Les Bleus nous ramènent une très belle médaille d’argent de ce championnat d’Europe que Tony Parker estime « le plus relevé de l’histoire. »
On devrait être content : ce statut de vice-champion continental est une magnifique réussite, et on aurait tort de bouder notre plaisir surtout que nos Bleus ont successivement dû abattre Allemands, Italiens, Serbes, Turcs, Lituaniens, Grecs, et Russes ! Bref, il n’y a pas grand-chose à dire, et ce fut une très belle épopée et une intense aventure humaine (70 jours de vie commune) !
Mais cette finale perdue laisse aussi quelques regrets. Avant de refermer définitivement le livre de cet Euro, revenons sans faux-semblant sur ce qui a manqué à la France pour venir inquiéter l’armada espagnole mais également sur les forces (nombreuses) de nos Bleus.
Les bonnes surprises
Une cohésion nouvelle
Autour de son leader Tony Parker, cette équipe s’est enfin trouvé une unité, un esprit de corps, une identité d’équipe. C’est fondamental pour la suite. Car ne l’oublions pas, et Gregor Beugnot le soulignait justement sur le plateau de Canal, nos Bleus ne sont encore qu’au commencement de leur histoire. Ce groupe est tout frais. Tony, Boris, Flo et Ronny en sont les éléments primaires (respectivement le feu, l’eau, le vent et la terre comme ce dernier l’explique dans son blog sur l’Equipe.fr). Et visiblement, le cinquième élément est Joakim. Il y aura un avant et un après Noah. Son arrivée, combinée à la mainmise de Parker sur le leadership, a propulsé nos Bleus sur une autre planète. Continuons sur cette lancée !
Une meilleure gestion des fins de match
Cela reste encore perfectible (remember le trou d’air affreux contre la Turquie) mais les résultats sont là. La France a gagné nombres de matchs durant cet Euro qu’elle n’aurait certainement pas gagné auparavant. La solidarité à toute épreuve qu’a su créer le coaching staff a porté ses fruits. Les shoots de Gelabale durant le premier tour, ceux de Parker ou de Batum durant les quart et demis : toutes ces réussites sont conditionnées par la confiance que le groupe France a cultivé précieusement, puisant même parfois cette force collective dans les échecs (nombreux malheureusement) du passé. C’est le métier qui rentre, comme on dit. Mieux vaut tard que jamais…
Des choix de coaching payants
On en a déjà parlé sur Basket Europe ; Vincent Collet et ses assistants ont fait du très bon boulot. Ne mésestimons pas leur travail. Lancer Tchicamboud contre la Lettonie, Kahudi contre la Serbie, Séraphin contre l’Espagne (au second tour), De Colo contre la Lituanie ; tous ces choix tactiques se sont avérés payants. C’est à la fois la preuve que l’entraîneur et ses joueurs sont sur la même longueur d’ondes et que la confiance règne dans ce groupe. Tout est lié. Pour aller au combat, il faut faire confiance à ses généraux. Collet sur le banc, Parker sur le terrain ont obtenu ce capital confiance. C’est tout bon pour la suite.
Les manques
La dureté
Appelez cela comme vous voudrez : vice, dureté, roublardise, méchanceté. La France ne l’a pas encore. L’Espagne l’a, et l’a démontré. Cette vilaine faute de Rudy Fernandez (passible d’expulsion directe outre-Atlantique – ne faudrait-il pas que la FIBA se rénove à ce niveau-là ?) en est l’exemple paradigmatique. Les Espagnols arpentent les hauteurs de la planète basket depuis une décennie ; et si leur expérience leur a appris quelque chose, c’est bien que le haut-niveau nécessite non seulement du talent, mais également (hélas) des « coups bas. » Tony Parker avait prévenu ces coéquipiers (« Il faudra être plus durs ») mais, dans cette finale notamment, la France a encore manqué de ce vécu FIBA qui implique que les joueurs n’acceptent pas de se faire marcher dessus. Le quart contre la Grèce avait déjà été un avertissement sans frais (et Noah, avec son dunk surpuissant sur Bouroussis avait sonné la charge), le basket FIBA est ainsi fait, il faut savoir s’y plier.
Un véritable ailier-fort
On a attendu pendant des années de posséder un pivot digne de ce nom, et désormais c’est un ailier-fort moderne qui nous fait défaut. Boris Diaw pourrait l’être mais il ne peut pas tenir tête à un Dirk Nowitzki ou un Pau Gasol. Il nous manque ce 4 capable de prendre 10 rebonds par match, d’ouvrir des brèches pour Joakim Noah, tout en étant capable d’apporter un danger à 5-6 mètres. Même en jeunes, on ne le voit pas arriver… Avec un Noah qui est d’abord un pivot défensif, la France a besoin d’un ailier-fort bon attaquant pour une meilleure alternance de son jeu.
Un deuxième meneur
Tony Parker a été monstrueux sur ce tournoi. Pour son 6ème Euro (déjà), il a encore brillé en terminant meilleur scoreur du tournoi (22,1 points) et démontrant une nouvelle fois sa capacité à porter son équipe nationale vers la victoire. Mais il a aussi été largement surexposé aux coups de ses adversaires. Sur la finale, cela a été évident. Calderon, Rubio, et Sada se sont succédés pour lui rendre la vie difficile, avec une petite poussette par là, un petit coup par ici. Et de manière générale, avec 35 minutes de moyenne, il faut lui trouver un back-up. Alors, évidemment, on pense tout de suite à Rodrigue Beaubois qui, comme Tony, peut apporter vitesse et scoring. Les Gravelinois Pape Sy et Yannick Bokolo sont également de très bons candidats. A voir…
Le respect des arbitres ?
C’est là une question nécessairement problématique. Et elle semble se régler petit à petit comme le prouve notre parcours dans ce tournoi. Mais que ce fut douloureux de voir Joakim Noah, Florent Piétrus se faire tous deux sortir du terrain dans la grande finale pour avoir été un peu trop physique (d’aucuns diraient trop généreux dans l’effort) ! Que ce fut laid de voir Tony Parker se faire violenter tout au long du match, avec en point d’orgue, ce véritable attentat gratuit de Rudy Fernandez ! Que faut-il aux arbitres pour enfin sanctionner ce vilain état d’esprit ! La frontière entre le basket FIBA et le basket NBA est encore trop mobile. Nos Bleus ne sont pas encore experts dans le savoir-faire FIBA. Ça ne saurait tarder.
Photo : JF Mollière / FFBB