Dans un scénario étonnamment identique, l’équipe de France a successivement battu la Turquie puis l’Italie, après prolongation, pour valider une place dans le dernier carré de l’Euro. Le sélectionneur Vincent Collet a balayé tous les sujets du moment en conférence de presse, avant d’affronter la Pologne (vendredi à 17h15).
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Était-ce un miracle ou une opportunité provoquée ? Ce jeudi matin, au Sheraton Berlin Grand Hôtel Esplanade, l’hôtel des Bleus, on pouvait sentir un mélange de soulagement, dû à la qualification presque miraculeuse pour le dernier carré contre l’Italie, mais aussi d’excitation et de concentration, celle de se projeter sur une nouvelle demi-finale, la troisième consécutive en compétition internationale. Et une opportunité en or de rejoindre une nouvelle fois la finale de l’EuroBasket.
En conférence de presse, le technicien tricolore Vincent Collet s’est confié sur la défaite surprenante de la Slovénie, mais aussi le coeur de la Pologne, vainqueur de la Slovénie, qui ne sera pas un adversaire facile à jouer. Le coach tricolore de 59 ans est aussi revenu à la fois sur les fulgurances et les carences de l’équipe de France. Ses joueurs sont certes, des braqueurs revenus de loin, mais surtout grâce à leur coeur. Ces Bleus sont toujours capables de se sortir de situations particulièrement inconfortables.
Etes-vous surpris de voir l’équipe de France dans le dernier carré de l’Euro, compte tenu des fulgurances mais aussi des carences montrées ?
« Vous l’avez tous dit, à juste titre d’ailleurs, nous sommes passés deux fois par un trou de souris. En tout cas, on est heureux d’être là, d’être en vie, d’avoir une opportunité d’aller en finale qui plus est. Ce sera bien sûr un match ouvert où l’on aura toutes nos chances, c’est déjà très bien, même si nous sommes bien conscients de nos carences. Mais nous avons aussi des qualités, entre autres ce qu’ont montré les deux fins de matches : notre ténacité, notre abnégation. On n’a pas toutes les qualités, mais en tout cas, on ne lâche pas. On a des faiblesses structurelles, dans les passes notamment, qui nous pénalisent. On ne joue parfois pas très justes, et parfois on y arrive. On est très irréguliers, c’est effectivement un souci. Mais malgré tout, on est encore là. Donc on prend les choses de manière positive. »
L’horizon s’éclaircit-il pour l’équipe de France après la victoire de la Pologne sur la Slovénie ?
« Bien sûr, c’est ce qui peut sembler venir à l’esprit, en particulier avec la défaite de la Slovénie. Hier, même quand j’ai cru qu’ils allaient finalement gagner dans le quatrième quart-temps, on sentait quand même les Slovènes émoussés par rapport à ce qu’on avait vu la semaine dernière (NDLR : au premier tour, où la Slovénie a battu la France, 88-82). Il faut jouer la Pologne comme une demi-finale de championnat d’Europe. Ils ne l’ont pas volé. C’est une autre opposition, avec beaucoup moins d’armes offensives que la Slovénie, mais avec une défense beaucoup plus solide. Ce n’est pas du tout le même type de match auquel il faut s’attendre. Il faut vraiment qu’on se prépare à leur agressivité défensive. C’est l’une des équipes du tournoi qui entoure le mieux la balle. Ils mettent de la pression, ils sont très agressifs, donc il va falloir qu’on trouve des solutions sur ce qu’ils vont nous proposer. À l’inverse, on n’aura pas à se préoccuper du cas Luka Doncic, qui était bien sûr très épineux. Mais ils ne sont pas arrivés là par hasard ! Hier, cette équipe polonaise en première mi-temps m’inquiétait plus qu’autre chose, avec le niveau qu’elle avait. Après, dans le troisième quart-temps, un peu à notre manière, ils ont eu une panne de courant. Mais au moment où on pensait qu’ils allaient perdre, ils ont trouvé de l’énergie pour refaire la différence. »
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Comment vit-on ces émotions de la Turquie et de l’Italie de l’intérieur ?
« Je ne le vis pas comme les spectateurs qui sont devant leur télé, et pour qui ça doit être irrespirable. Nous, on a quelque part la chance d’être dans l’action. Les minutes défilent, on est dans la recherche de solutions, dans la réflexion, donc je pense qu’on subit moins les émotions que les gens qui regardent le match et qui ont envie que tu gagnes. Pour nos supporters, ça doit vraiment être encore pire que pour nous. Quand on est -7 à 2 minutes 20 de la fin, c’est sûr qu’on n’est pas dans le meilleur état physiologique possible. Malgré tout, on reste dans l’action. Fabrice (Canet, responsable relation presse des Bleus) le vit moins bien derrière la tribune de presse (rires). »
« Il y a beaucoup de choses qu’on pourrait travailler mais c’est utopique de penser qu’on puisse le faire en vingt-quatre heures. Maintenant, je ne rêve plus par rapport à ça »
Avez-vous identifié les choses à travailler pour ne pas reproduire les trous d’air connus au troisième quart-temps ?
« On joue demain à 17h15. On n’est pas en club, on n’a pas une semaine pour s’entraîner et corriger. On a 24 heures pour préparer un match contre une équipe qu’on ne connait pas trop, donc on va déjà travailler sur la Pologne. Quant à nos trous d’air, on va essayer de trouver des solutions par la vidéo, et les prises de décision individuelles. Quand on envoie la balle dans les tribunes sur des passes directes non contestées, on peut travailler bien sûr, mais on peut surtout espérer qu’on arrête de le faire. »
La qualification, deux fois à l’arraché, peut-elle créer un supplément d’âme dans cette équipe de France ?
« On le dit, on peut en avoir l’impression. Mais c’est aussi dépendant de nos objectifs initiaux : on avait envie d’être là. J’ose espérer qu’on n’ait pas besoin de supplément d’âme (pour chercher la médaille d’or). Le supplément d’âme, je le crains plus pour notre adversaire, qui n’est pas arrivé en demi-finale de l’Euro depuis 51 ans… C’était en Allemagne d’ailleurs, c’était le championnat d’Europe d’Essen en 1971, le premier que j’ai dû voir à la télé. Et je ne me rappelais pas que les Polonais étaient allés si loin que ça, mais il y avait déjà les Espagnols. Clairement, on peut craindre ça chez les Polonais. De notre côté, je n’ai pas d’inquiétude. Je pense qu’on a vraiment envie d’aller au bout, mais ça ne suffit pas toujours. Ce qu’on montre dans l’inconstance, les pertes de balles, des moments où l’on exploite pas bien le rapport de force, notamment quand on a l’avantage intérieur et qu’on joue pour nos extérieurs, même quand on demande l’inverse. Ça fait partie de notre équipe, et il faut l’accepter. Oui, il y a beaucoup de choses qu’on pourrait travailler mais le problème, c’est que c’est utopique de penser qu’on puisse le faire en vingt-quatre heures. On ne va pas pouvoir tout travailler. Il va déjà falloir qu’on cible comment jouer contre notre adversaire en attaque. Le problème qu’on a dans les troisièmes quart-temps, c’est structurel. Là, ça se répète. Il faut qu’on vive avec et qu’on essaie de minimiser cela. Je ne rêve plus par rapport à ça. »
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Nikola Jokic, Giannis Antetokounmpo et Luka Doncic sont sortis. Cela révèle-t-il une tendance collective dans cet Euro ?
« Il y a une explication, et pas que dans cet Euro. Le basket reste un sport collectif, et un peu plus en Europe qu’en NBA. Les règles défensives qui contraignent les défenses NBA ne les contraignent pas en Europe. On a pu voir hier comment les Polonais ont réussi à enfermer Luka Doncic, c’était remarquable. Il faut bien mesurer la qualité défensive des Polonais, ce qui s’est passé hier. À chaque fois que Luka Doncic pénétrait, il y avait un deuxième défenseur. Quand il avait la balle au poste bas, les quatre autres étaient en zone. Dès qu’ils faisaient une passe extérieure, ils étaient organisés pour que la première passe soit prise en charge, puis la deuxième. Leur réseau défensif était remarquable. C’est la leçon.
Quand on parle de l’Espagne, c’est la même chose. On sait que ce sont les meilleurs depuis quinze ans dans tout ce qui est articulation collective. Ils sont en avance sur le reste de l’Europe, et c’est aussi une confirmation. Depuis le début de l’Euro, je n’ai pas arrêté de répéter à mes assistants qu’ils seraient là. Parce que ce n’est pas seulement les Gasol et les Navarro… Au-delà de ça, c’est l’école du basket espagnol qui est en demi-finale. Et oui, ce sont d’abord des équipes qui sont là. Pourtant, les trois stars citées ont toutes été exceptionnelles. Et on ne peut pas dire que ça soit leur stats qui ont provoqué la défaite. Mais fort heureusement, le basket reste un sport collectif, et encore plus dans le basket international. »
La Pologne n’est-elle pas le symbole de cette compétition extrêmement resserrée ?
« Oui, tout à fait. C’est surtout un Euro très relevé, car les équipes éliminées restent de très fortes équipes. Pour moi, sur le papier, la Serbie était numéro un. Mais ça ne suffit pas de l’être, car à partir des quarts, il y a l’aspect sublimation qui est très important. Surtout, il y a la façon d’appréhender le rapport de force. On sait que la faiblesse des Serbes, c’est lorsqu’ils sont chahutés, et c’est ce qui s’est passé. Hier, les Polonais ont profité de la relative faiblesse défensive des Slovènes qui avait déjà été vue précédemment. Ils ont quand même pris 58 points en première mi-temps, et ce n’était pas que de la faute des Polonais. C’est notre sport. Avec le football, c’est le sport le plus concurrentiel du monde. C’est vrai en Europe mais aussi dans le monde entier. Au début de la compétition, je pensais qu’il y avait 6-7 équipes capables d’aller au bout. Mais on s’aperçoit qu’il faut rajouter la Pologne. Et l’Allemagne, qui était pour moi à la bordure, joue un basket exceptionnel. Comme elle joue à domicile, elle se sublime. Avec leur public, ils sont presque en transe. C’est presque le favori de la compétition maintenant. On s’aperçoit bien qu’il y a une concurrence farouche. La façon dont on est passés montre bien que nos adversaires pourraient être à notre place. »
« Il ne faut pas oublier qu’on n’a pas encore fait notre match référence dans le tournoi. Il faut se dépêcher parce qu’il n’en reste plus que deux. Il est temps de le faire. »
Après le mondial 2019 et les JO 2021, ça fait tout de même trois derniers carrés d’affilée. Qu’est-ce que cela dit de cette équipe de France ?
« C’est un sentiment agréable, forcément, on est satisfaits. En revanche, on est aussi conscients de la façon dont ça s’est passé. Tout est à mesurer. Malgré tout, ça reste une performance d’être trois fois dans le dernier carré. On est la seule équipe européenne à avoir fait ça. Maintenant, ce n’est pas là-dessus qu’on s’arrête aujourd’hui, mon groupe et moi. On a surtout la détermination d’aller plus loin. Ce qui est devant nous, c’est une opportunité, rien de plus. On a très bien fait ça après la Serbie dimanche soir, c’est-à-dire qu’on a très bien préparé l’Italie, de la même manière qu’on aurait affronté les Serbes. Il faut qu’on fasse pareil contre la Pologne. Parce que cette opportunité est belle, on ne joue pas face à une équipe injouable. On va jouer contre une équipe qui peut nous battre, mais on peut les battre aussi. Et il ne faut pas oublier qu’on n’a pas encore fait notre match référence dans le tournoi. Il faut se dépêcher parce qu’il n’en reste plus que deux. Il est temps de le faire. »
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Comment stopper tactiquement Mateusz Ponitka et A.J. Slaughter ?
« On ne peut pas tout changer. On ne fait pas de boite ou des choses comme ça. Nous, on durcit la défense. On a des chiens de gardes, quelques spécialistes défensifs, qui vont être en mission, et sur tous les joueurs, pas que Ponitka et Slaughter. Notre défense est très dépendante des qualités dominantes des joueurs que l’on défend. Notre concept, c’est de défendre le danger. On se sert de ces éléments en ayant parfois des comportements différents selon qu’il parte sur la droite ou la gauche. On s’adapte à ça. »
Quels souvenirs gardez-vous d’Aaron Cel, Franco-Polonais que vous affronterez vendredi, qui prendra sa retraite internationale en fin de tournoi, et que vous avez coaché au Mans il y a une quinzaine d’années ?
« Je me souviens très bien de lui. C’est la génération 1987, la même que Nicolas Batum et Jérémy Leloup. Ce sont des gamins que j’ai entraînés. Moi j’ai grandi avec, entre autres, comme coach. Aaron, c’était un gamin introverti mais très dur. Il avait de l’assurance. Il y avait un autre jeune joueur à son poste, Kevin Corre, qui avait peut-être plus de qualités que lui mais qui avait beaucoup moins de dureté mentale. Aaron était vraiment sûr, assuré, déjà jeune. Je ne suis pas surpris de la carrière qu’il a pu réaliser. C’est un joueur polyvalent, qui sait faire beaucoup de choses, qui est surprenant, adroit, percutant, qui n’est pas très costaud en apparence mais qui est plutôt solide près du panier. L’année du titre en 2006, il s’est entraîné toute l’année avec nous, mais il ne fait pas la finale. Comme Nico Batum, je crois (rires). »
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À Berlin (Allemagne).
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Était-ce un miracle ou une opportunité provoquée ? Ce jeudi matin, au Sheraton Berlin Grand Hôtel Esplanade, l’hôtel des Bleus, on pouvait sentir un mélange de soulagement, dû à la qualification presque miraculeuse pour le dernier carré contre l’Italie, mais aussi d’excitation et de concentration, celle de se projeter sur une nouvelle demi-finale, la troisième consécutive en compétition internationale. Et une opportunité en or de rejoindre une nouvelle fois la finale de l’EuroBasket.
En conférence de presse, le technicien tricolore Vincent Collet s’est confié sur la défaite surprenante de la Slovénie, mais aussi le coeur de la Pologne, vainqueur de la Slovénie, qui ne sera pas un adversaire facile à jouer. Le coach tricolore de 59 ans est aussi revenu à la fois sur les fulgurances et les carences de l’équipe de France. Ses joueurs sont certes, des braqueurs revenus de loin, mais surtout grâce à leur coeur. Ces Bleus sont toujours capables de se sortir de situations particulièrement inconfortables.
Etes-vous surpris de voir l’équipe de France dans le dernier carré de l’Euro, compte tenu des fulgurances mais aussi des carences montrées ?
« Vous l’avez tous dit, à juste titre d’ailleurs, nous sommes passés deux fois par un trou de souris. En tout cas, on est heureux d’être là, d’être en vie, d’avoir une opportunité d’aller en finale qui plus est. Ce sera bien sûr un match ouvert où l’on aura toutes nos chances, c’est déjà très bien, même si nous sommes bien conscients de nos carences. Mais nous avons aussi des qualités, entre autres ce qu’ont montré les deux fins de matches : notre ténacité, notre abnégation. On n’a pas toutes les qualités, mais en tout cas, on ne lâche pas. On a des faiblesses structurelles, dans les passes notamment, qui nous pénalisent. On ne joue parfois pas très justes, et parfois on y arrive. On est très irréguliers, c’est effectivement un souci. Mais malgré tout, on est encore là. Donc on prend les choses de manière positive. »
L’horizon s’éclaircit-il pour l’équipe de France après la victoire de la Pologne sur la Slovénie ?
« Il faut jouer la Pologne comme une demi-finale de championnat d’Europe. Ils ne l’ont pas volé. C’est une autre opposition, avec beaucoup moins d’armes offensives que la Slovénie, mais avec une défense beaucoup plus solide. Ce n’est pas du tout le même type de match auquel il faut s’attendre. Il faut vraiment qu’on se prépare à leur agressivité défensive. Ils ne sont pas arrivés là par hasard ! Hier, cette équipe polonaise en première mi-temps m’inquiétait plus qu’autre chose…
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Photo : Vincent Collet (FIBA)