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Il y a 30 ans, le Partizan Belgrade était champion d’Europe – Le fabuleux buzzer beater de Sasa Djordjevic

16 avril 1992. Les gamins du Partizan Belgrade du coach Zeljko Obradovic étaient sacrés champions d’Europe par la grâce d’un buzzer beater d’anthologie de Sasa Djordjevic.

16 avril 1992. Les gamins du Partizan Belgrade du coach Zeljko Obradovic étaient sacrés champions d’Europe par la grâce d’un buzzer beater d’anthologie de Sasa Djordjevic.

[arm_restrict_content plan= »registered, » type= »show »] Radojica Nikcevic a été assassiné au matin du 7 octobre 1993 alors qu’il sortait de sa Mercedes. Un témoin a vu deux hommes vêtus d’une salopette le guetter et l’un d’eux a tiré à bout portant dans la nuque de l’homme d’affaires millionnaire. Radojica Nikcevic était le fondateur de la première station de radio privée de Belgrade, directeur d’une coopérative d’habitation, proche du régime du président serbe de l’époque, Slobodan Milosevic, et président du Partizan Belgrade. Le lendemain, les condoléances du trop célèbre narcotrafiquant Pablo Escobar ont été publiées dans les journaux du pays, preuve ultime de l’aspect sulfureux de Nikcevic. Les assassins n’ont jamais été retrouvés.

20 ans plus tard, dans un film sur l’épopée du Partizan, l’illustre coach Zeljko Obradovic a déclaré que le triomphe en Euroleague en 1992 ne se serait pas produit sans Radojica Nikcevic. « C’est lui qui m’a convaincu que je pouvais diriger l’équipe. »

Photo : Zeljko Obradovic, au centre, avec Dragan Kicanovic, à droite.

Dragan Kicanovic choisit Zeljko Obradovic

On peut rembobiner le film jusqu’en 1989. Cette année-là, Cantu coaché ​​par Carlo Recalcati, fait figure de favori pour décrocher la Coupe Korac (C3) avec Antonello Riva, 26 ans, surnommé Superman en raison de ses larges épaules. Riva va marquer un total de 55 points sur les deux matches de la finale, mais ni sa performance, ni les 13 points d’avance pris par l’équipe italienne à l’aller, ne vont empêcher le Partizan de remporter le trophée grâce à un succès de 19 points au retour.

Le choc, en finale du championnat yougoslave, face au Jugoplastika Split, qui venait de remporter le premier de ses trois trophées consécutifs dans le championnat d’Europe des clubs -l’ancêtre de l’Euroleague- était attendu comme une sorte de Super Coupe d’Europe, mais il fut le théâtre d’un scandale. En colère à cause de l’arbitrage et le jet d’une pièce de monnaie sur Vlade Divac, les joueurs du Partizan quittèrent le terrain au milieu du deuxième match et Split du coach Bozidar Maljkovic fut reconnu comme le champion national.

L’homme qui était à la base de la génération montante du Partizan était le directeur sportif Dragan Kicanovic, l’un des meilleurs basketteurs du monde dit amateur des années 70. Il savait à la fois critiquer ses joueurs et aussi distribuer généreusement des compliments, sans jamais faire état de son illustre passé de joueur. « Mais l’administration du Partizan ne s’est pas développée aussi vite que l’équipe », a regretté plus tard Vlade Divac. « Cela a conduit au chaos. On faisait ce que l’on voulait, et à cause de notre jeunesse, on a fait des bêtises qui ont eu un impact négatif sur le jeu. Une fois, sans prévenir, je suis parti pendant trois jours en Italie et je n’avais aucune raison de faire ça. »

Le Partizan va ensuite assister à une véritable fuite des cerveaux. Le meneur de jeu Sasa Djordjevic est parti faire son service militaire, Vlade Divac et Zarko Paspalj s’en sont allés en NBA, et l’entraîneur Dusko Vujosevic à Grenade. Sans eux, l’équipe de la capitale ne termina que huitième du championnat suivant. Un an plus tard, Vujosevic revint à Belgrade, mais à l’Etoile Rouge. Ranko Zeravica fut à même de reprendre le job de coach, mais rechigna à s’occuper de ce fardeau. Dragan Kikanovic fut en quête d’un nouvel entraîneur mais sans pouvoir lui offrir des perspectives financières alléchantes ; le club était si pauvre qu’il demanda à l’agent Luciano Capicchioni de lui fournir des paires de basket. C’est alors que se produit le déclic.

Meneur de jeu de la sélection yougoslave, Zeljko Obradovic avait 31 ans. Cinq ans auparavant, il avait suivi une formation d’entraîneur et il s’était occupé de Predrag Danilovic lorsqu’il avait 16 ans. Sa carrière fut interrompue lorsqu’il a dû purger une peine de deux ans de prison pour avoir causé la mort d’un piéton lors d’un accident de voiture. Il avait repris place sur le terrain au Partizan et en équipe nationale lorsque se profila l’Eurobasket à Rome. « Je n’ai pas d’entraîneur pour la saison prochaine », lui a avoua Kicanovic. « Eh bien, il s’avère que j’ai un entraîneur pour toi », a répondu Zeljko. « Et qui est-ce ? », a demandé Kicanovic. « Moi-même », a tranché Obradovic qui a relevé ce pari risqué en sacrifiant le championnat d’Europe qui vit le sacre de la Yougoslavie pourtant privée de Drazen Petrovic et sur la fin de Jure Zdovc.

Djordjevic-Danilovic, un tandem qui ne se parlait pas

Sasa Djordjevic a été un temps tenu à l’écart de l’équipe nationale du fait du conflit entre son père et le coach Dusan Ivkovic, ainsi que son incompatibilité de jeu avec Drazen Petrovic, qui avait besoin autour de lui de forts défenseurs comme Jure Zdovc. Djordjevic a été couronné champion d’Europe à Rome, en compagnie de Predrag Danilovic.

Natif de Sarajevo, Danilovic accepta l’offre de Dusko Vujosevic de rejoindre le Partizan malgré les protestations de sa mère et l’interdiction du Bosna Sarajevo. « Son président, Mirza Delibasic ne m’a pas laissé partir, mais je suis quand même parti, ce qui, selon les règles de l’époque, signifiait une interdiction d’un an », s’est souvenu Danilovic. « Puis, pour une raison quelconque, le président de la fédération l’a prolongé d’un an et je me suis envolé pour l’Amérique, où j’ai terminé mes études et amélioré mon anglais. Quand je suis revenu au Partizan, je me suis entraîné 7 à 8 heures par jour, j’ai joué sous un faux nom et, à cause du surmenage, j’ai provoqué une bagarre dans l’un des matchs. » Danilovic a marqué 10 points dans chacun des deux matches de la finale de la Coupe Korac 89, mais en raison d’une fracture de la jambe, il a raté presque toute la saison suivante et la Coupe du monde en Argentine. A son retour de l’infirmerie, et Djordjevic de l’armée, le Partizan a obtenu la meilleure ligne arrière d’Europe.

Et pourtant, les deux joueurs s’ignoraient en dehors du parquet. « Ils ont cessé de parler après un conflit à l’entraînement », a écrit Aleksa Nikolic sur le site de la Radio Télévision de Serbie. « Tous deux ont montré leur fierté. Même assis avec des copines à la même table de café, ils ne se parlaient pas. Mais dans les matches, personne n’a remarqué les désaccords. » « Ils étaient de vrais amis sur le terrain », a ajouté Zeljko Obradovic . « Ils se comprenaient parfaitement, même s’ils ne communiquaient pas ensemble. Je dis souvent aux basketteurs : « Trouver un ami dans un café, c’est facile. Mais un ami qui vous aidera dans le jeu est beaucoup plus difficile ». Danilovic et Djordjevic formaient un duo phénoménal. »

Avec en plus le départ de Miroslac Pecarski en Grèce, la frontline du Partizan était déficitaire. Aussi, elle s’enrichit de Slavisa Koprivica du BMI Belgrade et d’un couple de jeunes centres, Mladjan Silobad de l’Etoile Rouge et Zeljko Rebraca de Novi Sad. Tous les joueurs du Partizan étaient serbes, sauf Ivo Nakic, qui était croate. Ils avaient 21 ans et demi de moyenne d’âge. Zeljko Obradovic fit par ailleurs appel à la science du professeur Aleksandar Nikolic, le démiurge du basket yougo. « Nikolic ne s’est pas assis sur le banc et n’est pas allé à des matches en dehors de Belgrade », a témoigné Vladimir Stankovic, journaliste au magazine Kos, « mais il a participé à l’entraînement, éliminant les erreurs et les mauvaises habitudes des joueurs. Et Zeljko a regardé et appris. »

En raison de la guerre en cours en Yougoslavie, les trois équipes yougos ont été obligées de jouer l’ensemble de leurs matches à domicile en dehors de leur pays. Le maire de Fuenlabrada, une ville proche de Madrid, qui avait poussé à l’édification d’une salle, baptisée du nom de Fernando Martín en l’honneur du premier joueur espagnol en NBA, décédé dans un accident de voiture en 1989, voulait impliquer ses administrés dans le basket, et c’est pourquoi il pris la décision d’accueillir le Partizan, alors que le Cibona Zagreb était hébergé à Puerto Real et Jugoplastika Split à La Corogne. Il s’attendait à rassembler tout au plus un millier de spectateurs à chaque match, il y en eut trois à quatre fois plus. Le Partizan a même été activement soutenu lors de ses déplacements à Estudiantes Madrid, à la Joventud Badalona, aux entraînements, alors que ses joueurs se sont vu offrir des gâteaux aux anniversaires.

Jouer ses matches de coupe d’Europe à l’étranger n’était pas pour autant une sinécure. Il est arrivé que l’équipe soit le mercredi soir en Espagne, et prenne l’avion après dîner pour arriver par avion à Belgrade vers 5 heures du matin, s’entraîne le soir, et ait sur l’agenda un match de championnat le lendemain. Les joueurs ont souffert d’insomnie, et souvent se réveillaient sans savoir dans quelle ville ils étaient.

Ces va-et-vient n’ont pas pour autant perturbé la marche en avant du Partizan. Ils se sont sortis avec quelques égratignures du groupe préliminaire mais bien vivants, avant d’éliminer le Knorr Bologne, deux manches à une, en quart-de-finale, en ayant la possibilité de jouer un match au Pionir de Belgrade, à moitié vide. « Le club voulait gagner de l’argent et en a fait trop avec le prix des billets », a admis le manager du Partizan, Dragan Todoric. « Seulement 2000-2500 personnes sont venues au seul vrai match à domicile de cette Euroleague. »

LE buzzer beater de Sasa Djordjevic

« Incroyable ! Incroyable ! »

Le Final Four d’Istanbul, qui fut couvert par 75 chaînes de télévision, se tint dans un contexte douloureux pour les Yougos. « Au printemps 1992, le chaos régnait à Sarajevo. Les parents de Sasa (Danilovic) sont restés là-bas et j’ai vécu avec lui dans la même pièce et j’ai vu à quel point il était nerveux, il ne pouvait pas dormir. Il était constamment dans une attente anxieuse et a appelé chez lui, persuadant ses parents de déménager à Belgrade, mais ils ne voulaient pas quitter leur appartement à Sarajevo », rapporte Mladan Silobad.

Le Partizan eut comme premier adversaire le Phillips Milan de l’ex-star de NBA, le pétulant Darry Dawkins, et trois finalises de l’EuroBasket 1991, Antonello Riva, Davide Pessina et Riccardo Pitis. Zeljko Obradovic sut motiver ses troupes en leur déclarant : « Les journalistes italiens estiment nos chances de gagner à 15 % ». « Nous étions comme des bébés qui apprenaient à marcher », se souvient le centre Mladjan Silobad. « Ils ne savaient pas ce qu’étaient les chutes et la douleur. Et donc nous avons avancé dans le tournoi. Avais-je peur de Dawkins ? Oui, j’ai juste joué du mieux que je pouvais, et puis, il s’avère que je l’ai arrêté. Certes, il pesait 130 kg et moi 94. Seul Rebraca était plus léger que moi avec ses 92 kilos. » Zoran Stevanovic se souvient parfaitement de sa rencontre avec le colosse américain : « Dawkins m’a donné un coup de coude dans la gorge. Pendant deux jours, je n’ai pas pu récupérer et même prendre une gorgée d’eau. » Le tournant du match se situa à trois minutes de la fin lorsque Chocolate Thunder Dawkins (21 points et 19 rebonds) écopa d’une sévère cinquième faute. Le Partizan s’imposa 82-75. Le plus beau était encore à venir.

Quelques secondes auparavant, l’affaire paraissait enveloppée. Tomas Jofresa, l’une des figures-clé de l’équipe de la Joventud Badalone, avec son frère Rafa et Jordi Villacampa, venait de marquer son 18e point. Les Espagnols, qui quelques mois auparavant avaient fait trembler les Los Angeles Lakers à Paris, avaient neuf doigts et demi sur le trophée de la Ligue des Champions, l’appellation de l’Euroleague à l’époque. On a alors vécu l’un des plus grands moments de l’histoire du basket européen. Il restait 9 secondes à jouer. Slavisa Koprivica a passé le ballon dare-dare à Sasa Djorjevic, qui a couru sur le côté droit et fait un coast to coast. Djordjevic n’a pas pensé à un seul moment assurer un panier à deux-points. Il s’est dit : banco ! Il a fait un bond des deux pieds conservant son équilibre en l’air, et envoyé la balle au-delà de la ligne située alors à 6,25m. « Au moment où Predrag Danilović a été éliminé en raison de fautes, tout le monde savait que Djordjevic prendrait ce tir décisif. Tomas Jofresa l’a suivi pendant le sprint à Abdi Ipekci Hall à Istanbul, mais il n’a pas réussi à voler le ballon à un moment crucial. « Morales est venu l’aider, mais il était en retard et personne n’a pu arrêter ce tir du gars, qui jouera plus tard pour Barcelone et le Real Madrid », a écrit un journaliste espagnol.

La balle est entrée dans le filet. 71-70. Le Partizan Belgrade et son équipe de 21 ans et demi de moyenne d’âge était champion d’Europe. « Incroyable, incroyable ! », a crié de dépit l’entraîneur de la Juventud Lolo Sainz. « Mon rêve d’enfant est devenu réalité ! En tant qu’enfants, jouant dans les cours d’école, sur du béton, nous avons souvent imaginé de tels matches : le temps presse et il faut marquer le dernier point, tout le monde est debout. Je suis un homme heureux parce que mon rêve est devenu réalité. Je ne me suis jamais senti aussi bien qu’alors », a déclaré Djordjevic aux médias en Serbie des années après son exploit d’anthologie. « Ce panier a changé ma carrière, a augmenté ma confiance en moi. Depuis lors, j’ai toujours pris la responsabilité de prendre ce dernier shoot. Certaines balles ne sont pas entrées, mais il y a eu plus de moments heureux que de déceptions. »

Le panier de Djordjevic a changé non seulement sa carrière, mais aussi le destin du Partizan et de son coach, Zeljko Obradovic.  « Ce shoot a changé toutes nos vies. L’émotion que j’ai ressentie avec ce titre, je ne l’ai plus jamais ressentie de ma vie », avoue Obradovic, qui cumule depuis un Championnat d’Europe et une Coupe du monde, une médaille d’argent olympique, et neuf Euroleague avec cinq équipes différentes, dont une avec la Joventut, deux ans plus tard à Tel-Aviv.

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20 ans plus tard, dans un film sur l’épopée du Partizan, l’illustre coach Zeljko Obradovic a déclaré que le triomphe en Euroleague en 1992 ne se serait pas produit sans Radojica Nikcevic. « C’est lui qui m’a convaincu que je pouvais diriger l’équipe. »

Photo : Zeljko Obradovic, au centre, avec Dragan Kicanovic, à droite.

Dragan Kicanovic choisit Zeljko Obradovic

On peut rembobiner le film jusqu’en 1989. Cette année-là, Cantu coaché ​​par Carlo Recalcati, fait figure de favori pour décrocher la Coupe Korac (C3) avec Antonello Riva, 26 ans, surnommé Superman en raison de ses larges épaules. Riva va marquer un total de 55 points sur les deux matches de la finale, mais ni sa performance, ni les 13 points d’avance pris par l’équipe italienne à l’aller, ne vont empêcher le Partizan de remporter le trophée grâce à un succès de 19 points au retour.

Le choc, en finale du championnat yougoslave, face au Jugoplastika Split, qui venait de remporter le premier de ses trois trophées consécutifs dans le championnat d’Europe des clubs -l’ancêtre de l’Euroleague- était attendu comme une sorte de Super Coupe d’Europe, mais il fut le théâtre d’un scandale. En colère à cause de l’arbitrage et le jet d’une pièce de monnaie sur

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Photo d’ouverture : Partizan

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