Après la troisième médaille en autant de compétitions internationales chez les hommes, le président de la fédération française de basketball Jean-Pierre Siutat estime que le basket français va « dans le bon sens », même s’il a besoin de « s’attaquer à certaines vérités ».
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À peine la déception de la finale européenne perdue de l’équipe de France contre l’Espagne digérée, Jean-Pierre Siutat nous a accordé quelques minutes afin de dresser le bilan de l’été. Médaille d’argent à l’Euro, montée en puissance du 3×3, axes de réflexion pour le développement des jeunes, ambitions des Bleues à la Coupe du monde en Australie, saturation des clubs malgré un engouement sans précédent du nombre de licenciés… le président de la fédération française de basketball (FFBB) a balayé les sujets forts du moment.
Cette médaille d’argent ramenée par les Bleus à l’EuroBasket est-elle satisfaisante ?
« Nous sommes très fiers de ce résultat. Nous sommes passés par une petite fenêtre, mais nous sommes fiers de cette troisième médaille consécutive (NDLR : après la Coupe du monde 2019 et les Jeux Olympiques de Tokyo en 2021). Ce n’est pas rien. Nous sommes à deux ans des Jeux de Paris 2024, nous souhaitons nous qualifier pour la Coupe du monde 2023, il nous reste un ou deux matches sur quatre à gagner pour y parvenir. Nous avons des ambitions sur 2023 et de très grandes ambitions pour 2024. Ce que l’on a vu lors de cet Euro nous rassure un peu. Nous savions qu’il manquait des joueurs cadres de l’équipe de France, mais nous avons vu des joueurs se révéler, c’est très positif pour l’avenir. Je veux rester sur un vrai message positif pour le basket français. Quand on regarde le bilan de cette année, malgré nos détracteurs, on peut dire que le basket français est solide. »
Est-ce que cela devient normal de ramener une médaille à chaque compétition pour l’équipe de France ?
« On ne s’habitue pas aux médailles, on sait trop le travail que c’est pour en arriver là. Mais je le vois par rapport aux SMS que je reçois. La première médaille, j’avais reçu 1 000 SMS, la deuxième 500 SMS et la troisième 100. Ce sont plus les gens qui commencent à se dire que c’est normal. »
Quel bilan dressez-vous de cette compétition ?
« Il faut d’abord féliciter l’Espagne, qui a fait un très beau tournoi. C’est une grande nation. Il faut aussi féliciter l’organisation de cette compétition, même s’il y a certainement des choses à revoir, notamment au niveau de l’arbitrage. Nous vivons une situation compliquée, à cause du conflit avec l’Euroleague, les meilleurs arbitres n’étaient pas là. Nous avons quand même de bons arbitres qui méritaient d’être à l’Euro, mais au vu des efforts consentis par les fédérations, il faut absolument que nous ayons tous les ingrédients pour réussir. L’organisation était bonne, il faut que tout soit bon, pour contribuer à la promotion de notre sport. Il faut, je pense, essayer de régler le conflit avec l’Euroleague. C’est important. C’est compliqué pour tout le monde, pour les fédérations, les ligues nationales, les clubs, les joueurs et les staffs. Résolvons ce problème pour repartir sur une bonne base, avec une vraie feuille de route. Il faut peut-être ajouter également un jour de repos supplémentaire entre les deux tours pour mieux se préparer, et organiser un tirage au sort après les poules, comme je l’avais déjà proposé en 2016 pour les Jeux. Je pense que ce serait intéressant afin d’éviter d’éventuels calculs lors des derniers matches de poules. »
« Au-delà du bilan comptable chez les jeunes, c’est la manière dont on joue qui m’a un peu chagriné »
La finale de l’Euro entre l’Espagne et la France a fait 2,3 millions de téléspectateurs sur M6, avec une pointe à 3 millions, sans compter les audiences de Canal +. Qu’est-ce que ce chiffre dit du basket en France ?
« C’est une bonne nouvelle. Aujourd’hui, le basket est très peu vu sur des chaînes gratuites. On arrive à le montrer un peu grâce aux décrochages de France 3 au travers de la Ligue Nationale de Basket pour la première division, on le fait à partir de maintenant sur le nouveau contrat avec France Télévisions pour les équipes de France. Canal + avait les droits jusqu’à cet Euro et ils avaient tout à fait raison de les exploiter. Donc nous n’avions que très peu de chances d’être vus, exceptés les phases finales. Imaginez si nous n’avions pas été en demi-finale et en finale, nous n’aurions pas été vus du tout sur une chaîne gratuite. Nous sommes déjà ravis d’être là parce que nous sommes vus. Il y a bien sûr la déception de la défaite mais, globalement, ces chiffres sont très satisfaisants. Les Jeux Olympiques sont encore plus importants en termes de visibilité car les gens s’y intéressent vraiment, ils les regardent, ils zappent d’un sport à l’autre. Mais bien sûr, à chaque fois qu’on peut être vu et bien figurer à l’image, c’est super. »
Sur les réseaux sociaux, vous n’avez pas caché votre déception à l’heure du bilan des campagnes internationales de jeunes. Comment l’expliquez-vous ?
« Nous avons une semaine de travail prévue avec la Ligue Nationale de Basket sur ce sujet mais, oui, nous aurions pu faire un peu mieux, c’est sûr. Ce que nous avons vu cet été, en jeunes et encore dimanche en finale de l’Euro, c’est que l’Espagne nous domine. C’est vrai qu’on peut avoir des différences dans le recrutement des jeunes et cela découle de plusieurs choix. Le premier, qui est un choix de nous tous à la fédération et que nous assumons, c’est de chercher des joueurs qui ont un potentiel pour se révéler au plus haut niveau plus tard. Le deuxième choix, c’est celui de ne pas faire doubler dans les catégories jeunes. On l’a fait uniquement avec les U16 filles qui sont championnes d’Europe (NDLR : Nell Angloma et Tea Cleante avaient participé à la Coupe du monde U17), c’est-à-dire que nos jeunes ne font qu’une seule compétition par été. C’est un choix que nous assumons et que la plupart des équipes ne font pas. On aurait pu envoyer Victor (Wembanyama) et compagnie en U20 et nous n’aurions probablement pas eu les mêmes résultats. C’est un choix. Au-delà du bilan comptable, c’est la manière dont on joue qui m’a un peu chagriné. Il ne faut pas tout jeter, beaucoup de gens envient la qualité de travail en France, on le voit avec le nombre de jeunes joueurs et jeunes joueuses qui sont envoyés tôt en équipe de France, mais on doit corriger le tir. De temps en temps, c’est aussi mon rôle de le dire. »
Quels sont les axes principaux établis pour corriger le tir ?
« C’est ce à quoi doit réfléchir la direction technique nationale. Il y a ce qu’on peut faire pour masquer une vérité et ce qu’on peut faire pour s’attaquer à une vérité. Pour s’attaquer à une vérité, il y a un travail de fond à faire dans tous les clubs, à l’image de ce qui se fait en Espagne. La culture basket dans les clubs est différente et elle est à la base de tout. Ça transpire le basket. Nous, nous héritons de joueurs qui ont d’abord des qualités physiques. C’est un vrai travail de fond mais qui va prendre 20 ans. Il faut une génération complète pour corriger le tir, et ça ne se voit pas en claquant des doigts. Mais pour les plus anciens dont je fais partie, souvenez-vous des années 1980-1990, nous étions la risée de l’Europe. On ne passait pas un premier tour. Si l’on doit prendre du recul sur les années qui viennent de s’écouler, on est globalement pas trop mal. »
« Nous sommes à 700 000 licenciés, c’est notre record historique. Mais aujourd’hui, nous sommes aussi au bord de la saturation dans nos clubs. L’année dernière, nous avons refusé entre 60 et 70 000 licenciés, c’est énorme. »
Quel bilan dressez-vous de la saison estivale de 3×3, où les Bleu(e)s ont ramené une flopée de médailles ?
« Le 3×3 a été extraordinaire, il a fait une vraie montée en puissance en 2022. Ce que nous avons fait cette année dans cette discipline est extraordinaire à tous les niveaux, avec en point d’orgue notre équipe de France féminine qui a réussi l’exploit d’être championne du monde et championne d’Europe la même année. C’est un vrai signal pour Paris 2024, une vraie fierté pour le basket français. Nous allons essayer de nous maintenir à un tel niveau en 2023 et de poursuivre le développement de cette discipline, qui est très appréciée chez les jeunes. »
À l’aube de la saison 2022-2023, comment se porte le basket dans les clubs en France ?
« Aujourd’hui, nous sommes à 700 000 licenciés, c’est notre record historique. Nous étions à 450 000 en 2010, donc c’est une sacrée progression. Mais aujourd’hui, nous sommes aussi au bord de la saturation dans nos clubs. L’année dernière, nous avons refusé entre 60 et 70 000 licenciés. C’est énorme. Les clubs ont perdu des dirigeants. Nous avons lancé une opération pour en avoir de nouveaux, ce qui nous a permis d’avoir quasiment 15 000 nouveaux encadrants. Mais aujourd’hui, notre problème, c’est vraiment la saturation des capacités d’accueil. On ne peut plus accueillir vraiment de nouveaux licenciés, même si nous avons énormément de pratiquants, qu’on évalue à 2,5 millions de personnes. En revanche, on a un gros développement du basket 3×3, c’est pour cela qu’on fonce sur la création de terrains extérieurs. On veut que les gens viennent pratiquer, même s’ils ne sont pas licenciés en clubs, qu’ils pratiquent le basket, qu’ils aiment le basket, qu’ils consomment autour du 3×3, autour des HoopsFactory. »
Les Bleues disputent actuellement la Coupe du monde en Australie pour la première de Jean-Aimé Toupane. Quelles sont les attentes ?
« Elles n’ont pas de pression. Il manque des cadres (NDLR : Sandrine Gruda, Marine Johannès, Endy Miyem, Valériane Vukosavljevic, entre autres) et il faut redire que, même avec ces cadres, on n’a jamais fait mieux qu’une 5e place (exceptée une médaille de bronze en 1953 dans une autre époque). Si on fait une belle performance, tant mieux, ça permettrait de capitaliser pour Paris 2024. Mais l’important, c’est surtout d’éviter le faux-pas en se sortant d’un premier tour qui est très difficile. On prendra ce qu’il y a à prendre. »
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À peine la déception de la finale européenne perdue de l’équipe de France contre l’Espagne digérée, Jean-Pierre Siutat nous a accordé quelques minutes afin de dresser le bilan de l’été. Médaille d’argent à l’Euro, montée en puissance du 3×3, axes de réflexion pour le développement des jeunes, ambitions des Bleues à la Coupe du monde en Australie, saturation des clubs malgré un engouement sans précédent du nombre de licenciés… le président de la fédération française de basketball (FFBB) a balayé les sujets forts du moment.
Cette médaille d’argent ramenée par les Bleus à l’EuroBasket est-elle satisfaisante ?
« Nous sommes très fiers de ce résultat. Nous sommes passés par une petite fenêtre, mais nous sommes fiers de cette troisième médaille consécutive (NDLR : après la Coupe du monde 2019 et les Jeux Olympiques de Tokyo en 2021). Ce n’est pas rien. Nous sommes à deux ans des Jeux de Paris 2024, nous souhaitons nous qualifier pour la Coupe du monde 2023, il nous reste un ou deux matches sur quatre à gagner pour y parvenir. Nous avons des ambitions sur 2023 et de très grandes ambitions pour 2024. Ce que l’on a vu lors de cet Euro nous rassure un peu. Nous savions qu’il manquait des joueurs cadres de l’équipe de France, mais nous avons vu des joueurs se révéler, c’est très positif pour l’avenir. Je veux rester sur un vrai message positif pour le basket français. Quand on regarde le bilan de cette année, malgré nos détracteurs, on peut dire que le basket français est solide. »
La finale de l’Euro entre l’Espagne et la France a fait 2,3 millions de téléspectateurs sur M6, avec une pointe à 3 millions. Qu’est-ce que ce chiffre dit du basket en France ?
« C’est une bonne nouvelle. Aujourd’hui…
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Photo : Jean-Pierre Siutat (FFBB)