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Jean-Michel « Mac » Veaudor, le kiné devenu international

Jean-Michel Veaudor est dans son domaine une sommité. Mais sa sélection en équipe de France est enveloppée d’un voile de mystère.

Jean-Michel Veaudor est dans son domaine une sommité. Mais sa sélection en équipe de France est enveloppée d’un voile de mystère.

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Le site de la fédération ne fait pas réellement état de son statut d’international. Un Veaudor est mentionné dans la liste des Bleus de tous les temps, à la date du 5 août 1979, pour un match amical à Cotonou contre le Bénin ponctué par un score fleuve : 118-93. Le Veaudor en question a marqué 2 points, se prénomme Marc et aucun club n’est identifié à son sujet. Etrange.

Jean-Michel Veaudor a fait son premier strapping à 22 ans, alors qu’il effectuait sa dernière année d’étude de kiné. Son patient était illustre : Alain Gilles, meilleur basketteur du XXe siècle. En fait, son frère François était pote avec Michel Buffière, le fils d’André, qui était alors l’entraîneur de l’ASVEL. Et son deuxième client fut son équipier de la JALT Le Mans, Gilles Prod’homme, le père d’Elise, ancienne joueuse de Ligue Féminine, et aujourd’hui coach des espoirs de la JDA Dijon. Jean-Michel Veaudor était à bonne école avec deux pionniers, Alain Roux et Jacques Lamy, qui avaient un cabinet de kinésithérapie à Coulaines, dans la banlieue du Mans, qui sera plus tard connu pour abriter, à la Jeunesse Sportive, le tennisman Jo-Wilfried Tsonga, ainsi que Jérémy Leloup, Iliana Rupert et Alexia Chartereau.

« Alain était précurseur des soins des sportifs car il avait connu Wanono, une sorte de guérisseur sur Paris, qui a exercé jusqu’au début des années 70. Celui-ci avait été le premier à comprendre le traitement manuel sur la pathologie musculaire, en particulier sur le traitement des claquages. Ça reste pour moi le traitement essentiel des blessures musculaires. Alain avait ramené ça dans sa pratique. Il a été le premier à établir les protocoles en pathologie musculaire des sportifs. Il a été le kiné en équipe de France de basket jusqu’en 1976. Sur un tournoi pré-olympique aux Pays-Bas, il avait vu un traineur américain qui avait amené des Etats-Unis les premières bandes avec les techniques de strapping. C’est lui qui avait mis en pratique les premiers strappings sur les chevilles. J’avais appris ça avec eux et c’est sûr que c’est dans le basket, en France, que les premiers strappings ont été posés, alors que le premier kiné dans le foot, c’est Jean-Paul Serini. »

Alain Roux a eu également entre ses mains les basketteurs du Mans, de Berck, de Tours, des équipes de foot, et ouvert au Mans une pizzeria, Maio, qui sera l’un des centres névralgiques de la vie mancelle. Jean-Michel Veaudor est entré dans le cabinet Roux-Lamy, et tout naturellement, il a pris la succession d’Alain Roux, au sein de l’équipe de France et du SCM Le Mans, avec qui il a participé à la conquête de trois titres de champion de France. De décembre 1976 lors d’un match France-Finlande à Evry, jusqu’aux Jeux Olympiques de Los Angeles en 1984, Jean-Michel Veaudor a sacrifié ses vacances à sa passion. Il a joué à la JALT jusqu’à la Nationale IV, puis avec l’équipe réserve et les anciens.

Photo : Sur le banc du SCM Le Mans.
En haut, à droite

« Mac, tu rentres ! »

L’année 1979 fut particulièrement riche en compétitions. Après une série de matches de préparation, l’équipe de France gagna ses trois matches de l’éphémère Coupe intercontinentale dont l’un contre les Etats-Unis à Lyon-Gerland (98-86) ; le premier succès de l’histoire face aux Américains, qui n’avaient dépêché, il est vrai, en France, que des acteurs de Série C. Elle a eu ensuite à avaler, en mai, des qualifications au championnat d’Europe, puis, quinze jours plus tard, fatiguée, l’Euro proprement dit en Italie avec une huitième place à la clé. Après une coupure en juillet, les Bleus eurent à leur agenda une tournée en Afrique, et la suite de la Coupe intercontinentale, au Mexique, à Porto-Rico et en Argentine !

Le coach Pierre Dao avait le chic pour dégotter des fonds dans le cadre d’échanges culturels et sportifs, et c’est ainsi que l’équipe de France se retrouva sur le continent africain, pour un match à Dakar contre le Sénégal, deux contre le Bénin à Cotonou et Porto-Novo, et un petit denier à Bamako contre le Mali. Avec autant de victoires à la clé. Mais comment donc, Jean-Michel Veaudor s’est-il retrouvé sous le maillot national ? Il raconte.

« Ils n’avaient sélectionné que dix joueurs et au moment de partir, il en manquait un. Je crois que c’était Bill Cain. Il n’y avait pas de chef de délégation. C’était le médecin, Jacques Huguet, qui faisait fonction. Il y avait aussi avec nous un arbitre, qui a arbitré le premier match contre le Sénégal avec un arbitre africain. L’ambassadeur était venu dans les vestiaires nous prévenir avant le match pour nous demander de gagner. La salle était hostile. Un concours de sifflets entre notre arbitre et l’arbitre sénégalais. Le match s’est terminé à 4 contre 4. Cela avait été plus que tendu. Même s’il y avait trois classes d’écart, l’arbitre africain avait massacré le match. L’équipe de France avait gagné parce que notre arbitre avait pris les choses en mains dans les trois dernières minutes. Je crois que c’est Eric Beugnot qui avait mis les derniers paniers à l’arrache pour gagner. Sauf que derrière on s’est retrouvé bloqué deux heures dans les vestiaires. On était sorti grâce à Mathieu Bisseni qui s’était mis devant le bus pour écarter les gens. Dao dit alors « on n’a que 9 mecs sur la feuille. On finit à 4, ce n’est pas possible. » C’est Eric qui lui a dit « tu n’as qu’à mettre Mac sur la feuille. » « Mais Mac ne sait pas jouer au basket ! » « Si, il est capable de tenir le ballon et comme ça, on sera dix. » Je me suis retrouvé inscrit sur la feuille le match d’après. J’ai mis un maillot et un short. Mon anniversaire est le 6 août, là c’était le 5. Le match au Bénin s’est joué en plein air avec des militaires cubains autour du stade. Pareil, le match ne se déroule pas très bien sur le plan de l’ambiance. Finalement, ça se décante dans les dix dernières minutes. Je pense que c’est Eric qui a concocté un truc avec Dao : « s’il y a de l’écart, on fait entrer Mac. » C’est ce qui s’est passé à 5-6 minutes de la fin. Dao fait changement. « Mac, tu rentres ! » C’est comme ça que je me suis retrouvé à jouer 5-6 minutes. Il y a eu deux points et un lancer-franc. Un mec m’avait grimpé dessus… Voilà comment j’ai joué en équipe de France (rires). »

Si la FFBB a officiellement retenu une sélection, Jean-Michel « Mac » Veaudor est formel, il a marqué 3 points la première fois contre le Bénin et joué deux ou trois minutes, la deuxième rencontre contre le même adversaire. Evidemment, de tels moments, ça ne s’oublie pas. « Tout ça est devenu important beaucoup plus tard, quand tu regardes un peu dans le rétro. Aujourd’hui, évidemment, plus rien de ça ne serait possible ! »

A l’époque, le basket n’était pas professionnel -surtout dans ses structures-, pas d’Internet, pas un seul journaliste français était sur place, aussi le kiné a joué ses deux matches d’internationaux dans la clandestinité. Même la revue fédérale Basketball sera très discrète sur ce voyage au long cours. « Si, on a été suivi par un mec de Jeune Afrique, qui était un journaliste extrêmement virulent, qui faisait de la politique sur la tournée de l’équipe de France, et qui nous assassinait en disant que l’on était les nouveaux colons sportifs de l’Afrique. Quand il était avec nous, il était gentil-gentil, mais on était tombé sur l’un de ses articles via Jacky Lamothe. Les mecs l’avaient chopé dans sa chambre et balancé à l’eau dans la piscine de l’hôtel. Sauf qu’il ne savait pas nager ! On l’avait récupéré à la petite cuillère et derrière, il nous avait assassinés. »

Photo : Aux Jeux Olympiques de Los Angeles, en 1984
Photo : Au jubilé Bob Wymbs, à Saint-Quentin

Une der avec l’ami Greg Beugnot

Donc, vous avez compris, Marc Veaudor, c’est en fait Jean-Michel Veaudor de son surnom Mac. Rien à voir avec les MacIntosh, mais il y a un rapport avec le basket américain. « C’était au retour d’un match à Orthez, que l’on avait terminé au petit matin en mangeant des huitres. J’avais un match le lendemain avec la JALT, le dimanche après-midi. Je jouais encore en équipe Une. Il y avait à la JALT un Américain qui s’appelait Christopher Lynch. Une pince, qui prenait tous les tickets shoots. Jacky Lamothe et Greg Beugnot étaient venus voir le match. Lynch ne mettait pas un panier. Les mecs sur le banc disent, ‘il faut faire jouer Veaudor’. Je rentre en deuxième mi-temps. Ce fut l’état de grâce. J’aurais pu tirer les yeux fermés, ça serait rentré. J’ai eu quatre ou cinq positions de shoots. J’ai dû louper un shoot, mettre 15 ou 20 points. Le journaliste a titré « Mac Veaudor, l’Américain de la JALT ». Derrière ça, les mecs m’ont tous appelé Mac. Dans le basket, je suis resté Mac. »

Les Jeux de Los Angeles de 1984 ont laissé un goût amer aux internationaux et aussi à leur kiné. La mise à l’écart d’Eric Beugnot avait alors précipité le retrait de Jean-Michel Veaudor de l’équipe de France. Il a continué à recevoir des basketteurs de haut niveau dans son cabinet, comme Jean-Michel Sénégal, Bob Riley, Antoine Rigaudeau et ceux des équipes de Greg Beugnot. Et de d’autres disciplines, et sa notoriété d’ostéopathe s’est décuplée lorsqu’il a été rendu public qu’il avait soulagé le judoka David Douillet de ses douleurs dorsales. Aujourd’hui, à 67 ans, Jean-Michel Veaudor a mis la pédale douce, mais il met son doigté au service des footballeurs du PSG, comme consultant référent ostéopathe. Il se rend chaque semaine au Camp des Loges et en cas d’urgence.

Sa dernière apparition dans le basket pro remonte à 2012, lorsque l’Elan Chalon, de l’inévitable Greg Beugnot, a réalisé le fameux triplé. « Après son dernier échec en finale avec l’ASVEL, on avait passé la nuit ensemble, il était effondré de tristesse. Je lui avais dit : tu vas reprendre un club, et tant que tu ne seras pas champion, je reste avec toi. Il est parti ensuite en Italie et quand il est revenu, il a pris Chalon. Il les a sauvés de la relégation in-extremis en fin de saison et après j’ai enclenché avec lui. J’avais beaucoup de plaisir à bosser là-bas en étant en osmose avec l’entraîneur, le préparateur physique, je crois que je n’ai jamais aussi bien bossé que cette année-là avec des résultats sportifs issus du suivi et en récup et en blessures que l’on a fait ensemble. C’est un souvenir de boulot extraordinaire. Il y a des images que je n’oublierai pas. Je lui avais dit que jamais je ne m’assiérai sur un banc de touche sauf quand il jouerait une finale. La finale du championnat était contre Le Mans, je l’ai faite sur le banc, et à deux minutes de la fin, quand le score était assuré, qu’il a vu que c’était gagné, il a fait un aller-retour le long du banc. On ne s’est rien dit, mais on s’est regardé dix secondes les yeux dans les yeux, on s’était compris. S’il y avait eu une autre reconstruction d’équipe, j’aurais continué avec lui pour finir dans le basket. »

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Le site de la fédération ne fait pas réellement état de son statut d’international. Un Veaudor est mentionné dans la liste des Bleus de tous les temps, à la date du 5 août 1979, pour un match amical à Cotonou contre le Bénin ponctué par un score fleuve : 118-93. Le Veaudor en question a marqué 2 points, se prénomme Marc et aucun club n’est identifié à son sujet. Etrange.

Jean-Michel Veaudor a fait son premier strapping à 22 ans, alors qu’il effectuait sa dernière année d’étude de kiné. Son patient était illustre : Alain Gilles, meilleur basketteur du XXe siècle. En fait, son frère François était pote avec Michel Buffière, le fils d’André, qui était alors l’entraîneur de l’ASVEL. Et son deuxième client fut son équipier de la JALT Le Mans, Gilles Prod’homme, le père d’Elise, ancienne joueuse de Ligue Féminine, et aujourd’hui coach des espoirs de la JDA Dijon. Jean-Michel Veaudor était à bonne école avec deux pionniers,

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Photo d’ouverture : Au TQO de Paris, en 1984 (Maxi-Basket)

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