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Rétro: Reportage au coeur du basket landais

Personne n’aime plus le basket que les Landais. Pas un coin de France ne compte autant d’adeptes de la balle orange que la Chalosse. Il y a une douzaine d’années nous avions effectué une plongée au cœur de ce phénomène à la rencontre de ces lieux et de ces sites et alors que Basket Landes… Continue

Personne n’aime plus le basket que les Landais. Pas un coin de France ne compte autant d’adeptes de la balle orange que la Chalosse. Il y a une douzaine d’années nous avions effectué une plongée au cœur de ce phénomène à la rencontre de ces lieux et de ces sites et alors que Basket Landes coaché par Olivier Lafargue n’était qu’un club en devenir.

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Le Village, Samedi, 17 heures.

Vingt secondes, montre en main, pour se rendre en voiture d’une extrémité à l’autre. Ce n’est pas un village, c’est un hameau. 360 habitants, mais l’essentiel vit hors du bourg. Il y a une épicerie, l’école, l’église qui donne directement sur les prés, et la salle de basket. C’est à peu près tout.

Nous sommes en Charlosse, dans le département des Landes. L’Indiana français. Les territoires plus à l’ouest ont été conquis par le rugby, le football s’est imposé dans le nord-est, mais ici, le basket est tout puissant. C’est en 1932 que trois petites communes créent leur club respectif : les Cadets de Chalosse de Gaujacq, la Jeunesse sportive de Laurède et l’Union sportive de Larbey. Parmi les membres du bureau de comité des Landes, on retrouvera très vite des instituteurs aux côtés de prêtres animateurs de patronages. La construction du gymnase pour le basket, entre 1975 et 1980, va renforcer l’implantation locale de ce sport en Chalosse. « Au début, il suffisait d’une surface en terre battue et de cinq joueurs qui partaient à l’aventure. Ils portaient leurs couleurs et avaient une fierté démesurée par rapport à ça », témoigne Christian Lecompte, qui fut, président du comité des Landes. « Aujourd’hui, les gamins sont un peu huppés par la Nintendo mais, malgré tout, il n’y a pas beaucoup d’offres dans la ruralité et ils restent ancrés dans le basket ».

A la fin des années quatre-vingt, Monségur fait sensation. Le club est alors en Excellence Régionale. Les trois quarts des joueurs sont du village et les autres, des cantons avoisinants. Le président de l’époque décroche son téléphone et appelle l’ancien entraîneur de l’équipe de France. De l’audace, toujours de l’audace. Jean Luent, qui a longtemps coaché Orthez, vient de quitter Lourdes. Contre toute attente, il accepte le challenge des Chalossais. Quelques mois plus tard, l’homme, profondément blessé, désabusé par le fiasco des Jeux Olympiques de Los Angeles, aura ce commentaire cruel : « A Monségur, ils sont plus disciplinés que certains internationaux ».

Ferme d’Olivier Léglise, Samedi, 17 h 30.

Olivier Léglise, casquette vissée sur un crâne dégarni, épaules toujours larges et puissantes, se prête avec le sourire à une séance de photos pour immortaliser le panneau de basket familial.

Léglise ? Un scoreur énorme. Une légende. Un monument historique. Probablement le plus célèbre des basketteurs français des temps modernes n’ayant jamais appartenu à l’univers professionnel. Un chic type aussi, modeste, toujours dispo. « J’ai eu la chance d’entraîner Olivier Léglise », dira ainsi, respectueux, son ancien coach Pierre Brouchert.

Comme Linda de Souza, ses cartons ont fait sa gloire. Lors de la saison 1992-93, il passe 57 points à Tarbes, 49 à Bruguières, 48 à Gaujacq, 43 le samedi soir en Coupe de France à Grandfonds et 50, le lendemain après-midi à Montgaillard. « Ici, dans les Landes, les jeunes basketteurs n’ont pas besoin de fantasmer sur Michael Jordan… ils ont Olivier Léglise », écrira un quotidien local. Olivier a les honneurs de Canal +, de l’Equipe Magazine et même du fameux journal de Claire Chazal. « A lui tout seul, il faisait venir du monde, à lui tout seul, il a fait basculer des matches. Il a fait connaitre le club et automatiquement le village », explique l’actuel président Bruno Cazenave. Le 2 juillet 2005, « Placiat » a fait son jubilé. Pour le remercier de sa totale fidélité, ses potes lui ont offert un voyage en Australie. Olivier avait un talent comparable à celui des frères Gadou. Il a toujours préféré son clocher à la cathédrale de l’Elan Béarnais. A 17 ans, ses parents venaient de lui acheter sa ferme et il n’eut pas le cœur de les lâcher. Bien plus tard, sans doute pris de remords, il effectuera un test à Pau. C’était trop tard.

En fait, Monségur s’est associé à un autre village, Mant, 340 habitants, pour se sentir plus fort. Le club recense cent licenciés, trois équipes seniors de garçons et deux de filles dont la première est en N3. Tout le monde ici joue au basket, ou a un frère, une petite fille à l’ASMM. Oliver a convolé en justes noces avec Mireille, une basketteuse. Marylis, la sœur d’Olivier, est mariée avec le frère du maire, Thierry qui, bien sûr, a joué à l’ASMM. Marie-Hélène, la femme de Freddy Fauthoux, lui-même originaire de Horsarrieu, est titulaire à Monségur, son village. En Chalosse, on rentre dans le basket comme dans les ordres. Pour la vie.

Gymnase Municipal, Samedi, 19 h 20.

Les mamies se font la bise, les papys se donnent une poignée de main virile, discutent, et prennent possession de leurs places. C’est complet. Comme souvent. Et là, c’est un match décisif pour le maintien contre Valence-Condom. C’est chaud, mais pas brûlant. « Globalement, le terrain est sain. Ils défendent un basket de tradition. Quand il y a une parole déplacée, c’est le fait d’un imbécile, » résume Christian Lecompte. Visiblement, il y a quelques décennies, c’était beaucoup plus piégeux dans le coin.

Le revêtement vert est en caoutchouc. Idem dans les autres gymnases de Chalosse. A Horsarrieu, comme c’est une arène, c’est un véritable puzzle. Pourquoi pas de parquet ? Le coût certes. « Mais surtout la salle est polyvalente et la première semaine de mai, on part pour une série de quinze lotos qui font entrer de l’argent dans les caisses du club. Donc le parquet serait trop fragile » explique « Caz ».

A la présentation des équipes, les locaux se déplacent pour claquer dans les mains de leurs adversaires. Une tradition, là aussi. Mais après, on se jette sur tous les ballons sans crier gare. Bien que dominés par la puissance de Xavier Pasut, les Monségurois prennent le large, 55-40 à mi-temps. Valence-Condom a subi un bombardement en règle. Mais, alors qu’ils mènent de près de vingt points, les locaux commentent à jouer petits bras. La fameuse peur de perdre. Ils consument toute leur avance. Un dernier tir à trois points au buzzer de Frédéric Zadro pour l’égalisation. La balle roule sur le cercle et… ressort. Jeu, set, et maintien en NP pour Monségur ! c’est le frère de sang Horsarrieu qui trinque et qui descend.

Gymnase Municipal, Samedi, 22 Heures.

Benoit Cordonnier, qui venait de Lourdes pour chaque entraînement, et dont c’était l’ultime match avec l’ASMM, est porté en triomphe. Les joueurs réunis au milieu du terrain, bientôt rejoints par les filles du club chantent L’immortelle, hymne béarnais cher à Lolo Loupoueyou. Le champagne est sabré dans le vestiaire. Mais quelques minutes plus tard, ces mêmes joueurs disposent les tables sur le terrain avec les bénévoles pour une paella géante de 300 personnes. Tout le village, quoi.

Une fois, les Nantais de Carquefou avaient réservé des piaules sur Mont-de-Marsan pour la nuit d’après-match. Ils sont, en définitive, restés avec ceux de Monségur jusqu’au petit matin.

Hôtel Calicéo, Dimanche, 10 heures.

Au son des bandas et dans des effluves de frites-merguez, ont lieu chaque année, aux arènes de Pomarez, ce que l’on nomme ici, avec un mélange de fierté et d’autodérision, les finales de la Coupe du monde des Landes. Une Coupe départementale revigorée, il y a quelques années avec Jacques Dorgambide, ancienne comité locale, récemment décédé, qui avait instauré des handicaps – 5 points par catégorie – pour favoriser les plus faibles. Freddy Fauthoux a beau être multi-champion de France, on le chambre dans sa région, car il n’a jamais gagné la Coupe des Landes*. Chaque année, plus de 3 000 fidèles – le Palais des Sports de Pau ne suffirait pas à satisfaire toutes les demandes – se dirigent ainsi vers la Mecque du basket landais pour vivre un délire collectif, qui se termine jusqu’à plus soif, tard dans la nuit. Encore ému, Bruno Cazenave se souvient de l’année 1998, la dernière avec Jean Luent, à la tête de l’équipe, où Monségur avait gagné la Coupe en garçons et en filles. « Trois jours de bringue. On a fait le tour des fermes sur un tracteur avec les coupes. »

Les « Basket Folies » n’obéissent pas à la même philosophie. C’est 100% fun. Pierre Dartiguelongue en est l’architecte. Il y a dix ans, il a téléphoné à Charles Bietry pour lui faire part de ce projet, et le chef des Sports de Canal + l’a dirigé sur George Eddy qui, depuis, est le fil rouge de ces « Basket Folies ». Avec Eric Besnard et l’ensemble des Canal Bulls, ils ont développé le concept qui consiste à faire venir des VIP dans un petit village proche de Dax, Heugas. Le journaliste Hervé Mathoux a fait partie des invités et Pierre Dartiguelongue note malicieusement, que c’est ici qu’il a rencontré sa future femme.

L’autre go-between des « Basket Folies », c’est l’ancienne internationale Françoise Amiaud, qui s’est constitué un beau carnet d’adresses depuis qu’elle est vice-présidente de la fédération. Car, comme le dit Pierre Dartiguelongue, « on n’a aucun moyen, 20 000 euros de budget. Je ne vais pas mettre un cachet sur un mec alors que je vais demander à nos bénévoles – une centaine – de venir les trois derniers jours à 6 heures du mat’. Alors, c’est très dur d’avoir des VIP. Il ne faut pas qu’il y ait des droits à l’image. Il ne fait passer par les attachés de presse, les agents. Ça se fait uniquement sur le fil de l’amitié, le fait d’être accueilli dans un centre de thalasso, les plaisirs de la région. Pour en avoir 2, j’en contacte 40 ! »

* Il l’a remportera en 2010 avec Horsarrieu

Gymnase Municipal, Dimanche, 15 heures.

Gymnase classique : revêtement en ciment vert, murs en briques, fronton de pelote basque et mini-tribunes, déjà pleines de 1 300 personnes. Gros plus, une sono à faire pâlir d’envie une majorité de salles de Pro A.

Les stars s’échauffent. Françoise Amiaud avec un t-shirt noir « Alcoolo Anonyme ». La plupart avec les superbes maillots étoilés du match, jaunes et violets, de la marque lituanienne Orange Virus, nouvellement distribué en France. Pierre Dartiguelongue a sollicité en vain Antoine Rigaudeau qui n’était pas libre. Il déplore le forfait de Jean-Pascal, star américain et, animateur de l’émission « Incroyable mais vrai » sur TF1. L’équipe de VIP est essentiellement nourrie de basketteurs, avec l’ancienne « fille en or » Yannick Souvré, beaucoup pus précautionneuse sur un terrain qu’il y a une demi-douzaine d’années, et qui est la marraine de ces « Basket Folies ». Freddy Fauthoux en est naturellement le parrain. On retrouve les anciens internationaux Philip Szanyiel, Jean-Luc Deganis et Ben Kaba. L’inusable George Eddy. Les entraîneurs de l’US Dax Rugby, Marc Lièvremont, et Jean Philippe Crayola, les rugbymen Patrice Labeyrie et le colossal Olivier Merle, sorte de Shaquille O’Neal en plus ramassé, auteur comme le pivot des Heat de magnifiques briques à trois mètres. Freddy Hufnagel, qui tient désormais un bar tout près du Palais des Sports de Pau, est assis sagement dans les tribunes.

En face, Olivier Léglise, la quarantaine venue, fait enfin équipe avec Didier Gadou revenu à la lumière après son éviction douloureuse du coaching de l’Elan Béarnais. Le reste de l’équipe est constitué de journalistes et consultants de la chaîne Alegria qui, depuis quelques mois, diffuse ses programmes sur le territoire national, notamment sur le canal 146 de CanalSat. Alegria revendique les valeurs culturelles qui unissent le Sud, de Biarritz à Nîmes. Elle offre notamment des reportages sur les coulisses du Top14 et de la Pro D2 de rugby. Et, grande première, elle enregistre des images pour diffuser un magazine sur les « Basket Folies » avant de se rendre deux jours plus tard, à Saint-Sever pour diffuser, en direct, le match de Coupe de France féminine, Basket Landes-Bourges.

J’avoue: je n’ai pas noté le score final.

Gymnase Municipal, Dimanche, 17 h 30.

Deux personnalités si appréciées dans les Landes sont absentes avec un mot d’excuse. Claude Bergeaud et Patrick Beesley sont en voyage d’affaires aux USA pour superviser les internationaux français de la NBA. Beesley fut, avec le journaliste Jean-Pierre Angely et Jacques Dorgambide, à la création de Landes Basket Magazine. Il en est toujours le rédacteur en chef. La publication se targue de 3 500 abonnés et de 500 à 800 ventes en kiosques par numéro, principalement en Chalosse. C’est dans les Landes et nulle part ailleurs.

Il y a trois ans, les « Basket Folies » furent dynamisées par un Old Star Game qui avait réuni tous les anciens joueurs de plus de 40 ans ayant opéré au niveau de la N3. C’est après ce succès que germa l’idée d’un All-Star Game landais. Le principe est élémentaire : il concerne les joueurs de Nationale et Prénationale, sélectionnés par les Internautes – il y a eu 800 votants -, qui sont répartis en deux équipes, le Nord et le Sud. On s’y amuse avec sérieux, réalisant passes dans le dos, dunks, et shoots à longue portée, tous en cherchant la victoire.

C’est le seul moment où les meilleurs joueurs des clubs de village de Chalosse sont unifiés. Pourquoi ne pas en faire de même toute l’année ? Pourquoi les quatre bourgades du canton d’Hagetmau ne passeraient-elles pas un pacte pour viser la N1 ? Récemment interrogé dans le quotidien Sud-Ouest, seul Patrick Porterie, président de Serres-Gaston, s’est révélé favorable à ce type de projet. « C’est de plus en plus difficile pour les clubs, surtout financièrement. Nous perdons plus de sponsors que nous n’en trouvons. Maintenant, est-ce réalisable ? Je ne sais pas. »

Visiblement, non, si l’on écoute l’analyse de Bruno Cazenave. « Qu’est-ce qui fait le charme de notre région ? C’est cette mixité de clubs avec les avantages et les inconvénients. Si je prends mon cas, je suis président du club à travers mon village, pas à travers une championnite aigu. En N2, on est vu par les médias, c’est bien, mais on ne va pas crever si on descend en N3. On conservera une identité par rapport au village. Le basket vit grâce au village et le village grâce au basket. »

Le nord a battu le Sud 109 à 106.

Lycée Saint-John Perse, Lundi, 18 Heures.

Jean-Pierre Brouchert a entraîné Manu Schmitt dans il était prof sur Mulhouse. Il a surtout un CV régional épais comme les bras d’Olivier Merle. Il a coaché Hagetmau-Doazit, juste après le départ de Roger Duquesnoy, un vrai 7 pieds qui avait longtemps ravi La Moutète, tout en étant la tête de Turc des autres publics de l’Hexagone. Puis il a œuvré deux ans à Londres. Une demi-douzaine d’années avec les filles de Eyres-Moncube. Et autant à Monségur.

Ce n’est pas tout, Jean-Pierre Brouchert a fait de son établissement scolaire, le lycée Saint-John Perse à Pau, le centre névralgique de la formation de l’Elan Barnais avec lequel il a signé une convention. Y figurent parmi les anciens élèves Thomas Larrouquis, Gauthier Darrigand, Fred Moncade et encore le rugbyman Jérôme Thion quand il était encore basketteur en herbe. Les résultats sportifs sont tombés drus. Six titres de champion de France scolaire depuis la première finale en 1997. Dans les deux catégories UNSS, la traditionnelle, et l’Excellence, réservée aux jeunes qui sont membres des centres de formation et des pôles espoirs. En cadets et en juniors.

A la veille de ses cinquante ans, Jean-Pierre Brouchert, avec la complicité de Bernard Uthurry a réussi le tour de force d’organiser le Mondial scolaires de basket (joueurs et joueuses nés en 90 et 91) en Béarn et en Soule, avec comme centre d’accueil son propre lycée où est dressé un chapiteau de 800 m2. C’est un budget de 400 000 euros. Et une grosse organisation. 140 enseignants sont mis à contribution dont Nathalie, la femme de Claude Bergeaud. Des profs d’EPS, de langues, de maths, qui s’occupent des stats. Ils chapeautent 400 élèves qui ont chacun des missions différentes, d’interprètes, de préposés à la table de marque, de restauration, d’animation. Un lycée de Mourenx, spécialisé dans la formation de stadiers, a envoyé des élèves qui s’occupent de la sécurité. 150 bénévoles des clubs de la région sont également mis à contribution. On sert 13 000 repas, un a fabriqué 2 000 affiches et autant de tee-shirts.

Il faut préciser que le Mondial regroupe 48 équipes, 576 joueurs et joueuses, 80 arbitres dont la moitié ont moins de 21 ans. L’Europe est très largement majoritaire, mais il y a des établissements scolaires de Chine, de Taiwan, d’Israël. « Il n’y a pas d’Américains. Ils ne sont pas affiliés pour le basket. On m’a dit, c’est comme si les Blacks ne faisaient pas le Mondial du rugby. Mais on veut éviter des élèves qui auraient fait l’impasse sur un cursus scolaire, et qui seraient en fait dans une filière professionnelle, donc exclusivement basket. Les Américains ne rentrent pas complètement dans ce système. Et puis, ça ne les intéresse peut-être pas… », glisse Bernard Uthurry.

Les élèves sont là aussi pour s’ouvrir l’esprit et goûter aux spécialités locales. Pas seulement culinaires. Ils ont assisté à une partie de cesta punta lors de la cérémonie d’ouverture. Les Chinois du 11e collège de Chanchun ont joué un match dans les arènes d’Arzacq, village renommé pour sa Maison du jambon de Bayonne et sa Fête des mâts. Deux jours plus tard, tout le monde était convié, au même endroit, à une course de vaches landaises. Imaginez le dépaysement.

Le hasard fait parfois bien les choses. La France est représentée, du côté des garçons par les cadets de la section basket du lycée Charles Despiau de Mont-de-Marsan, sacrés champion de France, en février, après avoir fait chuter le Lycée Sud du Mans. Une belle revanche. Il y a deux ans, les Landais avaient été vaincus par les Manceaux emmenés par un certain Nicolas Batum. En fait, dix des douze champions de France évoluent sous les couleurs de Stade-Montois en Cadets France ou Région. Leur coach, Bruno Baptifoy, exerce également aux Canaries Serres-Gaston en N2. Comme on se retrouve. « Les plus grands dont à 1,98 m et 1,95 m. On a toujours été en déficit de taille au niveau français. On compense par le collectif, le liant. Ça nous permet de passer des montagnes. » Le coach fait le même constat avec ses cadets qu’avec les ainés : « On n’a jamais eu de grands joueurs en taille, à part les deux Gadou. En sélections régionales, il faut aller chercher des Bordelais, des Pyrénéens. Les Landais sont réputés petits, rapides et adroits. Et hargneux, car on ne tâche rien chez nous. » D’ailleurs, Bruno Baptifoy estime que ces jeunes peuvent avoir comme aboutissement d’opérer en N3 et en NP. Il y a tout de même un petit joyau dans le groupe. Du haut de son 1,95 m, Romain Hilotte passe avec facilité du poste 1 à 4. Il est annoncé à Pau Orthez.

Les Montois se sont courageusement hissés jusqu’en finale où ils sont tombés sur un os grec, 62-86. En assurant la gratuité, les organisateurs espéraient quatre milliers de spectateurs pour cette finale au Palais des Sports. Il y en a eu 5 500.

Salle Omnisports La Loubère, Mardi, 18 h 30.

Trois centaines de personnes dont déjà la queue au soleil. Basket Landes qui déroule le tapis rouge pour Bourges, en quarts de finale de la Coupe de France, c’est comme si Quimper offrait l’hospitalité à Vitonie. Les Berruyères sortent tout juste du Final Four de l’Euroleague à Moscou. Il y a mille places à l’intérieur. L’affaire a été entendue en une demi-heure : abonnés + partenaires + licenciés + collectivités, c’est plein. Comme à chaque fois. De toute façon, les 3 250 sièges de l’Espace Mitterand à Mont-de-Marsan, à vingt minutes d’ici, n’auraient pas suffi. Seul le Palais des Sports de Pau, encore lui, eut été un écrin suffisant. Mais les gens de Saint-Sever – ils sont 4 500 – auraient pu prendre cet exil comme une trahison. Surtout que la municipalité a déjà acheté un terrain pour construire bientôt une nouvelle bâtisse plus grande (3 500/4 000 places, tout de même), plus moderne, bref mieux adaptée à des basketteuses qui grimpent. « C’est un public qui n’est pas habitué au basket de La Chalosse, qui est venu par curiosité et que l’on a réussi à fidéliser », commente le président Christian Lecompte.

En fait, ils sont un peu plus de mille. Il y a des adultes dans les marches et une ribambelle de gosses, assis sagement en tailleur, à mes pieds et donc à vingt centimètres de la ligne de touche. A ma droite, France Bleu Gascogne diffuse le match non-stop, et le journaliste va contester parfois les décisions des arbitres en criant « non ! non ! » au micro. Et puis, il y a la chaine Alégria comme prévu.

Salle Omnisports La Loubère, Mardi, 20 Heures.

Ce projet de Basket Landes, de réunir en une même équipe féminine les plus beaux talents du département, remonte à l’an 2000. En résumé, le but était de garder à la maison des Aurélie Bonnan, Julie Bertin, pures Landaises parties exercer leur métier ailleurs. « Sportivement, techniquement, financièrement, on pouvait soutenir un projet de basket féminin. On s’est mis autour de la table. Dominique Lafargue s’est attelée à la tâche. On s’est dit que la première chose que l’on devait faire, c’est un centre de formation. On a amélioré les structures, pour avoir une unité au niveau de l’administratif, de la restauration, de l’hébergement, etc. Mont-de-Marsan est Dax se bouffaient le museau pour aller au plus haut niveau. On s’est dit que l’on allait prendre le créneau. Les politiques ont été convaincus », raconte Christian Lecompte.

Les racines sont, en fait, à Eyres-Moncube, petit village de 358 habitants situé à cinq kilomètres de Saint-Sever. Le club local avait accédé un temps à la Nationale 1, mais refusait cette fois une nouvelle accession à la N2. C’était, il y a quatre ans. « Ils ont accepté de nous céder leurs droits sportifs pour y greffer le projet Basket Landes. Une partie des gens de Eyres-Moncube est venue nous donner un coup de main. »

Trois ans plus tard, Basket Landes, avec deux joueuses de l’équipe originelle, parvenait en N1 pour y jouer directement les premiers rôles. Étonnant. De quoi susciter des jalousies dans le coin. Le président, qui manie l’ironie, ne s’en cache pas : « Le championnat du monde des Landes !? C’est là où l’on devient le meilleur des moins bons. Et nous, comme on cherche à devenir le meilleur des meilleurs, les gens ne comprennent pas. Il y en a qui auraient trouvé le projet formidable s’il s’était fait chez eux, et qui sont les premiers à venir à la sortie du centre de formation pour voir s’ils ne peuvent pas piquer des joueuses, alors que celles qui ne peuvent pas intégrer l’équipe première sont dévolues à jouer en N2. Sans ce projet, nous aurions été condamnés à être champions du monde de la Nationale 3 puisque, dans les Landes, on aurait pu faire une poule complète. De temps en temps, l’un serait monté pour redescendre aussitôt. Alors que maintenant, le Stade Montois est à même de monter. La pyramide commence à prendre tournure. C’est le but, ainsi que de mettre un phare qui brille. »

Autour précédent, les Landaises ont réussi un truc incroyable, sortir Montpellier, 2e budget de Ligue. Mais cette fois, c’est Bourges. La 2e défense d’Euroleague. Son label tango de professionnalisme. Sans Emmeline Ndongue, blessée. Sans bientôt Sonja Kireta, out à son tour à cause d’une cheville meurtrie. Mais des internationales si appliquées, si adroites, pas venues là pour faire du sentiment, 8-0, 23-3. Ça sent la mauvaise piquette.

Salle Omnisports La Loubère, Mardi, 21 h 45.

Rassurez-vous, les Landaises ont du tempérament. A l’image de la courageuse meneuse Babeth Montero. Elles savent courir, et, et… sont adroites bien sûr. Et… manquent de taille, vous l’aurez compris. « Même Delphine Delcoutre et son 1,93 m recule pour marquer. Jouer avec des grandes, c’est contre notre culture. » Basket Landes possède également en Bineta Diouf une joueuse d’impact. C’est une Sénégalaise munie d’une carte de séjour de dix ans et qui est, paraît-il, sur les tablettes des scouts. « Toutes les joueuses disent qu’elles ont trouvé une deuxième famille. Elles veulent toutes rester. Elles parlent beaucoup entre elles et ce sont maintenant d’autres joueuses qui veulent venir. Et si elles se sentent bien, elles jouent bien. Diouf, ça fait trois ans qu’elle est chez nous. Tous les ans, les gens disent qu’elle va partir. Sans doute qu’elle va partir encore cette année ! ».

Les Landaises ont fait front 80-54, ce n’est pas un Waterloo morne plaine. Et ce sont elles qui ont fait un tour d’honneur.

Il restait encore deux journées de championnat. Basket Landes pouvait encore mathématiquement accéder à la Ligue. Et puis, sait-on jamais, quelques désistements et une opportunité sur le tapis vert pouvaient se présenter. « J’étais vendredi à la fédé. Au cas où… On n’est pas chaud pour monter ! Monter, ça veut dire un million d’euros. J’ai rencontré les gens de Dunkerque et Reims et eux-mêmes se disent « qu’est-ce qu’on va faire ? » On s’est donné trois ans pour rejoindre la Ligue. Il faut gagner en puissance. On est dans le milieu associatif. On s’appelle la veille pour se demander si on a les maillots pour le lendemain. Il faut un ou deux professionnels, un responsable administratif, qui connaisse la compta, le social, un peu l’informatique, les règlements, la structure fédérale. Cette année, les bénévoles ont fait le joint, mais ça ne durera pas dix ans. L’idéal, ça serait de monter avec la nouvelle salle. C’est une pompe indispensable, qui permet de fédérer plus de public, d’attirer les partenaires. Elle devrait être en route pour 2009. »

Il est 23 heures. La buvette extérieure du gymnase est encore vivante. Le car-couchettes des Tangos, et quelques supporters traditionnels ont repris la route de Bourges. On va rejoindre notre hôtel sur Mont-de-Marsan et diner dans les chambres. Un voyage dans les Landes, c’est passionnant, mais épuisant.

Paru dans Maxi-Basket en 2006.

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Le Village, Samedi, 17 heures.

Vingt secondes, montre en main, pour se rendre en voiture d’une extrémité à l’autre. Ce n’est pas un village, c’est un hameau. 360 habitants, mais l’essentiel vit hors du bourg. Il y a une épicerie, l’école, l’église qui donne directement sur les prés, et la salle de basket. C’est à peu près tout.

Nous sommes en Charlosse, dans le département des Landes. L’Indiana français. Les territoires plus à l’ouest ont été conquis par le rugby, le football s’est imposé dans le nord-est, mais ici, le basket est tout puissant. C’est en 1932 que trois petites communes créent leur club respectif : les Cadets de Chalosse de Gaujacq, la Jeunesse sportive de Laurède et l’Union sportive de Larbey. Parmi les membres du bureau de comité des Landes, on retrouvera très vite des instituteurs aux côtés de prêtres animateurs de patronages. La construction du gymnase pour le basket, entre 1975 et 1980, va renforcer l’implantation locale de ce sport en Chalosse. « Au début, il suffisait d’une surface en terre battue et de cinq joueurs qui partaient à l’aventure. Ils portaient leurs couleurs et avaient une fierté démesurée par rapport à ça », témoigne Christian Lecompte, qui fut, président du comité des Landes. « Aujourd’hui, les gamins sont un peu huppés par la Nintendo mais, malgré tout, il n’y a pas beaucoup d’offres dans la ruralité et ils restent ancrés dans le basket ».

A la fin des années quatre-vingt, Monségur fait sensation. Le club est alors en Excellence Régionale. Les trois quarts des joueurs sont du village et les autres, des cantons avoisinants. Le président de l’époque décroche son téléphone et appelle l’ancien entraîneur de l’équipe de France. De l’audace, toujours de l’audace. Jean Luent, qui a longtemps coaché Orthez, vient de quitter Lourdes. Contre toute attente, il accepte le challenge des Chalossais. Quelques mois plus tard, l’homme, profondément blessé, désabusé par le fiasco des Jeux Olympiques de Los Angeles, aura ce commentaire cruel : « A Monségur, ils sont disciplinés que certains internationaux ».

Ferme d’Olivier Léglise, Samedi, 17 h 30.

Olivier Léglise, casquette vissée sur un crâne dégarni, épaules toujours larges et puissantes, se prête avec le sourire à une séance de photos pour immortaliser le panneau de basket familial.

Léglise ? Un scoreur énorme. Une légende. Un monument historique. Probablement le plus célèbre des basketteurs français des temps modernes n’ayant jamais appartenu à l’univers professionnel. Un chic type aussi, modeste, toujours dispo. « J’ai eu la chance d’entraîner Olivier Léglise », dira ainsi, respectueux, son ancien coach Pierre Brouchert.

Comme Linda de Souza, ses cartons ont fait sa gloire. Lors de la saison 1992-93, il passe 57 points à Tarbes, 49 à Bruguières, 48 à Gaujacq, 43 le samedi soir en Coupe de France à Grandfonds et 50, le lendemain après-midi à Montgaillard. « Ici, dans les Landes, les jeunes basketteurs n’ont pas besoin de fantasmer sur Michael Jordan… ils ont Olivier Léglise », écrira un quotidien local. Olivier a les honneurs de Canal +, de l’Equipe Magazine et même du fameux journal de Claire Chazal. « A lui tout seul, il faisait venir du monde, à lui tout seul, il a fait basculer des matches. Il a fait connaitre le club et automatiquement le village », explique l’actuel président Bruno Cazenave. Le 2 juillet 2005, « Placiat » a fait son jubilé. Pour le remercier de sa totale fidélité, ses potes lui ont offert un voyage en Australie. Olivier avait un talent comparable à celui des frères Gadou. Il a toujours préféré son clocher à la cathédrale de l’Elan Béarnais. A 17 ans, ses parents venaient de lui acheter sa ferme et il n’eut pas le cœur de les lâcher. Bien plus tard, sans doute pris de remords, il effectuera un test à Pau. C’était trop tard.

En fait, Monségur s’est associé à un autre village, Mant, 340 habitants, pour se sentir plus fort. Le club recense cent licenciés, trois équipes seniors de garçons et deux de filles dont la première est en N3. Tout le monde ici joue au basket, ou a un frère, une petite fille à l’ASMM. Oliver a convolé en justes noces avec Mireille, une basketteuse.

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