Fin avril, Nanterre 92 naviguait dans les tréfonds du classement de la Jeep Élite avec un peu brillant bilan de 7 victoires pour 13 défaites. C’est alors que le club des Hauts-de-Seine a entamé une incroyable remontée qui l’amène aujourd’hui à tutoyer les places pour les playoffs, grâce à ses 9 victoires pour 2 défaites entre le 1er mai et le 6 juin. Quelles sont les raisons de cette surprenante montée en régime ? Le mieux placé pour en parler est évidemment Pascal Donnadieu, l’emblématique entraîneur de l’équipe.
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Fin avril, la JSF Nanterre n’était pas en excellente posture en Jeep Élite, c’est le moins qu’on puisse dire. L’équipe affichait alors un triste bilan de 7 victoires pour 13 défaites et figurait à la dernière place du championnat en matière d’adresse à trois-points (31,1 %), pourtant généralement l’une des armes majeures des équipes constituées par Pascal Donnadieu, l’historique coach de Nanterre 92.
Plus tôt dans le championnat, l’équipe altoséquanaise avait même figuré à une peu glorieuse 17e place, soit en position de relégable. Et le jeu de l’équipe ne semblait pas pouvoir rêver de meilleures perspectives qu’un simple maintien. Manquant d’organisation, reposant presqu’uniquement sur des exploits individuels de Chris Warren ou, plus souvent encore, d’un Isaïa Cordinier irréprochable de combativité et d’engagement, souvent fébrile, l’équipe ne ressemblait pas au Nanterre que l’on avait pris l’habitude de voir sur les parquets ces dernières années.
Début mai, le déclic
Puis, début mai, un déclic a semblé survenir. Le jeu nanterrien a retrouvé de sa fluidité, les espaces se sont ouverts, l’adresse de loin est revenue. Résultat, entre le 1er mai et le 6 juin, Nanterre 92 a disputé 11 rencontres pour 9 victoires et 2 petites défaites, ce qui lui permet, à cette échéance, de figurer en 10e position au classement, à une victoire seulement de l’actuel 8e au classement (Limoges) et donc d’une qualification en play-offs.
Comment expliquer un tel retournement de situation ? Il n’y a évidemment pas qu’un seul facteur, comme le fait remarquer Pascal Donnadieu, qui commence son explication en remettant ce mauvais début de saison dans son contexte. « À un moment de la saison, nous étions avant-dernier. Dans ce genre de situation, on voit souvent beaucoup de changements de joueurs ou de coach. Nous, nous n’avons pas trop paniqué, nous avons surtout essayé de trouver des solutions en interne. En outre, il faut se rappeler que 12 de nos joueurs ainsi que tout le staff ont été arrêtés à un moment ou à un autre par le covid. En plus, il y avait la fatigue de la coupe d’Europe, où nous avons tout de même fait le Top 16 de l’Eurocup. À partir de là, il fallait trouver le bon équilibre. Il y a eu une prise de conscience des joueurs. Et quand nous avons trouvé cet équilibre, il restait un tiers du championnat. »
Pour Pascal Donnadieu, les mauvais résultats du début de saison s’expliquent aussi par la peur de gagner qui envahit souvent les équipes mal classées : « Il ne faut pas avoir peur de dire que lorsqu’on est 17e, on est sous pression. Et que cela entraîne pertes de balle ou mauvais choix en fin de match. L’exemple révélateur, c’est notre match contre Cholet dimanche dernier (NDLR : remporté 88-83 par Nanterre). Avant, la pièce retombait souvent du mauvais côté pour nous, alors que là, elle l’a fait du bon côté. Il n’y a pas de hasard : ils sont mal classés, ils se crispent, manquent de confiance et finissent par perdre. »
Un jeu plus aéré, plus fluide
À regarder les matchs de Nanterre des deux parties de sa saison, il est frappant de constater à quel point le jeu brouillon et resserré du début a laissé place à un jeu d’attaque bien plus aéré, avec une balle voyageant beaucoup mieux entre les joueurs. « Notre philosophie de jeu, c’est le passing game et le spacing. En début de saison, nous dépendions beaucoup d’Isaïa Cordinier, qui nous portait sur ses épaules. Depuis Marcquise Reed est devenu très impactant, alors que Johnny Berhanemeskel a retrouvé son adresse. D’où un jeu plus large, moins centré sur Isaïa. Et cela a pour conséquence une meilleure adresse : à un moment de la saison, nous étions derniers au pourcentage de réussite à trois-points, il est bien remonté depuis (NDLR : 34,0 % aujourd’hui contre 31,1 % fin avril). »
L’apport de Victor Wembanyama
Bien sûr, il n’est pas la seule raison de l’embellie nanterrienne. Mais il y a des chiffres évocateurs. Lorsque l’immense (2,20 m) et jeune (17 ans) ailier-fort entre sur le parquet, Nanterre est à 11 victoires et 4 défaites. Et à 9 victoires pour 0 défaite sur les matchs qu’il a joués depuis début mai ! Et ce avec une influence non négligeable, tournant à 11,3 d’évaluation sur cette dernière période. Un apport dont Pascal Donnadieu n’est pas peu fier : « Après sa blessure, Victor a pu s’entraîner à plein temps avec le groupe pro et se responsabiliser. C’est une fierté pour nous d’avoir un garçon formé au club depuis ses plus jeunes années. »
Encore très frêle, le grand espoir du basket français se montre pourtant très intéressant en attaque, que ce soit en artillant de loin (37,3 % à trois-points), en montant au dunk ou en délivrant des passes lumineuses. Mais aussi en défense, où faute de pouvoir toujours contenir des adversaires bien plus physiques que lui, on le voit défendre un peu à la manière d’un libéro au foot, naviguant dans la raquette afin de contrôler le rebond ou de contrer des adversaires qui auraient la mauvaise idée (pour eux) de vouloir aller au panier. Pascal Donnadieu explique comment Victor Wembanyama s’est inséré dans son dispositif : « Lorsque nous n’étions pas bien, pour notre opération sauvetage, on a fait beaucoup de zone. À Gravelines-Dunkerque, on doit faire quelque chose comme 25 minutes de zone, par exemple. On est bien organisés pour ça. Maintenant, on est beaucoup plus souvent en homme à homme. Et Victor a un grand pouvoir de dissuasion, ainsi qu’un excellent timing au contre. Ce n’est pas seulement dû à sa taille et à ses longs segments s’il est désormais le meilleur contreur du championnat (NDLR : 1,5 contre par match), mais aussi à ce timing. En outre, il a une grosse intelligence de jeu, une grande facilité à trouver la bonne passe, beaucoup d’intuition dans le jeu. »
Le facteur Motum
L’une des autres raisons majeures de la remontada nanterienne s’appelle Brock Motum (2,08 m, 30 ans). Passé par le Zalgiris Kaunas, l’Anadolu Efes ou Valence (il a même joué l’Euroleague avec ces trois clubs, pour 7,9 points et 2,6 rebonds de moyenne en 134 matchs), il a débarqué à Nanterre le 10 mai pour suppléer Tyler Stone, le plutôt décevant titulaire du poste d’ailier-fort. Et il n’est rien de dire qu’il a transfiguré le jeu de Nanterre, par son adresse (65,5 % aux tirs dont 58,7 % à trois-points) comme par sa vision du jeu et sa capacité d’adaptation. Depuis son arrivée, Nanterre a enregistré 7 victoires pour 2 défaites et l’international australien tourne à 15,1 points, 4,0 rebonds et 16,3 d’évaluation. Pascal Donnadieu ne tarit pas d’éloges à son sujet : « Il nous a fait beaucoup de bien au niveau de la stabilité et du QI basket. Brock a une intelligence de jeu supérieure et, en plus, il a une mentalité incroyable. Il ne démarre pas les matchs, afin de responsabiliser Victor Wembanyama, et ce alors qu’il a 5 ans d’Euroleague, mais ça ne le dérange pas. Nous avons vraiment pioché le bon joueur, qui sait se fondre dans le collectif, qui ne croque pas. J’ai toujours eu besoin d’un poste 4 (NDLR : ailier-fort) fort dans le jeu. Avec Brock, nous l’avons, il élargit le jeu, ouvre les espaces. »
Le retour du public
Le fait que les supporters de la JSF Nanterre aient pu à nouveau garnir les travées de Maurice-Thorez semble également avoir eu un impact positif sur l’équipe. Et Pascal Donnadieu le démontre chiffres à l’appui : « Parmi les facteurs qui expliquent notre remontée, il y a le retour du public, et ce n’est pas une figure de style. Nous avons plutôt bien voyagé au cours de la saison, mais nous ne gagnions pas à la maison. Depuis que le public est à nouveau autorisé, nous en sommes à 4-0 à Maurice-Thorez. Comme par hasard, nous avons retrouvé notre philosophie de jeu et nous avons ainsi pu renverser la vapeur contre Boulogne-Levallois (NDLR : -11 à la mi-temps, 73-65 à la fin du match). »
Et pour la suite ?
La remontée au classement de Nanterre amène le club à une victoire du Top 8. De quoi nourrir des ambitions de play-offs ? Pascal Donnadieu ne veut pas se faire trop d’illusions : « Il nous reste trois matchs à disputer (NDLR : entretien réalisé avant la rencontre chez LDLC Asvel du 9 juin). Nous avons fait une belle remontada mais nous sommes partis de tellement loin que l’on devrait rester aux portes du Top 8. En début de saison, je parlais d’une année de transition. C’est un peu le cas. Mais tant qu’il y a de l’espoir, on va jouer pour gagner, jusqu’au bout. Cela dit, notre calendrier n’est pas facile : Asvel, Monaco et Le Mans. Donc, le ballotage ne nous est pas très favorable. »
Une phase finale faussée ?
Même si Nanterre se qualifie pour les playoffs, pas sûr que cela réjouisse Pascal Donnadieu plus que cela. Notamment parce que plusieurs équipes que l’on devrait retrouver dans ces phases finales seront amoindries du fait du départ de leurs internationaux pour les tournois de qualification aux Jeux olympiques (le Slovène Alen Omic de Bourg-en-Bresse ou le Sénégalais Ibrahim Fall Faye de Monaco, par exemple) ou pour la préparation de ces mêmes JO (Thomas Heurtel, Mouss’ Fall, Guerschon Yabusele et William Howard à l’Asvel ou Matthias Lessort à Monaco, notamment). « Quel est l’intérêt sportif de cette phase finale, avec l’absence de ces joueurs ? Tout est faussé. Mais ce qui me gêne le plus, c’est qu’on ne pouvait pas déterminer il y a encore quelques jours comment serait couronné le champion. Et je ne suis pas fan de cette formule, elle n’existe nulle part ailleurs. Partout en Europe, les championnats en sont aux playoffs. Et, pour moi, cette phase finale risque d’être contre-productive pour l’image du basket français. »
On ne saurait être plus clair…
En attendant, il reste au minimum trois rencontres aux supporters nanterriens (et à tous les fans de basket français) pour profiter du « Nanterre nouveau » de cette fin de saison, de sa pépite Victor Wembanyama et de son Australien de niveau Euroleague Brock Motum. Un mélange de jeunesse et d’expérience à savourer sans modération.
Toutes photos : JSF Nanterre/Seralco Netgroup
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Fin avril, la JSF Nanterre n’était pas en excellente posture en Jeep Élite, c’est le moins qu’on puisse dire. L’équipe affichait alors un triste bilan de 7 victoires pour 13 défaites et figurait à la dernière place du championnat en matière d’adresse à trois-points (31,1 %), pourtant généralement l’une des armes majeures des équipes constituées par Pascal Donnadieu, l’historique coach de Nanterre 92.
Plus tôt dans le championnat, l’équipe altoséquanaise avait même figuré à une peu glorieuse 17e place, soit en position de relégable. Et le jeu de l’équipe ne semblait pas pouvoir rêver de meilleures perspectives qu’un simple maintien. Manquant d’organisation, reposant presqu’uniquement sur des exploits individuels de Chris Warren ou, plus souvent encore, d’un Isaïa Cordinier irréprochable de combativité et d’engagement, souvent fébrile, l’équipe ne ressemblait pas au Nanterre que l’on avait pris l’habitude de voir sur les parquets ces dernières années.
Début mai, le déclic
Puis, début mai, un déclic a semblé survenir. Le jeu nanterrien a retrouvé de sa fluidité, les espaces se sont ouverts, l’adresse de loin est revenue. Résultat, entre le 1er mai et le 6 juin, Nanterre 92 a disputé 11 rencontres pour 9 victoires et 2 petites défaites, ce qui lui permet, à cette échéance, de figurer en 10e position au classement, à une victoire seulement de l’actuel 8e au classement (Limoges) et donc d’une qualification en play-offs.
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