Après Masha Kirilenko, Miriam Poterbin, Jelisaveta Teodosic, Sabrina Ionescu, Juste Jocyte et Linda Fernandez, voici une autre femme influente du basket européen : Ilona Korstine. Comment la jeune espoir russe de 16 ans du CJM Bourges, française par le mariage de sa mère, est devenue la Directrice Générale de la VTB League soit la femme avec le plus de pouvoir dans le basket européen.
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Un père international estonien :
A sa naissance ses parents l’ont prénommée Julia mais cela ne plaisait pas à sa grand-mère estonienne et elle est devenue Ilona. Son père fut international estonien et était réputé dans le domaine de la préparation physique; il a notamment travaillé avec le BC Nizhny Novgorod. Au cours de son enfance, la native de Leningrad rebaptisée Saint-Petersboug s’est essayée à la natation, à l’athlétisme, à la gymnastique et au tennis avant de se décider pour de bon pour le basket. « Je suis venue à l’entraînement une fois par semaine, puis trois fois, puis… tous les jours », confia-t-elle à Maxi-Basket précisant qu’elle faisait aussi des un-contre-un avec le paternel. Après une saison en pro et un premier diplôme russe, elle se retrouva à la croisée des chemins : Moscou ou la NCAA ? Et ce fut…
En France pour rejoindre sa mère :
…la France ! Sa mère Olga demanda à sa fille unique de la rejoindre dans l’hexagone où elle venait de se remarier. Son père la poussa à prendre cette direction. Ilona avait 16 ans. Elle prit conseil auprès de l’entraîneur de Saint-Petersbourg qui connaissait Igor Groudine de Mondeville et Vadim Kapranov de Bourges. Nous étions en 1996. Ilona vint passer Noël avec sa mère, puis le Nouvel An à Paris, fit un bout d’essai à Bourges et fut enrôlée de suite pour la saison suivante. Elle connaissait déjà la France pour être venue visiter sa tante qui habitait la capitale. « Bourges, ce n’était pas Paris ! Au début, comme ma famille d’accueil était en vacances, j’étais dans un internat, on était six dans une petite chambre, je me suis dit : « oh non, ce n’est pas vrai ! La première année, c’était très, très dur. Quand en plus tu as connu le haut niveau et que tu es déjà pro, tu redescends une marche. »
Des diplômes en Russie et en France :
En plus du russe, Ilona Korstine parle français, anglais, espagnol et un peu allemand. Son français est si bon que l’Arizona Republic écrivit que c’était une russe qui parle anglais avec l’accent français ! Après un premier diplôme à Saint-Petersbourg, elle a obtenu un BTS en Commerce International à Bourges. Cela laisse songeur quant à ses capacités intellectuelles et sa pugnacité quand on sait qu’elle jouait en plus en Euroleague en semaine. « Beaucoup croient que j’ai de la facilité, que tout me tombe dessus comme ça, juste en claquant des doigts (…) Derrière tout ça, je suis parfois triste, je fais des efforts pour sourire, parce que ce n’est pas facile tous les jours. J’ai eu beaucoup de chance mais il ne faut pas oublier tout le travail quotidien. » Plus tard, Ilona obiendra un autre diplôme en gestion à la Samara State Aerospace University.
Le passeport français mais pas l’équipe de France :
Le nom de Ilona Korstine figure au palmarès des meilleures espoirs de la Ligue féminine, en 1999, entre Edwige Lawson et Claire Seigle. Comme française. Car par le biais du mariage de sa mère, et étant mineure, elle a pu obtenir automatiquement le passeport bleu (à l’époque). Aussi, le président fédéral, Yvan Mainini, caressa l’espoir de la voir revêtir le maillot de l’équipe de France bien qu’elle ait porté le russe dans les catégories de jeune. « Quand je suis arrivée en France, on m’a dit qu’en ne jouant pas trois ans avec la Russie, je pourrais rejoindre les Tricolores, grâce à ma naturalisation. Je suis donc restée trois étés sans rien faire, au lieu de partir en stage. Et au bout de cette période, on m’a dit qu’il fallait patienter encore un peu ! Franchement, ça m’a foutu les boules ! » Lassée d’attendre un hypothétique feu vert de la FIBA, Ilona réintégra l’équipe nationale de Russie.
Grise mine en boîte à l’Euro 2001 :
Avec son mentor Vadim Kapranov, Ilona a progressé très rapidement même si au départ elle faisait tapisserie. C’était une finisseuse, toujours en mouvement, toujours prête à mener une contre-attaque, à récupérer une balle qui traînait sous le cercle pour la renvoyer dans le cercle. Elle fut dans l’équipe de Bourges qui obtient en 2001 une troisième couronne européenne en finale à Messine contre Valenciennes et avec un rôle actif. Trois ans plus tôt, quand le Final Four avait été organisé à Bourges, comme tous les espoirs du club, elle avait servi des petits fours aux sponsors ! Une grande année 2001 ? Oui et non car quelques mois plus tard, en finale de l’Euro au Mans, avec la Russie, elle était battue en finale par la France de Yannick Souvré et Cathy Melain et s’est retrouvée ensuite en boîte avec ses équipières en club, dans un coin, et pas du tout avec l’envie de faire la fête. Huit ans plus tard, Ilona Korstine et la Russie échouèrent de nouveau en finale de l’Euro face aux Bleues, à Riga. Il y avait toujours Cathy Melain dans le camp d’en face.
Son maillot suspendu à Bourges :
Elle fut invitée et elle est venue au 20e anniversaire de la Ligue Féminine sur une péniche à Paris. Elle a aussi eu son maillot suspendu au plafond du Prado de Bourges pour services rendus de 1997 à 2003. « C’est bien que les Français se souviennent de leurs héros. J’ai passé six ans merveilleux à Bourges », commenta-t-elle à la presse russe oubliant les mauvais moments. « C’est toujours agréable quand ils se souviennent de vos mérites car les sports professionnels représentent beaucoup de travail et les athlètes lui donnent les meilleures années de leur vie. »
Une espionne russe :
Ilona a rencontré à Bourges celui qui fut longtemps son compagnon, Eric. Et lorsque la belle blonde décida de rentrer en Russie, le jeune homme l’a suivi. « Dans son pays natal, il a travaillé comme ingénieur au Space Research Institute. Quand ils ont découvert qu’Eric sortait avec une fille russe, il a eu des problèmes. Ils pensaient que j’étais une espionne. D’une façon générale, j’ai tourmenté Eric pendant longtemps, j’étais coquine. Il ne voulait probablement pas me perdre, alors il a tout quitté et a déménagé en Russie. Il a travaillé dans des clubs où j’ai joué plus tard.«
Le visage du basket féminin européen :
La question lui a été posée en Russie :
-Ilona, vous a-t-on proposé de devenir mannequin ou le « visage » d’une grande entreprise?
-Marcher sur le podium n’est pas pour moi. J’ai participé à des séances photo, mais quand elles ont duré trop longtemps, ça a commencé à m’ennuyer. Et j’ai eu très peu de tournages publicitaires et j’ai été payée de façon ridicule. On ne peut tout simplement pas me comparer avec Masha Sharapova (NDLR : Maria Sharapova, l’ancienne star du tennis russe). »
Illona Korstine a tout de même été choisie en 2006 pour être pendant dix-huit mois le premier « visage » du basket féminin européen de la FIBA. Le lancement eut lieu à Pecs en Hongrie à l’occasion du 1er All-Star Game européen féminin et Ilona eut droit à une séance photos de… mannequin.
Le racisme en WNBA :
Malgré son palmarès, la Franco-Russe ne comptabilise que 12 marches en WNBA avec Phoenix. Un souvenir désagréable si on l’écoute : « À Phoenix, je suis tombée sur un vrai racisme. Les basketteuses noires m’ignoraient, ne voulaient pas communiquer avec moi. Elles pouvaient courir vers moi et me jeter au visage : « Vous les Blanches, partez ! » Pendant longtemps, je n’ai pas compris d’où venait cette colère. Et après de nombreuses années, j’ai parlé avec un entraîneur aux États-Unis, qui est venu travailler en Russie. Sa grand-mère a la peau foncée et ne pouvait pas entrer dans les magasins. Seuls les Blancs y étaient autorisés. Sa grand-mère n’avait pas non plus le droit de monter dans le bus. D’où la haine des Blancs. »
La politique astucieuse de Besiktas :
Un pays qui ne lui a pas non plus paru très sympathique, c’est la Turquie. Elle a porté le maillot de Besiktas en 2011-12 et n’a pas apprécié sa façon de faire. « La direction de Besiktas, si je comprends bien, a une politique astucieuse. Ce club invite les basketteuses avec une somme d’argent décente, mais commence alors à retarder le paiement des salaires. Pendant un mois, deux, trois. Les joueuses grognent, et s’en vont. À leur place, ils en prennent d’autres et opèrent de la même manière. Alors je suis partie. » Elle a raconté également son expérience de conductrice à Istanbul. « Oh, c’était quelque chose ! Les Turcs klaxonnent pour n’importe quelle raison. Cela m’a irritée, puis j’ai commencé à klaxonner en réponse. Brûler un feu rouge ou franchir une double ligne continue, c’est facile. Je me souviens comment un excentrique a laissé une voiture dans une rue étroite. Notre bus du club n’a pas pu passer. Nos entraîneurs sont alors descendus du bus et, avec le chauffeur, ont retiré cette voiture de la route. »
Un incroyable butin :
Le 16 juillet 2013, à 33 ans, Ilona Korstine a annoncé la fin de sa carrière de basketteuse. Dans son coffre-fort, un incroyable butin : Trois médailles d’or européennes (2003, 2007 et 2011), trois d’argent (2001, 2005 et 2009), deux médailles d’argent mondiales (2002 et 2006) et deux de bronze olympiques (2004 et 2008), trois Euroleague (2001, 2005 et 2010) et trois finales (2000, 2006 et 2011). Plus 2 titres de championne de France, 3 de championne de Russie et plein de breloques. Nota important : sa retraite correspond avec la sérieuse baisse de régime de l’équipe nationale russe.
VTB League et télévision :
Peu après la fin de sa carrière, elle s’est vu offrir le poste de directrice adjointe de la VTB United League, une ligue supranationale mais avec une large majorité de clubs russes. Ça ne se refuse pas. En parallèle, Ilona a travaillé comme consultante pour les chaînes de télévision Russia 2 puis Match TV. « Vous savez, je pensais que lorsque j’aurais fini avec le basket, j’aurai plus de temps libre », commenta t-elle à l’époque. « Mais j’en n’ai plus du tout ! Après tout, j’étudie aussi, je vais bientôt passer mon diplôme dans une école de commerce. Maintenant, j’ai des tests et des examens solides à faire. De plus, pendant la semaine, je m’envole pour Sotchi pour une formation avancée à l’Université internationale olympique. » Et à propos de ses interventions télévisées : « Je connais à fond les statistiques des joueurs et des équipes, les tactiques de tel ou tel club, et les caractéristiques de l’approche du coaching. Cette connaissance ne peut que m’aider à l’avenir »
Dans les tribunes du CSKA avec Vladimir Poutine
Ilona Korstine est devenue un personnage public en Russie et cela lui permet d’en côtoyer d’autres encore plus importants. C’est ainsi qu’elle s’est retrouvée à un match d’Euroleague CSKA Moscou-Real Madrid en compagnie de Vladimir Poutine, alors Premier Ministre et le Vice-Président Sergei Ivanov. Une partie du public n’a pas pu voir le début du match car les spectateurs ont été fouillés avec soin par la police à l’entrée de la salle et les propriétaires de voitures particulières ont dû se garer à plus de 300 mètres du parking habituel. « « Oui, je lui ai parlé de certains aspects techniques du jeu, j’ai parlé un peu de la tactique du CSKA. Il connaît bien le basket. Poutine m’a semblé un interlocuteur très intéressant, vivant et direct. On sent que c’est un sportif pour qui le sport fait partie de la vie. Honnêtement, c’était très excitant de côtoyer des gens aussi haut placés. J’ai eu de la chance, après tout, tout le monde ne parvient pas à communiquer personnellement avec Vladimir Vladimirovitch. Il transpire l’énergie et la force. En conversation sans protocole, le chef du gouvernement est très aimable et agréable. Nous avons parlé de basket-ball et soutenu le CSKA, qui a malheureusement perdu à la fin contre le Real Madrid. »
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Une Académie à son nom à Moscou :
En août 2019, l’insatiable Ilona Korstine a ouvert une Académie à son nom à Moscou. Elle est réservée aux filles et garçons entre 6 et 17 ans.
Le temps de faire un enfant
C’est en juillet 2016 qu’elle a été nommé Directrice Générale de la VTB League. Elle a été reconduite cet été dans ses fonctions. La responsabilité la plus importante pour une femme dans le basket en Europe. « Notre objectif est de maintenir un haut niveau de compétition », expliquait-elle en début de saison à propos des ambitions de sa ligue. « Nous améliorerons les réglementations marketing et sportives, en élevant la barre pour les clubs afin qu’ils s’efforcent de s’améliorer, de travailler plus efficacement avec les fans et d’augmenter la fréquentation. Je veux que le basket-ball soit le sport numéro un. La ligue, bien sûr, grandit et se développe. Cette saison, nous fêtons nos 10 ans, pendant lesquels beaucoup de choses ont changé. L’essentiel, je pense, n’est pas de s’arrêter là. » En 2017, Ilona a épousé Vladimir Potapov, président du conseil d’administration de VTB Capital et elle a eu le temps de faire un enfant.
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Un père international estonien :
A sa naissance ses parents l’ont prénommée Julia mais cela ne plaisait pas à sa grand-mère estonienne et elle est devenue Ilona. Son père fut international estonien et était réputé dans le domaine de la préparation physique; il a notamment travaillé avec le BC Nizhny Novgorod. Au cours de son enfance, la native de Leningrad rebaptisée Saint-Petersboug s’est essayée à la natation, à l’athlétisme, à la gymnastique et au tennis avant de se décider pour de bon pour le basket. « Je suis venue à l’entraînement une fois par semaine, puis trois fois, puis… tous les jours », confia-t-elle à Maxi-Basket précisant qu’elle faisait aussi des un-contre-un avec le paternel. Après une saison en pro et un premier diplôme russe, elle se retrouva à la croisée des chemins : Moscou ou la NCAA ? Et ce fut…
En France pour rejoindre sa mère :
…la France ! Sa mère Olga demanda à sa fille unique de la rejoindre dans l’hexagone où elle venait de se remarier. Son père la poussa à prendre cette direction. Ilona avait 16 ans. Elle prit conseil auprès de l’entraîneur de Saint-Petersbourg qui connaissait Igor Groudine de Mondeville et Vadim Kapranov de Bourges. Nous étions en 1996. Ilona vint passer Noël avec sa mère, puis le Nouvel An à Paris, fit un bout d’essai à Bourges et fut enrôlée de suite pour la saison suivante. Elle connaissait déjà la France pour être venue visiter sa tante qui habitait la capitale. « Bourges, ce n’était pas Paris ! Au début, comme ma famille d’accueil était en vacances, j’étais dans un internat, on était six dans une petite chambre, je me suis dit : « oh non, ce n’est pas vrai ! La première année, c’était très, très dur. Quand en plus tu as connu le haut niveau et que tu es déjà pro, tu redescends une marche. »
Des diplômes en Russie et en France :
En plus du russe, Ilona Korstine parle français, anglais, espagnol et un peu allemand. Son français est si bon que l’Arizona Republic écrivit que c’était une russe qui parle anglais avec l’accent français ! Après un premier diplôme à Saint-Petersbourg, elle a obtenu un BTS en Commerce International à Bourges. Cela laisse songeur quant à ses capacités intellectuelles et sa pugnacité quand on sait qu’elle jouait en plus en Euroleague en semaine. « Beaucoup croient que j’ai de la facilité, que tout me tombe dessus comme ça, juste en claquant des doigts (…) Derrière tout ça, je suis parfois triste,
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