L’ancien coach de l’Equipe de France et de Pau rebondit depuis le début de l’année en Pro B, à Boulazac, tout en continuant à faire des interventions sur SFR Sport 2. Deuxième partie de l’interview. Votre parcours a été atypique puisque vous avez été un temps, de 2008 à 2010, directeur général de Pau-Orthez. Avez-vous eu envie de revivre ce type d’expérience ? Non. Cette expérience était contextuelle. C’était une réponse affective à une sollicitation du boss, Pierre Seillant, qui m’a expliqué ce qui allait se passer et qui m’a demandé de prendre sa succession. Ce jour-là, je suis effondré car j’apprends ce qui va se passer dans le club avec son départ et les difficultés. Je suis à une période où j’ai démissionné de l’équipe de France et je vais rebondir car à ce moment-là, l’étranger est ouvert. J’ai trois propositions à l’étranger. Sauf que la mémoire du cœur a fonctionné. Je me suis rappelé d’où je venais, ce qu’avait fait le prési pour nous tous. Il était impossible face à sa demande et celle de certaines collectivités de dire « vous vous êtes foutus dans la merde, débrouillez vous ! ». Mais je prenais cette activité pour la période la plus courte possible et je souhaitais revenir sur le terrain. Et elle a été très courte puisqu’elle a duré deux ans et que l’on a réussi ce qu’on voulait faire, même si le sport est passé au deuxième plan, ce qui était une erreur. Mais il y a eu cette affaire Skelin (NDLR : le Croate Mate Skelin a porté les couleurs de Pau en 2003-04 et avait attaqué l’Elan pour rupture abusive de contrat. Le club avait été condamné dans un premier temps par les Prud’homme à hauteur de 470 000 euros), qui nous est tombé dessus et qui là va être résolue de façon positive.
« Sur l’affaire Skelin, récemment l’Elan Béarnais a eu gain de cause, sauf que depuis l’avance d’argent a été consommée… »
Ça vous avait coûté combien à l’époque ? 650 000 euros. Il a fallu payer la dette et recapitaliser, donc trouver une somme très conséquente. Et cette somme de [arm_restrict_content plan= »registered, » type= »show »] 650 000€, il fallait la payer même si on allait en appel et en cassation. Sauf qu’on s’est dit que si on payait, on ne reverrait plus l’argent. On a tout fait pour le bloquer et c’est le juge d’exécution des peines qui a bloqué une partie de l’argent, donc une autre a été versée. Récemment l’Elan Béarnais a eu gain de cause, sauf que depuis l’avance d’argent a été consommée… Pour fermer la parenthèse, à ce moment-là, quand l’affaire tombe, en plus la collectivité allume Pierre Seillant. Et là, on a fait bouclier pour le protéger. Hors de question de toucher à Pierre Seillant ! On a tout fait pour qu’il sorte par le haut. On se dit : « Claude Bergeaud à Boulazac, c’est normal », c’est le Périgord, c’est le Sud-Ouest. Mais en fait la situation géographique a t-elle influé sur le choix ? Il faut faire attention à ce que l’on dit car il y a la dimension consciente et la dimension inconsciente. Consciemment, rester dans le Sud-Ouest ne faisait pas partie des critères prioritaires. Le projet, c’était de travailler dans des structures déjà organisées. A mon âge (NDLR : 56 ans), je n’ai plus envie de passer par la case « on reconstruit tout du sol au plafond. » Je pense y avoir contribué dans les grandes largeurs quand on est passé d’Orthez à Pau où il fallait tout bâtir, centre de formation, recrutement humain, etc. Ici, à Boulazac, je suis arrivé dans un club déjà bien organisé, très structuré au plan de la logistique et humain. Dans le staff, il y a un adjoint permanent (Romain Leroy) qui est rodé et pas débutant et un deuxième (Thomas Andrieux) qui s’occupe du centre de formation, qui est un ancien joueur, qui connaît le basket, un préparateur physique, un staff médical organisé. Il y a une figure emblématique qui est un Pierre Seillant bis, qui est Jacques Auzou, son président. C’est un passionné de basket incroyable. Il y a toute une organisation autour, des administratifs, des bureaux hyper confortables. Quand tu visites, tu te dis « whoua ! C’est de la Pro A ! » Oui, la structure, c’est de la Pro A. Le Palio (NDLR : inauguré en 2008) est économiquement très rentable puisqu’il se transforme du basket en salle de spectacle et c’est une SEM qui gère toutes ces animations et qui amorti l’investissement de la salle. Le Palio est prêt d’être déjà amorti. Et il se dit qu’il y a un projet de salle exclu basket qui va être déposé. Ce que je viens de citer, pour quelqu’un comme moi qui est en recherche, c’est l’un des critères les plus importants. D’autres m’ont sollicité ailleurs mais au plan humain et au plan des structures, ils ne sont pas comme le BBD. Mais non, ce n’est pas la régionalisation qui fait le premier choix. Ce qu’il faut dire, c’est que le Palio est un oasis dans Boulazac, une petite ville de 6 000 habitants de la banlieue de Périgueux qui elle-même ne fait que 30 000 habitants. L’hiver, c’est un peu perdu… C’est le Noooorrrrrddd… (Sourire) De L’Aquitaine. Il y a une vraie dynamique locale dans cet endroit avec des valeurs rurales. On parle beaucoup de la nourriture saine, des bons produits, de la pierre. J’habite le centre-ville de Périgueux, c’est fantastique les jours de marché.
« Ce club est très aimé et parce qu’il l’est, on ne lui pardonne pas grand chose »
A Boulazac, la couverture était énorme à l’époque où le club était en Nationale 2 et toujours très vivace quand il est monté en Pro A. C’est toujours le cas ? Elle l’est toujours et peut-être un peu accentuée par une démultiplication affective. Ce club est très aimé et parce qu’il l’est, on ne lui pardonne pas grand chose. Il y a quatre médias qui sont là en permanence alors qu’en Pro A, il y en a un ou deux. A Pau, par exemple, il n’y a pas Radio France Pau Béarn tout le temps, juste La Rep et Sud-Ouest. Et même parfois le journaliste t’appelle car il ne peut pas être au point-presse. A Boulazac, on fait deux points-presse par semaine, un le mardi après l’entraînement du matin, et un la veille du match ou la veille du départ. Un des medias est tout le temps en déplacement pour les matches.
Quand on arrive dans un club en cours de saison, comment fait-on ? On a des entretiens individuels avec le staff et les joueurs ? On cherche à connaître les raisons des problèmes ? On avale plein de vidéos ? Ce qui a été compliqué c’est avant mon arrivée car ça a été très rapide. Les choses se sont faites en quarante-huit heures et je n’ai pas pu arriver tout de suite car c’était la période de break et je n’ai pu rencontrer ni staff ni joueur. Bien sûr, je me tenais au courant de la Pro B. Et le jour du All-Star Game à Paris, je suis allé à la ligue et j’ai téléchargé trois matches de Boulazac et le lendemain je partais en Espagne avec mes enfants, je les ai regardés là-bas.
L’ensemble des matches de Pro B que l’on voit sur KMotion sont disponibles pour les coaches ? Ils sont sur une plate-forme et il y a deux licences par club mais moi comme je n’étais pas affilié à un club, je n’avais pas un numéro d’accès. J’ai donc regardé les matches et c’est en arrivant ici que les choses sont allés très vite. L’adjoint, qui est resté le même, m’a vraiment drivé pour que ce soit facile et ça l’a été car la collaboration a été immédiate, ce qui a accéléré le processus d’intégration qui est compliqué si tu te retrouves tout seul. Où on va ? Où ça se passe ? Qui ouvre ? Qui ferme ? Les entretiens ont été faits un petit peu après, une fois les entraînements commencés. Avec les préparations, les entraînements, les entretiens, les journées ont été chargées, avec en plus les clubs de supporters, les galettes, le conseil d’administration qui se mêlent à tout ça.
Ce n’est plus le même rythme qu’à l’époque de Ma Chaîne Sport et SFR ? Fondamentalement. J’avais beaucoup d’autonomie, d’organisation, je partais la veille à Paris pour être très large, prendre le temps, être serein. On va dire qu’ici à Boulazac, l’essorage de fin de la machine à laver a été au début. Bon, ça y est, là on a davantage le temps de préparer les entraînements, de réfléchir.
L’objectif, ce sont les playoffs cette année et la remontée à moyen terme en Pro A ? Je pense que c’est à court terme. Le club a connu la Pro A, il a la surface et l’épaisseur pour y retourner et essayer d’y rester. Bien sûr, c’est ce qui m’a attiré dans le discours.
A court terme, ça veut dire dès cette saison ? Il faut déjà entrer dans les playoffs. Donc, c’est d’abord du match après match. Et après en playoffs, pourquoi pas ? Souvent de la bouche des coaches on entend, « il ne faut pas brûler les étapes, etc ». Non, là, c’est possible, le club est prêt. Est-ce que l’équipe est prête ? C’est autre chose. La Pro B est très complexe. Je ne sais pas si beaucoup de monde attendait Fos à ce niveau là. C’est très dur de monter même s’il y a deux places. Il suffit de voir Bourg-en-Bresse l’année dernière qui avait pourtant une équipe de feu, comme cette année d’ailleurs, qui est en difficulté, qui se reprend… Les choses sont loin d’être faites. J’ai connu la Pro B avec Pau et les JSA Bordeaux. Avec Pau, on a fini premier et bien heureux de l’être car s’il avait fallu passer par les playoffs, rien n’était garanti, il y a toujours des surprises. Tout le monde n’aurait pas mis le gros billet l’année dernière sur Le Portel.
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