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Emmanuel Schmitt (Hyères-Toulon): « On a notre destin entre nos mains »

La deuxième partie de l’interview d’Emmanuel Schmitt. Pour son retour comme coach en Pro A, l’équipe du Hyères-Toulon Basket a fait un démarrage en boulet de canon et était à même de s’insérer dans le top 8 de la Leaders Cup alors qu’il dispose de la plus mince masse salariale du championnat. Seulem

La deuxième partie de l’interview d’Emmanuel Schmitt. Pour son retour comme coach en Pro A, l’équipe du Hyères-Toulon Basket a fait un démarrage en boulet de canon et était à même de s’insérer dans le top 8 de la Leaders Cup alors qu’il dispose de la plus mince masse salariale du championnat. Seulement, le club s’est fait sanctionner pour des erreurs administratives, ce qui a brisé son élan.

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Quand vous avez déménagé à Toulon pour raisons professionnelles, vous vous êtes occupé des U17 du HTV ?

Le HTV, j’ai failli y jouer, Philippe Legname (NDLR: le directeur général), je le connais depuis très longtemps. Bien entendu je suis allé voir les matches et comme mon fils jouait au basket et qu’ils cherchaient des entraîneurs de jeunes, je me suis occupé de son équipe.

A l’époque où vous étiez en Suisse, avez-vous cherché à revenir en Pro A ou à partir dans un autre pays ?

J’ai eu des opportunités avec des clubs notamment de Pro B, pas de Pro A. J’ai été viré de Chalon, peu importe le contexte, ensuite j’ai entraîné en Suisse très longtemps et je ne suis pas certain qu’un club de Pro A aille chercher un entraîneur en Suisse. J’ai eu quelques contacts avec l’étranger mais ça n’a pas été plus loin. Je n’ai jamais rien exclu. Et puis, le championnat suisse est ce qu’il est mais j’ai toujours été dans des équipes de haut de tableau, j’avais des conditions plus que correctes, à part pour mon égo personnel de me dire que la France s’est mieux qu’en Suisse, j’étais épanoui. Mes équipes étaient compétitives. Avec Genève, on a été une fois en finale du championnat, on a gagné la Coupe, la Coupe de la Ligue, et avec Neuchâtel j’ai fait deux finales de championnat, on a gagné la Coupe de la Ligue, on a été en finale de la Coupe avec le cinquième budget. Il y a du monde qui vient à la salle, tu donnes des émotions aux gens, et encore une fois à part ton égo qui te dit que la Suisse c’est un championnat plus faible que la France, j’étais très bien. Bien sûr j’aurais aimé avoir plus de moyens mais mon job c’est d’optimiser le potentiel que l’on met à ma disposition. Donc tant que j’avais le sentiment de participer à un projet qui pouvait progresser, et on a globalement toujours fait mieux que ce que permettait a priori le budget, j’étais épanoui sans jamais fermer la porte à rien mais ce n’était pas revenir en France pour revenir en France.

Je suppose que vous continuiez à regarder les matches de Pro A, à suivre l’actualité du basket français ?

Bien sûr. Je regardais les matches, j’étais en contact, je venais en France dès que je pouvais. Des gens ont été surpris lors de mon retour que je connaisse le basket français mais beaucoup de gens en Suisse le connaissent aussi bien voire mieux que beaucoup de Français. Les Suisses sont très ouverts et j’ai été très surpris en arrivant de leurs connaissances ; ils t’apprennent des trucs !

Mais donc, après votre expérience dans l’entreprise, vous avez décidé de replonger dans le basket à Neuchâtel ?

Même si le job que je faisais était super intéressant, ça m’a amené à me poser beaucoup de question, sur moi, sur le management en général, sur mon job de coach, j’ai senti que le basket était dans mon ADN. Je me suis remis sur le marché même si ce n’était pas évident au bout de quatre ans et demi. J’ai failli à l’époque reprendre déjà le HTV. C’était l’année où Aymé Toupane a repris le club. Comme j’étais parti de Suisse de mon plein grès et en ayant plutôt de la réussite, j’ai eu très rapidement des offres en Suisse dont de Neuchâtel. J’ai besoin d’avoir un relationnel assez fort avec les gens avec qui je travaille et j’ai senti que ça pouvait le faire avec les dirigeants. Je suis parti à Neuchâtel à l’été 2013. J’ai remplacé un Français, Arnaud Ricoux.

« Avec le HTV on s’était manqué une fois, j’avais ma maison et mon fils dans le coin, c’était une opportunité de relever un nouveau challenge »

Qu’est-ce qui vous a fait revenir en Pro A et au HTV pour de bon ?

J’avais régulièrement des contacts avec des clubs de Pro B et par rapport à ce que je vivais en Suisse, ce n’était pas forcément d’un intérêt supérieur. Quand je mettais tout dans la balance, j’étais bien où j’étais. J’avais toujours dit que si j’avais une opportunité en Pro A, c’était autre chose. Quand le HTV m’a sollicité l’année dernière, j’avais encore deux ans de contrat avec Neuchâtel avec une clause de sortie pour l’étranger. Avec le HTV on s’était manqué une fois, j’avais ma maison et mon fils dans le coin, c’était une opportunité de relever un nouveau challenge. Le confort pour moi aurait été de rester en Suisse mais ce qui me fait vivre c’est le besoin de me remettre en danger.

Ce n’était pas le challenge le plus facile dans le sens où la masse salariale du HTV est incroyablement faible ?

C’est à vérifier mais je pense que c’est dans l’histoire du club en Pro A la masse salariale la plus faible. Je savais où j’arrivais, je connaissais les difficultés et je n’ai pas de soucis avec ça. J’ai confiance dans mes qualités, dans les domaines où je crois que je peux amener des choses. Je connais aussi aujourd’hui mes points faibles et j’arrive à trouver un équilibre avec ça. Le danger, il est partout. Quand on prend la tête d’un club qui a beaucoup de moyens, c’est un autre danger.

Avoir si peu d’argent, ça oblige à ne pas se tromper quand on fait le recrutement ?

Bien sûr que c’est difficile de recruter des joueurs quand on n’a pas beaucoup d’argent mais en même temps, dans cette position-là, tu es assez confortable. Aux joueurs que j’ai recrutés -certains je les suivais depuis quelques années-, je leur ai dit : « c’est simple, si tu veux gagner de l’argent, ce n’est pas chez nous. Par contre, le deal c’est, oui, tu peux gagner plus d’argent ailleurs, mais tu as des choses à prouver et si tu fais une bonne saison, que l’on fait une bonne saison ensemble, on en tirera tous le bénéfice. » Quand tu n’as pas de moyens, tu proposes 10 et le mec ne va pas te demander 12 car il sait que tu ne les as pas. Après la difficulté, c’est de travailler sans filet. Si tu te plantes, tu n’auras pas les moyens de changer. Mais qu’est-ce que tu risques ? La peur n’écarte pas le danger.

Vous avez tout d’abord recruté les Français ou les Américains ?

J’ai tout d’abord fait un état des lieux. Bien sûr, quand tu n’as pas beaucoup de moyens, c’est important d’avoir des joueurs français fiables. Il y avait des joueurs que l’on ne pouvait de toutes façons pas garder, qui étaient sur d’autres projets. Ferdinand Prénom était pour moi une priorité. Pour moi ce qui est important c’est d’utiliser les gens sur leurs points forts dans le cadre que j’ai défini par rapport à ma philosophie. Et arriver à ce que la complémentarité entre les points forts des gens amène à un potentiel supérieur à celui que tu pensais avoir à la base. Et que les points faibles des gens soient compensés par le collectif, par l’effort que les gens mettent pour atténuer et progresser sur leurs points faibles.

Vous avez dit en début de saison que votre équipe est composée de dix joueurs qui se sacrifient.

Qui sacrifient leur égo personnel, qui ont confiance dans leurs points forts, que chacun les connaisse. Je travaille beaucoup là-dessus. Mais par contre qui se sacrifient sur le côté « ce qu’ils aimeraient faire mais qui ne correspond pas forcément à ce qu’ils sont ». C’est, il me semble, la difficulté qu’ont tous les coaches. Souvent un joueur n’accepte pas d’être lui-même. Je dis aux joueurs qu’il faut connaître ces points forts et ces points faibles et que le fonds de commerce, ce sont les points forts. J’ai un exemple, Vafessa Fofana (1,98m, 25 ans). C’est le couteau suisse parfait. A mon sens, il peut être absolument indispensable dans une équipe car il peut défendre sur les postes 1, 2, 3 et 4 et en attaque, sur les postes 2, 3, 4. A condition d’être dans le schéma, « je mets de l’intensité à fond tout le temps » et en se disant « mon point fort, c’est la polyvalence. Mais je ne veux pas être un autre, le scoreur de l’équipe. » C’est quelqu’un qui est capable de marquer des points mais à la condition de rester dans son rôle et dans ses points forts. Quand un joueur estime que son point fort c’est ça ou ça et pas moi, c’est compliqué de travailler ensemble. On sait que l’environnement du joueur n’est pas forcément en phase avec ce que nous, coach, on veut mettre en place.

Vous avez été en place très vite, ce qui n’est pas toujours le cas des grosses équipes, et cela vous a permis d’engranger des victoires ?

Pourtant on a eu une préparation raccourcie, on a fait six semaines. On a essayé d’être dense. On a passé beaucoup de temps au début à expliquer ça, je travaille vraiment là-dessus. J’ai senti très vite qu’il y avait une adhésion avec les gars. Il n’y a que des bons gars dans cette équipe et ça on le sent très vite. Dès les premiers entraînements on sent si une alchimie peut prendre. Quand j’ai compris que les gars adhéraient à ce discours, j’ai gagné beaucoup de temps. La question n’est pas de savoir si le système 3 ou le 5 tu le répètes 10 ou 20 000 fois, la question est de savoir si les gens adhèrent à tes principes de vie, de fonctionnement, d’utilisation de leurs potentiels et de mettre ça au service du groupe. Il faut d’abord que les gens adhèrent à un projet individuel avant de s’investir dans un projet collectif.

https://www.youtube.com/watch?v=dyd0ghXrikM

« On a gagné sept matches et si tu regardes le classement, on n’a que six victoires. On peut rester dans cette posture-là mais ça ne mène à rien à part du négatif, de la frustration »

Vous avez pris un coup de poignard dans le dos lorsque le club a été sanctionné de trois victoires sur tapis vert. Comment avez-vous géré ça vis-à-vis des joueurs ?

Un coup de poignard, c’est clair. Avec mon staff et les joueurs on s’est réuni dans le vestiaire. On a essayé de s’isoler de ça. Un truc que je répète sans cesse aux joueurs : « contrôlons ce que l’on peut contrôler. » Ça ne sert à rien de s’occuper de l’arbitre pendant le match. Et là, c’était poussé à l’extrême. Oui pour les joueurs et pour les coaches c’est injuste. On n’y est pour rien. On a gagné sept matches et si tu regardes le classement, on n’a que six victoires. On peut rester dans cette posture-là mais ça ne mène à rien à part du négatif, de la frustration. C’est un gros effort assez coûteux nerveusement mais j’essaye au quotidien de nous isoler de ça.

Récupérer deux victoires a constitué une bouffée d’oxygène ?

Je me refuse à dire qu’on en a récupéré deux. Je dis qu’on n’en a perdu qu’un. C’est très dur mais c’est moins dramatique que trois. Je suis content que l’appel ait été rendu pour vraiment tourner la page. Ce qui m’intéresse maintenant ce sont les dix-sept matches qui arrivent (NDLR: seize après la défaite hier face à Strasbourg). Se dire que l’on va jouer neuf matches à la maison et que si on est performants comme on peut l’être, on a notre destin entre nos mains. Se lamenter, crier à l’injustice, chercher des coupables, ça ne mène à rien.

Ça n’a pas influencé sur le rendement de l’équipe ?

En tous les cas le groupe n’a pas explosé alors que c’était un réel danger. Lorsque la décision a été rendue on était à 6 victoires et 6 défaites et depuis on a fait 1 victoire et 4 défaites. Certes on a joué Monaco chez nous, Bourg et Villeurbanne chez eux. Ça a été difficile, je ne le cache pas, bien sûr que ça a marqué un coup d’arrêt. Il n’y a pas de hasard, on marque plus de points depuis ce moment-là et on encaisse aussi plus de points. Peut-être qu’il y a quand même un effet à ce niveau-là.

Vous êtes revenus en France pour de bon ?

Le parcours de ma vie professionnelle montre que l’on ne sait pas de quoi demain sera fait. Je suis resté neuf ans à Chalon, six à Genève, cinq ans dans le monde de l’entreprise, quatre ans à Neuchâtel et j’avais encore deux ans de contrat aussi mon idée c’était de construire. J’aime avoir le sentiment que les choses peuvent avancer. Tant que je peux apporter quelque chose et que je me reconnais dans le projet, je ne me mets pas de limite dans la durée. Je ne présage de rien.

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Quand vous avez déménagé à Toulon pour raisons professionnelles, vous vous êtes occupé des U17 du HTV ?

Le HTV, j’ai failli y jouer, Philippe Legname, je le connais depuis très longtemps. Bien entendu je suis allé voir les matches et comme mon fils jouait au basket et qu’ils cherchaient des entraîneurs de jeunes, je me suis occupé de son équipe.

A l’époque où vous étiez en Suisse, avez-vous cherché à revenir en Pro A ou à partir dans un autre pays ?

J’ai eu des opportunités avec des clubs notamment de Pro B, pas de Pro A. J’ai été viré de Chalon, peu importe le contexte, ensuite j’ai entraîné en Suisse très longtemps et je ne suis pas certain qu’un club de Pro A aille chercher un entraîneur en Suisse. J’ai eu quelques contacts avec l’étranger mais ça n’a pas été plus loin. Je n’ai jamais rien exclu. Et puis, le championnat suisse est ce qu’il est mais j’ai toujours été dans des équipes de haut de tableau, j’avais des conditions plus que correctes, à part pour mon égo personnel de me dire que la France s’est mieux qu’en Suisse, j’étais épanoui. Mes équipes étaient compétitives. Avec Genève, on a été une fois en finale du championnat, on a gagné la Coupe, la Coupe de la Ligue, et avec Neuchâtel j’ai fait deux finales de championnat, on a gagné la Coupe de la Ligue, on a été en finale de la Coupe avec le cinquième budget. Il y a du monde qui vient à la salle, tu donnes des émotions aux gens, et encore une fois à part ton égo qui te dit que la Suisse c’est un championnat plus faible que la France, j’étais très bien. Bien sûr j’aurais aimé avoir plus de moyens mais mon job c’est d’optimiser le potentiel que l’on met à ma disposition. Donc tant que j’avais le sentiment de participer à un projet qui pouvait progresser, et on a globalement toujours fait mieux que ce que permettait a priori le budget, j’étais épanoui sans jamais fermer la porte à rien mais ce n’était pas revenir en France pour revenir en France.

Je suppose que vous continuiez à regarder les matches de Pro A, à suivre l’actualité du basket français ?

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