Deuxième partie de l’entretien avec Irène Ottenhof, qui est depuis cinq ans la Directrice de la Ligue féminine de Basket. Où l’on parle de salaires, de reconversion, de médiatisation, et bien sûr du vingtième anniversaire de la LFB.
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La Jeep Elite (ex-Pro A) est critiquée à cause de son turnover de joueurs. Au début de la Ligue Féminine, les effectifs étaient extrêmement stables alors qu’aujourd’hui il y a comme chez les garçons beaucoup de changements en cours de saison avec la possibilité pour les Françaises de passer d’un club à l’autre. C’est pour cela qu’en plus de Géraldine Robert à Lyon, on a retrouvé quelques semaines plus tard Joyce Cousseins-Smith à Villeneuve d’Ascq. L’intérêt individuel à court terme n’a-t-il pas pris le dessus sur l’intérêt collectif de lisibilité vis-à-vis du public extérieur ?
La réponse pour moi est non et pour plusieurs raisons. Sur le plan juridique, on n’a fait que moduler ce qui était déjà autorisé à l’époque. A savoir que l’on ne parle plus de remplacement médical. Sur le plan règlementaire, il n’y a pas une ouverture qui permet de faire tout et n’importe quoi. On ne peut représenter que deux clubs de Ligue Féminine par saison. Deuxième point qui nous protège un peu de ce qui se passe en Pro A : pour la quasi-totalité de nos joueuses étrangères, étant donné que le championnat LFB est un très beau championnat sur le plan sportif et solide financièrement, on a peu de turnovers. Même si elle a joué dans d’autres championnats, Kristen Mann a porté le maillot de beaucoup de clubs français. On n’est pas dans le cas de figure de la Pro A avec des joueuses américaines qui pourraient être catapultées ici pour trois mois.
A l’instant T, non, mais n’est-ce pas un risque à terme d’avoir une démultiplication des transferts ? On observe par exemple qu’auparavant tous les joueuses étrangères parlaient français et ce n’est plus le cas. Or, c’est une identité très forte de la Ligue Féminine d’avoir des joueuses très proches de leur public ?
Il y a toujours un risque qui, encore une fois, est contenu sur le plan réglementaire. Une joueuse ne peut donc représenter que deux clubs durant la même saison, les clubs sont limités à quatorze contrats pros par saison contre seize en Pro A. C’est un chiffre qui a été débattu avec les clubs. On a conscience du fait que la Ligue Féminine a une vraie identité que ce soit avec ses Françaises et ses étrangères. Il existe une fidélisation qui fait que les joueuses sont proches du public, c’est une marque de fabrique de la Ligue Féminine. On peut encore être prêt du terrain, discuter avec les joueuses après les matches. Quand bien même on va aller de plus en plus vers la professionnalisation, l’état d’esprit doit être conservé. Effectivement, il faut être vigilant.
La Ligue Féminine est passée à douze clubs à partir de la saison dernière et aussi à une formule de playoffs plus conventionnelle. Pourquoi ce changement ?
On avait dans l’idée avec Philippe Legname de mettre de la visibilité sur la formule de compétition. Avec le Challenge Round, la poule à quatre, même les gens issus de notre discipline avaient parfois du mal à bien comprendre. On avait la volonté d’harmoniser le haut niveau : Ligue Féminine, Ligue 2, Nationale 1, et de passer sur les playoffs à huit. Les clubs réclamaient quelque chose de compréhensible, étaient prêts, ce qui n’a pas toujours été le cas par le passé.
A cause des frais de déplacement ?
Non, du fait que les clubs de haut de tableau qui terminaient premiers de la saison régulière se disaient qu’ils n’étaient pas à l’abri d’avoir un accident contre le huitième. Quand on a mis ça en marche, le championnat LFB était très dense et presque tout le monde pouvait battre presque tout le monde. Je pense que l’on a bien expliqué que l’enjeu autour de ça, c’était de donner un éclairage, une compréhension à la presse sur ce que l’on voulait faire de notre championnat. A peu de choses près, désormais on joue le même basket que l’on soit en Pro A, en Pro B, en Ligue Féminine, en Ligue 2, en NF1.
« La Ligue Féminine a souhaité que le SNB aille dans les clubs, rencontre les joueuses, explique les enjeux »
Le Syndicat National des Basketteurs (SNB) a fait des interventions auprès des joueuses et la LFB porte t-elle sur cela un regard favorable ?
Bien plus que ça ! Sur cette olympiade 2012-2016, il y a une volonté politique d’aboutir sur des accords sectoriels. C’est-à-dire d’arriver à la rédaction d’un texte conventionnel qui permettrait d’enrichir la convention collective nationale du sport qui est le seul texte qui pilote le basket féminin professionnel. C’est reconnaître l’existence d’une pratique professionnelle du basket avec des cas spécifiques qui peuvent déroger à la convention collective, comme les minimas de salaires, les congés, la prévoyance, il y a sept ou huit domaines qui sont réglementés par rapport à ça. Cela fait cinq ans que je suis à la Ligue Féminine et depuis trois ou quatre ans, j’ai cette idée en tête que l’on puisse un jour structurer la pratique professionnelle. Il y a eu des velléités en 2006, en 2010, puis des travaux qui ont été initiés mais sans aboutir car pour avoir des accords sectoriels, il faut qu’un dialogue social s’instaure entre les employeurs, c’est-à-dire les clubs, et les employés, soit les joueuses et les coaches. Il faut que les syndicats qui représentent ces trois entités se mettent autour de la table et discutent. La Ligue Féminine a souhaité que le SNB aille dans les clubs, rencontre les joueuses, explique les enjeux. Il y a un travail de fond pour se faire connaître et bouger les mentalités des joueuses. L’une des raisons des échecs de 2006 et 2010, c’est que les joueuses n’étaient pas représentées sur le plan syndical et ne voyaient pas l’intérêt de porter des négociations. Aujourd’hui les joueuses sont prêtes. Il y a un collectif de dix ou douze joueuses de Ligue Féminine et de Ligue 2 qui est l’interlocuteur privilégié du SNB. J’ai assisté à une réunion et je ne peux pas dire qu’il y a pour l’instant un leader mais peut-être faudra-t-il ensuite une porte-parole. La première réunion avec tous les clubs a été initiée à Brest en marge du match de l’équipe de France, en présence du syndicat des coaches, de quelques joueuses, du SNB et c’est la Ligue Féminine qui l’a pilotée. Une réunion va avoir lieu le 27 mars entre les clubs. La Fédération sort de ces échanges et c’est très bien. On va juste les accompagner sur le plan logistique. Aujourd’hui tous les feux sont au vert. Un rétro-planning a été créé et validé au cours de la réunion de Brest et si tout se passe bien, on peut espérer une livraison du texte définitif à la fin de la saison 2019-20 pour que la règlementation fédérale puisse se mettre au niveau du texte conventionnel pour une application en 2020-21, c’est-à-dire à l’ouverture de la nouvelle olympiade. Nous, Ligue Féminine, on manage quelque chose dans lequel on n’intervient pas concrètement mais on fait ça en partenariat puisque le texte rédigé ne pourrait pas être en totalité à l’encontre de ce que proposent les règlements de la LFB. Si on arrive à faire ça, on sera le premier sport féminin à aboutir à un texte conventionnel. Ce n’est pas très sexy, ce n’est pas de la com, ce n’est pas l’Open mais c’est essentiel.
A propos des coaches, ils ont systématiquement des assistants. Ceux-ci gagnent-ils désormais leur vie avec le basket ? Ça n’existait pas il y a vingt ans ?
Absolument. Ils sont professionnels de la pratique. Pour la plupart ils entraînent aussi le centre de formation.
Y a-t-il des kinés dans les clubs ?
Partout. Il n’y a pas d’obligations réglementaires mais chaque club a son kiné et la plupart ont leur propre médecin. Certains travaillent avec des ostéos. Cet aspect-là c’est aussi très professionnalisé.
Katarina Tetemondova (Hainaut) lors de l’Open 2017.
« Même des gamines de 12-13 ans qui n’ont pas forcément de clubs de Ligue Féminine dans leur territoire, elles savent ce qu’est l’Open »
On peut dire sans forfanterie que la Ligue Féminine est en pointe aussi bien vis-à-vis des autres ligues féminines en France que des ligues de basket en Europe ?
Effectivement. Depuis sa création, c’est une ligue qui a remporté un nombre important de trophées. Le taux de représentativité de nos internationales qui jouent en France est toujours élevé même si certaines s’expatrient. Au début des années 2000, il y avait des championnats qui étaient très forts comme l’italien et l’espagnol et aujourd’hui ce sont des nations qui souffrent. Il n’y a plus cette homogénéité qu’il y avait. Le championnat russe –pour la Turquie c’est un peu moins vrai-, à part le très haut de gamme, c’est un peu moins dense. C’est pour ça que les joueuses aiment jouer dans la Ligue Féminine, il n’y a pas un match facile.
Elles sont aussi sûres d’être payées.
Absolument. Quand elles sont blessées, elles touchent leurs salaires, des indemnités. Ce n’est pas « merci, au-revoir ». Le droit français protège.
Ce qu’il manque, c’est ce que l’on retrouve dans pas mal de pays, un ou deux clubs avec des budgets élevés et où c’est du mécénat ?
Oui, ils sont très au-dessus. C’est du mécénat et au niveau des charges salariales, ce n’est pas le même système. En France, on est fortement taxé.
L’Open de début de saison est un événement important pour donner un sentiment d’appartenance pour les joueuses à la Ligue Féminine, pour qu’elles prennent bien conscience que si elles sont adversaires sur le terrain, elles défendent une cause commune ?
Il y a d’abord les valeurs humaines, elles se retrouvent toutes à cette occasion sur le même lieu et même s’il y a un enjeu sportif puisque c’est l’ouverture du championnat, c’est une occasion unique de se voir puisque le reste de la saison, elles sont en avion et dans les trains. Cet aspect contribue à créer du lien, de l’identité entre toutes les joueuses. Deuxième point : c’est la 14e édition et l’Open est devenu presque une marque. On a été les premiers à innover, à créer cette compétition. Même des gamines de 12-13 ans qui n’ont pas forcément de clubs de Ligue Féminine dans leur territoire, elles savent ce qu’est l’Open. De plus ce concept d’Open a été décliné aux échelons régionaux et départementaux. L’Open, c’est l’ouverture du championnat. C’est un moment attendu en tant que sportives professionnelles car elles ont envie de reprendre la saison. L’été a été long, tu vas retrouver tes potes. Et puis c’est un univers particulier, c’est un événement parisien qui transporte pas mal de choses.
Là aussi, il y a un apport important de la fédération qui est le principal partenaire ?
L’Open, c’est plus de 200 000€. Ce n’est pas un événement qui fait rentrer de l’argent dans les caisses, ça coûte à la fédération.
« S’il y a un club à Paris, j’ai envie de dire qu’il faut que ça soit encore au-delà de ce qui existe dans les territoires, en termes d’infrastructures, de remplissage, d’ambiance et donc de spectacle sportif »
A propos de Paris, un club dans la capitale ne donnerait-il pas une dimension supérieure à la Ligue Féminine ? Cela générerait-il une médiatisation supérieure ?
Ce qui est sûr c’est que ça ne serait pas un handicap. Ce que je constate c’est qu’entre la Ligue Féminine et la Ligue 2, il y a 24 clubs qui représentent le haut niveau et il y a un maillage territorial intéressant, qui est cohérent, si l’on compare par exemple avec le rugby. On n’est pas sectorisé sur une seule région. Un club qui réside dans une capitale ça serait une plus-value. Il en faut un mais à certaines conditions, avec une capacité d’accueil, une aréna digne de ce nom. A Paris, il faut réussir à remplir, exister à côté des garçons, des événements culturels. Ça peut contribuer au développement de la ligue mais pas à n’importe quel prix. S’il y a un club à Paris, j’ai envie de dire qu’il faut que ça soit encore au-delà de ce qui existe dans les territoires, en termes d’infrastructures, de remplissage, d’ambiance et donc de spectacle sportif.
On vit un peu ce phénomène dans la deuxième ville de France, à Lyon. L’implication de Tony Parker est-elle encline à donner un coup de projecteur intense sur la Ligue Féminine ? A l’Open, les médias allaient beaucoup vers la présidente de l’Lyon ASVEL Basket Féminin, Marie-Sophie Obama ?
La réponse est oui quant à l’implication de Tony Parker dans le basket féminin. L’ASVEL féminin c’est la première structure qui fonctionne en termes d’identité avec un club de Pro A. S’adosser à une identité masculine, c’est précisément ce que quoi je crois. Il y a aussi le fait que ce soit une femme qui soit présidente. Une femme, jeune, et une ancienne joueuse professionnelle, qui incarne la pratique. Quand vous avez 35-40 ans, dans votre vie professionnelle, vous êtes à l’apogée, vous avez l’énergie et c’est un peu le visage du basket féminin que j’ai envie de montrer. Pas pour faire du racisme anti vieux ! Mais si elle reste à son poste, elle a plusieurs décennies pour faire avancer les choses. C’est aussi pour ça que les médias s’intéressent à l’ASVEL féminin. Mais évidemment avant toute chose, c’est pour Tony Parker et il faut s’appuyer là-dessus. Pas de place pour les jalousies.
Les affluences importantes enregistrées à Gerland démontrent aussi le dynamisme du club et de la Ligue. Quel pays en Europe peut se prévaloir de tels chiffres ?
J’ai le souvenir de la finale de l’Eurocup à Charleroi entre Braine et Villeneuve d’Ascq, il y a trois ans, près de 7 000 spectateurs et c’était très pro dans l’organisation. Mais effectivement c’est le signe d’une bonne santé de la ligue féminine et on accompagne ces initiatives sur le plan structurel et parfois humain, et aussi d’une bonne santé des clubs. En l’occurrence ce n’est pas un one shot, c’est la troisième saison qu’ils organisent cette opération. Et là, c’est à trois semaines d’intervalle. La première fois c’était pour la venue de Mondeville à Gerland et avec tout le respect que je dois à ce club, est moins « médiatisable » que Basket Landes avec Céline Dumerc et au classement c’est moins relevé. Moi, le chiffre sur lequel j’ai envie de communiquer, c’est sur le fait qu’il y a eu presque 10 000 spectateurs pour deux matches de LFB. Ils ont fait 5 200 spectateurs donc un peu moins que les années passées mais aussi parce qu’il y a plus de payants. Chapeau bas ! Les collectivités adorent aussi communiquer là-dessus. Je rappelle que le match a eu lieu à Gerland à Lyon et donc il y a des enjeux politiques.
Céline Dumerc
« La PQR fait en local un travail exceptionnel. Ce sont les premiers relayeurs d’informations et ils font ça avec passion et détermination et c’est ce qui donne cet éclairage en local aux clubs.
Faut-il craindre à l’avenir que les meilleures joueuses françaises aillent de plus en plus à l’étranger dans des clubs plus rémunérateurs ?
On ne peut pas affirmer ce que va être l’avenir, en revanche on peut s’appuyer sur ce qui existe aujourd’hui et sur la direction dans laquelle on va. En dehors des toutes meilleures joueuses, on peut prendre l’exemple de Sandrine Gruda quand elle est partie en Russie, qui vont crever l’écran très rapidement et attirer l’œil de clubs russes ou turques avec lesquels on ne peut pas rivaliser en France en termes de salaires, tant que l’on aura une ligue forte avec de bons salaires, avec des clubs structurés qui payent en temps et en heure, où les joueuses sont protégées, une ligue attractive sur le plan sportif, on peut espérer être protégé d’une fuite éventuelle de nos internationales. Ce n’est pas le cas par exemple en Espagne. Les internationales espagnoles ne jouent pratiquement pas dans le championnat national. Mais on peut être victimes de la rançon de la gloire, d’avoir des joueuses tellement fortes qu’elles vont tenter leur chance à l’étranger.
Le pourcentage de joueuses françaises de Ligue Féminine ayant eu une médaille en équipe de France jeune est extrêmement élevé, ce qui prouve que le niveau général est lui-même excellent ?
C’est vrai. C’est un très bon critère. C’est un signe de bonne santé.
Etes-vous satisfaite de la médiatisation de la Ligue Féminine, aussi bien au niveau des quotidiens régionaux, que sur SFR Sport 2 et sur LFBTV ?
Je suis satisfaite mais je suis Madame Plus, je veux toujours plus. C’est normal, c’est mon travail. Cette médiatisation est en augmentation. Quand je suis arrivée à la Ligue Féminine nous avions moins de matches diffusés avec le diffuseur de l’époque. Aujourd’hui, contractuellement, doivent être diffusés toute la finale même si elle va en cinq matches, la Coupe de France, le match des Champions, et un certain nombre de matches de saison régulière. Sur l’aspect qualitatif, il y a des relations très cordiales qui existent entre la Ligue Féminine et SFR avec notamment un travail de proximité avec David Cozette. SFR n’avait pas ainsi spécialement envie ou besoin de prendre le match Lyon-Basket Landes sauf que quand vous dites que c’est à Gerland, que le club sait remplir, que ça va être une belle fête, que sportivement ça peut se tenir –la preuve, contre toute attente, Lyon a gagné… Et puis il y a des contenus de basket féminin qui sont de plus en plus souvent intégrés à l’émission Buzzer, ce qui n’était pas le cas à sa création. On a vu par exemple une émission où l’invitée était Céline Dumerc –on a dévoilé à cette occasion qu’elle avait été plébiscitée par le public- avec un sujet sur l’arbitrage féminin, et il y en avait un autre sur Marine Johannès. Oui, je suis satisfaite du travail qui est menée, qui porte ses fruits sur l’aspect média nationaux. Par ailleurs, la PQR fait en local un travail exceptionnel. Ce sont les premiers relayeurs d’informations et ils font ça avec passion et détermination et c’est ce qui donne cet éclairage en local aux clubs. Le troisième point, c’est le virage que l’on prend avec LFBTV où l’on a diminué le nombre de diffusions produites par la Ligue Féminine. Les clubs se sont équipés du système de captation automatisé Kmotion. Cela fait qu’aujourd’hui on peut voir sur le web tous les matches de Ligue Féminine de chaque journée de championnat, sauf quand ils sont sur SFR. Ça c’est un bond en avant exceptionnel.
Kmotion c’est pour un public captif ?
Il faut aimer, il n’y a pas de commentaires, c’est un plan fixe. Kmotion, ça ne permet pas que de regarder un match en live. Ça permet de faire des highlights, de sortir les plus belles actions, de communiquer sur les réseaux. C’est une banque d’images. Ça demande d’être staffé en termes de ressources humaines pour faire des montages, de la com. Kmotion va nous permettre d’augmenter encore notre niveau de visibilité. On va accompagner les clubs pour structurer tout ça.
Y a-t-il eu un lien direct entre la médaille d’argent aux Jeux de Londres et la médiatisation de la Ligue Féminine ?
C’est une évidence. Ça a coïncidé avec le moment où j’arrive à la Ligue Féminine avec Philippe (NDLR : Legname, le président) puisque lui est arrivé en décembre 2012 et moi en janvier 2013. On a assisté à un véritable raz-de-marée qui s’est d’abord manifesté à l’Open qui a suivi puisque ça a joué à guichets fermés et celui d’après c’était la même chose avec une Céline Dumerc portée aux nues. C’était d’ailleurs compliqué à gérer. Vous ne pouvez pas rivaliser entre un titre de champion d’Europe (NDLR : en 2009 à Riga) et un titre de vice-championne olympique. Les JO, c’est ce que tout le monde suit sur la planète. Oui, on a bénéficié de ça et encore maintenant même si on a pris d’autres virages. Au-delà des résultats sportifs et de la popularité de Céline, il y a eu le phénomène des Braqueuses et c’est tout un groupe qui a réussi à vivre autour d’un nom, d’une marque, d’un style de jeu, presque d’une philosophie. Vous surfez durant des années.
L’avantage c’est que la majorité de ces Braqueuses jouaient en Ligue Féminine, à commencer par Céline Dumerc qui jouait à Bourges ? On a reproché à la fédération de ne pas avoir surfé après la médaille d’argent aux JO de Sydney en 2000 mais à l’époque une large majorité d’internationaux évoluaient à l’étranger ?
Il n’y avait que Sandrine Gruda et Isabelle Yacoubou qui jouaient en Russie. Et puis, 2000-2012, c’est douze ans d’écart qui ont vu l’apogée de la communication, des réseaux sociaux, de la diffusion de l’information à tout va, de toutes les cibles, de tous les âges. Ça a été bien piloté ici (NDLR : à la fédération) mais vous ne pouvez pas rivaliser. 2000, c’est l’arrivée d’Internet. On commençait à s’envoyer des mails, on avait un forfait de vingt heures et on se dépêchait de raccrocher pour ne pas le dépasser … Ce n’était pas la même époque !
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La Jeep Elite (ex-Pro A) est critiquée à cause de son turnover de joueurs. Au début de la Ligue Féminine, les effectifs étaient extrêmement stables alors qu’aujourd’hui il y a comme chez les garçons beaucoup de changements en cours de saison avec la possibilité pour les Françaises de passer d’un club à l’autre. C’est pour cela qu’en plus de Géraldine Robert à Lyon, on a retrouvé après quelques semaines plus tard Joyce Cousseins-Smith à Villeneuve d’Ascq. L’intérêt individuel à court terme n’a-t-il pas pris le dessus sur l’intérêt collectif de lisibilité vis-à-vis du public extérieur ?
La réponse pour moi est non et pour plusieurs raisons. Sur le plan juridique, on n’a fait que moduler ce qui était déjà autorisé à l’époque. A savoir que l’on ne parle plus de remplacement médical. Sur le plan règlementaire, il n’y a pas une ouverture qui permet de faire tout et n’importe quoi. On ne peut représenter que deux clubs de Ligue Féminine par saison. Deuxième point qui nous protège un peu de ce qui se passe en Pro A : pour la quasi-totalité de nos joueuses étrangères, étant donné que le championnat LFB est un très beau championnat sur le plan sportif et solide financièrement, on a peu de turnovers. Même si elle a joué dans d’autres championnats, Kristen Mann a porté le maillot de beaucoup de clubs français. On n’est pas dans le cas de figure de la Pro A avec des joueuses américaines qui pourraient être catapultées ici pour trois mois.
A l’instant T, non, mais n’est-ce pas un risque à terme d’avoir une démultiplication des transferts ? On observe par exemple qu’auparavant tous les joueuses étrangères parlaient français et ce n’est plus le cas. Or, c’est une identité très forte de la Ligue Féminine d’avoir des joueuses très proches de leur public ?
Il y a toujours un risque qui, encore une fois, est contenu sur le plan réglementaire. Une joueuse ne peut donc représenter que deux clubs durant la même saison, les clubs sont limités à quatorze contrats pros par saison contre seize en Pro A. C’est un chiffre qui a été débattu avec les clubs. On a conscience du fait que la Ligue Féminine a une vraie identité que ce soit avec ses Françaises et ses étrangères. Il existe une fidélisation qui fait que les joueuses sont proches du public, c’est une marque de fabrique de la Ligue Féminine. On peut encore être prêt du terrain, discuter avec les joueuses après les matches. Quand bien même on va aller de plus en plus vers la professionnalisation, l’état d’esprit doit être conservé. Effectivement, il faut être vigilant.
La Ligue Féminine est passée à douze clubs à partir de la saison dernière et aussi à une formule de playoffs plus conventionnel. Pourquoi ce changement ?
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Photo: Justin Burgevin