Un nouveau président, un nouveau vice-président, un nouveau coach, beaucoup de nouveaux joueurs. Le Limoges CSP présente encore et toujours un nouveau modèle pour la saison à venir, tandis que l'instabilité financière chronique continue de peser.
La fin de saison 2022-23 du Limoges CSP a été ca-tas-tro-phi-que. 8 défaites sur les 10 derniers matches pour atterrir à la 15e place. 1 victoire pour 5 défaites dans la poule de top 16 de Basketball Champions League. Tout aussi négatif, le CSP a manifesté pour la énième fois son instabilité chronique, à la fois au niveau financier et dans le front-office. Dans un communiqué daté du 1er mai, la propriétaire Céline Forte écrivait pourtant à propos du résultat économique lié au sponsoring, « il est le meilleur jamais réalisé par le club depuis sa création tant en nombre de partenaires qu’en chiffre d’affaires ». La veuve de Frédéric Forte ajoutait : « Je terminerai par l’affluence exceptionnelle dont nous avons bénéficié tout au long de la saison. Plus de la moitié des matches ont été joués à guichets fermés et la rencontre particulière des 30 ans du titre européen a rassemblé à elle seul pas moins de 10 000 personnes à Beaublanc, preuve s’il en fallait encore une que notre public est le meilleur. »
Seulement, il était de notoriété publique dans le Limousin que les finances étaient boiteuses - le chiffre d’un million d’euros de déficit a circulé. En juin, Céline Forte choisissait France Bleu Limousin pour faire un point d’étape. « Je ne vais pas m’éterniser sur les chiffres mais c’était un déficit considérable qui a fait peur au départ. Après, il s’agit de mettre en place un plan de redressement. Ce qui a été fait. Aujourd’hui, ce déficit est bien amoindri (…). Pour palier ce déficit : ouverture de capital, apport en compte courant. C’est ce qui a fait qu’on a apporté des arguments favorables et positifs à la DNCCG. Des actionnaires ont bien voulu nous suivre dans note plan de redressement. Des actionnaires motivés par le Limoges CSP. C’était déjà la cas l’année dernière grâce à mon papa Serge Gabriel qui avait déjà mis 200 000 euros dans le club. C’était une première étape. Seconde étape cette année. Et à titre personnel, j’ai aussi remis de l’argent dans le Limoges CSP. En tant qu’actionnaire, j’ai joué mon rôle. »
Céline Forte annonçait un budget global légèrement allégé à six millions d'euros et un peu plus tard, la DNCCG confirmait l’engagement du club avec une masse salariale encadrée comme lors des quatre dernières saisons.
Des changements à tous les étages
Au CSP, l’organigramme n’est pas gravé dans le marbre et il faut être attentif aux va-et-vient, à tous les niveaux de la structure. Les trois plus marquants de l’intersaison ont été le changement de président. Yves Martinez a laissé son fauteuil à Didier Jamot, déjà président de la JA Isle Rugby. D’autre part, après Richard Dacoury qui n’a pas fait long feu, le CSP voit le renfort d’un autre champion d’Europe de 1993, Franck Butter, 60 ans, un fidèle de Beaublanc, qui devient vice-président.
Le bouleversement le plus visible a été le changement de coach. On dit que les histoires d’amour se terminent mal en général et celle de Massimo Cancellieri avec le club de la Haute-Vienne en est un parfait exemple. Quasi déifié à l’issue du premier exercice par le peuple vert, l’Italien est tombé en disgrâce et est devenu le dix-huitième entraîneur à quitter les verts pâturages du Limousin depuis le début de ce siècle. Le CSP est le club de tous les records. Limoges est une terre d’accueil puisque le Grec Ilias Kantzouris est le 13e étranger à occuper le poste depuis l'ère professionnelle.
« L'arrivée d'Ilias est un signe très positif pour moi. Il a été assistant dans des grands clubs puis a réussi à différents niveaux en tant que coach principal. Il a fait le choix de quitter son pays d'origine pour rejoindre le Limoges CSP grâce à l'histoire du club mais aussi la montée en puissance du championnat de France. Sa connaissance basket, ses ajustements sur le basket et son management ont fait qu’il était la première option pour le club en tant que coach. Nous souhaitons construire ce projet ensemble sur la durée et je ferai tout mon possible pour y arriver avec Ilias », veut croire le directeur sportif Kevin Anstett.
Trois joueurs conservés
A l’intersaison 2022, le CSP avait conservé le seul Nicolas Lang. Cette fois, il y a en plus de l’Alsacien, Mathieu Wojciechowski et Lucas Ugolin. C’est une petite ossature. En revanche, les non-JFL sont tous partis, soit parce qu’ils n’étaient pas assez bons soit comme Desi Rodriguez parce qu’ils ont trouvé l’herbe plus verte ailleurs. « Je suis content car le marché n'est vraiment pas facile, » a jugé Kevin Anstett dans Le Populaire à propos du recrutement. « Nous avons réussi à mixer l'expérience (Lang, Chassang, Nenadic et Wojciechowski) avec des joueurs qui veulent passer un cap (Appleby, McGusty, Doolittle et Shittu) ainsi que deux jeunes Français qui ont réalisé de bonnes choses l'an dernier (…) C'est devenu difficile de convaincre les joueurs de venir en Europe. Et c'est encore plus compliqué lorsque tu ne disputes pas de Coupe d'Europe. »
Même s’il sera « à jamais le premier » à avoir été champion d’Europe, le Limoges CSP est rentré dans le rang. Intégrer le top 8 de la Betclic Elite serait déjà une performance. Assainir ses finances et conserver son coach plusieurs années presque un exploit.
Les résultats des cinq dernières saisons
| Saison | Niveau | Bilan | Classement | Playoffs | Top scoreur | Budget |
| 2018-19 | Jeep Élite | 20-14 | 6e | Quarts de finale | Dwight Hardy (13,7) | 7,03 M€ |
| 2019-20 | Jeep Élite | 12-13 | 8e | (Annulée) | Semaj Christon (15,8) | 7,01 M€ |
| 2020-21 | Jeep Élite | 17-17 | 9e | - | Nicolas Lang (15,8) | 6,27 M€ |
| 2021-22 | Betclic Élite | 20-14 | 4e | Quarts de finale | Nicolas Lang (15,8) | 6,24 M€ |
| 2022-23 | Betclic Élite | 14-20 | 15e | - | Bryce Jones (15,8) | 6,52 M€ |
Les changements de l’intersaison
Sous contrat : Nicolas Lang (2025), Lucas Ugolin (2026), Mathieu Wojciechowski (2024)
Arrivées : Ilias Kantzouris (coach, AEK Athènes/Grèce, 2025), Lucas Beaufort (Strasbourg, 2025), Kameron McGusty (Plaisance/D2 italienne, 2024), Nemanja Nenadic (Rio Breogan/Espagne, 2024),
Alexandre Chassang (Bourg, 2025), Tyree Appleby (Wake Forest/NCAA, 2024), Oluwasimisola Shittu (Iowa Wolves/G-League, 2024), Kristian Doolittle (Bayamon/Porto Rico, 2024)
Départs : Massimo Cancellieri (coach, Strasbourg), Wilfried Yeguete (Le Mans), Desi Rodriguez (Nanterre), Jayvon Graves (Ludwigsbourg/Allemagne), Bryce Jones (Cluj/Roumanie), Marek Klassen (Karditsa/Grèce), Mohamed Sidibe (Andrézieux/NM1), Hugo Desseignet (Loon-Plage/NM1), Kenny Kadji, Tomas Kyzlink
Effectif 2023-2024 : Tyree Appleby, Kameron McGusty, Lucas Beaufort, Nicolas Lang, Lucas Ugolin, Nemanja Nenadic, Mathieu Wojciechowski, Kristian Doolittle, Alexandre Chassang, Simi Shittu
Staff sportif
Coach : Ilias Kantzouris (50 ans)
Assistant : Romain Leroy (45 ans), Dominik Gunthner (35 ans)
Front office
Propriétaire : Céline Forte
Président : Didier Jamot (66 ans)
Directeur sportif : Kevin Anstett (31 ans)
Salle : Palais des Sports de Beaublanc (4 711 places)
Les joueurs
Le cinq majeur
Tyree Appleby
Il sort directement de la fac ou plutôt des facs puisqu’il en a fréquenté trois : Cleveland State, Florida et Wake Forest. A chaque fois, il a bien garni son panier. Il a été le leader de l'ACC aux points (18,8), passes décisives (6,4) et minutes (36,7) par match. Il a dépassé les 20 points à 13 reprises en 33 matches et a atteint les 30 points deux fois. Preuve qu’il est percutant offensivement, ses 211 tentatives aux lancers francs ont constitué le plus grand nombre atteint par tous les joueurs de l'ACC et la 22e marque de NCAA. Un créateur avec une excellente vision.
Kameron McGusty
Encore un étudiant qui a changé de fac au cours de son cycle universitaire. Le Texan est passé des Sooners d’Oklahoma aux Hurricanes de Miami et il y cumule cinq saisons en raison du Covid alors que le maximum est en principe de quatre. Il était décrit comme un playmaker long et athlétique avec la mentalité de faire de la passe sa priorité. Non drafté, il a connu sa première saison en professionnel en deuxième division italienne. Avec 19,3 points, il a terminé 7e marqueur de la Serie A2. On l’appelle tout simplement Kam. LeBron James est son joueur préféré.
Nicolas Lang
Il est sur la 2e année d’un contrat de trois ans après déjà quatre saisons au CSP, il en est devenu son point d’ancrage. Il compense son peu de qualités physiques par sa son QI Basket et un shoot légendaire. C’est aussi un arrière de grande taille. Statistiquement, il est très légèrement en retrait vis-à-vis des deux exercices précédents. On est toujours étonné quand il loupe un lancer-franc. Quelques apparitions (12 sélections) en équipe de France lors des fenêtres internationales où son manque de qualités athlétiques le pénalise. Alsacien pur jus formé au ABC Lutterbach et au FC Mulhouse.
Kristian Doolittle
Depuis sa sortie d’Oklahoma - il a été deux ans l’équipier de Kameron McGusty -, Kristian Doolittle a multiplié en quatre ans les expériences : Porto-Rico - il a été champion en 2020 avec les Vaqueros de Bayamon -, G-League, Israël et le Japon (17,9 points et 9,4 rebonds dans l’Archipel). Son coach au CSP estime que c’est un joueur d’équipe capable de faire beaucoup de choses sur le terrain. Et son directeur sportif, Kevin Anstett, qu’il servira de deuxième meneur grâce à sa qualité de passes et son QI Basket. On le dit aussi costaud du bas du corps tout en étant mobile.
Simi Shittu
Né à Harrow, dans la banlieue de Londres, au sein d’une famille d'origine nigériane et caribéenne, il a grandi au Canada à partir de l’âge de cinq ans et possède les deux nationalités. Il a ensuite étudié aux Etats-Unis. Son très bon cycle au lycée a été gâché par une blessure au genou. Non drafté. Il a fait jusqu’ici beaucoup de G-League, toujours avec un rôle clé, un peu d’Europe via Israël et du championnat canadien. Doté d’un solide physique et d’une bonne mobilité pour sa taille (2,11 m). Son prénom est Oluwasimisola, ce qui donne comme diminutif Simisola ou encore Simi… C’est plus simple. Il se considère toujours comme un Londonien.
Les remplaçants
Lucas Beaufort
Un natif de Strasbourg et produit du centre de formation de la SIG. Il fut ensuite prêté à Aix-Maurienne, ce qui lui avait permis de s’exprimer en Pro B. Il est alors revenu en Alsace et il y a fait quelques percées. Il peut jouer les deux postes sur la ligne arrière, défendre dur et shooter à 3-points (36,6 % cette saison). La SIG a voulu le prolonger au terme de ses trois ans de contrat mais il a préféré changer d’air pour avoir davantage de temps de jeu. International U16 et U20 dans des rôles mineurs.
Lucas Ugolin
De bons passages l’an dernier lorsque l’équipe était en pleine tempête (21 points contre l’ASVEL, 18 contre Fos). Le Parisien semblait devoir faire un long séjour à Nancy, son club formateur, mais il aspirait à davantage de responsabilités et a signé en Haute-Vienne jusqu'en 2026. Un très bon shooteur à trois-points (plus de 40 % sur ses trois saisons professionnelles). Vice-champion du monde U19 en 2021 à 6,7 points en moyenne. Il a fait partie de la Select Team - une sorte d’équipe de France A’ -, qui a joué deux matches contre l’Arménie à Los Angeles. Il aimerait être polyvalent comme LeBron James et Kevin Durant.
Nemanja Nenadic
Né à Belgrade, il a longtemps œuvré en ABA League et dans la ligue serbe avant de partir en voyage, en Pologne/VTB League et Espagne. Ses stats en VTB avec Zielona Gora étaient très bonnes et c’est pourquoi il a été engagé en ACB dans une équipe qui a terminé 10e sur 18 et où il a été 3e marqueur - derrière l’ancien Manceau Scott Bamforth - et 3e rebondeur. Il peut évoluer sur trois positions. Physique avec une bonne qualité de passe et du QI Basket, et il est habitué à assumer des responsabilités. Il a réalisé un triple double dans le championnat polonais (18 points, 11 rebonds et 10 passes décisives), ce qui n’était pas arrivé depuis deux ans.
Mathieu Wojciechowski
Il a deux amours, la France et la Pologne, et sa double nationalité lui a permis d’évoluer dans les championnats des deux pays. Né à Calais, il a été international polonais en U20 et en A. Son autre particularité est d’avoir signé un contrat de cinq ans au CSP en 2015, à l’époque de Frédéric Forte, mais de n’y être resté que deux ans, pour y revenir en 2022. Un battant, qui doit encore prouver qu’il peut être efficace. Son évaluation a été divisée de moitié entre sa deuxième année au Portel et Limoges. Son maintien au sein de l’effectif actuel n’a a priori tenu qu’à un fil.
Alexandre Chassang
Ses meilleures années sont dijonnaises sous la houlette de Laurent Legname. C’est en Bourgogne qu’il a gagné ses galons d’international des fenêtres, fait apprécier sa solidité musculaire, et sa capacité à shooter à trois-points. Il a tenté une brève aventure en Turquie qui s’est soldée par un rapide retour en France, à Bourg. La deuxième saison a été très mitigée avec un temps de jeu en retrait et une fin en eau de boudin avec une blessure à la main. Il affirme que sa priorité était de rejoindre un club qui le voulait ardemment plutôt que le montant du salaire. Il compte sur le public de Beaublanc pour le pousser à en faire encore davantage. Prononcez Chassan sans le g.
Le coach
Ilias Kantzouris
Limoges a déjà eu un coach grec avec Panayotis Yannakis (2012-13). Celui-ci n’a évidemment pas le même pedigree de joueur ni même d’entraîneur, même si le parcours de Ilias Kantzouris est à relever. Il a été tour à tour assistant à Patras, à l'Aris Salonique, au Sporting Athènes, à l'AEK Athènes et à Panellinios, avant de le devenir à l’étranger au Zalgiris Kaunas, à UNICS Kazan et à Bamberg. Il y fut promu head coach par intérim jusqu'à ce que le club embauche le futur Strasbourgeois Luca Banchi. C’est ensuite comme coach qu’il a œuvré à Iraklis, Rhodes, et la saison dernière à l’AEK Athènes avec qui il a atteint les quarts de finale des playoffs du championnat de Grèce et de BCL.
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Photo d'ouverture : Nicolas Lang (Tuan Nguyen)
