face à nous, les cheveux un brin grisonnant, avenant, réfléchi mais imperturbable, pas enclin à livrer des scoops pour faire les gros titres des chaînes d’info en continue. Encore que, à la fin… Vous verrez.
-Le fait d’être agent libre change-t-il votre approche d’une compétition internationale ?
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Photos: FFBB