Marta Xargay, c’est 7 médailles avec l’équipe nationale espagnole, 147 sélections, 14 trophées en club. Son arrêt brutal de la compétition, il y a plus d’un an, avait surpris puisqu’elle n’avait alors que 29 ans.
« Avant que la pandémie n’éclate, il était clair pour moi que je voulais quitter l’équipe nationale après Tokyo 2020. Puis, avec le report, le dilemme de rater les Jeux ou non est venu et je me suis éloignée des terrains pour prendre du recul. Là j’ai découvert que c’était déjà… que mentalement je n’en pouvais plus. Cela ne m’a pas manqué de jouer. C’était le grand signe. J’étais en paix avec moi-même et avec ma carrière », a expliqué la joueuse dans une interview dans le quotidien El Pais.
La publication de cette interview a été reportée après les JO suite à une demande du président de la Fédération, Jorge Garbajosa, qui estimait que les déclarations de Marta Xargay pouvait déstabiliser le groupe. On le comprend à la lecture du témoignage de la joueuse qui charge le coach de la sélection espagnole, Lucas Mondelo.
« Le moment est venu où j’ai dû mettre la personne avant l’athlète. Je ne pouvais pas continuer à supporter des choses insupportables. Il y a des limites qu’il ne faut pas franchir et il m’a emmenée à une limite très lourde… J’ai eu beaucoup de problèmes avec la nourriture à cause de cette personne. Tout a commencé en Russie, à mon époque au Dynamo Koursk (NDLR: lors de la saison 2018-2019, au cours de laquelle Mondelo a combiné son poste avec celui d’entraîneur national). Ils nous pesaient chaque semaine et il était toujours derrière nous pour tout regarder. Il y a eu plusieurs situations dans lesquelles il s’est approché de Sonja Petrovic (Vasic) et moi et nous a dit que nous n’avions pas de dessert parce que nous étions grosses. A cette époque, je pesais 67 kilos et je mesure 1,82 m. J’étais bien physiquement, mais cela m’a rendu très peu sûre de moi, sur et en dehors du terrain. Cela a provoqué une révolution physique et mentale en moi », détaille-t-elle dans son témoignage. « Je me sentais mal de manger, même si c’était une salade… Je n’aimais pas la nourriture, je mangeais avec anxiété et puis j’allais aux toilettes… Quand je savais que le lendemain matin ils devaient nous peser, la nuit je ne dormais pas. Je pouvais passer deux heures au supermarché à regarder les composants de tous les produits. J’ai perdu le sens de la réalité, de ce que j’étais physiquement. Il n’a pas réussi à contrôler son autorité. A aucun moment il ne m’a respectée, ni en tant que joueuse ni en tant que personne. Il a eu de nombreux commentaires, publics et privés, m’attaquant en mettant en avant ma vie privée et mes relations. »
Marta Xarrgay raconte qu’elle est devenu obsédée et qu’on lui a diagnostiqué une boulimie et une orthorexie, une obsession de manger des aliments sains ou supposés tels. Elle précise qu’elle raconte son histoire avec le « désir d’aider plus que de rapporter. Je la raconte parce que je pense que je peux aider beaucoup de filles qui vivent la même chose « .
A l’issue des JO de Tokyo et de l’élimination de l’Espagne par la France en quart-de-finale, Lucas Mondelo a été démis de ses fonctions de coach national. La Fédération espagnole (FEB) a publié ce dimanche un communiqué dans lequel elle montre son soutien à Marta Xargay et condamne tout comportement abusif, précisant qu’elle n’était pas au courant jusqu’ici de celui de Mondelo. Le président de la fédération, Jorge Garbajosa, s’est par ailleurs exprimé dans As.
« Marta elle-même a déclaré que même sa famille n’était pas au courant de l’affaire. J’ai une excellente relation avec les joueuses. Laia Palau est mon amie, j’ai une relation très amicale avec Alba Torrens. Évidemment, au moment où on aurait su quelque chose, on l’aurait coupé pour que ce type de situation ne se produise pas et que le coach ne puisse pas continuer à son poste. J’ai personnellement parlé avec Marta. Pour qu’elle se sente couverte, pour lui offrir tout notre soutien. Nous savons à quoi ressemble le monde du basket, qu’il n’est ni noir ni blanc. Qu’il y ait des relations meilleures et pires dans les vestiaires, de l’usure, mais là, cela dépasse le seuil de tolérance et si à un moment donné si on avait su quelque chose, on n’aurait pas laissé passer une seconde. »
Photo: FIBA