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Rediff – Le championnat espagnol est-il plus fort que jamais ?

Considéré comme le meilleur en Europe, le championnat espagnol, la Liga Endesa ou Liga ACB, a réussi la prouesse de voir six de ses clubs sur douze possibles dans les derniers carrés des trois compétitions européennes majeures lors de la saison 2021-2022. Une ville espagnole, Bilbao, a également obt

Considéré comme le meilleur en Europe, le championnat espagnol, la Liga Endesa ou Liga ACB, a réussi la prouesse de voir six de ses clubs sur douze possibles dans les derniers carrés des trois compétitions européennes majeures lors de la saison 2021-2022. Une ville espagnole, Bilbao, a également obtenu l’organisation du premier Final Four de la BCL en terrain neutre. Le basket en Espagne se porte-t-il mieux que jamais ?

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Dans une semaine, le Real Madrid et le FC Barcelone s’affronteront pour une place en finale de l’Euroleague. Le weekend dernier, Tenerife et Manresa se défiaient dans un Final Four de la Basketball Champions League (BCL) épique, dont le premier cité est sorti vainqueur de la finale. Ajoutez également Valence et Andorre, deux clubs déchus en demi-finale de l’Eurocup, et vous obtenez six clubs espagnols sur douze dans le dernier carré des trois compétitions européennes majeures. Une prouesse remarquable.

La saison 2021-2022 est un très grand cru pour les représentants espagnols mais cette nation de basket en a pris l’habitude : elle a toujours vu au moins deux clubs se qualifier pour les demi-finales des trois compétitions depuis la création de la BCL lors de la saison 2016-2017. Sur les six derniers exercices, l’Espagne a remporté une Euroleague (via le Real Madrid en 2018, et elle aura un club en finale samedi prochain), deux Eurocup (via Malaga en 2017 et Valence en 2019) et surtout quatre BCL (via Tenerife en 2017 et 2022 et San Pablo Burgos en 2020 et 2021). À titre de comparaison, le championnat de France n’a eu « que » cinq clubs en demi-finale sur la période (en BCL : Monaco en 2017 et 2018, Dijon en 2020 et Strasbourg en 2021 ; en Eurocup : Monaco en 2021), et un seul titre, l’épopée de la Roca Team en Eurocup la saison dernière.

Le succès européen des clubs espagnols ne garantit pas pour autant une réussite dans le championnat local tant il est relevé et homogène. Les exemples sont nombreux. La saison dernière, l’historique Estudiantes Madrid est descendu en deuxième division pour la première fois de son histoire. Double tenant du titre de BCL, San Pablo Burgos est cette saison dernier de Liga Endesa à une journée de la fin (10 victoires, 23 défaites). La course au maintien risque d’être folle car, avant cette dernière journée, quatre équipes sont à 11 victoires, dont Morabanc Andorre, qui a perdu énormément d’énergie dans la longue saison régulière de l’Eurocup, et Saragosse, présent lors des deux éditions précédentes du Final Four de la BCL. Européen chaque saison depuis 1995, le club de Malaga, 12e, n’est lui pas certain de jouer une coupe d’Europe la saison prochaine.

« Il peut y avoir pas mal de surprises en Liga Endesa, même face aux grosses équipes, car elles peuvent jouer en semaine à l’autre bout de l’Europe et arriver le weekend avec moins de force et d’énergie »
– Le capitaine français de Bilbao Jonathan Rousselle

Parti à Bilbao à l’été 2019, l’international français Jonathan Rousselle ne regrette pas son choix d’avoir quitté le championnat de France pour la compétitivité de la ligue espagnole. « Il y a deux championnats en un, celui avec les plus gros budgets qui ont des effectifs pléthoriques comme le Real Madrid, Barcelone, Baskonia, Valence pour jouer l’Euroleague et l’Eurocup, et qui se retrouvent quasiment chaque année en playoffs sauf accident industriel comme Andorre cette année, et celui des autres où c’est plus ouvert, plus homogène. Il peut y avoir pas mal de surprises, même face aux grosses équipes, car elles peuvent jouer en semaine à l’autre bout de l’Europe et arriver le week-end avec moins de force et d’énergie. On le voit encore cette année avec des clubs comme Murcie ou le promu Breogan qui peuvent accrocher les playoffs. Ça rend le championnat hyper intéressant. »

La présence des deux mastodontes – le Real Madrid et le FC Barcelone, à quasi 44 millions d’euros de budget cette année – crée une émulation vers le haut avec un top 10 au très gros pouvoir financier, et le reste du championnat doit suivre. « Il y a plus d’argent, c’est un fait. Les salaires sont meilleurs en Espagne. Ça crée de la compétitivité et des joueurs de meilleure qualité », appuie le capitaine de Bilbao. Pour autant, huit équipes sur les dix-huit présentes cette saison en Liga Endesa ont présenté un budget annuel inférieur à 4 millions d’euros. En parallèle, seulement deux clubs sont sous cette barre en première division française (Fos et Le Portel), un argument qui laisse à penser que l’homogénéité du championnat dans l’Hexagone est d’aussi belle facture. La fracture entre les budgets des équipes espagnoles du haut et du bas de tableau reste notoire.

Budget (presupuestos) et masse salariale (plantilla) des clubs de Liga Endesa lors de la saison 2021-2022, révélés par 2Playbook.

Mais l’écart ne l’est pas autant concernant les masses salariales. Sur le papier, les différences ne sont pas si flagrantes. En réalité, les salaires sont bien plus juteux en Espagne, et cela s’explique par un taux d’imposition plus faible. Ainsi, quand un joueur est payé 100 000 euros net la saison, il est rétribué environ 180 000 euros brut en France (hors Monaco) ou en Allemagne contre 150 000 euros en Italie ou en Israël, 140 000 euros en Lituanie ou 110 000 euros en Serbie. En Espagne, chaque région à ses spécificités fiscales, ce qui rend les comparaisons plus délicates. Mais il apparaît que les joueurs touchant 100 000 net la saison seraient en réalité payés 148 000 euros bruts à Barcelone et moitié moins dans certaines régions comme le pays basque, notamment à Vitoria.

« La grosse différence avec la France, c’est que les clubs paient moins d’impôts et peuvent ainsi s’offrir des très bons joueurs. Les taux d’imposition sont bien plus favorables aux joueurs, note Jonathan Rousselle. On le voit avec Manresa (tout récent finaliste de la BCL), qui a un budget vraiment très moyen (2,7 millions d’euros, 17e budget du championnat) mais qui arrive à signer Ismael Bako qui était à l’ASVEL et même le récent MVP de BCL Chima Moneke qui s’était affirmé en France. De manière générale, le challenge sportif en Espagne est difficilement égalable, que ce soit en France, en Italie ou ailleurs, car il y a énormément de clubs qui jouent en coupe d’Europe (12 cette saison, 3 en Euroleague, 4 en Eurocup et 4 en BCL, auquel il faut ajouter une équipe cette année en FIBA Europe Cup, Saragosse). Par le challenge sportif et l’attrait financier, c’est très intéressant pour les joueurs. Ça peut aussi être un vrai tremplin pour avoir de l’exposition et, derrière, passer sur un marché européen plus relevé, de calibre coupe d’Europe. Je pense que pas mal de joueurs réfléchissent de cette façon-là. »

La ferveur espagnole

Outre la compétition ou l’attrait financier, il faut souligner la vraie ferveur du peuple espagnol pour le sport collectif, et notamment le basket. La présence continue de centaines de personnes, jeunes et moins jeunes, sur les deux terrains installés à la fan zone de Bilbao pendant le Final Four de la BCL ainsi que celle de quelques dizaines d’aficionados du club local dans les rues à toute heure de la journée nous rappellent à quel point la France a encore du retard sur son voisin. Manresa, ville de Catalogne de 75 000 personnes, l’a également montré en réunissant à Bilbao – à plus de 5 heures de route – plus de 3 000 supporters le vendredi en demi-finale et 5 000 supporters le dimanche en finale. Tous vêtus de rouge, un maillot sur le dos ou une écharpe aux couleurs de leur équipe préférée. Évidemment, ils ont mis de l’ambiance avant, pendant et après les matches (vidéo ci-dessous)… et après la défaite en finale, ils ont même chanté en choeur au nom de l’équipe qui les a empêché de fêter le premier titre européen de leur histoire : Tenerife.

La Liga Endesa dispose par ailleurs des meilleures structures en Europe, avec des salles dont la capacité moyenne flirte cette saison avec les 8 500 places. « L’Espagne a une vraie culture basket, probablement à un degré supérieur qu’en France. C’est vraiment le sport qui est juste derrière le foot ici, c’est un sport très important, détaille Jonathan Rousselle. Chaque match passe à la télé. Il y a un très gros contrat TV, avec une case pour chaque équipe, pour le premier comme le dernier au classement. Il y a de vraies grosses salles, des infrastructures très belles… C’est important pour la qualité des championnats et l’économie qui en résulte. » Il faut aussi noter le coût de la vie moins cher en Espagne et le climat le plus ensoleillé d’Europe. « La qualité de vie rentre aussi en compte… Tout ça mis bout à bout, ça fait pas mal de choses qui rendent le championnat hyper attractif. »

Le Final Four de la BCL en terrain neutre, le choix de Bilbao « justifié »

Ce n’est pas un hasard si la FIBA a choisi un terrain neutre, à savoir dont l’équipe de la ville ne figurait pas parmi les concurrents de la compétition, en l’occurrence Bilbao et son Arena de 10 000 places, pour l’organisation du Final Four de la BCL. « Nous avions l’intention de changer notre approche en organisant le Final Four dans un lieu neutre, c’est-à-dire non lié directement aux clubs participants, expliquait le patron de la Ligue des Champions, Patrick Comninos. Bilbao est un choix justifié, avec une vraie communauté locale, un très beau club et une région active. C’était exactement ce que nous espérions en choisissant ce lieu, qui en plus voit deux équipes espagnoles s’affronter en finale. »

« C’est simplement la meilleure ligue d’Europe, c’est normal qu’elle ait des représentants qui aillent loin dans les compétitions européennes », commentait sobrement John Patrick, l’entraîneur de Ludwigsbourg, après sa défaite en demi-finale contre Manresa, pas contredit le lendemain par l’entraîneur de Tenerife Txus Vidorreta et son joueur Kyle Wiltjer.

L’avis du capitaine Jonathan Rousselle sur Bilbao :
« Bilbao est une vraie ville de sport. Le club de foot reste le club phare de la ville mais le basket arrive juste derrière. C’est un club moderne, très bien structuré et organisé. Il dispose d’une superbe salle de 10 000 personnes, ce sont des conditions optimales même pour un club qui ne fait pas partie des plus gros budgets. L’Arena est toujours remplie pour les gros matches, et il y a quand même 7 à 8 000 personnes pour les matches contre des clubs de deuxième partie de tableau. C’est sans aucun doute la meilleure ambiance que j’ai connu depuis le début de ma carrière (NDLR : Jonathan Rousselle est passé par Gravelines, Cholet et Limoges). Il y a une très grosse ferveur, une vraie connaissance du basket. Cette salle te pousse à faire des exploits, elle te donne beaucoup d’énergie, elle met beaucoup de pression sur les adversaires, les arbitres. (…) Je ne dirais pas que c’est une ville qui respire le basket mais les gens sont très attachés au club, ils ont connu des grandes heures de basket (NDLR : finale de Liga ACB en 2011, quarts de finale d’Euroleague en 2012, finale d’Eurocup en 2013) avant leurs problèmes financiers. Mais depuis que je suis arrivé ici en 2019, le club n’a jamais eu aucun souci de paiement, ils sont mêmes souvent en avance. La dette d’il y a 5-10 ans est encore en train d’être épongée mais elle est étalonnée dans le temps, raison pour laquelle le club est tombé en deuxième division et le budget ne monte pas très haut (3,8 millions d’euros). Mais le club est sain, il a vraiment appris de ses erreurs. »

Mais une Liga Endesa en manque de joueurs locaux

Mais le basket espagnol n’est-il pas pour autant en danger ? L’Espagne est championne du monde en titre, ses équipes de jeunes montent régulièrement sur les podiums internationaux, sa ligue reste la référence sur le continent. Mais le joueur espagnol est en danger d’extinction. Cette saison, seulement 13 joueurs hispaniques bénéficient d’un temps de jeu de vingt minutes de moyenne en Liga, contre 39 en France, soit le triple. En Euroleague, si l’Etoile Rouge de Belgrade ou l’ASVEL utilisent plus de 50 % de joueurs locaux, Baskonia n’attribue que quelques bribes de minutes à son seul joueur espagnol, Alejandro Barrera. Le règlement du championnat espagnol obligeant à un minium de quatre joueurs formés localement (JFL) sur la feuille de match, la plupart des clubs atteignent le quota en recrutant très tôt des jeunes joueurs étrangers, qui deviennent alors JFL en trois ans. L’an dernier, on comptait en Liga Endesa deux fois plus d’U21 étrangers qu’espagnols… Le dernier rapport de la FIBA montre aussi que l’ACB est le championnat européen avec le plus de joueurs étrangers (70 %), largement devant l’Allemagne (57 %) et la France (54 %). « Les clubs sont conscients de la situation, mais il n’y a pas de volonté globale de s’asseoir et de la corriger », déplorait le président de l’association des joueurs professionnels Alfonso Reyes dans le numéro de mars de Basket Le Mag.

L’intérêt du championnat souffre également d’une baisse d’audience. La meilleure affiche diffusée le dimanche après-midi sur Vamos ne réunit qu’entre 50 000 et 100 000 personnes (diffuseur payant) quand l’audience moyenne de l’ACB atteignait le million il y a 25 ans (à la télévision publique). Le produit global est surtout de plus en plus concurrencé par l’Euroleague, qui a considérablement réduit l’intérêt du championnat au fil des saisons. Est-ce que cela finira par influencer négativement la Roja ? Le sélectionneur national, l’Italien Sergio Scariolo, convenait il y a quelques mois dans les colonnes d’El Pais que les « ces données sont très inquiétantes », soulignant également que cela pouvait se répercuter directement dans les fenêtres internationales de qualification aux grandes compétitions : « le fait que l’Espagne soit le pays au monde dans lequel la ligue compte le moins de joueurs nationaux rend la route plus difficile ». La Liga Endesa ne reste pas moins un rouleur compresseur qui a rappelé lors des compétitions européennes de cette saison qu’il n’était pas prêt à laisser la place.

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Le Real Madrid et le FC Barcelone s’affronteront cette semaine pour une place en finale de l’Euroleague. Le weekend dernier, Tenerife et Manresa se défiaient dans un Final Four de la Basketball Champions League (BCL) épique, dont le premier cité est sorti vainqueur de la finale. Ajoutez également Valence et Andorre, deux clubs déchus en demi-finale de l’Eurocup, et vous obtenez six clubs espagnols sur douze dans le dernier carré des trois compétitions européennes majeures. Une prouesse remarquable.

La saison 2021-2022 est un très grand cru pour les représentants espagnols mais cette nation de basket en a pris l’habitude : elle a toujours vu au moins deux clubs se qualifier pour les demi-finales des trois compétitions depuis la création de la BCL lors de la saison 2016-2017. Sur les six derniers exercices, l’Espagne a remporté une Euroleague (via le Real Madrid en 2018, et elle aura un club en finale samedi prochain), deux Eurocup (via Malaga en 2017 et Valence en 2019) et surtout quatre BCL (via Tenerife en 2017 et 2022 et San Pablo Burgos en 2020 et 2021). À titre de comparaison, le championnat de France n’a eu « que » cinq clubs en demi-finale sur la période (en BCL : Monaco en 2017 et 2018, Dijon en 2020 et Strasbourg en 2021 ; en Eurocup : Monaco en 2021), et un seul titre, l’épopée de la Roca Team en Eurocup la saison dernière.

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Photo : Nikola Mirotic (Euroleague)

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