L’équipe de France disputera la première phase de l’EuroBasket 2017 en Finlande. Il y a deux ans, elle s’était déjà rendu dans ce pays où le basket est devenue une affaire si sérieuse que l’équipe nationale, les Susijengi, est suivie à l’étranger par des milliers de supporters. Les Bleus s’étaient inclinés à Tampere et avaient pu constater que Petteri Koponen et compagnie d’agneaux se sont métamorphosés en loups et qu’ils méritent ainsi parfaitement leur surnom.
[arm_restrict_content plan= »registered, » type= »show »]
Plus une chambre de disponible en ville. Vingt-quatre mille personnes assistent dans le stade de foot au concert de Nightwish, un groupe de métal symphonique finlandais réputé, et dans la région se tient le célèbre rallye automobile des 1 000 lacs qui rassemblent 100 000 spectateurs. Surtout, à Tampere, se joue sur trois jours le traditionnel Delphin Basket Tournament, réservé aux juniors, garçons et filles, avec 270 équipes et 3 000 joueurs de sept pays. Un record. Cerise sur le gâteau pour les 7 282 privilégiés du Hakametsän Jäähali, deux matches de préparation entre Finlandais et Français en route pour leur EuroBasket respectif, celui des U16 –victoire des Bleus 67-51- et celui des adultes, qui est retransmis en direct sur TV1, la chaîne principale du pays.
L’enceinte a servi à l’EuroBasket de 1967, mais son atmosphère est 100% hockey-sur-glace et 100% américaine avec effluves de popcorn, échoppes, restaurants, bars, dont le Hemingway’s qui donne sur le terrain, loges à l’ancienne, photos encadrées de stars du hockey, et bannières des titres nationaux des deux équipes de la ville, les Tappara et les Ilves, toujours très actives en Hockey League.
D’ailleurs, le hockey-sur-glace est le sport national finlandais, même s’il n’y a que 100 000 licenciés contre 130 000 au football. « Pour les médias, c’est comme le football américain aux Etats-Unis. Le football est le numéro deux. Nous avons ensuite le ski de fond, le saut à ski, le hockey en salle et probablement le basket après ça », témoigne Mika Mäkelä, le directeur de l’équipe nationale finlandaise de basket-ball. Il y a une demi-douzaine d’années, un sondage a démontré que le basket n’était que le 28e sport préféré des Finlandais -il ne recense que 17 000 licenciés contre 660 000 en France, douze fois plus peuplée- mais il est passé récemment en 6e position quant à la popularité. Gloire à son équipe nationale !
Le plan de Henrik Dettmann
A l’inverse de leurs voisins baltes, les Finlandais n’ont jamais appartenu aux VIP européens. Conseiller de presse auprès de l’ambassade à Paris, Marko Ruonala a potassé son dossier et en ancien pratiquant savoure le fait que les basketteurs furent les premiers de tous les sports de balle du pays à se qualifier pour les Jeux Olympiques ; c’était à Tokyo en 1964. « On a gagné au championnat d’Europe en 1977 contre la France et on a été ensuite absents du haut niveau pendant dix-huit ans », ajoute t-il.
L’homme de la reconstruction, la référence du basket finlandais, c’est Henrik Dettmann, aperçu sporadiquement à Dijon (NDLR: puis au début de la saison 2016-17 à Strasbourg) qui était déjà coach de l’équipe nationale il y a vingt-trois ans avant un intermède en Allemagne. « Il est revenu à la tête de l’équipe nationale en 2006 et c’est grâce à lui qu’il y a eu ce succès sportif », tranche Mika Mäkelä. Dettmann a mis en place une véritable stratégie en associant étroitement les juniors aux séniors. Une académie du basket liée à un lycée a été créée et c’est là-bas que professe Hanno Möttölä, véritable icône locale, sur lequel s’est appuyé longtemps sur le terrain le coach –ainsi que sur Teemu Rannikko- et qui était encore présent à 38 ans à la Coupe du Monde 2014 en Espagne. Avant le retour de Dettmann, la Finlande se morfondait en division B et à la 33e place du ranking européen.
Comme chez les Baltes, le shoot longue distance est le poison mortel des Finlandais. D’ailleurs les juniors se rendent annuellement en Lituanie pour un stage de dix jours et les séniors ont comme sparing-partners privilégiés les Lituaniens et… les Français.« Henrik Dettmann a établi un style de jeu commun pour l’ensemble des équipes nationales. C’est devenu plus facile ainsi d’intégrer des joueurs de l’équipe junior. Nous prenons beaucoup de risques en défense car nous sommes plus petits que tous les autres et nous shootons à trois points ! Nous avons pas mal de shooteurs et nous sommes capables de lancer des contre-attaques quand nous contrôlons le rebond », confirme Mika Mäkelä, qui se félicite que quatre joueurs à 2,10m figurent désormais dans le roster des juniors, ce qui est tout à fait exceptionnel car la Finlande ne possède pas le vivier de géants des Lituaniens.
L’équipe nationale bénéficie aussi de l’apport de plusieurs fils d’Américains installés en Finlande. C’est ainsi que Gerald Lee Sr, meilleur marqueur de tous les temps de la ligue nationale, a donné au pays son fils Gerald Lee Jr, un intérieur de 2,08m qui jouait la saison écoulée à Murcie. Shawn Huff, un arrière-ailier de 1,98m, est de la même origine puisque son père Leon Huff s’est marié avec une Finlandaise.
Les deux cas qui concernent de près la France sont ceux de Erik Murphy et Jamar Wilson. Erik Murphy est le fils de Jay qui a porté le maillot de l’ASVEL et du Paris Basket et c’est ainsi qu’il est né il y a presque vingt-cinq ans à Lyon. Sa mère aussi est finlandaise. Suivant l’exemple du paternel, Erik a disputé quelques matches en NBA, 24 aux Bulls en 2013-14 (NDLR: il était lors de la saison 2016-17 à Strasbourg et il a signé à Nanterre pour celle-ci). Jamar Wilson va lui jouer cette saison à Rouen (NDLR: il est depuis au Partizan Belgrade). Il a obtenu le passeport finlandais après s’est marié avec une fille du pays, eut un enfant, et il a passé avec succès le test de langue finnoise, ce qui n’est pas une sinécure. Avant de l’intégrer, il s’entraînait avec l’équipe nationale chaque été depuis cinq ans. « C’était la première fois ce soir que je portais le maillot de la Finlande. C’était une incroyable expérience. J’étais super excité d’entendre l’hymne national. C’était fou, un moment spécial », disait-il sincèrement ému après la victoire sur les Français.
Un phénomène est né
La Finlande a cumulé les exploits, battant en préparation ou en compétition, France (en 2009, en qualification pour le championnat d’Europe), Italie, Israël, et encore Serbie. Du 33e rang européen, elle a grimpé au 8e. Lorsque la meute de loups a vaincu la Serbie, en 2008, c’était devant un peu plus d’un millier de spectateurs et les journaux s’étaient contentés d’articles faméliques. C’est la participation à l’Euro 2011 qui a servi de détonateur. Un millier de supporters a fait le déplacement en Lituanie où la Finlande s’est qualifiée pour le deuxième tour. Le meilleur était à venir deux ans plus tard en Slovénie. Placés dans un groupe mortel, les Finlandais ont décapité la Suède –ce qui était attendu-, la Turquie, la Grèce et la Russie après deux prolongations –ce qui l’était beaucoup moins-, n’achoppant que face à la seule Italie. « Et là, les médias sont devenus fous », sourit Mika Mäkelä. « Ils ont écris que nous étions des tueurs de géants ». Ce n’est qu’au point-average particulier défavorable vis à vis de l’Espagne que la Finlande fut interdite de quarts de finale.
La Fédération Internationale avait jeté un pavé dans la mare en accordant quatre wild cards (invitations) pour la Coupe du Monde 2014, surtout que parmi les bienheureux figuraient la Finlande au détriment de la Russie, de la Chine, de l’Italie ou encore de l’Allemagne. Trois raisons à cela. L’une peu avouable : Rovio est une entreprise finlandaise de développement de jeux vidéo qui a créé Angry Birds lequel a connu un succès universel, et c’est un partenaire de la FIBA. Deuxio, les résultats sportifs en hausse de l’équipe nationale, et tertio sa capacité à rameuter un nombre considérable de fans en déplacement. Et là, personne n’a été déçu. Les Finlandais ont battu un record d’Europe en convoyant près de 10 000 fans à Bilbao, réservant plus de 40 avions, sans compter les voyages individuels. « Il y avait beaucoup de famille, de femmes, de petits enfants. C’était surprenant. Jamais autant de supporters finlandais ne sont allés à l’étranger pour un événement sportif sauf pour la formule 1 où il y a eu 25-30 000 Finlandais en Hongrie mais c’était essentiellement des hommes », confirme Mika Mäkelä.
Les fans finlandais ont beaucoup apprécié la… déroute face à l’équipe américaine (55-114). « Je n’oublierai jamais l’atmosphère lorsque nous avons pénétré sur le parquet pour la première fois. J’en ai encore des frissons en y pensant. Les fans étaient incroyables. Même quand nous étions menés de quarante points, ils nous encourageaient. C’était un honneur de jouer contre l’équipe américaine », résume l’ailier international Tuukka Kotti. « Il y a davantage d’intérêt pour le basket aujourd’hui. Les gens comprennent aussi mieux le jeu. Après l’EuroBasket 2013, des fans me reconnaissaient et me disaient bonjour dans la rue. Cela n’arrivait jamais avant en Finlande. »
Au-delà de ce match de gala face aux Etats-Unis, le peuple finlandais a pu constater que les Susijengi avaient acquis un véritable statut international. La qualification pour le deuxième tour s’est jouée à un rien. Menés à un moment de vingt-deux points par la Nouvell-Zélande, les Finlandais sont revenus à deux unités à quatre seconde du buzzer. Le meneur étoilé Petteri Koponen a tenté un panier au buzzer mais la pression des Tall Blacks était trop intense pour qu’il réussisse dans son entreprise.
Bienvenue à Montpellier !
Les joyeux supporters finlandais vont venir en masse à Montpellier et seront eux-mêmes des attractions de cet EuroBasket. Un regret : ils n’ont obtenu que 3 200 billets pour le match d’ouverture contre la France du fait que la Park&Suite Arena ne peut recevoir qu’une dizaine de milliers de spectateurs et qu’il faut privilégier les fans français. La métropole montpelliéraine tient à les recevoir avec soin. Des indications en finnois seront portées sur des documents et sur les vitrines des magasins arborant le macaron de l’EuroBasket. Une course camarguaise sera organisée sur la commune de Baillargues afin de faire découvrir une tradition locale.
Pour encourager leurs supporters à venir en famille, et alors que la rentrée scolaire au pays se fait à la mi-août, la fédération finlandaise va mettre sur pied, à la Maison des Relations Internationales de Montpellier, du 7 au 10 septembre, une sorte d’école itinérante intitulée Pikkusudet-koulu, soit l’école des petits loups. Vingt à trente enfants y seront conviés gratuitement dans une classe mixte et bénéficieront des cours d’une enseignante finlandaise. Une initiative totalement inédite.
Par contre, Mika Mäkelä n’est pas très optimiste quant à la possibilité de voir ces fans suivre leurs héros à Lille en cas de qualification aux huitièmes de finale. « Suivant l’exemple de ce qui s’est passé en Lituanie et Slovénie, il n’y en aura que quelques centaines. Les gens réservent uniquement une semaine de vacances et après retournent au travail. » Dommage car leurs joueurs ont toutes les chances de rallier le stade Pierre-Mauroy et le top 16 européen.
[armelse]
Article paru dans BasketHebdo en 2015.
Plus une chambre de disponible en ville. Vingt-quatre mille personnes assistent dans le stade de foot au concert de Nightwish, un groupe de métal symphonique finlandais réputé, et dans la région se tient le célèbre rallye automobile des 1 000 lacs qui rassemblent 100 000 spectateurs. Surtout, à Tampere, se joue sur trois jours le traditionnel Delphin Basket Tournament, réservé aux juniors, garçons et filles, avec 270 équipes et 3 000 joueurs de sept pays. Un record. Cerise sur le gâteau pour les 7 282 privilégiés du Hakametsän Jäähali, deux matches de préparation entre Finlandais et Français en route pour leur EuroBasket respectif, celui des U16 –victoire des Bleus 67-51- et celui des adultes, qui est retransmis en direct sur TV1, la chaîne principale du pays.
L’enceinte a servi à l’EuroBasket de 1967, mais son atmosphère est 100% hockey-sur-glace et 100% américaine avec effluves de popcorn, échoppes, restaurants, bars, dont le Hemingway’s qui donne sur le terrain, loges à l’ancienne, photos encadrées de stars du hockey, et bannières des titres nationaux des deux équipes de la ville, les Tappara et les Ilves, toujours très actives en Hockey League.
D’ailleurs, le hockey-sur-glace est le sport national finlandais, même s’il n’y a que 100 000 licenciés contre 130 000 au football. « Pour les médias, c’est comme le football américain aux Etats-Unis. Le football est le numéro deux. Nous avons ensuite le ski de fond, le saut à ski, le hockey en salle et probablement le basket après ça », témoigne Mika Mäkelä, le directeur de l’équipe nationale finlandaise de basket-ball. Il y a une demi-douzaine d’années, un sondage a démontré que le basket n’était que le 28e sport préféré des Finlandais -il ne recense que 17 000 licenciés contre 660 000 en France, douze fois plus peuplée- mais il est passé récemment en 6e position quant à la popularité. Gloire à son équipe nationale !
Le plan de Henrik Dettmann
A l’inverse de leurs voisins baltes, les Finlandais n’ont jamais appartenu aux VIP européens. Conseiller de presse auprès de l’ambassade à Paris, Marko Ruonala a potassé son dossier et en ancien pratiquant savoure le fait que les basketteurs furent les premiers de tous les sports de balle du pays à se qualifier pour les Jeux Olympiques ; c’était à Tokyo en 1964. « On a gagné au championnat d’Europe en 1977 contre la France et on a été ensuite absents du haut niveau pendant dix-huit ans », ajoute t-il.
L’homme de la reconstruction, la référence du basket finlandais, c’est Henrik Dettmann, aperçu sporadiquement à Dijon (NDLR: puis au début de la saison 2016-17 à Strasbourg) qui était déjà coach de l’équipe nationale il y a vingt-trois ans avant un intermède en Allemagne. « Il est revenu à la tête de l’équipe nationale en 2006 et c’est grâce à lui qu’il y a eu ce succès sportif », tranche Mika Mäkelä. Dettmann a mis en place une véritable stratégie en associant étroitement les juniors aux séniors. Une académie du basket liée à un lycée a été créée et c’est là-bas que professe Hanno Möttölä, véritable icône locale, sur lequel s’est appuyé longtemps sur le terrain le coach –ainsi que sur Teemu Rannikko- et qui était encore présent à 38 ans à la Coupe du Monde 2014 en Espagne. Avant le retour de Dettmann, la Finlande se morfondait en division B et à la 33e place du ranking européen.
[/arm_restrict_content]
[arm_restrict_content plan= »unregistered, » type= »show »][arm_setup id= »2″ hide_title= »true »][/arm_restrict_content]