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Rediff – ITW Jean-Philippe Guillin (2/2) : « La France aux fenêtres internationales, on est entre 400 et 600 000 téléspectateurs »

Il est depuis plusieurs décennies le « Monsieur Basket » de France Télévisions. Le journaliste Jean-Philippe Guillin s’est confié à Basket Europe en juin dernier. Durant l’été, la rédaction de Basket Europe vous propose de relire une sélection de quelques uns de nos articles premium. Pour les lire,

Il est depuis plusieurs décennies le « Monsieur Basket » de France Télévisions. Le journaliste Jean-Philippe Guillin s’est confié à Basket Europe en juin dernier.

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L’interview est en deux parties. La première est à relire ici, voici la deuxième.

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Depuis quand faites-vous équipe avec Richard Dacoury ?
Il a commencé avant moi, aux Jeux de 96 avec Patrick Montel. Et, entre 96 et 2000, il y a Charles Biétry qui passe chez nous, notamment avec Christian Prudhomme, qui est rédacteur en chef de Tout le sport. Celui-ci se rend compte que le gars qui fait les sujets et passe à l’antenne pour le basket dans Tout le sport et Stade 2, c’est souvent Jean-Philippe Guillin. C’est lui qui dit à Biétry que ça serait bien de mettre Guillin pour les Jeux de Sydney. Je me retrouve à Sydney à commenter les femmes et les hommes. Et, à l’époque, Richard sort de ses derniers contrats de joueur au PSG Racing où Biétry était président. Je savais très bien que si ça n’allait pas, j’allais me faire dégager très vite. A la mi-temps du premier match, dans les ordres, j’ai la voix de Charles Biétry qui me dit « ça va petit, tu vas continuer » (rires). Petit, même si, comme je suis né en 62, en 2000, j’avais déjà quelques heures de vol !

Les premiers matches des équipes de France ont été diffusés sur France 4. D’autres pourraient-ils l’être sur France 2 ou France 3 ?
Tous les matches de qualif’ vont être sur France 4. Pour la Coupe du monde féminine, je n’ai pas encore l’info. Il y a des propositions faites par la programmation des sports, et ça doit être validé par les directrices ou directeurs des programmes de chaque chaîne concernée. Pour que ce soit envoyé à la presse écrite, il faut que ce soit validé quinze jours ou trois semaines avant la compétition.

Que pensez-vous de l’évolution des deux équipes de France, vous qui avez connu la très longue traversée du désert ?
La semaine dernière, Laurence Dacoury, la femme de Richard, m’a envoyé par Whatsapp un vieux reportage que j’avais fait pour FR3 d’une tournée de l’équipe de France en 90 où elle joue la Tchécoslovaquie à Prague et l’URSS à Moscou. C’est la première fois que l’équipe de France va gagner en Russie face à CCCP qui est champion olympique (NDLR : 85-86). Le cinq majeur de l’époque, c’était Demory, Dacoury, Ostrowski, Hugues Occansey et Vestris. C’était une traversée du désert avec parfois des moments sympas. Je me souviens d’un championnat d’Europe en Italie, en 1991, où la France, en ne gagnant qu’un seul match en poule, se retrouve en demi-finale. On a commenté quelques matches avec André Garcia sur France 3 national.

Aujourd’hui, on mesure le chemin parcouru : l’équipe de France bat les Etats-Unis, est en finale des Jeux Olympiques. Et les filles, qui ont longtemps navigué entre la 6e et la 8e place européenne, ont obtenu des médailles à l’EuroBasket comme aux Jeux Olympiques ?
Quand on met, côte à côte, des photos des douze joueurs qui ont été en finale à Sydney en 2000 et ceux qui ont été en finale à Tokyo en 2021, on se rend compte qu’athlétiquement, ce ne sont plus du tout les mêmes gabarits. Ils courent plus vite, ils sautent plus haut. Il y a aussi beaucoup plus de mixité aujourd’hui en équipe de France. Il y a des parents avec des racines africaines, des racines américaines, des basketteurs qui viennent des DOM-TOM qui ont toujours eu énormément d’importance en équipe de France. La formation française est selon moi l’une des meilleures du monde. J’ai l’impression qu’en ce moment les planètes s’alignent car on peut additionner des joueurs qui ont un énorme vécu d’Euroleague, des joueurs qui ont un énorme vécu de NBA, avec lesquels on met avec parcimonie pour les endurcir des jeunes qui vont former l’équipe dans quatre, six ans. C’est assez incroyable. Il n’y a pas longtemps, dans une émission qui s’appelle Temps additionnel, j’ai reçu sur France Info, pendant une demi-heure en plateau Vincent Collet. En aparté, je lui ai dit qu’il avait un métier de dingue car il se retrouve avec un réservoir qui lui permet de faire une équipe de France presque qu’avec des joueurs NBA, une autre qu’avec des joueurs Euroleague, et une troisième qu’avec des joueurs du championnat de France. A ce propos, ça serait tellement mieux que l’on puisse régler ces problèmes d’égos surdimensionnés entre les patrons de l’Euroleague et ceux de la FIBA pour que, par exemple, trois joueurs du Real Madrid, et deux de Anadolu Efes puissent être en équipe de France.

Photo : FIBA

« Si tu mets une équipe de France – si tant est que tu as la présence d’esprit de faire une bande-annonce pour le vendre un peu le match -, tu fais des audiences qui sont le double ou le triple de la case normale »

Les stations de France 3 diffusent des matches de Betclic Elite. Est-ce que ça fait partie de la volonté de France Télévisions de développer le basket ?
Ça fait partie de la volonté de France Télévisions de développer ce que la chaîne France 3 appelle des PAE, des Prises d’Antenne Exceptionnelles. Et dans ces PAE, il y a de plus en plus de sports. Comme ces prises d’antenne ont souvent lieu le dimanche, ça tombait pile pour les matches de basket, au moment où la LNB cherchait des solutions pour mieux valoriser son sport. Pour les directeurs régionaux, qui ont chacun leur enveloppe, c’était très intéressant car ça ne coûte pas trop cher de mettre en image un match de championnat de France de basket masculin ou féminin, et après de décrocher sur deux régions. Bourges-Basket Landes peut à la fois être décroché sur Orléans et la région Centre et sur la grande région Aquitaine. Et là, tu as un gros noyau de téléspectateurs potentiels et, compte tenu des coûts de production, les audiences sont très intéressantes pour les directeurs et les directrices régionales.

Vous ne communiquez pas beaucoup sur ces audiences ?
C’est une grande maison, il y a 10 000 salariés. Ce n’est pas la direction des sports qui communique là-dessus, mais c’est à chaque direction de valoriser ses Prises d’Antenne Exceptionnelles. Si vous allez sur le site de France 3 Orléans, par exemple, vous allez vous rendre compte qu’ils ont beaucoup communiqué sur les matches de Bourges. Sur France 3 Rennes, ils vont peut-être parler des handballeuses de Brest. La direction nationale va communiquer en fin d’année, en disant, « on a fait tant de directs », mais chaque région est complètement autonome. Ce n’est plus l’époque où on débarquait de Paris, « poussez-vous, on connaît tout ! » Et heureusement. Dans la maison mère, qui est située en face de l’Hôpital Georges Pompidou à Paris, où on est 3 500, il y a une structure qui s’appelle France 3 Paris-Ile-de-France. Quand sa direction a décidé de mettre à l’antenne trois matches du Paris Basketball, elle a pris sa décision en toute indépendance, sans demander l’autorisation à la direction des sports, comme si c’était France 3 Corse. France 3 va de plus en plus être une station tournée vers la régionalisation, en gérant son antenne avec son budget. Il y a un public pour ces PEA. La salle est pleine dans ces villes moyennes, où il n’y a pas de concurrence avec le rugby et le foot, et ceux qui n’y sont pas regardent à la télévision ou sur la tablette le basket, le hand ou le volley, d’autant que ces stations régionales sont sur les box. Bien sûr que moi, à titre individuel, j’aurais aimé qu’une structure nationale basket se monte, et que l’on descende par ci par là, mais je me mets à la place des directeurs ou directrices régionales, ça leur permet de valoriser leur personnel. C’est normal qu’ils mettent des commentateurs ou commentatrices qui sont toute l’année dans la région, et qui connaissent peut-être mieux les joueurs et les joueuses que nous quand on arrive pour un one shot en région.

Etes-vous satisfaits des audiences, que ce soit sur France 4 et France 3 ?
Oui. Sur France 4, ils sont très contents, d’autant qu’ils ne font plus grand-chose depuis l’épisode Covid. Il y a des dessins animés le matin, et le soir ça se transforme souvent en une chaîne culturelle avec de l’opéra, de la musique en live, pour des publics de niches. Aussi, il est évident que si tu mets une équipe de France – si tant est que tu as la présence d’esprit de faire une bande-annonce pour le vendre un peu le match -, tu fais des audiences qui sont le double ou le triple de la case normale. En début de saison, pour des affiches qui ne faisaient pas grimper au rideau, des France-Monténégro, Hongrie-France, ou France-Portugal, on est entre 400 et 600 000 téléspectateurs. Quand tu vois que L’Equipe TV, quand ils en ont 100 000, ils en font des pages… Pour France 4, c’est très bien.

Photo : Jean-Philippe Guillin avec Nicolas Batum

« Les gens découvrent l’été une équipe de France et, quand il rallume leur télé sur France 4, ce n’est pas la même équipe »

Quels sont pour vous les principaux handicaps du basket français : la concurrence de la NBA, l’absence des internationaux, le turnover des équipes, l’absence de résultats des clubs en Europe, le changement perpétuel de diffuseurs ?
Je mettrai en un le changement perpétuel dans les compositions d’équipe. Tu ne peux plus t’attacher à un joueur. Tu ne sais plus qu’Antoine Rigaudeau est de Cholet ou Richard Dacoury de Limoges. Ça change tout le temps, parfois deux fois dans la même saison. La deuxième chose, ce sont les joueurs étrangers qui viennent en France pour valoriser leur carrière, et signer ensuite dans des championnats plus lucratifs. Même si c’était déjà le cas il y a quinze ans, ils restaient quand même 2 à 3 ans dans le même club. On achète un joueur polonais, qui est en fin de carrière, et qui va faire 7e joueur car il est moins cher qu’un jeune joueur formé localement. Il y a aussi les problèmes de diffusion. Il faut que la Ligue Nationale se pose les vraies questions. Pourquoi a-t-elle des soucis à trouver des diffuseurs ? Le produit n’est pas assez bien expliqué. Il y a ce phénomène de playoffs qui est incompréhensible sinon par la niche de téléspectateurs qui suivent la NBA, et qui savent ce qu’est une formule en 5 ou 7 matches gagnants. Alors qu’en sortant dans la rue, je te défie de trouver trois personnes qui savent comment va être désigné cette année le champion de France. Toutes ces choses-là font pour moi beaucoup de mal au basket français. En plus de ça, on est victime de notre succès. C’est-à-dire que nos joueurs sont très bien formés, ils sont à la fois demandés par de grands clubs d’Euroleague et par la NBA. Résultat des courses : le téléspectateur moyen ne les voit pas. J’ai eu la chance de suivre toute la carrière de Tony Parker en équipe de France, de commenter ses matches, sur France Télévisions, à partir des quarts-de-finale, et c’est grâce à ces retransmissions en clair qu’il a été connu par l’ensemble de la planète basket. Ce ne sont pas les Français moyens qui s’abonnent à la NBA pour se lever à trois heures du matin, et voir Tony Parker à San Antonio. C’est juste la niche des basketteurs, 100-150 000 téléspectateurs, grand maximum ! Si tu veux atteindre des millions, il faut mettre des matches en clair, dans des compétitions compréhensibles. Quand je regarde la liste qu’a sorti Vincent Collet pour les deux matches que l’on va commenter avec Richard Dacoury, heureusement qu’il y en a deux à l’ASVEL, un à Cholet, un jeune qui n’a jamais joué, et un à Monaco, parce que le championnat de France est un peu à poil. Au sens, comment le Français moyen peut-il se reconnaître dans l’équipe de France ? Ça sera compliqué tant qu’il y aura ces doublons de calendrier. Les gens découvrent l’été une équipe de France et, quand il rallume leur télé sur France 4, ce n’est pas la même équipe. Et toi, tu ne peux pas te saborder, dès la prise d’antenne, en disant « restez avec nous, mais vous n’allez pas voir Nando De Colo, Evan Fournier et Rudy Gobert. » Il faut expliquer, vulgariser, donner envie aux gens de rester jusqu’au bout. En leur disant que dans cette équipe-là, il y aura peut-être un, deux, trois joueurs qui auront la chance de rejoindre le noyau dur et d’être à Paris en 2024.

Pour une chaîne nationale, des clubs dans des villes comme Fos-sur-Mer, Le Portel, Gravelines, c’est vendeur ?
Ça l’est pour France 3 Nord-Pas de Calais. Après, sur le national, il ne faut pas rêver. Tu ne vas pas mettre ça à un horaire de grande écoute. Même la finale, si on avait les droits, en cinq matches, ça serait très compliqué pour nous de le faire. 400-600 000 téléspectateurs sur France 4, c’est bien, mais sur France 2 ou France 3, il ne faut pas rêver.

Le match de l’équipe de France, qui aura lieu à l’Accor Arena de Paris, à la fin août, dont on ne connaît pas encore l’adversaire, sera-t-il pour vous un bel évènement ?
On croise le groupe de la Lituanie, de la République Tchèque, de la Bosnie-Herzégovine et de la Bulgarie. Ça sera juste après les championnats européens à Munich dont je parlais avec ceux de la natation à Rome. On aura un peu plus de moyens. J’ai demandé une caméra de plus avec David Malarme pour faire en plus des interviewes bord terrain. Il y aura peut-être quelques joueurs en plus dans le groupe en plus de ceux que Vincent Collet a désigné pour les matches de juillet. S’ils veulent remplir Bercy, c’est mieux d’avoir Rudy Gobert dans la raquette que Vincent Poirier.

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Depuis quand faites-vous équipe avec Richard Dacoury ?
Il a commencé avant moi, aux Jeux de 96 avec Patrick Montel. Et, entre 96 et 2000, il y a Charles Biétry qui passe chez nous, notamment avec Christian Prudhomme, qui est rédacteur en chef de Tout le sport. Celui-ci se rend compte que le gars qui fait les sujets et passe à l’antenne pour le basket dans Tout le sport et Stade 2, c’est souvent Jean-Philippe Guillin. C’est lui qui dit à Biétry que ça serait bien de mettre Guillin pour les Jeux de Sydney. Je me retrouve à Sydney à commenter les femmes et les hommes. Et, à l’époque, Richard sort de ses derniers contrats de joueur au PSG Racing où Biétry était président. Je savais très bien que si ça n’allait pas j’allais me faire dégager très vite. A la mi-temps du premier match, dans les ordres, j’ai la voix de Charles Biétry qui me dit « ça va petit, tu vas continuer » (rires). Petit, même si, comme je suis né en 62, en 2000, j’avais déjà quelques heures de vol !

Les premiers matches des équipes de France ont été diffusés sur France 4. D’autres pourraient-ils l’être sur France 2 ou France 3 ?
Tous les matches de qualif’ vont être sur France 4. Pour la Coupe du monde féminine, je n’ai pas encore l’info. Il y a des propositions faites par la programmation des sports, et ça doit être validé par les directrices ou directeurs des programmes de chaque chaîne concernée. Pour que ce soit envoyé à la presse écrite, il faut que ce soit validé quinze jours ou trois semaines avant la compétition.

Que pensez-vous de l’évolution des deux équipes de France, vous qui avez connu la très longue traversée du désert ?

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Photo d’ouverture : Mam Jaiteh (FIBA)

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