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[REDIFF] L’analyse – Les Bleus à la Coupe du monde : Un groupe est né

Tout autant que son raté en demi-finale, la médaille de bronze, la qualification pour les Jeux de Olympiques, l’identité et le jeu développés par cette équipe de France version 2019 sont des éléments sur lesquels penser l’avenir : avec ambition.

Tout autant que son raté en demi-finale, la médaille de bronze, la qualification pour les Jeux de Olympiques, l’identité et le jeu développés par cette équipe de France version 2019 sont des éléments sur lesquels penser l’avenir : avec ambition.

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Pendant qu’Espagnols et Argentins se disputaient la médaille d’or, un sentiment de frustration emplissait les cœurs français : ils auraient pu être à cette place. Sans ce match raté, le seul de la compétition, mais survenu à l’un des pires moments, en demi-finale, face à l’Argentine… «Vendredi, après la défaite, j’étais comme certains de mes joueurs, détruits. J’ai rêvé de disputer cette finale, et je persiste à penser qu’il y avait la place pour le faire», souffle Vincent Collet. «Mais c’est aussi l’essence du sport de savoir rebondir. Il fallait concrétiser la belle campagne que ce groupe a fait, depuis la préparation, la meilleure depuis 2011.» Et au courage, au forceps, au mental, au talent, ils sont allés chercher cette place sur le podium. En équipe. «Bien sûr toute la France aurait aimé l’or, mais on part sur une victoire. Qui nous aurait mis sur le podium au début de la compétition ?», questionne Louis Labeyrie. Réponse : pas grand-monde, d’autant plus après avoir perdu deux joueurs du 5 majeur durant la préparation (Thomas Heurtel et Adrien Moerman). Les favoris étaient américains et serbes, les principaux outsiders grecs, australiens voire espagnols. «On est venu et on a fait un braquage, vulgairement on a dit fuck les States et nique la Serbie», continue Labeyrie.

Il y a cette médaille de bronze, le deuxième podium dans l’histoire de la France à la Coupe du Monde après la troisième place de 2014, et avant elle il y avait eu la victoire historique face aux États-Unis et leurs joueurs NBA puis la qualification directe pour les Jeux Olympiques 2020 à Rio. Dès lors, le bilan est forcément très positif. «On est à la Coupe du Monde, on n’est pas à la coupe régionale de je ne sais où !», rappelle Collet. «Quand on sait que les Serbes sont cinquièmes, les Américains septièmes, il y a de quoi être contents. Il ne faut pas galvauder ce type de médaille. Qui on est, nous, basket français, pour cracher sur une médaille de bronze ? Ce n’est pas comme si on en avait gagné 40 !»

Photo: Rudy Gobert (FIBA)

Quatre leaders

Comme un symbole, la victoire contre l’Australie fut scellée par trois paniers à trois-points dans le dernier quart-temps d’Andrew Albicy, le seul des 30 joueurs utilisés dans les fenêtres internationales à avoir disputé l’ensemble des douze matches de qualification. «Cette médaille, c’est aussi pour ces 30 mecs», a salué Nicolas Batum. L’histoire de ce podium remonte à l’après-2017, avec la claque subie à l’Euro, et cette médaille permet de tourner pour de bon la page Tony Parker, et officialise la «nouvelle ère», décrite par Batum. «Cette équipe est vraiment neuve», poursuit Collet. «C’est une nouvelle ère, une nouvelle équipe, un nouveau chapitre. Commencer par une médaille lance des mecs comme Frank (Ntilikina), lance Evan (Fournier) et Rudy (Gobert) en leaders», enchaîne Batum.

Durant la préparation, le capitaine avait annoncé que pour ne pas rééditer les erreurs de 2017, les Bleus, avant même de parler de leadership, auraient besoin d’une hiérarchie établie. «Une équipe est née dans cette compétition», témoigne Vincent Poirier, et la Coupe du Monde lui donne raison. Ces Bleus, cuvée 2019, savaient où ils voulaient aller et surtout comment. «Connaître son rôle, savoir qui fait quoi, c’est ça le plus important», dit Batum. Et chacun des douze hommes avait connaissance de sa tâche et s’y acquittait.

Cette équipe de France s’est construite autour de quatre leaders, «quatre gars qui ont une voix, et c’est bien que le leadership vienne de plusieurs personnes», estime Fournier. Les Quatre Fantastiques : Rudy Gobert – «notre poutre défensive», dixit Collet –, Nicolas Batum – «Même s’il n’est pas très vocal, il a été beaucoup plus présent dans la vie quotidienne ; c’est celui qui met de l’huile dans le moteur», image le sélectionneur –, plus les deux fers de lance offensifs, Evan Fournier et Nando De Colo. Le premier était titulaire, le deuxième opérait en sixième homme, mais très souvent ils furent alignés dans les moments importants et leur capacité à trouver le chemin du cercle l’un après l’autre a rendu chèvre quasiment toutes les défenses. «Evan a fait une campagne remarquable. Surtout, il a mûri, dans son rapport aux autres, son implication dans le groupe. C’est quelqu’un qui a grandi et qui va grandir encore. Nando, c’est un tueur silencieux. Il y a une vraie complémentarité avec Evan. Ils arrivent à jouer ensemble parce qu’ils sont vraiment différents. La finalité est souvent la même, ils marquent des paniers, mais pas forcément les mêmes», analyse Collet.

Photo: Vincent Collet (FIBA)

5e médaille pour Vincent Collet

L’équipe de France est entrée dans sa Coupe du Monde en laissait seulement 4 points dans le premier quart-temps à l’Allemagne, elle l’a terminée en essorant l’Australie. Hormis le couac face à l’Argentine (voir plus bas), cette sélection, sur qui reposait bien des doutes, notamment en raison de son inexpérience, a fait preuve d’un grand sérieux et d’une application. Surtout, elle a su appliquer la recette qui a toujours fait le succès de l’équipe de France : la défense. C’est sur elle que les Bleus ont forgé leurs victoires, autour d’une colonne vertébrale sur les postes 5-3-1. Rudy Gobert, Nicolas Batum, et à la mène le duo Frank Ntilikina-Andrew Albicy. Ces deux-là, premières lames défensives de l’équipe, ont collé tour à tour Dennis Schröder, Kemba Walker ou encore Patty Mills, et ainsi ont mis la défense tricolore dans son ensemble sur le bon rythme. Leur style de jeu, leur complémentarité, leurs profils différents ont été tellement complémentaires que la question se posera l’an prochain, avec le retour au jeu de Thomas Heurtel, de savoir comment trouver le bon équilibre à la mène. «Ils ont réussi leur Mondial», approuve Collet. «Entre les deux, on a trouvé des solutions, on s’est plutôt bien débrouillé donc c’est encourageant.»

Ntilikina et Albicy se sont relayés, s’encourageant l’un et l’autre. Un autre trait de caractère de cette cuvée 2019 : sa profondeur de banc et son entente. «On ne peut pas toujours compter que sur Rudy et Evan, ils sont ciblés», rappelle Batum, qui prend la rencontre face à l’Australie en exemple. «Les titulaires australiens jouaient 35 minutes en moyenne. Chez nous, Evan, c’est 25 minutes. On savait que la fraîcheur serait de notre côté. Andrew Albicy et Vincent Poirier ont été extraordinaires. Rudy a laissé Vincent faire le boulot, et il l’encourageait sur le banc, ça montre que cette équipe avait un but commun.» Collet enchaîne : «Ça symbolise l’état d’esprit de cette équipe.  Il n’y  a pas de bonne équipe sans esprit de sacrifice, surtout en équipe nationale. Il y a beaucoup de bons joueurs, donc il faut qu’ils acceptent d’avoir un rôle qui ne soit pas aussi glorieux que celui qu’ils ont en club. Quand on est remplaçant de Rudy Gobert, forcément, on va jouer un peu moins. Là, Vincent était à fond d’entrée et a été décisif, comme Louis Labeyrie en première mi-temps. Tout ça sont des petites choses qui ont fini par peser.»

Cette médaille est aussi celle de Vincent Collet. Sa cinquième après l’argent à l’Euro 2011, l’or à l’Euro 2013, le bronze au Mondial 2014 puis à l’Euro 2015. De quoi faire de lui le sélectionneur national le plus titré dans l’histoire de l’équipe de France. «C’est sa cinquième médaille en une décennie, c’est quand même grandiose ! C’est un mec qui a gagné avec Tony, mais ausssi sans Tony, et maintenant sans Tony et Boris (Diaw)», lance Nicolas Batum. «C’est une fierté. Vous savez bien tout ce qui a été dit depuis les Jeux de Rio…», commente l’intéressé, qui a entendu et continue d’entendre bien des critiques à son sujet. «J’avais vraiment le souhait, le désir, de rebondir avec cette nouvelle équipe. Je suis fier que l’équipe de France soit la seule équipe à monter deux fois de suite sur le podium de la Coupe du Monde. Car les autres équipes ce soir (Espagne et Argentine) n’étaient pas sur le podium en 2014.»

Photo: Luis Scola et Nicolas Batum, FIBA

Le raté contre l’Argentine

Les montagnes russes des émotions, du mercredi soir, date de la victoire qui fera date face aux États-Unis (le premier succès français face à Team USA avec ses joueurs NBA), au surlendemain, avec la défaite face à l’Argentine. De l’euphorie à la gueule de bois en 48h. Ce petit refrain ne cessera peut-être jamais de trotter dans la tête du staff et des joueurs : et si, et si, et si…

Nul ne peut prédire l’avenir, mais peut-être que l’opportunité d’une vie de se battre pour le titre mondial est passée pour cette génération. D’où cette réaction d’Evan Fournier après le buzzer face à l’Australie, quand il s’est dépêché d’enlever la médaille autour de son cou. «Pour être honnête, je me fous de la troisième place ou de battre Team USA. Nous étions venus ici pour gagner la médaille d’or. Pas pour ramener le bronze ou battre les Américains», explique-t-il. «Je me souviendrai toute ma vie de ce match contre l’Argentine.» Cette demi-finale, perdue certes à la régulière, face à une équipe qui était simplement supérieure ce jour-là, les Bleus sont aussi passés à côté. «Ce n’était pas nous», reconnaît Batum. «On n’a pas perdu avec nos valeurs. C’est le seul match où on était un peu différent. Mais ça, ça arrive tout le temps dans le sport, et il faut savoir rebondir après», continue Collet.

Nul ne peut assurer par ailleurs ce qu’auraient pu réaliser les Bleus si la formule de la compétition avait été plus équitable, laissant un jour de repos en moins à la France avant la demi-finale, et surtout la forçant à voyager 8h le mardi, veille de quart-de-finale, puis 8h encore le jeudi, veille de demi-finale. «La FIBA doit faire un meilleur job là-dessus. Ce n’est pas normal», peste Fournier. «OK, on avait un jour off entre les matches, mais à chaque fois  on avait 6-8h de bus, de train ou d’avion… Ce n’est tout simplement pas acceptable pour les joueurs, point.»

Photo: Evan Fournier (FIBA)

En pensant déjà à Tokyo 2020

En 2019, l’équipe de France a confirmé la naissance d’un groupe, et semé de bien beaux espoirs pour l’avenir, avec la prise de pouvoir de la génération 1992 (Fournier-Gobert) et l’émergence de Ntilikina. «Cette médaille est aussi une promesse pour les JO», confirme Collet. «Les Espagnols ont la même équipe depuis 2010, donc ce n’est pas du hasard. Dans ces compétitions, l’expérience est une donnée hyper essentielle. Ce qui est arrivé vendredi (contre l’Argentine), on s’est fait la promesse que ça ne nous arrive plus jamais. Quand il y aura de nouvelles joutes, je ne pense pas qu’on nous avancera sur la gueule de la même façon.»

La campagne olympique a déjà commencé avec l’obtention du billet direct, qui permet d’éviter par le traquenard des tournois de qualification olympique, qui ne laissent aucun droit à l’erreur et qui, même en cas de qualification, tendent à plomber les chances de l’équipe de briller en lui imposant une double-préparation. «En 2016, trois jours après avoir la fin des championnats (nationaux), Heurtel, De Colo et moi, on était sur le pont pour aller au TQO aux Philippines !», rappelle le sélectionneur. «Et après s’être qualifié, il fallait se préparer pour les JO.  Là,  s’être qualifié directement permettra d’avoir une vraie préparation, dédiée aux JO, de quatre semaines, et même probablement cinq. Ça pemettra aux joueurs de se reposer. On aura l’avantage de pouvoir établir une préparation qu’on aura choisie. C’est un avantage énorme qu’on ne peut pas mesurer», poursuit Collet, habité par l’envie de faire grandir encore ce groupe. «Ce qui est positif, c’est qu’ils ont une ambition, j’allais presque dire démesuré, ce n’est jamais démesuré : il faut se donner les moyens de ses ambitions. Cette année, on n’était pas loin malgré tout.» Pas loin du Graal, le titre mondial. Dans cette quête, cette campagne 2019 pose une pierre fondamentale : des bases, saines, sur lesquelles continuer à construire.

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Pendant qu’Espagnols et Argentins se disputaient la médaille d’or, un sentiment de frustration emplissait les cœurs français : ils auraient pu être à cette place. Sans ce match raté, le seul de la compétition, mais survenu à l’un des pires moments, en demi-finale, face à l’Argentine… «Vendredi, après la défaite, j’étais comme certains de mes joueurs, détruits. J’ai rêvé de disputer cette finale, et je persiste à penser qu’il y avait la place pour le faire», souffle Vincent Collet. «Mais c’est aussi l’essence du sport de savoir rebondir. Il fallait concrétiser la belle campagne que ce groupe a fait, depuis la préparation, la meilleure depuis 2011.» Et au courage, au forceps, au mental, au talent, ils sont allés chercher cette place sur le podium. En équipe. «Bien sûr toute la France aurait aimé l’or, mais on part sur une victoire. Qui nous aurait mis sur le podium au début de la compétition ?», questionne Louis Labeyrie. Réponse : pas grand-monde, d’autant plus après avoir perdu deux joueurs du 5 majeur durant la préparation (Thomas Heurtel et Adrien Moerman). Les favoris étaient américains et serbes, les principaux outsiders grecs, australiens voire espagnols. «On est venu et on a fait un braquage, vulgairement on a dit fuck les States et nique la Serbie», continue Labeyrie.

Il y a cette médaille de bronze, le deuxième podium dans l’histoire de la France à la Coupe du Monde après la troisième place de 2014, et avant elle il y avait eu la victoire historique face aux États-Unis et leurs joueurs NBA puis la qualification directe pour les Jeux Olympiques 2020 à Rio. Dès lors, le bilan est forcément très positif. «On est à la Coupe du Monde, on n’est pas à la coupe régionale de je ne sais où !», rappelle Collet. «Quand on sait que les Serbes sont cinquièmes, les Américains septièmes, il y a de quoi être contents.

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Photos d’ouverture: FIBA

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