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Mathias Lessort (Nanterre 92) : « J’ai tout ce qu’il faut pour apporter à une équipe NBA »

Vainqueur de la Coupe de France et de la FIBA Europe Cup, Mathias Lessort (2m05, 21 ans) vient de boucler la meilleure saison de sa jeune carrière. L’intérieur de Nanterre s’est confié à BasketEurope.com sur cet exercice plein de succès et sur ses ambitions de NBA.

Vainqueur de la Coupe de France et de la FIBA Europe Cup, Mathias Lessort (2m05, 21 ans) vient de boucler la meilleure saison de sa jeune carrière. L’intérieur de Nanterre s’est confié à BasketEurope.com sur cet exercice plein de succès et sur ses ambitions de NBA.

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Une semaine après l’élimination contre le Paris-Levallois, dans quel état d’esprit es-tu ?

Le premier jour c’était un peu difficile à digérer, on était déçu. Mais Pascal (Donnadieu) a eu le bon discours dans le vestiaire. Il nous a dit de prendre du recul sur la saison, de ne pas s’arrêter au match qu’on venait de faire, et de repenser à toute la saison. Et quand on y repense, on se dit qu’on a gagné deux trophées et qu’on a fait une des meilleures saisons de l’histoire du club. Maintenant, même si on aurait préféré ne pas l’être, on est en vacances, donc on essaye d’en profiter. On a le sentiment du devoir accompli. Mais on aurait préféré aller plus loin dans les playoffs pour les supporters. On ne voulait pas se faire éliminer par le Paris-Levallois, parce que c’est quelque chose qui compte beaucoup pour les supporters et les dirigeants. Pour eux, on aurait préféré passer cette équipe. Mais on a vu Monaco se faire sortir aussi. C’est la loi des playoffs, c’est ce qui fait la beauté de notre sport.

Si tu devais faire ton autocritique de la saison, que dirais-tu ?

C’est quelque chose que je n’aime pas trop faire. Mais si je devais le faire, je me baserais plutôt sur la performance générale de l’équipe, sur ce que pensent mes coéquipiers et les coaches de moi. Et cette année, ils étaient contents de ce que je faisais. Je pense aussi que le fait d’avoir été titulaire et d’avoir eu un rôle important tout au long de l’année prouve que j’ai fait une bonne saison même si je ne suis jamais pleinement satisfait. J’aurais pu mieux faire que ce que j’ai fait. Je dirais que j’ai fait une saison correcte mais sans plus. Certaines personnes diront que j’ai fait une très bonne saison, mais je pense vraiment que j’aurais pu faire beaucoup mieux en étant plus régulier.

Comment as-tu vécu la victoire en FIBA Europe Cup contre ton club formateur ?

C’est un sentiment très particulier d’avoir gagné cette coupe d’Europe. L’année dernière, quand j’étais à Chalon, on l’avait perdue. Donc j’ai vécu deux fois une finale à domicile parce que l’année dernière, même si on n’a pas été en finale, le Final 4 était à Chalon, et cette année le match retour était à Nanterre. J’ai eu deux fois l’opportunité de soulever un trophée à domicile. L’année dernière, j’ai vu ce que ça faisait de perdre, surtout pour les fans et ceux qui s’investissent pour qu’on réussisse. J’avais eu du mal à le digérer. Cette année, je n’avais pas envie de revivre la même chose. Le hasard a fait que c’était contre Chalon, mon club formateur. Il y avait une double motivation. J’avais envie de gagner contre mon ancien club. Je n’avais pas envie que Chalon vienne soulever le trophée à Nanterre. Il y avait aussi le duel face à Moustapha Fall, l’un des meilleurs intérieurs du championnat, peut-être même le meilleur donc j’avais envie de bien faire.

Justement, quel est l’intérieur qui t’a le plus impressionné cette saison ?

Par rapport à nos styles de jeu, je dirais Moustapha Fall. On a plus ou moins trouvé des solutions pour le match retour de coupe d’Europe face à Chalon. On a essayé de faire en sorte qu’il ne brille pas. Mais c’est un très bon joueur. Il est très grand, il sait utiliser son corps. C’est son arme numéro un. Vu qu’il est plus grand que moi, c’était un peu difficile, mais au match retour on l’a éloigné du cercle, on l’a fait jouer face au panier. C’est vraiment contre lui que j’ai eu le plus de mal sur les quatre matchs qu’on a joués.

« A Chalon c’était un peu plus flou. C’était surtout des « si tu mérites … ». Je préférais avoir des garanties, même si j’aime bien les challenges »

Qu’est-ce que Pascal Donnadieu t’a apporté cette saison que tu n’aurais pas pu avoir en restant à Chalon ?

Je ne peux pas vraiment dire parce que je ne sais pas comment cela se serait passé à Chalon. Peut-être que j’aurais explosé à Chalon comme j’ai explosé ici, peut-être que j’aurais fait une meilleure saison … Mais quand j’ai signé mon contrat à Nanterre, j’avais plus de garanties qu’à Chalon quant à mon rôle dans l’équipe, au fait d’être titulaire, d’avoir des minutes, des responsabilités. A Chalon c’était un peu plus flou. C’était surtout des « si tu mérites … ». Je préférais avoir des garanties, même si j’aime bien les challenges. Je sais que si j’avais été mauvais à Nanterre, je n’aurais pas joué. Je n’ai pas seulement joué parce que Pascal me l’avais promis. J’ai mérité ma place.

Cette saison, on a vu un vrai groupe d’amis. Est-ce la clé de vos succès ?

Je pense qu’avoir réussi à créer cette alchimie, ça nous a beaucoup aidé. Il ne faut pas l’oublier : l’équipe a complètement été reconstituée avec huit nouveaux joueurs. Il ne restait que deux joueurs de l’année dernière, donc personne ne se connaissait à part Hugo (Invernizzi) et Mykal (Riley). Avoir une bonne ambiance et ne pas avoir de mauvaises personnes dans le groupe, c’est quelque chose de vraiment important dans une équipe. C’est la première fois que je peux dire que sur toute la durée de la saison, il n’y a eu aucune embrouille entre joueur. On n’était pas toujours d’accord avec le coach donc il haussait le ton, passait des coups de gueule dans la presse … Mais il n’y a jamais eu de problème entre joueurs, que ce soit sur le terrain ou en dehors. Je pense que ça se voyait. On n’apercevait jamais un joueur qui tirait la gueule parce qu’il ne jouait pas ou parce que le joueur devant lui était meilleur. Tout le monde était content quand un coéquipier marquait. Quand Bathiste (Tchouaffé), Spencer (Butterfield), Heiko (Schaffartzik), Talib (Zanna) et les autres faisaient un bon match, on était tous heureux. On les félicitait à la fin du match.

« La priorité c’est d’aller en NBA. La draft c’est une seule fois dans la vie et là c’est la dernière année où je peux y aller donc il ne faut vraiment pas que je me loupe »

Aujourd’hui, quelle est ta priorité : la NBA ou l’équipe de France ?

La priorité c’est d’aller en NBA. La draft c’est une seule fois dans la vie et là c’est la dernière année où je peux y aller donc il ne faut vraiment pas que je me loupe. J’ai fait des sacrifices tout au long de ma carrière pour y arriver. Maintenant je vais partir aux Etats-Unis pour préparer cette draft. C’est l’objectif numéro un.

Donc si tu avais le choix entre faire les Summer League ou la préparation de l’Euro avec l’équipe de France, tu choisirais les Summer League ?

Je ne suis pas certain de faire une Summer League. Ce sont les équipes qui choisissent qui elles veulent. Il y a de fortes chances que j’en fasse, mais ce n’est pas une certitude. Mais tout ça dépend de la draft. Si j’ai un contrat garanti et que je n’ai pas besoin de faire les Summer League, je serai disponible pour l’équipe de France. A l’inverse, si je n’ai pas de contrat garanti et que je dois faire mes preuves, j’irai en Summer League. Si je dois aller en Summer League, mais que l’équipe n’est pas intéressante je ne vais pas perdre mon temps … Pour résumer, si je dois passer par les Summer League pour signer en NBA, j’irai. Mais je pense que j’ai tout ce qu’il faut pour apporter à une équipe NBA dès la saison prochaine.

« Mon agent m’a dit que 24 équipes avaient appelé pour des work-outs. Je ne peux pas tous les faire, c’est beaucoup trop »

La plupart des mocks draft t’annoncent en début de second tour. Comment vas-tu faire pour grimper un peu dans la hiérarchie ?

Pendant un moment je regardais les mocks draft, mais je me suis rendu compte que mentalement ce n’est pas bien. Ça me fait plus cogiter et me disperser qu’autre chose. Donc j’ai arrêté de regarder tout ce qui concerne la draft. J’essaye de me couper de tout ça pour ne pas être distrait et que ça m’empêche de me concentrer sur Nanterre. Ce ne sont que des prévisions. On verra le 23 juin, et c’est pendant les work-outs que tout va se jouer. On a vu l’année dernière avec Guerschon (Yabusele), par exemple, et avec Petr (Cornelie) aussi. Tout se passe là-bas. D’ailleurs, je vais bientôt partir aux Etats-Unis. Mon agent m’a dit que 24 équipes avaient appelé pour des work-outs. Je ne peux pas tous les faire, c’est beaucoup trop. J’en ferai certains en priorité. Je vais cibler les sept ou huit équipes les plus intéressantes, celles où j’ai le plus de chances d’aller. Mon agent m’a dit quelles équipes l’avaient contacté, quelles équipes avaient montré de l’intérêt tout au long de l’année. Il y a les Nets, les Nuggets, les Pelicans, les Rockets, les Hawks …

Jouer tout au long de la saison devant les scouts NBA, ça ne rajoute pas trop de pression ?

Ça peut être motivant, mais si on fait un mauvais match on va se dire : « les scouts ont pensé que … ». Et au match d’après, plutôt que de gagner, on aura envie de prouver. Au début de la saison, mon agent et les coaches me disaient quand il y avait des scouts qui venaient. Au fur et à mesure de la saison, ils ont compris que cela ne servait à rien. Les scouts nous connaissent depuis trois ou quatre ans. Ils savent qui on est. Parfois, ils viennent ici mais ne regardent pas le basket. Ils regardent comment tu te comportes pendant l’échauffement, avec le coach, avec les arbitres, quand tu es sur le banc. Que tu mettes 10 ou 20 points, ça ne va rien changer pour eux.

Sur quel aspect du jeu penses-tu devoir encore progresser ?

Ce n’est pas un secret : sur mon shoot et mon jeu extérieur. D’abord à mi-distance, puis ensuite à trois points. C’est comme ça que le jeu évolue. Tout le monde doit être capable de shooter, d’étirer le jeu. C’est là que je dois le plus progresser, et encore plus par rapport au fait que je ne suis pas très grand. Je ne peux pas rester tout le temps dans la raquette, même s’il y a de moins en moins de grands 2,15m-2,20m qui restent dans la raquette.

Tu ne mesures « que » 2,05m. Tu n’as pas peur que ta taille te desserve en NBA ?

J’ai souvent entendu ça, mais il y a beaucoup de joueurs qui ne sont pas si grands que ça en NBA. Draymond Green, par exemple, joue poste 5 alors qu’il ne fait pas deux mètres… Et il n’a aucune difficulté à le faire. Ça pourrait être un désavantage, mais c’est à moi de faire en sorte que ça ne se voie pas. Il faut que je fasse oublier la différence de taille par mon énergie, ma capacité à courir, ma rapidité. Plein de choses qui feront que ce qui devait être un désavantage sera un avantage.

« Le seul avec qui j’échange assez souvent c’est Ronny Turiaf. Il avait à peu près les mêmes caractéristiques de jeu que moi. C’est quelqu’un qui m’inspire beaucoup »

Attends-tu avec impatience ton arrivée dans la colonie française en NBA ?

Ça serait une fierté de faire partie de la colonie française en NBA. Mais il y a beaucoup de joueurs français qui ont été draftés, et qui n’y ont jamais joué. J’ai déjà eu quelques contacts avec certains joueurs. L’année dernière j’avais discuté avec Rudy (Gobert) parce que j’avais fait des work-outs à Utah. Les autres je ne les connais pas beaucoup. J’avais eu Tony (Parker) l’année dernière au téléphone pour l’ASVEL. J’oubliais Timothé (Luwawu-Cabarrot) ! Mais je ne le considère pas comme un joueur NBA, c’est mon pote. Et Clint aussi. J’ai joué avec lui à Chalon chez les jeunes. Le seul avec qui j’échange assez souvent c’est Ronny Turiaf. Il avait à peu près les mêmes caractéristiques de jeu que moi. C’est quelqu’un qui m’inspire beaucoup. Il a ouvert les portes de la NBA a beaucoup d’Antillais. C’est un exemple pour moi. Il a un titre NBA, il a joué avec LeBron James, Kobe Bryant et Carmelo Anthony, trois des vingt meilleurs joueurs de tous les temps … Ca fait rêver. Des gens vont critiquer sa carrière à cause de son rôle, mais moi je respecte parce qu’il n’a jamais été free agent. Il a toujours su trouver un contrat donc c’est la preuve que quand il était dans une équipe, il apportait quelque chose.

Quels rapports entretiens-tu avec tes frères ?

Mes frères, je les consulte à chaque fois avant de prendre une décision. Ils ont une expérience que je n’ai pas. Pour la draft, ils seront impliqués. Ils me disent de me donner à fond, de montrer qui je suis et que j’ai ma place.

https://www.youtube.com/watch?v=A4wdaWzw49o

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Photo : Claire Macel

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