Diandra Tchatchouang (1,89m, 27 ans) est l’un des piliers de l’équipe de France. Avec cinq autres internationales, elle fait de Lattes-Montpellier un épouvantail cette saison en ligue féminine. Interview d’une jeune femme qui porte le numéro 93, un rappel de son département de naissance -elle est née à Villepinte-, et qui est fière de ses origines africaines.
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Vous êtes plusieurs internationales à avoir choisi de rejoindre Lattes-Montpellier. En avez-vous discuté ensemble avant de prendre votre décision ?
Oui. On peut le dire maintenant car ça serait mentir de dire que c’est du hasard. A un moment donné, en discutant les unes avec les autres en équipe de France, on s’est rendu compte que c’était un projet, un club qui pouvaient nous intéresser. On a communiqué un peu plus ensemble et on s’est dit « pourquoi pas s’y retrouver ? » On a été coéquipières à un moment donné que ce soit à Bourges et en équipe de France et surtout on est des amies. On a apprécié de jouer et de gagner ensemble. Edwige Lawson (NDLR : Directrice Sportive) et Rachid Méziane (coach) y sont aussi pour beaucoup car ce sont eux qui nous ont contactées. Honnêtement, au départ, on se disait que c’était impossible que l’on soit les cinq joueuses sur le même choix car au niveau de la carrière on a des attentes différentes. Au final ça s’est fait et on était super contentes mais toujours avec en tête cet objectif de se réunir pour gagner.
Pour vous, ce n’était pas un problème de ne pas faire l’Euroleague ?
Si. Quand on nous a montré le projet, on était intéressé à la condition que le club fasse l’Euroleague. Au final, en discutant un peu toutes ensemble, en se disant qu’en jouant l’Eurocup -qui n’est clairement pas au niveau de l’Euroleague-, il y avait peut-être quelque chose à aller chercher sur cette compétition-là, que c’était un challenge de plus d’aller chercher l’Euroleague pour la saison d’après. Ce qui aurait été extrêmement compliqué pour nous ça aurait été de jouer une seule fois par semaine et là on s’est dit qu’on aura le rythme de deux matches par semaine même si ce n’est pas la même compétition. Je pense aussi que le championnat de France est en train de grimper, on est des compétitrices, on aime ça.
« C’est paradoxal car il y a tellement de sports que l’on entend peu parler du basket féminin à Montpellier mais le maire, que j’ai pu rencontrer, est très présent et il a vraiment envie de faire grandir le club »
Le basket à Bourges et dans le Cher, c’est très important. Ça ne fait pas un chaud et froid de passer à Montpellier où son impact est bien moindre avec beaucoup d’autres sports et quantité de distractions ?
Je connaissais Montpellier et je m’en rends compte depuis que j’y suis revenue. A Bourges, on n’est pas anonymes car la ville vit vraiment autour des basketteuses, c’est le club titré, il y a la culture de la gagne. Quand tu arrives à Bourges, tu n’as pas besoin de demander les objectifs, ce sont les mêmes chaque année. Gagner, gagner, gagner. Montpellier est un club qui a déjà écrit de très belles pages de son histoire en gagnant aussi des titres mais c’est complètement différent de Bourges. A Montpellier, on est complètement anonymes. Bien sûr ça va passer par des titres, des victoires mais l’un des objectifs c’est aussi de faire entendre le basket féminin à Montpellier car sa place y est encore petite même si les collectivités ont une grande part dans le budget. Il n’y aurait pas de club sans eux. Il faut peut-être gagner plusieurs choses pour montrer que le basket existe à Montpellier, qu’il y a des Françaises et que l’on veut porter haut et fort les couleurs du BLMA dans toute la ville alors qu’à Bourges c’était déjà fait.
Vous pourriez bénéficier dans le futur d’une véritable aréna* ?
Oui, une salle partagée avec le club de hand. C’est paradoxal car il y a tellement de sports que l’on entend peu parler du basket féminin à Montpellier mais le maire, que j’ai pu rencontrer, est très présent et il a vraiment envie de faire grandir le club. Aujourd’hui la salle de Montpellier peut se transformer en chaudron mais elle reste très petite -c’est la plus petite de la ligue, je pense- et une salle digne de ce nom c’est important dans un projet que Montpellier veut mettre en place.
Et en ce qui concerne les installations notamment médicales ?
Je peux faire la différence puisque j’y étais il y a sept ans. On a un kiné à chaque déplacement, il est disponible quasiment tout le temps durant la semaine. C’est vrai que j’ai été habituée à Bourges à avoir un kiné à plein temps H 24 ! Mais à Montpellier, si les filles ont besoin d’examens, elles les ont en moins de 24 heures. On sent qu’ils mettent tout en œuvre pour que l’on soit dans les meilleures conditions.
« L’année dernière, il y avait Céline et que c’était le cas depuis beaucoup d’années et que tu ne l’as remplace pas comme ça »
Autre chapitre plus douloureux. Avez-vous senti que les Belges étaient plus qu’euphoriques, possédées, lors de la Coupe du monde et pas seulement contre vous ?
J’ai regardé le match aussi douloureux que ça pouvait l’être. Les Belges étaient sur un nuage, ont joué avec les tripes et avec le cœur. Il ne faut pas enlever le fait qu’on n’a pas fait ce qu’il fallait. On n’est pas rentré dans le match comme on doit rentrer dans un quart-de-finale. On a mis beaucoup moins d’intensité qu’elles alors que c’était censé être l’une des clés du match et que l’on a des joueuses plus physiques. Elles ont super bien joué et avec du recul tu te dis en regardant la demi-finale contre les Etats-Unis et le match pour la troisième place contre l’Espagne que si, comme le disait le président (NDLR : de la FFBB, Jean-Pierre Siutat), c’est la manière qui blesse, mais on est à notre place.
On a l’impression de l’extérieur qu’avec la retraite de Céline Dumerc, il manque un leader. Est-ce la sensation que vous avez eu de l’intérieur ?
Sur le coup, on ne pense pas à ça mais avec du recul, tu te dis que l’année dernière, il y avait Céline et que c’était le cas depuis beaucoup d’années et que tu ne l’as remplace pas comme ça. C’est clairement un leader vocal sur le terrain. Dans les moments durs, on a essayé chacune de faire notre truc de notre côté mais il n’y a pas eu quelqu’un -ça aurait pu être moi, Endy (Miyem), Sandrine (Gruda), les plus anciennes peut-être- qui a réussi -je ne dirais pas « rester ensemble » car on ne s’est pas complètement désolidarisé- à ramener l’équipe ensemble. Oui on a eu du mal à gérer la crise comme Céline le faisait les années précédentes, naturellement.
Les deux prochaines échéances, ce sont la Roumanie et la Slovénie. Pour assurer la qualification, il faut reprendre six points aux Slovènes. Le match aller là-bas, vous l’aviez raté ?
Si mes souvenirs sont bons, on a très bien commencé. On gagne de plus 10/15 et elles reviennent à la mi-temps et on est méconnaissables en deuxième, on est à leur niveau alors qu’on sait que ces matches à l’extérieur, il faut les tuer car les fins de match sont compliqués. On ne le fait pas et je pense que rien qu’en défendant un petit peu mieux -je ne sais plus combien de rebonds offensifs elles nous avaient pris mais c’était juste exagéré- et même en n’ayant pas de réussite, ça aurait suffi. On va se remettre sur ce match retour car c’est important de se qualifier en terminant premières pour être ensuite tête de série.
Que pensez-vous du fait que Bria Hartley soit maintenant dans le groupe de l’équipe de France ?
Je n’ai pas trop d’avis sur la question. Je pense que c’est une très belle joueuse mais sur le fait qu’elle vient en équipe de France, non, je n’ai pas d’avis.
Vous attendez déjà de la connaître ?
Oui, c’est vrai que je ne la connais pas du tout personnellement. Je sais juste que c’est une super joueuse. On aura l’occasion de la rencontrer en novembre. Même si Bria arrive et découvre l’équipe de France, l’objectif commun passera toujours avant autre chose. En tous les cas, ça se passera bien.
« J’étais super contente de partir de la maison. C’était pour ma mère que ça a été dur et je ne m’en suis pas rendue compte tout de suite »
Vous étiez invité à L’Elysée lors de la venue de George Weah, l’ancien footballeur qui venait d’être élu président du Libéria avec d’autres sportifs français d’origine africaine. C’est important pour vous de valoriser vos racines africaines ?
C’est important. Je suis née en France et j’ai grandi en France mais je connais aussi le Cameroun et la culture d’origine de mes parents. Ils sont nés là-bas et ils sont arrivés en France un peu avant leurs vingt ans. J’ai la chance d’avoir cette double culture car on a été éduqués à l’africaine. Même si j’ai mes bases ici, comme c’est une population qui est parfois en difficulté, dès que je peux j’essaye de faire de mon possible pour aider les gens qui sont là-bas. J’ai toujours dit que je suis française et camerounaise.
Nicolas Batum a un père camerounais. Avez-vous échangé là-dessus ?
Oui. On n’a pas fait des choses communes mais je discute souvent avec sa maman qui est très portée sur les projets associatifs au Sénégal. C’est vrai que l’on a cet attachement là en commun pour le Cameroun et l’Afrique en général. On s’est dit avec la mère de Nico, « pourquoi pas faire quelque chose pour la jeunesse africaine à un moment donné ? »
Vous faites des études de journalisme à Sciences Po. Vous avez l’objectif de devenir journaliste ?
Oui. J’aimerais bien faire du global pas que du sportif. J’aime bien échanger sur plein de choses, écrire. Quand je vois ce que vous faites, vous, ou les autres médias pas uniquement sportifs, je me verrais bien dans ce monde-là que je ne connais pas en détails.
Ce sont des études par correspondance ?
Oui. Je suis en train de faire un certificat préparatoire pour pouvoir faire un master après en sciences po. Il me reste trois semestres à faire.
Vous étiez très précoce en jeune et vous êtes partie de la maison familiale à 12 ans. C’est vraiment très tôt ?
Je suis partie au pôle d’Eaubonne quand j’avais 12 ans. J’avais deux ans d’avance puisque je suis rentrée avec les 89 alors que je suis de 91. J’étais super contente de partir de la maison. C’était pour ma mère que ça a été dur et je ne m’en suis pas rendue compte tout de suite. Ce n’est pas facile de laisser partir son enfant de 12 ans même si je rentrais le week-end. On se voyait très peu. Je passais la semaine en sport-études et le week-end j’avais match avec le club. A partir du moment où le basket est devenu ma passion et que l’on m’a expliqué le cheminement, que l’on m’a dit qu’en entrant au pôle j’étais parmi les meilleures de l’Ile-de-France, c’est devenu mon objectif. Pareil quand on m’a dit que si j’entrais à l’INSEP, j’étais parmi les meilleures françaises. Je n’ai pas senti que je partais un peu trop tôt. J’étais plus jeune mais je me sentais prête et ça m’a permis de grandir un peu plus vite. Je ne regrette pas et j’ai parfois des personnes, des mamans qui n’osent pas trop laisser partir leurs enfants en centre de formation ou en pole et qui m’en parlent, et je ne peux que leur dire de surtout les laisser partir même si pour elles c’est un peu trop tôt. A partir du moment où l’enfant se sent prêt, qu’il a envie de le faire, il faut le laisser faire car moi ça ne m’a pas apporté que « baskettement » mais à tous les niveaux et surtout humainement.
*La Métropole de Montpellier a lancé des études pour l’édification d’un nouveau palais des sports dans le futur quartier Cambacérès, près de la gare TGV Sud de France. C’est également sur cette zone que la Métropole prévoit de construire son nouveau stade de foot « Louis Nicollin », dont la première pierre sera posée le 7 juin 2019. Le nouveau palais des sports comptera entre 5 000 et 6 000 places et son coût sera d’environ 50M€. Champion d’Europe de handball en titre, le MHB en sera le club résident et le BLMA pourrait y disputer ses matches les plus importants.
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Vous êtes plusieurs internationales à avoir choisi de rejoindre Lattes-Montpellier. En avez-vous discuté ensemble avant de prendre votre décision ?
Oui. On peut le dire maintenant car ça serait mentir de dire que c’est du hasard. A un moment donné, en discutant les unes avec les autres en équipe de France, on s’est rendu compte que c’était un projet, un club qui pouvaient nous intéresser. On a communiqué un peu plus ensemble et on s’est dit « pourquoi pas s’y retrouver ? » On a été coéquipières à un moment donné que ce soit à Bourges et en équipe de France et surtout on est des amies. On a apprécié de jouer et de gagner ensemble. Edwige Lawson (NDLR : Directrice Sportive) et Rachid Méziane (coach) y sont aussi pour beaucoup car ce sont qui nous ont contactées. Honnêtement, au départ, on se disait que c’était impossible que l’on soit les cinq joueuses sur le même choix car au niveau de la carrière on a des attentes différentes. Au final ça s’est fait et on était super contentes mais toujours avec en tête cet objectif de se réunir pour gagner.
Pour vous, ce n’était pas un problème de ne pas faire l’Euroleague ?
Si. Quand on nous a montré le projet, on était intéressé à la condition que le club fasse l’Euroleague. Au final, en discutant un peu toutes ensemble, en se disant qu’en jouant l’Eurocup -qui n’est clairement pas au niveau de l’Euroleague-, il y avait peut-être quelque chose à aller chercher sur cette compétition-là, que c’était un challenge de plus d’aller chercher l’Euroleague pour la saison d’après. Ce qui aurait été extrêmement compliqué pour nous ça aurait été de jouer une seule fois par semaine et là on s’est dit qu’on aura le rythme de deux matches par semaine même si ce n’est pas la même compétition. Je pense aussi que le championnat de France est en train de grimper, on est des compétitrices, on aime ça.
« C’est paradoxal car il y a tellement de sports que l’on entend peu parler du basket féminin à Montpellier mais le maire, que j’ai pu rencontrer, est très présent et il a vraiment envie de faire grandir le club »
Le basket à Bourges et dans le Cher, c’est très important. Ça ne fait pas un chaud et froid de passer à Montpellier où l’impact du basket est bien moindre avec beaucoup d’autres sports et quantité de distractions ?
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Photos: FIBA et FFBB/Hervé Bellenger