Première équipe à se qualifier pour les playoffs d’Euroleague dès sa première saison dans la compétition et premier représentant français dans le top 8 depuis l’ASVEL en 2001, l’AS Monaco défie l’Olympiakos en quarts de finale dès mercredi soir (20h). Un affrontement en trois manches gagnantes et à l’avantage du terrain pour les Grecs, qui disposent du meilleur bilan de la saison à domicile, mais à la dynamique du côté des hommes de Sasa Obradovic.
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Jusqu’où s’arrêtera la Roca Team ? Imaginez plutôt, l’AS Monaco figure parmi les huit derniers représentants de la plus prestigieuse compétition européenne et vient de renouveler son bail pour la saison prochaine. Qui aurait prédit une telle destinée il y a exactement 10 ans, en 2012, quand le club végétait en quatrième division ? Le club de la Principauté a ensuite enchaîné trois montées en quatre ans avant de s’installer en un temps record, sous la tutelle de l’homme d’affaires ukrainien Sergey Dyadechko, comme une puissance du championnat de France. Et même européenne, car l’ASM est montée deux fois sur le podium de la BCL (3e en 2017, finaliste en 2018) et s’est ouvert les portes de l’Euroleague à la faveur de son titre d’Eurocup la saison dernière. Puis elle a intégré le top 8 de la C1, avec le concours d’un changement de coach – et de président – en cours de saison, devenant l’une des équipes les plus redoutées d’Europe, et remportant 13 victoires sur les 16 derniers matches. Personne n’a fait mieux.
Les obstacles furent pourtant nombreux. En présaison, il a fallu au club monégasque obtenir une dérogation pour jouer dans sa propre salle Gaston-Médecin, pas aux normes requises par la compétition, en réalisant des travaux express l’été dernier (la capacité de la salle passant de 2 840 places à 4 090 places). Puis construire un collectif de toute pièce en ne conservant que deux joueurs du titre d’Eurocup. Mais aussi remercier son coach historique, Zvezdan Mitrovic, avec qui la Roca Team a grimpé les échelons de la Pro B jusqu’aux sommets européens, alors qu’elle figurait au 14e rang de l’Euroleague après un tiers de la compétition (5 victoires, 9 défaites). Et enfin, quand elle avait été performante jusqu’alors face aux clubs russes (quatre succès sur cinq possibles), se remobiliser malgré l’annulation de ses victoires, forçant l’équipe de Sasa Obradovic à cravacher jusqu’à l’avant-dernière journée pour composter le précieux billet. Jamais dans l’histoire une équipe ne s’était jusqu’alors qualifiée pour les playoffs dès sa première saison en Euroleague.
L’Olympiakos, une forteresse à faire tomber
L’acquisition de cette septième place avec un bilan final de 15-13 – sans les résultats face aux équipes russes – qualifie non seulement Monaco pour la prochaine saison de C1 mais en fait également un concurrent légitime au Final Four. Le défi sera immense face à l’Olympiakos, deuxième de la saison régulière (19-9), qui dispose de l’avantage du terrain pour ce quart de finale en cinq manches potentielles, dont trois à Athènes, alors que l’équipe grecque n’a perdu qu’une seule fois dans sa salle lors de cette saison européenne, contre l’Etoile Rouge de Belgrade. Soit le meilleur bilan de la compétition à domicile (13-1).
L’info en +
Depuis la mise en place de la formule actuelle de l’Euroleague en 2016, les équipes avec le meilleur bilan à domicile ont obtenu des résultats mitigés en playoffs. Invaincue à domicile en saison régulière en 2018-2019, Fenerbahçe a perdu face au Zalgiris Kaunas lors du 2e match de playoffs avant de se qualifier pour le Final Four. L’an dernier, le Bayern Munich, meilleur bilan de la ligue (13-4), a remporté ses deux matches à domicile mais a perdu sa série.
« D’un côté, Monaco est pour la première fois en playoffs ; de l’autre, l’Olympiakos fait preuve de stabilité, de compétitivité et de régularité dans les résultats. C’est une équipe qui n’a connu qu’une petite crise avec quatre défaites consécutives. Bien sûr, Monaco a gagné de 20 points en saison régulière … mais maintenant, ce sont les playoffs. Ces matches donnent plus de temps aux entraîneurs et aux joueurs pour travailler sur la tactique, l’équipe la plus solide a plus de chances, estimait cette semaine Dimitris Itoudis, sélectionneur de l’équipe nationale grecque et coach du CSKA Moscou… qui a misé sur l’Olympiakos. La plus grande arme de cette équipe est son homogénéité et sa discipline. Le jeu monégasque tourne lui davantage autour de Mike James, et il est entouré de bons joueurs aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur, ils arrivent à jouer ensemble. Mais Monaco aura du mal car l’Olympiakos a la volonté, la capacité et l’expérience pour aller au Final Four. »
Parmi les principales menaces de l’équipe grecque : Sasha Vezenkov. À 26 ans et pour sa septième saison en Euroleague, l’international bulgare réalise l’exercice le plus abouti de sa carrière (13,8 points, 5,6 rebonds en 30 minutes de moyenne) et est, avec Nikola Mirotic (Barcelone) et Mike James (Monaco), l’un des principaux candidats au titre de MVP de la saison. On retrouve également deux Frenchies : le vice-champion olympique Moustapha Fall, pivot titulaire et principale menace intérieure (8,7 points, 5,1 rebonds), et l’ancien Villeurbannais Livio Jean-Charles, cantonné à un rôle de rotation cette saison (4,0 points, 2,1 rebonds). L’autre force des rouges et blanc réside dans sa traction arrière avec l’expérimenté Kostas Sloukas, le scoreur et facteur X Tyler Dorsey et le défenseur Thomas Walkup. Les grecs Kostas Papanikolaou et Georgios Printezis n’en sont pas non plus à leur coup d’essai.
« Nous sommes tous impatients et affamés, affirmait le meneur Kostas Sloukas aux médias grecs cette semaine, lui qui a déjà joué 32 matches de playoffs d’Euroleague en carrière quand les joueurs de Monaco n’en comptent que 20 au total. Nous sommes enfin de retour en playoffs après plusieurs saisons sans les jouer, et ce en développant un très bon basket. Nous avons réussi à obtenir l’avantage du terrain et nous ne devons pas le jeter à l’eau. Il n’y a pas de détente ou de stress, mais nous ressentons la pression parce que l’Olympiakos en tant qu’organisation ne vit et ne survit que grâce aux titres. Il ne faut pas oublier les sacrifices qui ont été faits par la direction, les joueurs et les entraîneurs pour que nous soyons ici. Monaco ne sera pas anxieuse, c’est une excellente équipe. Mais, sans vouloir sous-estimer cette équipe, si nous sommes concentrés et que nous nous battons avec nos fans à nos côtés, il sera difficile de perdre mercredi. »
Le coach grec Georgios Bartzokas prévenait malgré tout ce weekend de l’implication de ses joueurs lors du dernier match de championnat local contre Larissa (93-84). En cause : son équipe avait déjà l’esprit aux quarts de finale d’Euroleague. « Quinze minutes de bon basket ont suffi pour gagner contre Larissa mais nous nous sommes relâchés de manière injustifiée après avoir compté 21 points d’avance. J’ai l’impression que mes joueurs pensent qu’ils doivent économiser de l’énergie dans le championnat grec pour l’Euroleague, je dois les pousser et les convaincre que ces matches ne sont pas procéduriaux et que le profit pour l’équipe est grand si on joue avec intensité. Contre Monaco, ce sera une bataille physique mais aussi mentale », a-t-il averti.
L’avis de Yannis Psarakis,
journaliste grec pour BN Sports
« Pour moi, l’Olympiakos est favori. En Euroleague, l’avantage du terrain est toujours important. « Oly » est une forteresse à domicile, l’équipe à une énorme base de fans et une atmosphère chaude… et surtout le meilleur bilan à domicile cette saison. C’est aussi une équipe beaucoup plus expérimentée que Monaco : les principaux joueurs ont déjà connu les playoffs et savent gérer l’équipe lorsque les choses tournent mal pendant ou après les matches. Printezis et Sloukas comptent à eux seuls plus de matches de playoffs (respectivement 34 et 32) que l’ensemble des joueurs monégasques (20 au total pour quatre joueurs).
Leurs points forts sont l’expérience et l’alchimie au sein de l’équipe. Printezis, Papanikolaou, Sloukas se connaissent mieux que leurs femmes ! (Rires) Ils jouent ensemble depuis de nombreuses années. L’ajout de joueurs comme Vezenkov – quatrième année dans l’équipe -, Hassan Martin – troisième année -, Shaquielle McKissic – troisième année – donne l’impression que les joueurs ont un lien fort entre eux. Son point faible, c’est que l’équipe ne peut parfois pas égaler la puissance et la dimension athlétique des autres équipes, cela peut être le cas contre Monaco qui a de véritables athlètes comme Hall, Bacon, Diallo. Si Monaco parvient à jouer fort, à avoir la même énergie pendant 40 minutes, elle a de bonnes chances de gagner au moins un match, notamment à domicile.
Pour l’Olympiakos, le joueur clé sera Tyler Dorsey. C’est le dernier venu dans l’effectif, c’est le meilleur tireur extérieur, c’est lui qui peut faire la différence offensivement, notamment à 3-points. S’il marque plus de 10 points de moyenne sur la série, je pense que « Oly » se qualifiera. Pour Monaco, le facteur X pourrait être Dwayne Bacon. Mike James est le leader et le joueur le plus expérimenté de la Roca Team mais la défense grecque l’attendra. Bacon peut élever le jeu monégasque à un autre niveau et s’il réussit bien offensivement, il peut faire basculer la série. »
Bien que l’Olympiakos fasse figure de favori, l’AS Monaco, meilleure attaque de la compétition, a de sérieuses armes pour concurrencer le triple vainqueur de la C1 (1997, 2012, 2013) et deuxième meilleure défense de la saison régulière, comme elle l’avait fait à domicile le 23 mars dernier (victoire 92-72 avec 25 points de Mike James). Il faut souligner l’excellence monégasque en termes de recrutement puisque le front office a su construire un véritable collectif en ne conservant quasiment rien de l’armature qui a permis au club de remporter l’Eurocup la saison dernière. Et aussi la remise en cause à effets radicaux en remplaçant l’entraîneur Zvezdan Mitrovic par Sasa Obradovic très tôt dans la saison. Avec succès.
De Mike James à Alpha Diallo, du talent à tous les étages
Sous la houlette du coach serbe, la Roca Team est devenue une équipe plus hiérarchisée. Son leader, Mike James, a réalisé une deuxième partie de saison fantastique et avec beaucoup plus de régularité qu’auparavant (16,2 points, 5,8 passes). Arrivé fin octobre en tant que dernière recrue du club, Dwayne Bacon a éclaboussé l’Europe de son talent offensif (13,7 points à 41,3 % à 3-points en 25 minutes) comme les mains de Donatas Motiejunas ont rappelé qu’à 31 ans passés, le pivot lituanien avait encore de très belles années devant lui (10,4 points, 4,8 rebonds en 19 minutes).
Notons également les deux superbes pioches de l’intersaison, deux Américains de 24 ans : Alpha Diallo, incontestablement l’une des plus belles révélations européennes de la saison puisque l’ailier n’était pas attendu à un tel niveau (9,7 points, 4,8 rebonds en 24 minutes) après une seule saison en Europe, à Lavrio (Grèce) ; et Donta Hall, intérieur super-athlétique – qui n’est pas arrivé à se faire une place en NBA après deux saisons menacées par la crise sanitaire -, capable de récupérer des alley-oops en très haute altitude et de changer le cours d’une rencontre grâce à son activité hors du commun (8,2 points, 5,2 rebonds en 18 minutes).
Ajoutez à cela l’expérience de l’international tricolore Léo Westermann et celle de l’intérieur Will Thomas, l’énergie de Paris Lee et de Yakuba Ouattara dans la rotation, les qualités offensives de Danilo Andjusic, et la profondeur de banc intérieure avec Brock Motum, Jerry Boutsiele et Ibrahima Faye Fall et vous obtenez une équipe ultra compétitive, comme rarement ne l’a été une équipe du championnat de France sur la scène européenne. Si Rob Gray n’a pas été utilisé en Euroleague depuis décembre dernier, la Roca Team arrive en plus au complet pour l’échéance la plus importante de sa saison européenne. Et sans pression.
Final Four ou non, priorité donnée au championnat
L’équipe monégasque n’aura pas de stress à ce stade de la compétition car l’essentiel, le renouvellement de l’invitation européenne au gré de la présence du club en playoffs, est déjà acquis. Les dirigeants de la Roca Team ont déjà prolongé leur coach jusqu’à l’été 2023 et peuvent tranquillement commencer à préparer la saison prochaine… tout en espérant décrocher le premier titre de champion de France de son histoire en juin prochain. « On va disputer ces playoffs d’Euroleague sans pression. Maintenant, on est des compétiteurs. On sait qu’on a nos chances pour faire quelque chose et jouer les trouble-fêtes sur ces playoffs, car on est l’une des meilleures équipes sur la phase retour », a confié l’international français Jerry Boutsiele à Ouest-France avant d’affronter l’Olympiakos.
Quelle que soit l’issue de cette série, sans l’avantage du terrain et à guichets fermés à Athènes pour les deux premiers matches, mercredi (20h) et vendredi (18h), cette « épopée » européenne aura au moins eu l’avantage de remettre la France sur la carte du basket européen. Car 20 ans d’absence en playoffs de la C1 ont été balayés et l’avenir s’annonce d’autant plus radieux. Le basket français aura encore a minima deux représentants en Euroleague la saison prochaine, avec l’ASVEL, titulaire d’une licence permanente. Et l’absence potentielle des équipes russes dans un avenir à court terme pourrait ouvrir le marché et redistribuer les cartes. Alors qu’on fêtera en 2023 les 30 ans du sacre de Limoges en coupe d’Europe des clubs champions, l’avenir du basket français n’a jamais semblé aussi réjouissant.
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Jusqu’où s’arrêtera la Roca Team ? Imaginez plutôt, l’AS Monaco figure parmi les huit derniers représentants de la plus prestigieuse compétition européenne et vient de renouveler son bail pour la saison prochaine. Qui aurait prédit une telle destinée il y a exactement 10 ans, en 2012, quand le club végétait en quatrième division ? Le club de la Principauté a ensuite enchaîné trois montées en quatre ans avant de s’installer en un temps record, sous la tutelle de l’homme d’affaires ukrainien Sergey Dyadechko, comme une puissance du championnat de France. Et même européenne, car l’ASM est montée deux fois sur le podium de la BCL (3e en 2017, finaliste en 2018) et s’est ouvert les portes de l’Euroleague à la faveur de son titre d’Eurocup la saison dernière. Puis elle a intégré le top 8 de la C1, avec le concours d’un changement de coach – et de président – en cours de saison, devenant l’une des équipes les plus redoutées d’Europe, et remportant 13 victoires sur les 16 derniers matches. Personne n’a fait mieux.
Les obstacles furent pourtant nombreux. En présaison, il a fallu au club monégasque obtenir une dérogation pour jouer dans sa propre salle Gaston-Médecin, pas aux normes requises par la compétition, en réalisant des travaux express l’été dernier (la capacité de la salle passant de 2 840 places à 4 090 places). Puis construire un collectif de toute pièce en ne conservant que deux joueurs du titre d’Eurocup. Mais aussi remercier son coach historique, Zvezdan Mitrovic, avec qui la Roca Team a grimpé les échelons de la Pro B jusqu’aux sommets européens, alors qu’elle figurait au 14e rang de l’Euroleague après un tiers de la compétition (5 victoires, 9 défaites). Et enfin, quand elle avait été performante jusqu’alors face aux clubs russes (quatre succès sur cinq possibles), se remobiliser malgré l’annulation de ses victoires, forçant l’équipe de Sasa Obradovic à cravacher jusqu’à l’avant-dernière journée pour composter le précieux billet. Jamais dans l’histoire une équipe ne s’était jusqu’alors qualifiée pour les playoffs dès sa première saison en Euroleague…
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Photo : Monaco, Mike James au centre, contre l’Olympiakos (Euroleague)