Après quatre saisons de privation, Le Mans est de retour sur la scène européenne avec un effectif bien différent de celui de la saison dernière. Terry Tarpey s'en est allé, Matt Morgan aussi, et de nouvelles têtes arrivent pour fêter les 30 ans du club.
Le Mans Sarthe Basket, qui avait pris le relais du Sporting Club Moderne, fête ses trente ans d’existence - il est né le 6 septembre 1993 - via quelques évènements, la sortie d’une bande dessinée originale et un retour attendu en Basketball Champions League. « La Coupe d’Europe, la dernière fois, c'était en 2018-2019 », a rappelé le président Christophe Le Bouille. « Mais on était habitué à disputer la Coupe d'Europe. On est très heureux car c'est un objectif qui nous avait échappé de peu déjà l'année précédente. C’est évidemment pour bien y figurer. Ce n'est pas juste pour se qualifier et faciliter le recrutement. C'est aussi pour enfin créer, si ce n'est une épopée, du moins transformer un parcours européen avec beaucoup d'attachement de la part des supporters. » Il faut rappeler que si la présence continentale du club manceau s’inscrit sur cinq décennies, il n’a jamais su y exceller, ce qui est un fâcheux chapitre en blanc dans son Livre d’Or.
Le fait d’intégrer la saison régulière de Basketball Champions League a facilité, à l’inverse par exemple de Limoges, le recrutement des étrangers comme le souligne le directeur sportif Vincent Loriot. « Notre chance, c'est de pouvoir jouer une Coupe d'Europe et de l'avoir su très rapidement. Ça a été extrêmement facilitateur. Par exemple, Selom (Mawugbe) avait une clause qui lui permettait de se libérer du contrat si on ne faisait pas la phase régulière de la BCL. »
Seulement deux joueurs conservés
Pour le MSB, dont le budget est de 6,8 millions d'euros et la masse salariale brute chargée (joueurs et staff pros avec 3 coaches) de 1,9 million, le recrutement estival a représenté un sacré chantier car alors que l’équipe sortait d’une bonne saison, elle n’en conserve plus que deux vestiges, Abdoulaye Ndoye et Williams Narace en plus du coach Elric Delord. C’est la rançon à payer lorsque vous n’avez pas le portefeuille nécessaire pour conserver de (trop) bons joueurs comme Matt Morgan, finaliste au trophée de MVP de la saison de Betclic Elite et même l’autre All-Star, Tres Tinkle. Sans parler évidemment de Terry Tarpey, qui a monnayé son statut d’international auprès de Monaco.
On remarque aussi que le MSB a réalisé un recrutement de scouting dans la mesure où D’Shawn Schwartz, Matt Lewis et Nate Mason n’ont pas ou peu de références européennes. « On a eu tous les premiers choix qu'on voulait. C’est un bon signe. On est partis sur des profils bien spécifiques et on a réussi à convaincre les joueurs qui allaient bien dedans. Maintenant, on va voir si les pièces du puzzle s'emboîtent bien… », commente Elric Delord. Vincent Loriot ajoute : « Ce ne sont pas des joueurs déjà installés. À leur niveau, ils ont tous quelque chose à prouver et le MSB peut servir de tremplin. »
Le départ de Terry Tarpey, le retour de Will Yeguete
Le départ de Terry Tarpey, qui a passé six saisons dans la Sarthe, et qui était devenu la cheville ouvrière du club de par son investissement jamais démenti, ouvre un nouveau chapitre. Dans cette perspective, le MSB a fait revenir Will Yeguete, qui a déjà à son CV trois - remarquables - saisons au club avec le titre de champion de France de 2018.
Le Mans fait partie de ces équipes qui peuvent faire naître des espérances mais qui sont trop renouvelées pour permettre un jugement définitif à la lumière de son seul roster et de quelques matches de préparation, même si ceux-ci sont positifs. Cela se traduit dans les propos prudents du président Christophe Le Bouille : « On joue le maintien mais évidemment que l’on aspire à mieux que ça. Ça ne veut pas dire qu'on manque d'ambition, on veut simplement faire les choses dans l'ordre. Un objectif qui est permanent, ce sont les playoffs, oui, mais être sorti en deux manches sèches, ce n’est pas non plus forcément l’enjeu. Beaucoup de clubs peuvent y prétendre. On aspire aussi à rejouer une Coupe d’Europe, mais je n’oublie pas qu’il y a trois descentes cette année ». En 30 ans, le MSB a toujours joué au plus haut niveau. En 60 ans, Le Mans n’a connu que trois saisons de Pro B.
Les résultats des cinq dernières saisons
| Saison | Niveau | Bilan | Rang | Playoffs | Top scoreur | Budget |
| 2018-19 | Jeep Élite | 20-14 | 8e | Quart de finale | Cameron Clark (13,6) | 6,59 M€ |
| 2019-20 | Jeep Élite | 11-14 | 9e | (saison arrêtée) | Brandon Taylor (15,2) | 6,01 M€ |
| 2020-21 | Jeep Élite | 19-15 | 7e | Quart de finale | Ovie Soko (16,0) | 5,37 M€ |
| 2021-22 | Betclic Élite | 17-17 | 9e | – | Tashawn Thomas (13,7) | 5,87 M€ |
| 2022-23 | Betclic Élite | 19-15 | 6e | Quart de finale | Matt Morgan (20,7) | 6,06 M€ |
Les changements de l'intersaison
Sous contrat : Williams Narace (prolongation, 2025), Abdoulaye Ndoye (prolongation, 2025), Raphael Djasrambaye (premier contrat pro, 2026), Elric Delord (coach, prolongation, 2024)
Arrivées : Wilfried Yeguete (Limoges, 2025), Léopold Delaunay (Vichy-Clermont/Pro B, 2025), D’Shawn Schwartz (Fenerbahçe II/Turquie, 2024), Devante’ Jones (Boulogne-Levallois, 2024), Selom Mawugbe (Rostock/Allemagne, 2024), Matt Lewis (Iowa Wolves/G-League, 2024), Nate Mason (Atleticos de San German /Porto-Rico, 2024)
Départs : Terry Tarpey (Monaco), Matt Morgan (London Lions/Grande-Bretagne), Valentin Chery (Gravelines), Marcus Gomis (Orléans/Pro B), Kaza Kajami-Keane (Chemnitz/Allemagne), Bul Kuol (Cairns/NBL), Kenny Baptiste (Chalon, départ définitif), Mathias Van Den Beemt (2025, prêté à Aix-Maurienne/Pro B), Hugo Mienandi (prêté à Angers/Pro B), Ugo Doumbia (Chartres/NM1, 2026, prêté à Châlons-Reims/Pro B), Tres Tinkle (Obradoiro/Espagne), Josh Carlton (Boulogne-Levallois), Cameron McGriff
Effectif 2023-2024 : Devante’ Jones, Nate Mason, Abdoulaye Ndoye, Léopold Delaunay, Matt Lewis, D’Shawn Schwartz, Williams Narace, Raphael Djasrambaye, Wilfried Yeguete, Selom Mawugbe
Staff sportif
Coach : Elric Delord (41 ans)
Assistants : Antoine Mathieu (44 ans), Romain Zwicky (35 ans), Jordan Bernard (34 ans)
Préparateur physique : Pierre Golvan (26 ans)
Front office
Président : Christophe Le Bouille (52 ans)
Directeur sportif : Vincent Loriot (56 ans)
Directeur administratif : Arnaud Leproux (52 ans)
Salle : Antares (6 035 places)
Les joueurs
Le cinq majeur
Devante’ Jones
Des étrangers du MSB, c’est le seul qui a déjà joué en France, la saison dernière à Boulogne-Levallois. Son club l’estime investi en défense, capable d’attaquer en force le panier, efficace dans le tir, un vrai meneur de jeu, qui fait d’abord jouer ses équipes, un leader. 1,98 m d’envergure. Il a été responsabilisé aux Mets par Vincent Collet une fois Tremont Waters parti. 13,8 d’évaluation sur les 8 matches de playoffs avec une finale à la clé. C’était sa saison de rookie en pro après Coastal Carolina et la plus réputée université de Michigan.
Nate Mason
Le meilleur repère est qu’il a été All-Star en VTB League avec Avtodor Saratov avant d’aller gagner sa vie dans le championnat chinois tout en jouant l’été dans la ligue de Porto-Rico. Un combo. On annonce qu’il est scoreur, créateur, clairvoyant dans la distribution de la balle et doté de la fameuse grinta. Partout, il a marqué une quinzaine de points avec 5-7 passes et un bon ratio passes/balles perdues. Il va s’agir de sa deuxième expérience européenne après Israël. Fera-t-il oublier Matt Morgan ? Son profil est en tous les cas différent.
Matt Lewis
Le MSB le voulait déjà la saison dernière et c’est finalement Brynton Lemar qui a pris la place pour se retrouver très vite blessé puis partant. Matt Lewis a finalement effectué une deuxième année de G-League, toujours dans l'Iowa. Le club manceau estime qu’il n’a pas à entrer dans le costume de Terry Tarpey. En prenant du volume physique depuis sa sortie de fac, il s’est plutôt mué en extérieur polyvalent à la fois shooteur et scoreur. C’est en fait un swingman. Il avait été victime d’une blessure au genou lors de sa dernière année universitaire, ce qui a jeté à l’eau ses espoirs d’être drafté. Il lui a fallu ensuite du temps pour retrouver pleinement ses capacités.
D’Shawn Schwartz
Un gaucher qui peut jouer aux deux postes d’ailier et Elric Delord estime qu’il joue comme un arrière et qu’il possède une grosse marge de progression. Comme son prédécesseur Tres Tinkle, il devrait faire apprécier son shoot à trois-points (36,7 % derrière l'arc avec près de quatre tentatives par match sur cinq saisons et 159 matches universitaires). Il sort de l’équipe réserve de Fenerbahçe et a joué au deuxième niveau turc comme Matt Morgan. En avril 2022, D’Shawn Schwartz a participé à un championnat national de 3x3, discipline qui l’a vu porter le maillot de Team USA.
Selom Mawugbe
Meilleur défenseur de la BBL, le championnat allemand, ce qui pose son homme. Il a aussi fini meilleur contreur, 5e rebondeur et joueur le plus adroit du championnat (74,1 %). Il couvre les espaces, colmate les brèches, contrôle le trafic aérien, et il possède la panoplie complète du joueur spectaculaire : contres, alley-oop, dunks. Un gros sens du collectif aussi et il ne demande qu’à progresser offensivement, ce que promet son coach. Né aux USA de parents ghanéens, c’est par le football qu’il a vraiment commencé la pratique sportive dans la région de Los Angeles. Pendant la pandémie de Covid aux Etats-Unis, il a travaillé neuf mois comme vendeur pour la chaine nationale de grande distribution Lowe’s. Il a côtoyé le néo-Burgien JeQuan Lewis à Rostock et Axel Toupane aux Santa Cruz Warriors en G-League.
Les remplaçants
Abdoulaye Ndoye
Dans un premier temps, le Nordiste avait reçu un contrat de huit semaines de pigiste médical en remplacement de Brynton Lemar. Il avait été ensuite prolongé jusqu’à la fin de la saison 2022-23. L’entente avec le club est bonne au point d’avoir resigné jusqu’en 2025. De quoi lui donner de la stabilité après des passages éclair à Monaco et Gravelines. Il a été titulaire 28 fois en 32 matches. Ce combo guard de grande taille a comme première mission de défendre dur. Son pourcentage à trois-points a doublé sur une saison mais demeure sa principale faiblesse. Champion d’Europe U16 et 18. Fils d’Oumar, un ancien pro, qui fut son premier entraîneur.
Léopold Delaunay
Formé à Cholet, il avait encore un an de contrat avec CB mais en a été libéré selon son souhait. Il avait été prêté ces deux dernières saisons à Vichy-Clermont en Pro B avec qui il a été titulaire lors du dernier exercice. Polyvalent, il peut jouer 1, 2 et 3. Costaud et bosseur. Surnommé "Monsieur +" à La Meilleraie et son coach à la JAVCM, Guillaume Vizade, disait de lui qu’au niveau caractère, c’est "A+". Aussi joueur de 3x3, il postule pour les Jeux Olympiques de Paris 2024. C’est un pur produit du Maine-et-Loire (Jallais, Saint-Léonard Angers, Angers Métropole et donc Cholet Basket).
Raphaël Djasrambaye
Originaire de Troyes. Il a joué une première minute contre Pau en janvier dernier et dit que cela l’a libéré. Il a profité de forfaits pour montrer son savoir-faire en Coupe de France (6 points et 5 rebonds contre Nancy) et en Leaders Cup (dans le cinq de départ face à Cholet). Il est passé par Strasbourg et Dijon avant d’arriver au Mans en U20. Il a été victime d’une rupture des ligaments croisés, ce qui a freiné sa progression, mais il s’est étoffé. Il se dit joueur d’équipe et rêve davantage d’Euroleague que de NBA.
Williams Narace
Avec le départ de Terry Tarpey et ses trois saisons au compteur, l’international camerounais fait figure d’ancien au sein de l’effectif, d’autant qu’il est sous contrat jusqu’en 2025. Costaud, combattif, il se signale aussi par sa capacité à shooter de loin, même si sa réussite a chuté de 43,8 % à 27,3 %. Il a été sélectionné au All-Star Game 2023, une étape de plus depuis ses années comme espoir au SLUC Nancy. C’est en raison de sa croissance qu’il est passé du foot au basket. Il est Camerounais via sa mère et il a grandi dans ce pays avant de rejoindre Bordeaux. Douglas Kennedy et Paul Beatty sont ses écrivains préférés. On dit de lui qu’il a un cœur d’enfant.
Wilfried Yeguete
Nommé capitaine par ses pairs, il fait son retour au MSB puisque le natif de Pessac a déjà porté trois saisons le maillot du club avec le titre de champion de France en 2018 à la clé. Depuis, il a alterné le positif et les gros pépins. Il avait décroché un bon contrat à Monaco, ce qui récompensait un joueur qui se donne toujours à 100 % et qui peut jouer 4 ou 5. Vainqueur de l’Eurocup en 2021. Seulement, une blessure au genou l’a écarté des terrains pour toute la saison 2021-22. A Limoges, il lui a donc fallu se reconstruire. Il a prouvé qu’il n’a pas perdu ses qualités notamment de rebondeur. Le Mans a payé un buyout pour interrompre son contrat avec le CSP. Une faiblesse chronique aux lancers-francs et son pourcentage abominable de 37,1 % la saison dernière est le plus faible depuis son année de freshman à Florida.
Le coach
Elric Delord
Il a obtenu le poste de head coach en décembre 2019 au MSB suite à la mise à l’écart de Dounia Issa dont il était l’assistant, et depuis il est devenu une figure de la Betclic Elite. Débutant dans le métier à Bègles, l'entraîneur de 41 ans avait poursuivi ses études pour travailler au CNRS à Bordeaux. Il avait ensuite passé six saisons à l’ASVEL. Un coach cérébral qui ne se fait pas remarquer par ses colères sur le banc. Il aime le bon vin (c’est un Bordelais), l’automobile spécialement la Formule 1, l’OM, avoue qu’il n’était pas un joueur de grand avenir - il a joué en Régionale Aquitaine -, regarde 7 à 10 matches par semaine, de l’Euroleague mais pas la NBA.
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Photo d'ouverture : Abdoulaye Ndoye (Thomas Savoja)
