Lors d’une conférence de presse ce matin, le président de la FFBB, Jean-Pierre Siutat, a balayé tous les sujets d’actualité : conflit FIBA-Euroleague, fenêtres de qualification pour la Coupe du Monde 2019, disponibilité des joueurs d’Euroleague, 3×3, jeunes français recrutés par les universités américaines, JO de 2020 et de 2024.
Voici le copieux verbatim de son intervention avec les questions/réponses qui ont suivi avec une punch line qui est déjà sur les réseaux sociaux internationaux : « Je n’ai absolument aucune confiance en Jordi Bertomeu ». Car, oui, c’est parfois décapant.
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« On attaque une nouvelle olympiade, on a des ambitions. Il y a une excellente nouvelle : l’organisation des Jeux Olympiques en 2024 à Paris. J’ai eu le plaisir de faire partie de la délégation à Lima. J’ai passé beaucoup de temps cet été à discuter de plein de choses dont on va parler tous ensemble.
La première chose, c’est le nombre de licenciés. L’équipe est en place depuis 2010, on a fait du boulot. C’est le travail des clubs, de notre fédération, c’est l’exposition que peut avoir le basket, c’est le travail de la Ligue Nationale de Basket, que j’associe dans cette démarche, de la Ligue Féminine. Tout ce que l’on a mis en place fait que l’on a un bilan de 661 025 licenciés. On est la quatrième fédération en France et encore le premier sport collectif féminin même si le foot nous rattrape à grands pas avec une exposition qui, hélas, n’est pas la même pour les autres sports collectifs. J’associe le hand, le volley et le basket là-dedans.
Ce nombre de licenciés nous a permis de doubler le budget. Il était en 2010 de 18M€, on est à 36 (NDLR : 28,5 en 2015). Ça fait trois ans qu’on n’augmente pas les tarifs fédéraux car on sait que nos clubs souffrent à cause des diminutions d’aides publiques, etc. On a organisé des événements, l’Euro féminin en 2013, le masculin en 2015. On a organisé le TQO féminin qui a été déficitaire mais que l’on a pu se payer car on a fait un excellent Euro 2015. On a beaucoup travaillé avec la Ligue Nationale sur les droits de télévision, ça a été une bonne réussite, sur le plan du marketing en triplant son chiffre d’affaires. Je pense que la fédération est en très bon état, que ce soit sur le nombre de licenciés et le budget. En ce qui concerne le budget, l’Etat nous aide comme toutes les fédérations. Premièrement, avec du cash. Nous touchons 2,3M€. D’autres sports comme le handball sont à 3,5M€ depuis des années. Cela représente 7-8% par rapport au budget de la fédération.
Sur le plan du palmarès, on livre une copie qui n’est pas si mal que ça. On est troisième sur le plan mondial si on fait le ranking complet, c’est-à-dire si on prend les résultats des équipes de France masculine, féminine et de jeunes. Il ne faut pas le banaliser. J’ai discuté cet été avec des dirigeants de fédération qui disent qu’il y a 10, 15, 20 ans, la France était la risée au niveau des équipes de France de jeunes sur les championnats d’Europe. Aujourd’hui, c’est presque normal que l’on fasse une médaille et en fait… ce n’est pas normal. Ça demande du travail. Je veux saluer la Direction Technique. Même si dans le passé la formation française était une Bérézina, nous avons fait en 2017 le meilleur bilan au niveau des équipes de France avec 8 médailles dont 3 en or. C’est globalement le meilleur palmarès depuis 2009. Les séniors filles ont été médailles d’argent au championnat d’Europe. Les A’ ont gagné l’or aux Jeux de la Francophonie. Les U20 féminins ont été quatrièmes au championnat d’Europe. Nous aurions pu être champions d’Europe si on avait souhaité aligner notre équipe au complet. C’est un choix de notre fédération de ne pas avoir fait appel à certaines joueuses ; je pense en particulier à Alexia (Chartereau), qui aurait pu jouer en U18 et en U20. Les U18 féminines ont été médailles de bronze. Les U16 ont été championnes d’Europe. On avait souhaité organiser ce championnat d’Europe à Bourges pour qu’enfin une équipe de jeune puisse gagner sur le territoire français. Dans ces deux équipes nous avons des pépites que l’on risque de retrouver ensuite en équipe de France, en 2024. On parlera ensuite de l’échec des garçons en séniors mais je rappelle que les U20 ont été médailles de bronze avec énormément d’absences. Les U18 ont été sixièmes au championnat d’Europe mais là aussi avec énormément d’absences. Je rappelle que quelques mois auparavant, en décembre, nous avons été champions d’Europe. Et en U16 nous avons aussi été champions d’Europe. Je vais compléter avec le 3×3 qui est une discipline olympique. On a eu une médaille de bronze avec les séniors masculins à la Coupe du Monde à Nantes, qui a été un très bel événement. Les féminines ont été quatrièmes au championnat d’Europe. Et les U18 masculins ont obtenu une médaille de bronze en Europe.
« J’ai posé la question aux sept autres présidents qui ont été éliminés en huitièmes de finale. Personne ne remettait en cause son staff »
Vous connaissez tous le bilan de l’Euro masculin. Trois victoires, trois défaites et on a été éliminés en huitièmes de finale. Il ne faut pas se le cacher, c’est une contre-performance. On n’est globalement pas satisfaits de ça et on va très vite passer à autre chose.
On est loin de ce que l’on a connu par le passé. La formule du championnat a fait suite à une discussion que l’on a eu avec Tony (Parker), Boris (Diaw) et Kamil Novak (secrétaire-général de FIBA Europe) afin d’éviter une deuxième phase où les équipes calculaient les classements pour avoir le quart-de-finale le plus favorable. On perd un huitième, on n’existe plus. Autrefois, c’était en quart et si on le perdait on avait encore la possibilité de finir à la 5e place. On faisait partie de ceux qui, je pense, devaient passer en quart-de-finale. Sans chercher des excuses, on avait deux absents de marque (Nicolas) Batum et (Rudy) Gobert. Ils ont leurs raisons. On a eu des blessures qui ont provoqué l’abandon de joueurs. Je pense à Rodrigue Beaubois, qui a été le premier, à Fabien Causeur, qui n’a même pas pu démarrer, à Moustapha Fall et à Timothé Luwawu. Ce sont des joueurs qui avaient été vus, hyper motivés par l’équipe de France. Peut-être pas les quatre, mais ça aurait donné un profil quelque peu différent à cette équipe. Je rappelle aussi les blessures que l’on a eu pendant la préparation avec les 12. C’est Kevin Seraphin, Antoine Diot, Joffrey Lauvergne et Vincent Poirier. Vous allez me dire que toutes les équipes ont ces problèmes… Je veux saluer ceux qui sont venus, ils ont tout donné.
J’ai posé la question aux sept autres présidents qui ont été éliminés en huitièmes de finale. Personne ne remettait en cause son staff. J’ai particulièrement posé cette question à la Lituanie (NDLR : président Arvidas Sabonis, coach : Dainius Adomaitis) qui m’a répondu que dès le lendemain, « on attaque les fenêtres ! », qui arrivent en novembre. Il y a eu effectivement ce match perdu contre l’Allemagne mais remettre en cause le staff et se lancer dans une problématique alors qu’on sait que l’on doit faire très vite la préparation de novembre, ça paraît très compliqué. Très vite on a confirmé le staff en place et Vincent (Collet) bien évidemment. Après il y aura un débriefing de la Direction Technique et du staff mais je me suis engagé à faire mon propre débriefing car entre ce qui existe sur un plan technique et un plan personnel, j’aimerais que l’on puisse associer ces deux visions pour s’améliorer. J’aurai l’occasion de discuter avec Patrick (NDLR : Beesley, le DTN) et Vincent pour que de ces deux débriefings on ressorte grandi.
« Certaines universités proposent à des intermédiaires des bonus financiers, environ 4-5 000 euros, pour que des jeunes filles et garçons puissent les intégrer »
On a la chance d’organiser les Jeux Olympiques en France en 2024. La participation des pays qui organisent n’est pas une garantie. Mais une nation comme la France devrait avoir une garantie de participer aux Jeux au 5×5 comme au 3×3. Cela veut dire que l’on peut travailler dans la durée. On va bien évidemment se servir du patrimoine que l’on a actuellement. Je voudrais resituer les U18 masculins, vous en connaissez quelques-uns. Pareil pour les U16. On a un effectif en capacité d’être opérationnel en 2024. Mais je considère que pour bien préparer 2024 il faut être à Tokyo en 2020. Et vous savez que pour y être il faudra passer par la Coupe du Monde 2019.
Je voudrais d’abord revenir sur la filière de formation et pousser un coup de gueule. Ça fait deux ans que je le fais auprès de la fédération internationale. Je pense avoir été entendu car le dossier va être mis sur la table très rapidement. Pierre Collomb a présidé la commission juridique mondiale de la fédération internationale et il y siège toujours. On va travailler cet après-midi ensemble sur des propositions à faire pour protéger notre filière. Aujourd’hui, on a beaucoup de jeunes qui partent sur les universités américaines, filles et garçons. Il faut comprendre que les universités américaines (NDLR : notamment la NCAA) n’est pas dans la grande famille de la fédération internationale, ce qui fait qu’il n’y a aucune règle de protection entre les jeunes qui sont détectés par les universités américaines et le pays quitté. Autant on peut organiser les choses entre deux pays car la fédération internationale coiffe un peu tout ça, autant avec les universités américaines ce n’est pas possible. Nous constatons –j’aime dire les choses car je ne suis pas langue de bois- que certaines universités proposent à des intermédiaires des bonus financiers, environ 4-5 000 euros, pour que des jeunes filles et garçons puissent les intégrer, qu’elles soient de très bons, de moyens ou de petits niveaux. Ça veut dire que l’on est en train de déstructurer les équipes jeunes. On a constaté cet été que dans les hôtels où résidaient les délégations lors des championnats, des sergents-recruteurs étaient là pour chercher à recruter ces jeunes. Bien évidemment, la NBA avec les salaires mirobolants fait que l’on a complètement déstructuré tout le monde et chacun cherche à trouver une place dans l’Eldorado de la NBA.
Je reviens sur notre raison d’être, nous, fédération : nous avons une délégation du ministère pour préparer les équipes de France et nous avons, comme les autres fédérations, un parcours d’excellence sportive. On a l’obligation de mettre les jeunes dans un cadre de formation pour qu’ils puissent un jour devenir internationaux. Quand on vient les prendre à la sortie de l’INSEP, dans les centres de formation, dans les clubs, les équipes nationales, du jour au lendemain, et se dire que l’on n’aura pas les compensations et que ces jeunes ne joueront plus en équipe nationale, on a le droit d’être un peu en colère. Sur ce sujet, j’ai klaxonné et je le fais de plus en plus fort. J’ai envoyé il y a deux jours un courrier à la fédération internationale. On a une réunion de travail qui est prévu d’ici un mois. J’espère que l’on va pouvoir protéger notre travail. Nous dépensons tous les ans rien que pour le Centre Fédéral à l’INSEP 1,2M€ sur les deniers fédéraux sans aides de personne. A rajouter à ça ce que chaque club professionnel dépense pour son centre de formation. Aujourd’hui, on a en France énormément de talents. C’est le fruit des clubs, de la détection, etc, et on n’arrive pas à les récupérer. On a fait la liste des jeunes garçons qui n’ont pas été en équipe nationale pour x raisons, on se pose des questions.
« Nous avons donc 23 joueurs qui ne sont pas normalement disponibles pour jouer les fenêtres d’hiver »
Etre performant en 2024 passe pour nous par une participation aux Jeux de 2020. Pour les féminines, il n’y a eu aucune modification au niveau du système de qualification. En 2018, il y aura la Coupe du Monde en Espagne, en 2019 –nous sommes déjà qualifiés- un championnat d’Europe. Le champion d’Europe sera qualifié pour Tokyo et les autres seront reversés sur un tournoi de qualification. On a une équipe de France qui a des chances de se qualifier pour Tokyo.
Concernant les masculins, les choses avancent chaque jour. On a une qualification hasardeuse avec un calendrier profondément modifié. Nous sommes –hélas- une nation qui produit énormément de talents. Nous avons mis en place un projet France Team Basket avec 37 joueurs. Nous avons 10 joueurs sur ses 37 qui sont en NBA –avec le cas particulier de Boris (Diaw)- et 13 en Euroleague. Nous avons donc 23 joueurs qui ne sont pas normalement disponibles pour jouer les fenêtres d’hiver puisqu’en été on aura tout le monde. Nous tombons sur un groupe qui n’est pas simple. La Belgique est ravie de jouer contre nous dans cette situation. La Russie qui, on la vu cet été, est une grande nation, qui revient à son niveau. On s’est dit que l’on n’allait pas tomber sur une équipe supplémentaire de bon niveau et… on tombe sur la Bosnie, ce qui n’est pas simple !
Depuis le début de ce dossier, en 2012, j’ai œuvré -je regrette d’avoir été le seul à l’époque- pour dire que l’on n’était pas tout à fait d’accord avec ce calendrier. Je comprenais qu’il y avait peut-être besoin de changer les choses sur un plan mondial, que les équipes nationales jouent des compétitions dans leur pays, c’est important. Mais de là à se retrouver quelques années après dans une situation avec pratiquement 23 joueurs, 15 pour la Serbie, qui ne pourront pas participer à quatre de ses six fenêtres, c’est assez compliqué, sur un plan financier, de la compétition, et puis aussi de la marque, de ce que peut représenter l’équipe de France. Cela prive nous, fédération, les joueurs, les coaches, le public, les médias, notre grande famille, ce que l’on a mis en place depuis des années. Je me suis battu depuis des années, je m’aperçois que je suis rejoint dans ma position mais c’est, hélas, trop tard. J’ai combattu jusqu’en 2014 où il y a eu le Congrès en Espagne qui a validé ce nouveau système. La fédération française est membre de la fédération internationale, une grosse, parmi le top 3 ou le top 4 sur le plan mondial, et on se doit d’être légaliste et de respecter quelque chose qui a été décidé collégialement. Si un calendrier est en place il faut favoriser son application. C’est pour cela que ça a été notre positionnement contre l’Euroleague. Aujourd’hui ces choses ne sont pas en place et ce n’est pas de la faute de la fédération internationale même si on peut contester le projet. J’accuse ECA, la structure privée (NDLR : qui gère l’Euroleague et l’Eurocup) de ne pas faire le nécessaire pour organiser les choses. Je veux le dire franchement car je sais que l’on est en train de m’associer en Espagne au fait que la France rejoint l’Euroleague sur ce dossier. Ce que l’on veut, c’est que maintenant que ce projet existe, c’est qu’il se mette en place et que la France récupère ses joueurs car on veut se qualifier pour la Coupe du Monde 2019 et on veut, à travers elle, se qualifier pour les Jeux Olympiques. Dans cette affaire, j’ai mis beaucoup de pression sur la fédération internationale pour que quelque part ils tiennent compte de notre situation, qui est délicate. On est optimiste car on a heureusement un vivier important de joueurs. Les gens sont mobilisés, je lis les interviews de joueurs qui sont en France. Tant mieux. Mais je trouve dommage, alors qu’on est une nation qui travaille, que l’on ne puisse pas profiter du bénéfice de ce travail.
En 2020, il y aura des tournois qualificatifs et chaque zone aura deux invitations (wild cards). On espère que d’une manière ou d’une autre on puisse se retrouver qualifié. Sachez que la fédération, et moi en particulier, je me bats partout où je peux me battre pour avoir gain de cause car sincèrement on mérite vu notre travail et notre classement mondial, une équipe digne de tout ça.
« Va-t-on déboucher sur une ligue professionnelle de 3×3 ? Sur une compétition inter grands pays pour avoir beaucoup de joueurs et de joueuses qui en vivent »
Le 3×3, au même titre que d’autres disciplines olympiques, doit se préparer. On a normalement la garantie de participer aux Jeux Olympiques de 2024. Ce que l’on aimerait c’est se qualifier pour les Jeux de 2020.
On a dans notre sport la culture d’une qualification à travers une performance sportive avec des rencontres. Concernant le 3×3 c’est complètement différent, on est sur un système de ranking. On va fixer au mois de novembre 2019 le classement des nations en fonction des performances de 100 joueurs et de 100 joueuses. Un peu comme au tennis ou au golf, on va avoir un ranking. Chaque joueur aura participé à des tournois, en France, en Allemagne, en Turquie ou aux Etats-Unis, etc, et du moment où ils sont référencés sur la plateforme internationale, ils obtiendront des points et quand on aura totalisé les points des 100 meilleurs joueurs français et des 100 meilleures joueuses, vous aurez le classement mondial des nations. Et il faut être dans les six ou sept meilleures nations mondiales. C’est un système complètement nouveau.
On pouvait imaginer un système plus classique de qualification avec par exemple un championnat d’Europe et venir en 2020 avec des joueurs un peu différents. Mais c’est au sein de ces 100 que l’on devra choisir les quatre qui joueront les Jeux Olympiques. Cela veut dire qu’il faut que l’on multiplie le nombre de rencontres pour avoir la chance de gagner des points. Il faut que l’on soit opérationnels pour qu’en 2019 on soit classé dans les sept premiers. Aujourd’hui les filles ne sont pas trop mal, les garçons sont moins bien. J’ai initié une réunion la semaine prochaine à Belgrade où les grands pays d’Europe vont se réunir pour que l’on puisse travailler ensemble. Va-t-on déboucher sur une ligue professionnelle de 3×3 ? Sur une compétition inter grands pays pour avoir beaucoup de joueurs et de joueuses qui en vivent. Pour ça il faut un marché avec des partenaires, des contrats de télévision, des prix, des bonus. C’est un travail que l’on doit mener très vite. Notre objectif est de boucler ce dossier en décembre 2017. On sait aussi qu’en terme de développement le 3×3, ça peut être très intéressant. On a un réseau de ligues et de comités et surtout 4 500 clubs qui ont peut-être la capacité de proposer des choses pour le 3×3. Une compétition de clubs ? Des organisations territoriales ? On va le définir. La FIBA pousse les fédérations à se lancer à travers des promoteurs privés… ou peut-être la FIBA va demander à des promoteurs privés de développer le 3×3 sans les fédérations nationales. Je dis « stop ! Le basket français a bien évidemment la capacité de travailler sur le sujet avec des promoteurs privés. Par exemple, la Hoops Factory développe des plateformes et on peut imaginer s’associer avec eux pour organiser des compétitions. On a des équipements de qualité, des gens très motivés et dans des lieux où il y a énormément de population, on peut travailler ensemble.
« En 2015, on a refusé 50 000 jeunes que l’on aurait pu avoir dans nos clubs. Il faut que l’on rénove ce modèle, on est très ambitieux par rapport à ça »
Notre objectif est de qualifier pour 2024 les quatre équipes de France. On est censé être qualifiés d’office, sans avoir la garantie. C’est la fédération internationale qui décide. Depuis 1992, il n’y a eu que trois médailles pour les pays organisateurs : les Américains ont eu les deux médailles d’or à Atlanta et les Australiennes à Sydney. Ça veut donc dire que ce n’est pas parce qu’on organise les Jeux que l’on réussit dans le basket automatiquement. Mais notre objectif, c’est de réussir, d’avoir une médaille. Je lance un message vis-à-vis de la fédération internationale, j’ai discuté avec Patrick Baumann (NDLR : le secrétaire-général), qui est là pour soutenir ses fédérations nationales et trouver des solutions pour que l’on puisse bien préparer ces Jeux de 2024, donc en participant aux Jeux de 2020. On prépare un plan avec nos prestataires pour 2024 qui sera présenté ici à la fédération en décembre 2017. Il comprendra tout ça : comment mettre en place à la Direction Technique National un vrai projet de performance et comment on peut se servir de ça pour préparer l’héritage (…) Notre objectif est de voir comment le basket français se pratiquera en France dans les années 2020 quand les Jeux Olympiques seront passés. On est à 660 000 licenciés mais il y a pratiquement trois millions de pratiquants en France, qui ne sont pas chez nous. Comment faire le lien entre eux ? Nos clubs sont au taquet. A la mi-septembre, ils refusent du monde. En 2015, on a refusé 50 000 jeunes que l’on aurait pu avoir dans nos clubs. Il faut que l’on rénove ce modèle, on est très ambitieux par rapport à ça. On discute de ça avec d’autres fédérations comme le foot. On va le faire avec tous ces promoteurs, ces plateformes, pour que les choses bougent, que l’on puisse faire du basket sous toutes ses formes. Toutes les bonnes volontés sont bonnes à prendre, on ne refuse personne.
En résumé, on a passé un été que l’on espérait meilleur. On va se battre pour tenter de corriger le tir. Malgré les difficultés de joueurs qui seront peut-être non qualifiables, on y va ! On est motivé. On veut être aux Jeux en 2020.
Je répondrai à n’importe quelle question, je ne serai pas langue de bois.
« Je n’ai absolument aucune confiance en Jordi Bertomeu »
Pendant que vous parliez, l’Euroleague lançait un calendrier alternatif. Quel est votre commentaire là-dessus ?
J’ai reçu, j’ai lu tout ça. Je n’ai absolument aucune confiance en Jordi Bertomeu (NDLR : le directeur d’ECA). Je pensais que c’était un personnage qui voulait composer pour l’intérêt général. Aujourd’hui, je n’ai strictement plus aucune confiance en lui. Je respecte le travail de bonifier certains intérêts privés, d’une structure privée qui est là pour gagner de l’argent, mais nous on est service public, notre mission c’est l’intérêt général. J’ai là tout le dossier (il le montre). On a un agrément qu’avait fait la fédération internationale avec l’Euroleague sur la demande expresse de la Commission Européenne. La FIBA a tout lâché sur ce dossier… ECA a signé cet agrément et une heure après envoyait un mail à la Commission Européenne en disant qu’ils n’étaient plus d’accord. Ça a toujours été comme ça. En novembre 2016 –j’ai le courrier ici-, l’ECA a confirmé ce qu’ils avaient dit à la Commission Européenne qu’ils allaient respecter les fenêtres. Ils ne les ont pas respecté et comme par hasard, huit jours avant le début de la compétition, on cherche un produit alternatif alors que tout est bouclé. Moi, le premier, je serais ravi que l’on joue l’été mais ce n’est pas que l’Europe, c’est le monde entier qui est concerné. C’est pour dire qu’encore une fois « j’ai fait une ouverture et encore une fois la FIBA a refusé ». L’Euroleague dit qu’ils sont d’accord avec moi pour que l’on fasse sauter le projet FIBA. Ce n’est pas ça. Moi, je veux les joueurs pour jouer les fenêtres.
« Je le dis ouvertement : il y a des arrangements au niveau locaux entre un club d’Euroleague et sa fédération, qui libérera ses joueurs nationaux et qui par contre retiendra les autres joueurs pour jouer le match d’Euroleague »
Jordi Bertomeu a déclaré que les joueurs d’Euroleague sont libres de participer à ces fenêtres de qualification et on peut imaginer qu’il y aura une pression de la part de leurs clubs, de leurs employeurs, puisqu’il y aura des matches d’Euroleague en même temps. Jorge Garbajosa, le président de la fédération espagnole, a dit pour sa part que c’est une obligation dans son pays de jouer pour l’équipe nationale et qu’il allait convoquer les joueurs d’Euroleague. Dans ce contexte, la fédération, Vincent Collet, vont-ils convoquer les meilleurs joueurs y compris ceux d’Euroleague ? En amont, le coach va-t-il demander s’ils sont disponibles ou non ?
Nous allons convoquer les joueurs d’Euroleague. Si on ne les convoque pas, on ne pourra pas demander à la justice de leur demander à ce qu’ils viennent. Je le dis ouvertement : il y a des arrangements au niveau locaux entre un club d’Euroleague et sa fédération, qui libérera ses joueurs nationaux et qui par contre retiendra les autres joueurs pour jouer le match d’Euroleague. Barcelone… on a quelques joueurs français là-bas (NDLR : Thomas Heurtel, Adrien Moerman et Kevin Seraphin). J’irai quand même discuter avec quelques présidents de fédération. En Allemagne, il y a obligation de libérer les joueurs nationaux pour l’équipe nationale. En Italie, on peut imaginer que Milan puisse libérer les joueurs italiens. J’ai dit à la fédération internationale que si ça se passe, il faudra que vous preniez vos responsabilités. Donc nous sommes dans l’obligation de convoquer nos joueurs d’Euroleague. Après que derrière les choses se discutent, que ça puisse évoluer. Je ne peux pas tout dire ici mais il y a beaucoup de choses qui se passent depuis quelque temps à destination des pays où il y a des clubs d’Euroleague. J’espère que les choses vont se régler d’ici là. A mon avis, l’ouverture de Bertomeu, c’est une fausse ouverture. On verra comment les choses s’enclenchent derrière.
« On peut imaginer que des pays importants pour la fédération internationale, par exemple avec des joueurs NBA, puissent être invités à ce TQO »
Les billets pour le TQO seront-ils tous attribués au Mondial de 2019 sachant qu’en 2016, il y avait un système de wild cards. Aussi, si l’équipe de France se loupait dans les fenêtres, y aurait-il un petit espoir de rattrapage ?
Sept équipes sont qualifiées directement pour les Jeux. Il y a ce principe de l’universalité. On conserve le champion de chaque continent. Un représentant pour l’Afrique, l’Asie, l’Océanie, l’Amérique deux représentants et l’Europe deux représentants. Donc, à partir de la Coupe du Monde, deux européens seront directement qualifiés pour les Jeux. Cela fait sept équipes. Ensuite les seize suivants seront reversés sur un TQO sans tenir compte de ce principe d’universalité. En plus, il y aura deux wild cards par continent. Quatre sont concernés : l’Europe, l’Afrique, l’Amérique et l’Asie/Océanie. Ces wild cards pourraient revenir, pourquoi pas, à des pays qui n’ont même pas participé aux qualifications pour la Coupe du Monde. On peut imaginer que des pays importants pour la fédération internationale, par exemple avec des joueurs NBA, puissent être invités à ce TQO. Vous aurez quatre tournois de six équipes et les quatre vainqueurs, comme on l’a vécu aux Philippines, seront qualifiés aux Jeux Olympiques.
Comment est faite la désignation des wild cards ? Y a-t-il un grand jury ? Est-ce le fait du prince ? Cela dépend-il de la somme d’argent mise sur la table ?
Ce n’est pas à moi qu’il faut poser la question (sourire). Aujourd’hui, je ne sais pas. C’est une décision collégiale. C’est le comité exécutif de la FIBA qui décide. Je pense que c’est un système où l’on fait appel à la candidature, il y a des candidats, derrière ça je pense qu’il faut une équipe qui soit en capacité de réussir et une manne financière qui accompagne. Ce fut le cas en 2016 et en 2012. Exemple : la Turquie, qui avait été éliminée en huitièmes de finale de l’Euro 2015, s’est retrouvé avec nous à faire le TQO au Philippines. On considère que la Turquie peut réussir sa qualification et a une capacité financière. Je ne sais pas comment ça se passera en 2020 mais je peux imaginer que ça sera ce type de système. Nous, basket français, par toutes les fenêtres et les portes qui s’ouvrent, on sera là. On aimerait l’être sur le plan sportif car j’estime que l’on mérite de se qualifier pour la Coupe du Monde.
« Au Centre Fédéral, un jeune n’est pas venu le premier jour, on ne sait pas où il est, il a jamais dit qu’il partait. Où on va ? »
Quel type de pression avez-vous fait auprès de la FIBA, en ce qui concerne l’exil des jeunes et aussi les fenêtres ? Cela peut-il aboutir ?
Je mène un lobbying depuis le début. De 2012 à 2014, j’ai participé à toutes les réunions internationales sur les qualifs y compris en Afrique. A-t-on eu raison trop tôt ? Je n’en sais rien en tous les cas, très peu de gens ont suivi. Il y a des fédérations qui ne sont pas dans le même système que nous. Nous, on a énormément progressé grâce aux équipes de France. Vous connaissez le phénomène : ils sont très contents de jouer contre les grandes nations quand elles sont diminuées. Dès que ça a été entériné en 2014, on nous accusé d’être contre l’Euroleague et pour la FIBA, ce n’est pas ça. Ce que l’on veut, c’est que l’on mette en place un système vertueux, un règlement, qui nous permettent d’avoir nos joueurs d’Euroleague, d’Eurocup, que derrière on fasse un bon travail, que l’on remplisse nos salles, que l’on se qualifie. On s’aperçoit aujourd’hui que malgré ce qu’il a dit et écrit le COE d’ECA (NDLR : Jordi Bertomeu) n’a pas tenu ses engagements vis-à-vis de la Commission Européenne. Là, on a 23 joueurs concernés, à date, ça évolue vite avec les two-ways contract, les transferts entre joueurs d’Euroleague et d’Eurocup, tout est possible, très vite. Je l’ai dit à Hong Kong quand il y a eu le congrès mondial puisque je participe au bureau central de la fédération internationale, j’ai été consigné sur les PV, j’ai écrit depuis plusieurs fois à la fédération internationale. Les derniers courriers sont partis il y a trois jours et ont été envoyés aux cinquante pays de l’Europe pour que tout le monde comprenne que l’on n’est vraiment pas content. La Lituanie aussi a envoyé un courrier. Vous avez lu les interviewes de certains coaches, de certains joueurs, de certaines fédérations, personne n’est ravi de la situation. J’ai bien sûr l’occasion de voir plusieurs fois Patrick Baumann, qui avait un autre rôle important (NDLR : président de la commission d’évaluation du CIO). Il y a une prise de conscience importante et j’espère que les choses vont se décanter. La balle est vraiment dans le camp de la fédération internationale. Concernant la sécurisation des jeunes, c’est une vraie économie autour de tout ça. La fédération internationale se doit de protéger ses fédérations membres. J’ai fait des courriers cet été, j’ai eu des réponses il n’y a pas longtemps. On va donc travailler toute l’après-midi avec Pierre Colomb sur ce projet. On va proposer des idées. La commission mondiale se réunit le 27 et derrière le comité exécutif doit prendre une décision en novembre. On n’est pas contre le fait que nos jeunes partent mais que ce soit fait avec nous et pas contre nous. Par exemple, au Centre Fédéral, un jeune n’est pas venu le premier jour, on ne sait pas où il est, il a jamais dit qu’il partait. Où on va ? On dépense de l’argent, c’est l’argent des licenciés. Je pense que ça, ça va se faire.
Demander une forte compensation financière en cas de départ, c’est une piste ?
Il y a deux pistes. La première sur le plan juridique : on bloque. On ne peut pas interdire à quelqu’un de partir mais on peut bloquer les droits s’il revient. La deuxième, c’est copier ce que fait la FIFA. J’ai demandé à regarder de près ce qu’elle fait. La FIFA a réglé le dossier. On sait copier le foot pour autre chose, on peut le faire aussi pour la sécurisation des jeunes. On n’est pas contre le fait que des intermédiaires gagnent de l’argent mais on doit être payé du travail qu’on a fait. Que ce soit les clubs, nos pôles régionaux, le centre fédéral, on a quand même de la ressource derrière. Que l’on récupère au moins cet argent.
Est-il souhaitable de revenir à un autre système de qualification pour les JO de 2024 sachant que la NBA ne va certainement pas lâcher du lest, que l’Euroleague ne désarme pas ?
Je ne vais pas dire que je m’en fiche mais 2024, c’est chez nous. On sera moins concerné. Je n’en sais rien, ça va tellement vite. Je ne sais pas si c’est bien de revenir en arrière car ça voudrait dire que des clubs auraient gain de cause vis-à-vis de l’intérêt général. Il y a un calendrier, des joueurs qui ont besoin de se reposer, de gérer une carrière et le meilleur moyen de le faire, c’est de se mettre autour d’une table qui organise des compétitions pour faire le meilleur calendrier possible. On sera moins concerné pour 2024. On est dans la trajectoire de faire une très belle équipe pour 2024.
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« On attaque une nouvelle olympiade, on a des ambitions. Il y a une excellente nouvelle : l’organisation des Jeux Olympiques en 2024 à Paris. J’ai eu le plaisir de faire partie de la délégation à Lima. J’ai passé beaucoup de temps cet été à discuter de plein de choses dont on va parler tous ensemble.
La première chose, c’est le nombre de licenciés. L’équipe est en place depuis 2010, on a fait du boulot. C’est le travail des clubs, de notre fédération, c’est l’exposition que peut avoir le basket, c’est le travail de la Ligue Nationale de Basket, que j’associe dans cette démarche, de la Ligue Féminine. Tout ce que l’on a mis en place fait que l’on a un bilan de 661 025 licenciés. On est la quatrième fédération en France et encore le premier sport collectif féminin même si le foot nous rattrape à grands pas avec une exposition qui, hélas, n’est pas la même pour les autres sports collectifs. J’associe le hand, le volley et le basket là-dedans.
Ce nombre de licenciés nous a permis de doubler le budget. Il était en 2010 de 18M€, on est à 36 (NDLR : 28,5 en 2015). Ça fait trois ans qu’on n’augmente pas les tarifs fédéraux car on sait que nos clubs souffrent à cause des diminutions d’aides publiques, etc. On a organisé des événements, l’Euro féminin en 2013, le masculin en 2015. On a organisé le TQO féminin qui a été déficitaire mais que l’on a pu se payer car on a fait un excellent Euro 2015. On a beaucoup travaillé avec la Ligue Nationale sur les droits de télévision, ça a été une bonne réussite, sur le plan du marketing en triplant son chiffre d’affaires. Je pense que la fédération est en très bon état, que ce soit sur le nombre de licenciés et le budget. En ce qui concerne le budget, l’état nous aide comme toutes les fédérations. Premièrement, avec du cash. Nous touchons 2,3M€. D’autres sports comme le handball sont à 3,5M€ depuis des années. Cela représente 7-8% par rapport au budget de la fédération.
Sur le plan du palmarès, on livre une copie qui n’est pas si mal que ça. On est troisième sur le plan mondial si on fait le ranking complet, c’est-à-dire si on prend les résultats des équipes de France masculine, féminine et de jeunes. Il ne faut pas le banaliser. J’ai discuté cet été avec des dirigeants de fédération qui disent qu’il y a 10, 15, 20 ans, la France était la risée au niveau des équipes de France de jeunes sur les championnats d’Europe. Aujourd’hui, c’est presque normal que l’on fasse une médaille et en fait… ce n’est pas normal. Ça demande du travail. Je veux saluer la Direction Technique. Même si dans le passé la formation française était une Bérézina, nous avons fait en 2017 le meilleur bilan au niveau des équipes de France avec 8 médailles dont 3 en or. C’est globalement le meilleur palmarès depuis 2009. Les séniors filles ont été médailles d’argent au championnat d’Europe. Les A’ ont gagné l’or aux Jeux de la Francophonie. Les U20 féminins ont été quatrièmes au championnat d’Europe. Nous aurions pu être champions d’Europe si on avait souhaité aligner notre équipe au complet. C’est un choix de notre fédération de ne pas avoir fait appel à certaines joueuses ; je pense en particulier à Alexia (Chartereau), qui aurait pu jouer en U18 et en U20. Les U18 féminines ont été médailles de bronze. Les U16 ont été championnes d’Europe. On avait souhaité organiser ce championnat d’Europe à Bourges pour qu’enfin une équipe de jeune puisse gagner sur le territoire français. Dans ces deux équipes nous avons des pépites que l’on risque de retrouver ensuite en équipe de France, en 2024. On parlera ensuite de l’échec des garçons en séniors mais je rappelle que les U20 ont été médailles de bronze avec énormément d’absences. Les U18 ont été sixièmes au championnat d’Europe mais là aussi avec énormément d’absences. Je rappelle que quelques mois auparavant, en décembre, nous avons été champions d’Europe. Et en U16 nous avons aussi été champions d’Europe. Je vais compléter avec le 3×3 qui est une discipline olympique. On a eu une médaille de bronze avec les séniors masculins à la Coupe du Monde à Nantes, qui a été un très bel événement. Les féminines ont été quatrièmes au championnat d’Europe. Et les U18 masculins ont obtenu une médaille de bronze en Europe.
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Photos: FIBA Europe