Après 15 années passées entre Pro B et Pro A, Édouard Choquet a tiré sa révérence et remisé son maillot de basketteur. Mais il ne se retrouve pas démuni devant le « grand vide » de l’après-basket, auquel il a réfléchi depuis de nombreuses années, entamant un intéressant projet, Team Quan, il y a plus de deux ans maintenant.
Jusqu’à Noël, Basket Europe décerne ses trophées de la saison, avec des interviews et portraits de plusieurs personnalités de l’année 2022. Voici le trophée de la « reconversion » qui revient à Edouard Choquet. Pour découvrir l’intégralité de nos trophées, mais aussi de nombreuses nouveautés en 2023, abonnez-vous.
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Pour la première fois depuis pas mal d’années, Édouard Choquet savoure d’avoir pu prendre des vacances en août. En effet, le champion de France 2015-16 avec l’ASVEL a raccroché ses baskets, via un beau message d’adieu au basket professionnel, après 15 ans d’une carrière bien remplie, qui l’a emmené jusqu’au All-Star Game et l’a fait alterner entre Pro B et première division, avec Le Portel (4 saisons), Fos-sur-Mer (9 années en deux épisodes), l’ASVEL et Châlons-Reims.
Remercié d’une manière cavalière par Fos Provence à la fin de la saison dernière, le natif de Limoges n’est pas resté les deux pieds dans le même sabot, embrayant directement dans la vie active. Ce qui n’a rien d’un hasard : tout au long de sa carrière, l’ancien meneur de jeu a suivi des études avec comme objectif de monter sa propre entreprise. Pari tenu, il a créé Team Quan en 2020, un bon moyen de garantir son après-basket.
Retracez-nous votre carrière, commencée à Limoges ?
Je suis né à Limoges, dans une famille très impliquée dans le basket. J’ai commencé là-bas à 6-7 ans en poussins. J’y ai continué jusqu’en cadets, époque à laquelle je suis parti à Bordeaux, en cadets deuxième année. À l’époque (NDLR : 2004-05), le CSP avait des soucis financiers et vraiment pas de stratégie de formation, comme ils voulaient remonter le plus vite possible de NM1, où ils avaient un effectif très important. Il fallait donc que je parte pour voler de mes propres ailes et débuter ma carrière. Une porte s’est ouverte à Bordeaux, j’y ai donc été, pour jouer en première division du championnat de France cadets. Pour moi, ça a été l’occasion de progresser et cela m’a ouvert les portes de la NM1 à 18-19 ans. C’est comme cela que j’ai lancé ma carrière professionnelle, en partant ensuite pour Le Portel, puis Fos-sur-Mer.
Comment avez-vous vécu cette évolution, vous qui avez passé de nombreuses années (11 saisons) en Pro B et quatre autres en première division ?
Globalement, ma carrière a connu une évolution très progressive. En Pro B, je faisais mieux chaque année, je progressais, j’entretenais l’espoir de jouer en Pro A vers 24-25 ans. À Fos, j’ai connu une bonne première saison, mais je me suis rompu les ligaments croisés la deuxième. Ça a été un frein dans ma carrière : je pense qu’à la fin de cette saison là, j’aurais pu accéder à l’étage supérieur, mais cette blessure a un peu tout gâché. Fos m’a proposé un nouveau contrat, toujours en Pro B et j’ai dû refaire mes preuves. En définitive, j’ai accédé à la Pro A en 2015, à 27-28 ans. C’était une belle réussite puisque j’arrivais en Pro A dans un des clubs les plus prestigieux clubs français, l’ASVEL. Ensuite, j’ai fait une autre saison au même niveau avec Châlons-Reims puis je suis retourné à Fos-sur-Mer, où nous avons fait l’ascenseur entre Pro B et Pro A (deux montées en première division, une relégation en cinq saisons).
« À la fin, je peux me dire que j’ai eu la chance d’être champion de France, d’être All-Star, de monter deux fois avec Fos »
Lorsque vous avez débuté, pensiez-vous arriver à ce niveau ?
J’ai toujours eu l’envie et l’ambition de le faire, j’ai travaillé fort pour cela puis la logique a voulu que je progresse. J’ai également été très bien conseillé par mon agent, mon évolution a été très régulière sauf au moment de ma blessure aux croisés qui a été un coup d’arrêt dans ma carrière. Pour le reste, il y a une certaine forme de logique dans ma carrière. Et à la fin, je peux me dire que j’ai eu la chance d’être champion de France, d’être All-Star, de monter deux fois avec Fos. Tous les athlètes ne présentent un tel palmarès à la fin de leur carrière.
Vous avez arrêté à la fin de la saison 2021-22. Mais vous ne l’aviez pas prévu de cette façon ?
J’étais préparé à « l’après », j’ai suivi des études pendant toute ma carrière. Je savais que ça allait arriver un jour ou l’autre. Je n’étais pas un athlète qui craignait cette perspective. Ma fin de contrat avec Fos ne s’est pas bien passée mais je laisse ça de côté. J’ai compris que c’était comme ça. La question était de savoir ce que j’allais faire. Physiquement, je pense que j’avais encore une ou deux saisons à donner, mais j’avais pas nécessairement envie de bouger trop loin, de faire la saison de trop, j’avais des contraintes familiales… De ce fait, changer de vie à 34 ans, ne pas voir ses enfants pendant un ou deux ans, ça aurait été un choix important. J’ai donc dit « j’arrête », et puis voilà.
« En fait, j’ai eu la chance d’avoir ce projet en parallèle du basket »
Ce n’a pas été trop difficile ? Vous n’avez pas connu cette « petite mort » qu’on évoque souvent pour les sportifs professionnels raccrochant ?
J’en ai entendu parler mais, personnellement, je ne l’ai jamais vécu. J’avais fait des études toute ma carrière, j’avais déjà mon projet extra-sportif, ce qui fait que je l’ai pas vécu pour l’instant. Mais je ne dis pas que ça ne viendra pas. En fait, j’ai eu la chance d’avoir ce projet en parallèle du basket. Au moment où j’ai dit « ok, j’arrête le basket », je savais pourquoi j’allais me lever le lendemain matin, et cela m’a permis de pas avoir cette frustration, de ne jamais ressentir un sentiment de vide.
Quand avez-vous commencé ces études ? De quel type ?
J’ai étudié pendant toute ma carrière. En post-bac, alors que j’étais en début de carrière, j’ai intégré une fac d’anglais, plus pour donner le change à mes parents qu’autre chose, mais c’est aussi important de parler anglais. Ensuite, j’ai arrêté mes études jusque vers 24-25 ans, lorsque j’ai repris un cursus dans le but de monter une entreprise. J’ai suivi une formation en ligne sur deux ans et passé un diplôme en capacité de gestion des entreprises, une étape importante pour ma carrière et mon après-carrière. L’étape suivante a consisté à intégrer le programme Time Out de la FIBA Europe, un programme sur un an destiné aux basketteurs de haut niveau, à suivre online pendant la saison sportive et le reste in situ, et portant sur divers aspects de l’après-carrière et de la reconversion, comme les métiers du management du sport, d’agent sportif, etc. À la sortie de ce cursus, j’ai reçu le diplôme de « FIBA Manager Qualification ». En parallèle, j’ai validé un « PG Certificate » à l’université de Newcastle portant sur le management du leadership, un diplôme qui équivaut à un bac +4 en France. Ensuite, je me suis dit que ça serait dommage de pas finir sur un Master, j’ai donc suivi un cursus à Chambéry dédié aux sportifs de haut niveau, j’ai eu un Master 2 en marketing et développement du sport, avec un mémoire de fin d’études sur le développement du 3×3 et son impact.
Ce n’est pas trop dur de suivre des études en même temps que l’on exerce le métier de basketteur professionnel ?
Si, parce que ça demande beaucoup de temps et d’organisation. Ça demande aussi de rogner sur ses loisirs, parfois même sur sa famille, parce qu’on travaille, qu’il faut étudier. Après, dans une carrière de sportif de haut niveau, il y a beaucoup de temps faibles, on s’entraîne parfois deux fois par jour, mais il reste beaucoup de temps libre, on ne travaille pas 8 heures par jour comme au bureau. Et il y a les déplacements : quand on passe 8 heures dans un bus, on a beaucoup de temps à tuer. Globalement, c’est dur, mais ce n’est pas impossible à faire, la preuve, c’est que je l’ai fait. C’est surtout une question de motivation et d’organisation.
« J’ai toujours pensé qu’il fallait avoir autre chose à côté du basket pour être heureux »
C’était une vraie volonté dès le début d’avoir quelque chose d’autre que le basket ?
Oui, j’ai toujours pensé qu’il fallait avoir autre chose à côté du basket pour être heureux, même si on reste focalisé sur notre sport. Mais faut avoir autre chose dans la vie, on étudie, on apprend, on pense à l’avenir. Quand ça va moins bien sur le terrain, c’est bien d’avoir autre chose pour pas plonger dans une spirale négative, pour penser à des choses positives. Cela était donc important pour moi parce que ça fait du bien, déjà, et parce que je n’avais pas envie d’arrêter ma carrière et de devoir repartir à zéro avec la pression de devoir se dire « il faut que je vive ». Cela me permettait d’anticiper sur la suite.
Ce qui est ressorti de tout cela, c’est Team Quan. Quand avez-vous lancé ce projet ?
Je l’ai lancé en période post-Covid, en septembre 2020, juste après le premier confinement. J’avais déjà ce projet en tête depuis quelques temps, depuis que j’avais suivi le programme de la FIBA Europe, mais je n’avais pas forcément eu le temps de le travailler. Avec le Covid, on s’est retrouvés comme tout le monde à ne rien avoir à faire, sauf à faire l’école aux enfants, donc ça laissait pas mal de temps libre, j’en ai profité pour travailler sur le projet et le formater. Je l’ai lancé à la rentrée 2020, dans l’idée de proposer un accompagnement à 360° à des athlètes de haut niveau, que ce soit sur la santé mentale, sur la performance physique, sur la capacité à bien communiquer ou sur la préparation à l’avenir. Tout cela est mis en œuvre avec des experts du sport, des psychologues, des conseillers en communication, en réseaux sociaux, sur les aspects légaux, administratifs, financiers, sur l’anglais, etc. L’intérêt de ce projet, c’est de pouvoir dire que tout le panel de services dont un athlète peut avoir besoin est accessible à un même point, qu’il a tous les outils à disposition et qu’il peut piocher dans les thématiques qui l’intéressent.
« Ceux qui ont un peu plus confiance en eux, qui ont de meilleures capacités mentales, ce sont ceux qui sont le plus performants dans le sport »
Vous parlez de santé mentale, un sujet qui a longtemps été tabou dans le sport, c’est donc quelque chose que vous avez pris en compte ?
Oui, mis à part les sportifs de très très haut niveau où les différences physiques peuvent être importantes, à un certain niveau, on est tous à peu près similaires physiquement et techniquement, on a tous plus ou moins le même niveau, donc, à un moment, ceux qui ont un peu plus confiance en eux, qui ont de meilleures capacités mentales, ce sont ceux qui sont le plus performants dans le sport. Après, au-delà de la performance sportive, il y a aussi le bien-être au quotidien : quand ça va mal dans le sport, il faut pouvoir passer à autre chose, c’est hyper important. D’où l’intérêt d’avoir un psychologue du sport dans ce projet.
Combien de personnes utilisent les services de Team Quan, actuellement ?
Nous avons 23 clients actifs, qui ne sont pas toujours des athlètes : nous avons bifurqué vers d’autres métiers du sport, entraîneurs, entrepreneurs, qui ont aussi des problématiques sur les thèmes que nous couvrons. Nous les accompagnons sur toutes ces thématiques. Quant à la structure, elle compte aujourd’hui trois salariés et trois alternants, en plus des intervenants extérieurs.
Et qu’en est-il du camp que vous avez organisé ?
C’est un autre projet que nous avons monté parallèlement à Team Quan. Il s’agit d’un camp organisé l’été dernier et destiné à transposer notre ADN à des U15 et U18 France, avec des formations sur la préparation mentale et physique, la gestion des blessures avec un médecin du sport, etc. L’idée, c’est vraiment d’accompagner ces jeunes de manière globale, avec des intervenants spécialisés comme David Hermine, le directeur technique du camp, par ailleurs CTS de la Ligue de Bretagne et assistant-coach de plusieurs campagnes des équipes de France jeunes. Pour cette première édition du camp, nous avions 34 stagiaires, ce qui était proche du maximum, parce que nous voulons faire dans le qualitatif.
Quelles évolutions voyez-vous pour votre entreprise ?
Le premier objectif, c’est de la rendre pérenne, parce qu’aujourd’hui, je ne peux pas vivre de ça. L’avantage d’avoir commencé assez tôt dans ma carrière, c’est qu’on a construit des choses et c’est toujours plus facile de travailler sur un projet déjà réfléchi. Et aujourd’hui, ayant terminé ma carrière, j’ai plus de temps pour le travail et pour mettre en place des innovations. J’ai bon espoir que ça puisse fonctionner et que ça puisse devenir un incontournable pour les sportifs de haut niveau et les sportifs en général.
Dernier sujet : sur Twitter, vous avez posté un assez long commentaire sur ce qui pourrait être fait pour développer l’attractivité de la LNB. C’est un sujet qui vous tient à cœur ?
Oui, j’ai passé 15 ans dans ce système, je ne pouvais pas partir en me disant « ok, j’ai fait mon temps », et même si je ne suis pas forcément impliqué directement, ça m’a toujours intéressé. Dans ma carrière, ça m’a toujours intéressé de voir comment ça évoluait, les problématiques de diffusion, de visibilité, d’effectifs, etc. J’ai été longtemps impliqué au Syndicat des Basketteurs. Et je trouve important de s’impliquer dans le système parce que nous, les joueurs, on est aussi dedans !
Après ce tweet, avez-vous eu des remontées de la Ligue ou des acteurs du milieu ?
Pas vraiment. Dans mon réseau, les clubs où j’ai joué, on me dit parfois « oui, c’est intéressant », mais ça va rarement plus loin que ça.
« Il faudrait réaliser un cahier des charges pour imposer aux clubs de produire une réalisation avec une qualité minimale »
D’après vous, qu’est-ce qu’il y aurait à faire pour développer l’image du basket professionnel en France ?
Déjà, il ne serait pas mauvais que les clubs aient de vraies politiques de formation pour former des jeunes, pas que des prospects NBA, mais surtout des joueurs pouvant alimenter l’effectif de leur équipe première. Ça ne me paraîtrait pas stupide de voir un club comme Limoges, par exemple, faire jouer un ou deux jeunes formés au club, sur lesquels ils ont investi du temps et de l’argent pour en faire des joueurs professionnels de très haut niveau. Ce serait encore mieux que ce soient des joueurs locaux, ça donnerait plus envie aux supporters de la région de venir voir ces joueurs. Ensuite, on a très longtemps parlé de la diffusion du basket. Et il y a eu des évolutions très positives avec l’application lnb.tv notamment – c’est quand même très bien de pouvoir regarder les matchs de n’importe où. Maintenant, cela fait deux ans environ que la plateforme existe, il faudrait réaliser un cahier des charges pour imposer aux clubs de produire une réalisation avec une qualité minimale, supérieure à celle d’aujourd’hui. Certains clubs le font déjà très bien, d’autres de façon plus ponctuelle ou pas du tout. Ensuite, j’ai toujours eu dans l’idée que plutôt que de courir après des diffuseurs, il fallait trouver le moyen de monétiser cette LNB.TV, de proposer des contenus plus variés pour pouvoir faire vivre tout ça, des podcasts, etc., de faire en sorte que la LNB n’existe pas qu’au travers de l’ASVEL ou Monaco en Euroleague, qu’on raconte des histoires sur les clubs, qu’on les incite à faire des choses nouvelles et attractives.
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Pour la première fois depuis pas mal d’années, Édouard Choquet savoure d’avoir pu prendre des vacances en août. En effet, le champion de France 2015-16 avec l’ASVEL a raccroché ses baskets, via un beau message d’adieu au basket professionnel, après 15 ans d’une carrière bien remplie, qui l’a emmené jusqu’au All-Star Game et l’a fait alterner entre Pro B et première division, avec Le Portel (4 saisons), Fos-sur-Mer (9 années en deux épisodes), l’ASVEL et Châlons-Reims.
Remercié d’une manière cavalière par Fos Provence à la fin de la saison dernière, le natif de Limoges n’est pas resté les deux pieds dans le même sabot, embrayant directement dans la vie active. Ce qui n’a rien d’un hasard : tout au long de sa carrière, l’ancien meneur de jeu a suivi des études avec comme objectif de monter sa propre entreprise. Pari tenu, il a créé Team Quan en 2020, un bon moyen de garantir son après-basket.
Retracez-nous votre carrière, commencée à Limoges ?
Je suis né à Limoges, dans une famille très impliquée dans le basket. J’ai commencé là-bas à 6-7 ans en poussins. J’y ai continué jusqu’en cadets, époque à laquelle je suis parti à Bordeaux, en cadets deuxième année. À l’époque (NDLR : 2004-05), le CSP avait des soucis financiers et vraiment pas de stratégie de formation, comme ils voulaient remonter le plus vite possible de NM1, où ils avaient un effectif très important. Il fallait donc que je parte pour voler de mes propres ailes et débuter ma carrière. Une porte s’est ouverte à Bordeaux, j’y ai donc été, pour jouer en première division du championnat de France cadets. Pour moi, ça a été l’occasion de progresser et cela m’a ouvert les portes de la NM1 à 18-19 ans. C’est comme cela que j’ai lancé ma carrière professionnelle, en partant ensuite pour Le Portel, puis Fos-sur-Mer.
Comment avez-vous vécu cette évolution, vous qui avez passé de nombreuses années (11 saisons) en Pro B et quatre autres en première division ?
Globalement, ma carrière a connu une évolution très progressive. En Pro B, je faisais mieux chaque année, je progressais, j’entretenais l’espoir de jouer en Pro A vers 24-25 ans. À Fos, j’ai connu une bonne première saison, mais je me suis rompu les ligaments croisés la deuxième. Ça a été un frein dans ma carrière…
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Photo d’ouverture : DR