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Jean-François Reymond (SNB): « On a pris les joueurs en otages et c’est dégueulasse »

Nando De Colo (Euroleague) Après huit ans à la tête du syndicat des joueurs (SNB), Jean-François Reymond quitte le milieu du basket pour le rugby. L’occasion de faire un bilan avec celui qui a été au cœur de la vie du basket professionnel français. Chômage, turnover des joueurs, rapport avec les age

Nando De Colo (Euroleague)

Après huit ans à la tête du syndicat des joueurs (SNB), Jean-François Reymond quitte le milieu du basket pour le rugby. L’occasion de faire un bilan avec celui qui a été au cœur de la vie du basket professionnel français.

Chômage, turnover des joueurs, rapport avec les agents, dopage, conflit FIBA-Euroleague, féminines, statistiques, passeports européens bidons, nous avons balayé un maximum de sujet d’actualité lors de cette interview fleuve qui est en trois parties à suivre.

Troisième et dernière partie.

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Que pensez-vous du fait que la règle des joueurs européens est détournée par un nombre de passeports suspects donnés à des joueurs américains par des pays de l’Est de l’Europe ?

Lorsqu’elle a rendu sa décision par rapport à la plainte déposée par François Lamy (NDLR : agent de joueurs), la Commission Européenne a dit qu’elle ne voulait pas de restriction sur les Européens. « Par contre pour les extra-communautaires et les non-Cotonou, si vous voulez en mettre zéro, mettez en zéro », a t-elle précisé. Sauf que derrière, comme c’est voté au Comité Directeur, les présidents de club ne veulent pas transformer leur Américain en Européen. Ils disent : « comment je vais faire si je n’ai pas mon Américain ? » Ce qui intéresse la Commission Européenne, c’est que les Européens aient le droit d’aller et venir pour avoir des opportunités mais ils n’ont jamais dit que l’on pouvait avoir quatre Américains par équipe.

Certes, mais c’est un autre volet du dossier. Là, le gros problème, c’est que de plus en plus de joueurs américains contournent les règlements en obtenant des passeports européens. On les voit dans les équipes nationales mais aussi dans certains clubs. Il y en avait trois la saison dernière à Monaco…

… Strasbourg en a trois aussi. Ce sont les conditions d’obtention de passeports dans certains pays. Cet été, un joueur du championnat m’a appelé pour me dire qu’on lui proposait un passeport d’un pays africain. Il se demandait si ça valait pour lui le coup d’accepter car ça pouvait être une bonne opportunité pour sa carrière. Le deal, c’était on lui donne un peu d’argent et on lui demande de jouer avec l’équipe nationale pour la qualification pour la Coupe du Monde, la CAN (NDLR : l’AfroBasket). Là, tu te dis, « mais il est où le projet dans ce pays ? » C’est quand même hallucinant d’en arriver à ça. Effectivement c’est plus facile d’avoir un passeport roumain ou ukrainien qu’un passeport français. Beaucoup d’Américains essayent d’avoir un passeport français mais pas beaucoup réussissent. Il faut avoir vécu cinq ans sur le territoire, être à jour de ses impôts, parler français, plein de choses, alors que dans d’autres pays les conditions d’accès à la nationalité sont différentes. C’est ça qui fragilise le truc.

Lorsque vous discutez de ce phénomène au niveau du syndicat européen, vous n’envisagez pas des solutions ?

La solution c’est une uniformisation des règles dans les pays européens mais c’est pour dans quinze, vingt ans, pas pour maintenant. A part ça, je ne vois pas de solutions.

Quelle est votre position à propos du conflit entre la FIBA et l’Euroleague et les fenêtres pour les matches de qualification ?

La position est uniforme à travers tous les syndicats européens, c’est qu’on a pris les joueurs en otage et c’est dégueulasse. Depuis cinq ans que les discussions ont commencé, les seuls à qui on n’a pas parlé dans ce processus, ce sont les joueurs. Et là, à quasiment trois ou quatre semaines des matches, on leur demande s’ils veulent y aller. La FIBA fait des réunions en invitant des joueurs et a priori on va encore avoir un rendez-vous à Barcelone. C’est la guerre entre Patrick Baummann et Jordi Bertomeu et au final, ce sont les joueurs qui souffrent. On va leur demander de choisir entre leur employeur et leur équipe nationale. Tous les gars disent dans les interviewes, « oui, j’ai envie d’aller en équipe nationale » mais ça ne peut pas être à n’importe quelles conditions.

Adrien Moerman (FC Barcelone)
« Si leurs clubs leur demandent de faire les matches, ils vont les faire même s’ils aiment leurs équipes nationales »

Les joueurs qui jouent en Euroleague s’adressent t-il à leur syndicat pour savoir ce qu’ils doivent faire ?

Ils sont salariés de leurs clubs donc ils vont faire ce que leurs clubs leur dit. Il n’y a pas de lien contractuel avec leurs équipes nationales. Si leurs clubs leur demandent de faire les matches d’Euroleague, ils vont les faire même s’ils aiment leurs équipes nationales. C’est pour ça que je dis qu’ils sont pris en otage et à quatre semaines de l’échéance, on leur demande de trouver une solution ou de donner leur préférence entre l’Euroleague et l’équipe nationale. Un joueur peut être sanctionné, suspendu, licencié par son club et s’il ne va pas avec l’équipe nationale, il peut aussi être suspendu par la FIBA. Il y en a des joueurs qui ont été sanctionnés par leur fédération à une époque parce qu’ils avaient refusé une sélection en équipe nationale, y compris en France. Il y en a un qui joue à Cholet qui avait été sanctionné par la fédération française parce qu’il avait préféré aller au camp de Trévise plutôt que d’aller faire un début de prépa avec l’équipe nationale. Sauf qu’après il avait été drafté en NBA (NDLR : il s’agit de David Michineau qui, en appel, avait été condamné à deux mois de suspension avec sursis pour ne pas s’être présenté à un stage avec les U20 en 2014. Il avait présenté alors un certificat médical justifiant son absence). Il y a un truc qui me fait marrer, c’est que ce soit Vlade Divac qui soit à la fédération internationale le représentant des athlètes alors qu’il est manager général d’un club NBA (NDLR : Sacramento Kings). Et quand il a fait sa lettre ouverte en disant « il faut jouer pour son équipe nationale, c’est beau, c’est gentil… », il a oublié qu’il avait manqué lui-même un championnat d’Europe. On n’apprécie pas que les gens aient la mémoire courte et surtout qu’ils renvoient la responsabilité aux joueurs. Le deuxième problème, c’est qu’au bout d’un moment il n’y aura pas assez de semaines pour faire tous les matches. La fédé veut faire des matches de prépa, les clubs dans les ligues nationales veulent faire plus de matches, il y a plus de matches de coupe d’Europe, d’Euroleague, la Coupe du Roi, de la Ligue, du machin, au bout d’un moment il faut que ça s’arrête, les mecs ne sont pas des robots.

Au niveau du syndicat européen, vous reprochez à la FIBA et à l’Euroleague de ne pas vous impliquer ?

Bien sûr, de ne pas impliquer les joueurs dans le processus de décision. L’Euroleague fait une réunion avec des capitaines au mois de juillet à Barcelone mais il faut parler du fond avec des mecs impliqués. La FIBA, ça fait cinq ans qu’on leur envoie des lettres et là ils ont proposé un rendez-vous il y a dix jours et le syndicat français n’a même pas été invité. Je m’excuse auprès de Patrick Baumann de lui avoir posé des questions auxquelles il ne pouvait pas répondre. On est squizzé de la négo. Il y a de l’incompréhension du côté des joueurs. Un international qui joue en Euroleague m’a dit cet été : « ils n’ont qu’à arrêter les fenêtres ! » Mais c’est plus compliqué que ça. C’est un process de quatre ans pour mettre en place la Coupe du Monde. Cette Coupe du Monde est-elle l’événement nécessaire, absolu, pour le développement de notre sport ? C’est la position stratégique de la FIBA mais est-ce vrai dans les faits ? Le modèle du foot est-il à copier ?

Cela paraît difficile à partir du moment où on ne peut pas imposer aux joueurs NBA de venir à ces qualifications.

C’est sûr. Quand on a fait les stats sur les temps de jeu, les pourcentages de points par les joueurs d’Euroleague, d’Eurocup, Patrick Baumann dit que ceux de NBA ne représentent que 10% en nombre mais combien en temps de jeu et en points scorés.

Et tous les joueurs NBA européens n’étaient pas présents à l’Euro, loin de là, notamment en équipe de France où il manquait les deux principaux, Nicolas Batum et Rudy Gobert.

Une évidence.

« Avant d’être un emmerdeur de syndicaliste, je suis avant tout un amoureux du basket et encore plus de l’histoire de mon sport »

Le SNB a décidé d’un plan d’action afin d’informer les joueuses de la Ligue Féminine sur leurs droits et devoirs. En quoi consiste-t-il ?

J’en suis très fier car il aura fallu du temps pour le mettre en place mais on y est arrivé. C’est une discussion que l’on a eu avec la ligue féminine et il y a, je crois, une vraie volonté fédérale de créer une convention collective sauf que l’on part de très loin. On n’a jamais mis les filles dans ce mode de réflexion. Je remercie Irène Ottenhof, la directrice de la Ligue Féminine, avec qui on a mis en place des choses spécifiques en terme de visibilité pour les filles. On les a rencontrées dans les Pré-Opens avec la participation de la Ligue Féminine. Ça nous a permis d’en discuter. Il y a des filles brillantes. En Ligue 2, il y a des filles qui font des études de droit et qui ont envie de s’impliquer. J’en ai rencontré une qui fait des études de sociologie et qui est très intéressée par ces questions-là. Ce que l’on voulait c’est avoir un pool d’une dizaine de joueuses que l’on peut sensibiliser un peu plus. Il y aura une réunion à Paris en novembre au cours de la trêve internationale pour leur dire « on peut vous accompagner, avez-vous envie de le faire ? » Je leur ai dit en présence d’Irène, « le syndicat des joueurs ne le fera pas à votre place, on ne le fera que si les joueuses sont engagées. » Il y a une volonté de la fédé, a priori des présidents, je pense que les entraîneurs ne sont pas contre même si j’en n’ai pas forcément parlé avec eux, sinon avec ceux que je connais bien comme Emmanuel Coeuret à Nantes qui est très intéressé par ces questions-là. Maintenant c’est de savoir si les filles en ont envie et à quelles conditions. On a créé aussi des passerelles avec le syndicat de WNBA car il y a des joueuses de WNBA qui viennent jouer en France. On en est au niveau qui était le mien quand j’ai commencé ma tournée des clubs, avoir le ressenti des mecs, essayé de définir une stratégie, impliquer les joueurs au maximum. Il y a d’autres problématiques juridiques car on n’a le droit qu’à une seule ligue professionnelle dans une discipline et je ne suis pas persuadé que la LNB ait à gérer la ligue féminine. Ça demandera aussi un effort politique de la fédé, du Ministère des Sports et du législateur. Dans le foot, le rugby, il y a aussi des discussions sur la professionnalisation du sport féminin. Pour le coup dans le basket on est beaucoup plus en avance que les autres car c’est le seul où il y a une « vraie économie » avec des clubs qui sont là depuis longtemps, de bons résultats, il y a des filles qui gagnent bien leur vie. Je peux comparer avec le rugby où il y a une grande volonté des filles de faire quelque chose mais dans les faits, il n’y a pas l’économie.

Quel rapport le syndicat a-t-il avec les agents de joueurs ? Vous occupez un peu le même terrain ?

Oui et non. On a des rapports plutôt réguliers avec les agents. De très bons avec certains, de très mauvais avec d’autres. On a beaucoup d’agents qui nous appellent pour des questions sur la règlementation. Un exemple. L’année dernière, la Chorale de Roanne signe Devin Davis qui est dans notre comité directeur pour un poste de pigiste. Je connais très bien l’assistant. Je lui fais un SMS pour lui dire « Maxime (Boire) je suis désolé mais Devin Davis, vous ne pouvez pas le prendre. » Il m’appelle et je lui confirme qu’il ne peut pas rejouer en France. Le joueur était déjà arrivé dans le club. Il y a là un agent qui n’a pas compris les règlements et qui a fait à sa sauce en espérant que ça passe. On a très fréquemment ce genre de situation. Avec certains agents, on a de vrais échanges, ils essayent aussi d’apporter leur contribution au développement du basket. Il y a aussi les « agents boîte aux lettres » qui travaillent avec des agents américains en direct qui sont là pour placer le plus de joueurs possibles dans le championnat peu importe les équipes et qui sont là pour faciliter la vie des clubs quand il faut virer des mecs. Donc notre travail est complémentaire mais il prend aussi le relai des négligences des agents. Je ne peux pas leur en vouloir, le système est fait pour que les clubs payent les agents et tant que ce sera comme ça il y aura cette problématique là que le client de l’agent c’est le club est pas le joueur, alors qu’on dit « agent de joueurs ». Quand un agent ne veut pas mettre en difficulté sa relation commerciale avec le club, il préfère que ce soit nous qui gérions la m…. Le mec va être licencié parce qu’il est soit disant alcoolique ou parce qu’il fait un retweet, es choses que l’on a déjà eu dans le championnat. Si on a modifié notre site internet c’est aussi pour permettre aux agents d’avoir accès à l’information facilement. Lors de la réunion avec tous les agents, on nous a demandé à ce que le syndicat envoie des communications régulières sur les changements de règlementation.

Le SNB s’est associé avec ProBallers pour compiler les statistiques de tous les matches depuis la création de la LNB en 1987 et permettre l’établissement de records personnels ? Comment avez-vous fait ?

Avant d’être un emmerdeur de syndicaliste, je suis avant tout un amoureux du basket et encore plus de l’histoire de mon sport, des Skeeter Henry, Troy Truvillion, Alex Nelcha, qui ont été très importants dans le championnat de France. J’en ai parlé avec Eric Micoud avant qu’il commence la formation à la Sorbonne, qu’il rentre à BeIN SPORT. Il m’a dit le 30 juin, tout le monde m’appelait et le jour où j’ai arrêté, le 1er juillet, je me suis retrouvé seul dans mon canapé, je ne savais plus quoi faire de ma vie. Ça m’a marqué car Eric c’est un mec que j’apprécie vraiment. Je me suis toujours dit qu’il fallait au SNB que l’on fasse quelque chose pour ces gens qui ont donné à la ligue. J’ai proposé aux joueurs de mettre en lumière leurs statistiques. On s’est aperçu qu’il y avait plein d’erreurs sur le site de la LNB et c’est là qu’on est entré en contact avec Benoît (Dujardin) que je ne connaissais pas du tout avec lequel on a travaillé sur plein de projets notamment de mettre en lumière les performances des joueurs durant leur carrière et quand ils sont à la retraite. Pour compiler les stats, on a pris un stagiaire, le fils de Didier Primault (NDLR : le premier directeur du SNB) qui a saisi les box scores dans le Livre des 20 ans de la ligue. Il les a transformés en tableaux Excel avec toutes les stats. Un travail de titan. C’est comme ça que l’on a réussi à récupérer les années qui nous manquaient. Aujourd’hui on est capable de produire des stats de qualité et j’en suis très fier. C’est couplé au travail de Benoît car sans lui et ProBallers on n’aurait pas réussi. Il a quelque part une solution à tous les maux du basket français sur la visibilité, la médiatisation.

« Un joueur était parti en soirée et manque de bol, il a conclu. Il n’est pas rentré chez lui mais chez la fille et le lendemain à 7h du matin, il a eu un contrôle »

A propos du dopage, vous avez écrit sur votre site : « Notre mission au SNB est de rappeler au grand public que les joueurs doivent se contraindre à un régime de surveillance digne des meilleurs films d’espionnage américains (localisation 24h/24h, 7 jours/7 jours, 365 jours par an, contrôles de nuit) mais pour quels résultats? » Que voulez-vous dire par là, que les joueurs ont un bracelet électronique virtuel ?

On en n’est pas loin ! Le règlement anti-dopage tel qu’il existe demande effectivement qu’il y ait de la localisation des joueurs notamment dans les championnats professionnels par équipe. C’était d’abord une heure par jour avant d’évoluer plusieurs heures par jour, et puis encore plus de trucs restrictifs pour les joueurs en dehors de leur cadre de travail. On parle de leur vie privée. Vous vous souvenez de cette histoire truculente de Philippe Da Silva qui avait été oublié par le bus sur une aire d’autoroute entre Cholet et Paris. Quand il s’est fait ramener chez lui, il y avait un médecin anti-dopage qui l’attendait pour un contrôle et s’il n’avait pas été présent, il aurait pris un « no show » et au bout de trois, il aurait été suspendu. Et ce n’était pas de son fait, on l’avait oublié sur une aire d’autoroute. Il y a de vrais problématiques liées à la mise en place de cette politique antidopage au niveau internationale. On a fait évoluer les choses au niveau de l’AFLD (Agence Française de Lutte contre le Dopage) en expliquant que ce ne sont pas les joueurs qui font leur emploi du temps. C’est l’employeur qui décide. Si la veille tu as perdu, le coach peut décider d’un entraînement à 6h du matin le lendemain, et tu y vas. Même moi qui n’étais pas en pro, je l’ai fait, je sais comment ça se passe. Et les mecs ne voulaient pas comprendre que pour le joueur c’est impossible de changer sa localisation. On a un autre exemple. Un joueur était parti en soirée et manque de bol, il a conclu. Il n’est pas rentré chez lui mais chez la fille et le lendemain à 7h du matin, il a eu un contrôle. Boum, un avertissement. On a même un joueur à Nantes qui a pris un avertissement alors que c’est le même médecin qui est revenu chez lui et qui n’a pas trouvé la sonnette alors qu’il était déjà entré une fois. Comment est-ce possible ? Il y a eu plein de disfonctionnement et l’AFLD a décidé de faire des changements dans les règlements et de mettre la localisation à la charge des employeurs qui doivent envoyer les emplois du temps. Il y a des joueurs qui passent six ou sept heures au club tous les jours avec les entraînements, les soins, la muscu, la séance de shoots, etc. Aussi on leur a dit venez les contrôler autant que vous voulez mais sur leur lieu de travail. Ou alors l’autre solution, c’est effectivement de leur mettre des bracelets électroniques, mais ce ne sont pas des prisonniers !

Il n’y a quasiment pas de cas de dopage en France dans le basket ?

Non. On en a eu un l’année dernière avec un joueur de Gries, qui a été suspendu pour deux ans mais c’était avec récidive au cannabis. JK Edwards (Pau) s’est fait aussi prendre pour cannabis. On met des règles contraignantes alors que l’on est incapable de mesurer l’efficacité des contrôles. Et en plus on a le laboratoire de Châtenay-Malabry qui est censé contrôler en France et qui est suspendu par l’agence mondiale anti-dopage. Oui, il faut que les joueurs soient contrôlés, c’est normal, ça fait partie du cadre du sport, mais il faut de la cohérence. J’entends des histoires avec des cyclistes… si j’ai un gamin qui veut faire du vélo, je lui dis non. Ils sont réveillés la nuit à 4h pour faire des contrôles. Ceux qui font du dopage lourd comme en Russie, ils ne vont pas se doper durant la compétition. Le dernier point, c’est que les joueurs n’ont pas chez eux un bouquin de médecine pour savoir quels produits prendre pour améliorer leurs performances.

Certains affichent dans leur salle de bain la liste des produits interdits ?

Tant mieux mais ça aussi c’est un vrai problème. Quand on regarde la liste des produits interdits, tu as intérêt à ne pas être dyslexique avec tous les x, les z et les y qu’il y a dans les molécules…

Vous qui êtes au cœur des basketteurs professionnels français, vous pouvez affirmer qu’il n’y a pas de dopage organisé ?

Non, il n’y en a pas et le plus pros problème existant –et ce n’est pas que pour les basketteurs-, c’est l’utilisation des compléments alimentaires. La provenance, les process de fabrication, ne peuvent pas être garantis et aujourd’hui dans le basket comme dans le rugby, quand on demande aux gens de s’entraîner autant, avec autant d’intensité, tu es obligé de prendre des compléments alimentaires. C’est normal, il faut être au top de sa forme. On demande à des rugbymen de prendre cinq repas par jour, c’est impossible, tu es obligé de compenser différemment. Même les sumos ne le font pas, ce n’est pas humain. Et le danger vient de ces compléments alimentaires, on l’a vu avec Joakim Noah qui a pris une substance dont il ne savait pas ce qu’elle était. Ceux qui font des médicaments, du Guronsan, de l’aspirine, un truc contre le cancer, une protéine, peuvent avoir des cuves qui sont mal nettoyées, il y a de la contamination croisée. Le risque est là pour un basketteur, acheter des produits contaminés qui au final vont provoquer des contrôles positifs. Il y en a plein qui achètent ça sur internet et c’est pour ça que l’on a signé le partenariat avec Sport Protect qui fait de la certification de produits en ayant un contrôle sur la chaîne de fabrication. Ils conservent un échantillon témoin de tous les produits qu’ils certifient et ils ne certifient pas tout le monde.

A la fin du mois, vous allez quitter le SNB pour Proval, l’Union des Joueurs de Rugby Professionnels. C’est plus gratifiant de travailler en France pour le rugby que le basket ?

Non, j’ai adoré travailler pour le basket qui est le sport que j’aime, que je fais depuis que je suis gamin, et j’aime les joueurs. C’est aussi pour ça que je suis en train de faire la tournée des clubs, pour remercier les joueurs qui m’ont permis d’avoir cette opportunité. Proval m’a approché et m’a fait une proposition que j’ai refusée dans un premier temps. Ils sont revenus avec une contre-offre que j’ai acceptée. C’est une structure de dix salariés, de deux millions d’euros de budget, sans commune mesure avec ce que j’ai. Depuis toujours au SNB on a fait avec des bouts de chandelle et ma rémunération n’a jamais été… incroyable. Je ne m’en plains pas, j’ai fait ça parce que je croyais dans quelque chose. Mais là c’est une opportunité professionnelle que je ne peux pas refuser. Ils sont venus me chercher pour mes compétences et ça prouve qu’on faisait du bon boulot avec le SNB. J’ai donné le maximum, j’ai fait beaucoup de kilomètres, de nuits dans les hôtels. Je n’ai pas beaucoup vu ma femme. Là, je suis parti du lundi au vendredi pour voir le plus d’équipes possibles. Mais je me suis éclaté.

Qui sera votre successeur ?

Pour le moment Quentin Jegou qui était stagiaire chez nous que l’on va garder jusqu’à la fin de l’année et on va se lancer dans un recrutement car on a maintenant un peu d’argent disponible pour prendre quelqu’un qui me remplacera officiellement.

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Que pensez-vous du fait que la règle des joueurs européens est détournée par un nombre de passeports suspects donnés à des joueurs américains par des joueurs de l’Est de l’Europe ?

Lorsqu’elle a rendu sa décision par rapport à la plainte déposée par François Lamy (NDLR : agent de joueurs), la Commission Européenne a dit qu’elle ne voulait pas de restriction sur les Européens. Par contre pour les extra-communautaires et les non-Cotonou, si vous voulez en mettre zéro, mettez en zéro. Sauf que derrière, comme c’est voté au Comité Directeur, les présidents de club ne veulent pas transformer leur Américain en Européen. Ils disent : « comment je vais faire si je n’ai pas mon Américain ? » Ce qui intéresse la Commission Européenne, c’est que les Américains aient le droit d’aller et venir pour avoir des opportunités mais ils n’ont jamais dit que l’on pouvait avoir quatre Américains par équipe.

Certes, mais c’est un autre volet du dossier. Là, le gros problème, c’est que de plus en plus de joueurs américains contournent les règlements en obtenant des passeports européens. On les voit dans les équipes nationales mais aussi dans certains clubs. Il y en avait trois la saison dernière à Monaco…

… Strasbourg en a trois aussi. Ce sont les conditions d’obtention de passeports dans certains pays. Cet été, un joueur du championnat m’a appelé pour me dire qu’on lui proposait un passeport d’un pays africain. Il se demandait si ça valait pour lui le coup d’accepter car ça pouvait être une bonne opportunité pour sa carrière. Le deal, c’était on lui donne un peu d’argent, on lui demande de jouer avec l’équipe nationale. La qualification pour la Coupe du Monde, la CAN (NDLR : l’AfroBasket). Là, tu te dis, « mais il est où le projet dans ce pays ? » C’est quand même hallucinant d’en arriver à ça. Effectivement c’est plus facile d’avoir un passeport roumain ou ukrainien qu’un passeport français. Beaucoup d’Américains essayent d’avoir un passeport français mais pas beaucoup réussissent. Il faut avoir vécu cinq ans sur le territoire, être à jour de ses impôts, parler français, plein de choses, alors que dans d’autres pays les conditions d’accès à la nationalité sont différentes. C’est ça qui fragilise le truc.

Lorsque vous discutez de ce phénomène au niveau du syndicat européen, vous n’envisagez pas des solutions ?

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