Il fut à la fois un joueur de niveau national, un étudiant brillant et Directeur Technique National adjoint. Il s’est lancé dans les affaires avec Boris Diaw et Ronny Turiaf qu’il avait connus à l’époque où il était assistant coach en équipe de France juniors. Il est aujourd’hui vice-président de l’Orléans Loiret Basket 45 chargé du secteur sportif. Bref, il y a de multiples raisons pour que BasketEurope s’intéresse à Nicolas Raimbault.
L’interview est en deux parties.
Quand on regarde votre parcours d’étudiant, on se dit « mais comment a-t-il fait pour être en même temps basketteur professionnel » ?
Les études, c’était davantage une fois que je me suis posé. En Nationale 2, c’était un entraînement par jour et ça me permettait de mener les deux et même les trois de front. Je n’avais pas le talent pour être pleinement basketteur professionnel et j’ai pris le partie d’une activité semi pro. Pendant cinq ans j’ai été conseiller technique régional pour la Région Centre pour faire de la formation de cadres puis pendant les dix années où j’étais DTN adjoint, toujours dans la formation de cadres, j’ai continué de jouer au basket, à Orléans, à Blois. Je me suis formé à travers le Master pour la formation pour adultes, mon DEA en psychologie du sport et pour sortir de la fédé, l’Exécutive MBA de HEC. Je me suis toujours dit que la meilleure façon d’envisager l’après-basket c’est de le construire pendant le basket. J’ai bien fait car pendant que j’ai été DTN adjoint, j’étais notamment chargé de la reconversion des athlètes de haut niveau. J’ai fait passer leurs brevets d’Etat à Freddy Fauthoux, Laurent Sciarra, Antoine Rigaudeau, Fred Forte, Jimmy Verove, les deux frères Gadou, et je me suis dit que ce n’était pas si simple quand on s’en préoccupait à l’issue de la carrière.
Pour fixer tout ça dans le temps, quelles ont été les périodes de ces différentes activités ?
J’ai arrêté ma carrière avec le titre de champion de France de Nationale 2 avec Blois en mai 2005 alors que j’ai été DTN adjoint de 2001 à 2012.
Vous avez déclaré avoir été amer que le président Yvan Mainini vous ait promis le poste de Directeur Technique National mais que Jean-Pierre De Vincenzi, qui était titulaire du poste, vous ait savonné la planche ?
J’en ai été très amer car j’ai très mal vécu les choses dans l’instant. Je n’étais pas suffisamment armé à cette période là pour comprendre tous les enjeux. Avec le recul, j’ai le regret d’avoir été amer, peut-être de m’être un peu trop exprimé là-dessus car j’en ai fait une expérience qui finalement m’a aidé à avancer. Il y a une vie après la fédé. C’est aussi dans les moments où vous êtes en difficulté que vous voyez comment les uns et les autres se positionnent. Et même si vous avez travaillé loyalement avec des gens pendant dix ans, il n’y en a finalement pas beaucoup qui restent à vos côtés. Philippe Legname (NDLR : président de Hyères-Toulon, président de la Ligue Féminine, membre du Comité Directeur de la FFBB) a été l’un des très rares à m’avoir accompagné pour que ma sortie de la fédération soit la plus propre possible. Je lui en saurai gré jusqu’à la fin de mes jours.
C’est ça qui vous a poussé à passer de la fonction publique au privé ?
Oui, je devais être un fédéraste jusqu’à la fin de mes jours… J’emploie ce terme avec humour. Ce que je n’ai pas compris sur l’instant c’est que Jean-Pierre De Vincenzi était très fragilisé lorsque Bernard Laporte (NDLR : ancien secrétaire d’Etat aux sports) avait pris la décision que les DTN ne devaient pas faire plus de deux mandats successifs. C’est le moment où Yvan Mainini, qui venait d’être réélu, m’a proposé de reprendre ce poste là. J’étais donc programmé pour rester fédéraste car cet univers me correspondait bien. J’avais aussi de bonnes relations avec pas mal de gens du secteur pro, de la LNB, qui m’ont soutenu y compris quand je me suis relancé ensuite dans le privé.
« Quand on a été dans le dur, certains de mes associés m’ont dit d’aller revoir les deux millionnaires de NBA pour leur demander de recracher au bassinet. Je me suis refusé de le faire et j’ai moi-même provoqué la liquidation. »
Avec des capitaux de Boris Diaw et Ronny Turiaf, vous avez lancé Arrêt de jeu, un restaurant à Paris, et il devait être le premier d’une chaîne ?
Notre objectif était de créer la première chaîne de restaurant sur la thématique du sport comme les sports bar dont on connaît l’excellence à l’américaine. Lorsque j’ai fait mon exécutive MBA à HEC, j’ai planché sur le business case et la création de ce genre d’entreprise. D’autres actionnaires mais surtout Boris et Ronny quantitativement ont eu la gentillesse de se joindre au projet. Je leur en sais gré car la relation que j’avais avec eux tenait au fait que j’avais eu la chance de partager quelques moments lorsqu’ils étaient en équipe de France juniors. Ils savent que les relations qu’ils ont pu créer avant d’être riches et célèbres ont plus de valeur.
Ce qu’il faut donc préciser c’est votre passage de quelques mois comme adjoint de Pierre Vincent, aujourd’hui coach de votre club, avec les juniors de cette génération Parker, Diaw, Turiaf, Mickaël Pietrus ?
Oui, c’est de l’époque où j’étais encore CTR en Région Centre. Ce rôle d’adjoint m’avait été proposé par Jean-Pierre De Vincenzi et Pierre Vincent. Quelques mois après ça, Alain Blondé a quitté la fédé et c’est là qu’on m’a proposé de prendre le poste de DTN adjoint. Donc quand je me suis retrouvé dans la lever de fonds de ce projet Arrêt de jeu, comme quoi le monde est tout petit, je me souviens d’avoir discuté avec Philippe Legname au téléphone et c’est lui qui m’a dit : « Nico, tu connais bien Boris, pourquoi ne lui passes-tu pas un coup de fil ? » J’avais du mal à imaginer que je puisse demander de l’argent à quelqu’un que je connaissais. A la réflexion, je me suis dit « pourquoi pas »… Et de fil en aiguille ça s’est fait.
Mais ce fut un échec. Pourquoi ?
Nous sommes responsables et dans le nous, il n’y a ni Boris ni Ronny. Nous, c’est moi et les autres associés fondateurs. On ne s’est pas implanté au bon endroit. On était adossé au centre commercial Le Millénaire (NDLR : proche de la Porte d’Aubervilliers à Paris) dont on nous avait annoncé quinze millions de visiteurs par an et rapidement on s’est aperçu qu’il y avait l’équivalent de trois millions. Au bout de moins d’un an, la FNAC qui s’était implantée a vidé ses rayons. On a fait venir des personnalités, Tony Parker, Miss France, mais ça n’a pas permis d’avoir un plus suffisant. On n’a pas été bon sur ce sujet là et j’ai ma grande part de responsabilité. Certains de mes associés quand on a été dans le dur m’ont dit d’aller revoir les deux millionnaires de NBA pour leur demander de recracher au bassinet. De toute façon des euros supplémentaires auraient provoqué la même issue. Je me suis refusé de le faire et j’ai moi-même provoqué la liquidation.
Boris Diaw ne vous en veut pas puisque vous avez monté ensemble un autre projet, Proxiform, des salles de fitness ?
On essaye de mettre ça en place sur le modèle d’Arrêt de jeu, c’est à dire sur le développement de la franchise. En provoquant la liquidation judiciaire d’Arrêt de jeu, je me suis endetté car j’étais caution de l’emprunt bancaire. Je pensais qu’il n’était pas possible de me lever le matin pour faire payer quelqu’un sans payer moi même ma caution. J’en ai beaucoup discuté avec Didier Domat (Ndlr : avocat spécialiste en droit du sport qui s’occupe des intérêts de différents joueurs dont Boris Diaw) qui était de très bon conseil. Effectivement Boris ne m’en veut pas et pour moi ça vaut tout l’or du monde. On est donc associés dans ce projet et on échange quelques fois dans l’année.
« Beaucoup de gens pensent que Pierre Vincent est mon ami, que je le favorise. En fait, c’est Pierre Vincent le coach, c’est très bien, mais si demain c’est Tartempion, c’est très bien aussi. »
Mais votre vrai gagne-pain c’est PerfAndCO, une société qui fait du coaching de dirigeant, de manager en entreprise et de la formation en management, en communication, en gestion des conflits, en négociations ?
Je fais des conférences sur les liens entre la performance en entreprise et celle dans les sports de haut niveau. Je vais d’ailleurs en faire une bénévolement pour les partenaires de l’OLB le 23 novembre. Après l’aventure Arrêt de jeu, même si on a lancé Proxiform, je me suis dit « qu’est-ce que je sais le mieux faire ? » C’était ça et j’en vis actuellement puisque le poste de vice président de l’OLB, je le fais bénévolement et j’y tiens.
Quel est votre champ de compétence au club, notamment vis à vis de Pierre Vincent qui est coach et directeur technique ?
C’est de faire le lien avec le président sur la dimension sportive, les échanges avec les agents et les joueurs notamment pendant les périodes de recrutement. Je suis d’ailleurs allé à la summer league de Las Vegas en juillet dernier avec Philippe Legname. A mon modeste niveau, c’est essayer que l’on ait les meilleurs moyens pour que les résultats soient le meilleur possible.
L’an dernier, il y a eu un conflit avec Pierre Vincent qui voyant qu’on lui imposait Thomas Drouault comme assistant a menacé de partir alors qu’il lui restait deux ans de contrat. Vous étiez au cœur du conflit. Ce n’est évident de gérer ce type de situation quand il y a une dimension humaine ?
Oui mais il y a une dimension humaine avec toutes types de personne avec qui je travaille. Beaucoup de gens pensent que Pierre Vincent est mon ami, que je le favorise. En fait, c’est Pierre Vincent le coach, c’est très bien, mais si demain c’est Tartempion, c’est très bien aussi. Je les connais tous et j’apprécie une bonne partie d’entre eux ! J’ai organisé leurs différentes formations, j’ai fait passer à Pascal Donnadieu le DEPB (Ndlr : diplôme d’entraîneur professionnel), aux uns et aux autres. Mon souci c’est de me dire que le sport professionnel, la Pro A, c’est un environnement extrêmement compétitif et ce type de situation n’aide pas le club à être dans les meilleures dispositions pour affronter ses adversaires. Je crois que ce club a des moyens qui peuvent lui permettre d’exister correctement et durablement en Pro A. Il y a la perspective d’une grande enceinte sportive d’ici 2020 qui est piloté par Philippe Pezet, un joueur emblématique du club d’Orléans qui est élu au conseil municipal en étant vigilant sur le fait que l’OLB puisse être le club résident. Ce qui m’interpelle à l’OLB et ce sur quoi je travaille dès que je le peux, c’est mettre tout ce beau monde en cohésion pour qu’il soit le plus performant possible. Soit il y arrive et il a de beaux lendemains devant lui, soit il n’y arrive pas et ça sera sa limite.